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02/04/2021 | FRANCE | N°19PA04201

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 02 avril 2021, 19PA04201


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... D... a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française d'annuler l'arrêté du 20 juillet 2018 par lequel le garde des sceaux, ministre de la justice, a nommé Mme E... au poste de directeur adjoint du centre de détention de Papeari.

Par un jugement n°1800319 du 22 octobre 2019, le Tribunal administratif de la Polynésie française a annulé l'arrêté du 20 juillet 2018, et a enjoint au ministère de la justice de publier la vacance du poste de directeur adjoint du centre de détent

ion de Papeari dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement.

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... D... a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française d'annuler l'arrêté du 20 juillet 2018 par lequel le garde des sceaux, ministre de la justice, a nommé Mme E... au poste de directeur adjoint du centre de détention de Papeari.

Par un jugement n°1800319 du 22 octobre 2019, le Tribunal administratif de la Polynésie française a annulé l'arrêté du 20 juillet 2018, et a enjoint au ministère de la justice de publier la vacance du poste de directeur adjoint du centre de détention de Papeari dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 24 décembre 2019, le garde des sceaux, ministre de la justice, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de la Polynésie française du 22 octobre 2019 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. D... devant le Tribunal administratif de la Polynésie française.

Il soutient que :

- le Tribunal administratif de la Polynésie française a entaché son jugement d'une erreur de droit dans la mesure où il ne s'est pas borné à exercer un contrôle limité à l'erreur manifeste d'appréciation ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que l'arrêté de nomination de

Mme E... au poste de directeur adjoint du centre de détention de Papeari était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 avril 2020, M. D..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête du garde des sceaux ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 300 000 francs CFP sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par le garde des sceaux ne sont pas fondés.

La requête et le mémoire en défense ont été communiqués à Mme E... qui n'a pas produit de mémoire.

Par un nouveau mémoire en défense, enregistré le 9 mars 2021, M. D... déclare s'en remettre à ses précédentes écritures et soutient en outre que :

- il a fait valoir ses droits à la retraite le 27 janvier 2021 ;

- Mme E... a été maintenue dans ses fonctions par un nouvel arrêté du garde des sceaux du 5 décembre 2019 en dépit de l'annulation de l'arrêté du 20 juillet 2018 par le jugement du tribunal administratif du 22 octobre 2019 qui n'a ainsi pas été exécuté.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret 2007-930 du 15 mai 2007 portant statut particulier du corps des directeurs des services pénitentiaires ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- et les conclusions de M. Baffray, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. D... a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française l'annulation de l'arrêté du 20 juillet 2018 par lequel le garde des sceaux a nommé

Mme E... au poste de directeur adjoint du centre de détention de Papeari. Le garde des sceaux fait appel du jugement du 22 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif a annulé cet arrêté, et lui a enjoint de publier la vacance du poste dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement.

2. Aux termes de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 : " L'autorité compétente procède aux mouvements des fonctionnaires après avis des commissions administratives paritaires. (...) Dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service, les affectations prononcées doivent tenir compte des demandes formulées par les intéressés et de leur situation de famille. Priorité est donnée aux fonctionnaires séparés de leur conjoint pour des raisons professionnelles (...) ". Lorsque dans le cadre d'un mouvement de mutation, un poste a été déclaré vacant, alors que plusieurs agents se sont portés candidats, l'administration doit procéder à la comparaison des candidatures dont elle est saisie en fonction, d'une part, de l'intérêt du service, d'autre part, si celle-ci est invoquée, de la situation de famille des intéressés, appréciée compte tenu des priorités fixées par les dispositions de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984. L'appréciation ainsi portée par l'administration, notamment sur l'intérêt du service, n'est toutefois susceptible d'être censurée par le juge administratif qu'en cas d'erreur de fait, d'erreur de droit ou d'erreur manifeste d'appréciation, ou encore de détournement de pouvoir.

3. Pour annuler l'arrêté du garde des sceaux du 20 juillet 2018 comme entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, le tribunal administratif a relevé que M. D... a été titularisé dans le corps des directeurs des services pénitentiaires en 1985, qu'il a occupé de très nombreux postes, tant en outre-mer qu'en métropole, au plan régional comme en administration centrale, et qu'il a ainsi connu tous les aspects des fonctions de direction. Il a également relevé que M. D... a déjà été affecté à des postes de chef d'établissement pénitentiaire, notamment en Polynésie française de novembre 1997 à novembre 2001, puis à partir du

14 septembre 2015, et qu'il a, à partir de cette date, été affecté au centre pénitentiaire de Papeari pour exercer les fonctions de directeur adjoint du chef de l'équipe projet. Enfin, il a relevé qu'il n'était pas allégué par le garde des sceaux, que M. D... n'aurait pas donné pleinement satisfaction dans l'exercice de ses fonctions tout au long de sa carrière.

4. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier, ainsi que l'ont relevé à bon droit les premiers juges, que Mme E... n'a été titularisée dans le corps des directeurs des services pénitentiaires qu'en 2011 et qu'elle n'a occupé, depuis la sortie de sa scolarité, que trois postes en établissements pénitentiaires, à Lille et Valence. Ils ont également relevé qu'au vu notamment du compte-rendu de son entretien, elle ne s'est jamais investie dans les questions relatives aux ressources humaines, au " management " et à la gestion budgétaire, qu'elle n'a aucune attache familiale en Polynésie française, et que sa candidature n'a pas été motivée prioritairement par des raisons professionnelles et n'a été classée qu'en quatrième position pour pourvoir le poste vacant.

5. En se bornant à soutenir devant la Cour que, parallèlement à son emploi au sein de l'équipe projet occupé à partir du 14 septembre 2015, M. D... exerçait des fonctions administratives d'attaché en charge du suivi budgétaire, qu'il n'a, après l'ouverture du nouveau centre de détention en 2017, été maintenu sur son poste qu'avec ces dernières fonctions, dans le seul but de rester en Polynésie française, et que sa candidature a, pour ce motif, été considérée par le directeur interrégional, chef de la mission des services pénitentiaires de l'Outre-mer, comme ne correspondant pas au profil recherché, le garde des sceaux qui ne conteste aucune des circonstances relevées par le tribunal administratif, rappelées ci-dessus, ne fait état d'aucun élément de nature à remettre en cause le bien-fondé des motifs du jugement du tribunal.

6. Il résulte de ce qui précède que le garde des sceaux n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Polynésie française a annulé son arrêté du 20 juillet 2018 et lui a enjoint de publier la vacance du poste de directeur adjoint du centre de détention de Papeari.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. D... et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du garde des sceaux est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à M. D... une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au garde des sceaux, ministre de la justice, à

M. F... D... et à Mme A... E....

Copie en sera adressée pour information au ministre des outre-mer ainsi qu'au haut-commissaire de la République en Polynésie française.

Délibéré après l'audience du 19 mars 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. B..., président-assesseur,

- M. Pagès, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 2 avril 2021.

Le rapporteur,

J-C. B...Le président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

K. PETIT

La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 19PA04201 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA04201
Date de la décision : 02/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe NIOLLET
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : NOUGARO

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-04-02;19pa04201 ?
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