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02/04/2021 | FRANCE | N°19PA02920

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 02 avril 2021, 19PA02920


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet de police a rejeté sa demande tendant au retrait ou à défaut à l'abrogation de son arrêté du 27 décembre 2013 prononçant sa mise à la retraite d'office pour invalidité, outre des conclusions à fin d'injonction et des conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1806626/5-1 du 4 juillet 2019, le Tribunal

administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une re...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet de police a rejeté sa demande tendant au retrait ou à défaut à l'abrogation de son arrêté du 27 décembre 2013 prononçant sa mise à la retraite d'office pour invalidité, outre des conclusions à fin d'injonction et des conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1806626/5-1 du 4 juillet 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 6 septembre 2019, M. B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 4 juillet 2019 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler la decision implicite mentionnée ci-dessus ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de le réintégrer dans ses fonctions en reconstituant ses droits sociaux à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la decision attaquée est entachée de défaut de motivation ;

- elle méconnaît l'article L. 243-2 du code des relations entre le public et l'administration, car sa mise à la retraite d'office étant soit une sanction soit une decision inexistante, l'administration était tenue de la retirer ;

- elle est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en defense, enregistré le 22 février 2021, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... sont infondés.

Par un mémoire en réplique, enregistré le 9 mars 2021, M. B... maintient ses conclusions par les mêmes moyens.

Par une ordonnance du 23 février 2021, l'instruction a été rouverte et la cloture de l'instruction a été fixée au 10 mars 2021 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C... ;

- et les conclusions de M. Baffray, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ancien gardien de la paix affecté au centre de rétention administrative de Vincennes, a été mis à la retraite d'office pour invalidité par un arrêté du 27 décembre 2013 du préfet de police. Sa requête tendant à l'annulation de cet arrêté ayant été rejetée comme irrecevable car tardive, il a formé un recours indemnitaire et a obtenu, par jugement n° 1605768/5-1 du 9 novembre 2017, la reconnaissance de l'illégalité fautive de sa mise à la retraite d'office et la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 70 000 euros. Il a alors par courier du 7 février 2018 saisi le préfet de police d'une demande tendant au retrait ou à défaut à l'abrogation de l'arrêté illégal du 27 décembre 2013. Du silence de l'administration est née une decision implicite de rejet. M. B... a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à l'annulation de cette décision. Il relève appel du jugement du 4 juillet 2019 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'annulation et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

2. Aux termes de l'article L. 242-3 du code code des relations entre le public et l'administration : " Sur demande du bénéficiaire de la décision, l'administration est tenue de procéder, selon le cas, à l'abrogation ou au retrait d'une décision créatrice de droits si elle est illégale et si l'abrogation ou le retrait peut intervenir dans le délai de quatre mois suivant l'édiction de la decision ". Et aux termes de l'article L.242-4 du même code : " Sur demande du bénéficiaire de la décision, l'administration peut, selon le cas et sans condition de délai, abroger ou retirer une décision créatrice de droits, même légale, si son retrait ou son abrogation n'est pas susceptible de porter atteinte aux droits des tiers et s'il s'agit de la remplacer par une décision plus favorable au bénéficiaire ".

3. M. B... soutient que la décision du préfet de police refusant de procéder au retrait ou à défaut à l'abrogation de sa mise à la retraite d'office, n'étant pas justifiée, elle est entachée d'erreur de droit. Or, si la décision litigieuse implicite n'était pas motivée, et n'était pas au nombre des décisions individuelles défavorables devant être obligatoirement motivées, de sorte que le préfet de police n'a pas fait droit à la demande de M. B... tendant à la communication de ses motifs, il n'en demeure pas moins que l'administration doit fournir, au juge administratif, en cas de contentieux, les motifs d'une décision administrative non soumise à l'obligation de motivation. Or, il ressort des termes des mémoires en défense de première instance et d'appel que le préfet de police a refusé de faire droit à la demande de retrait ou à titre subsidiaire d'abrogation de l'arrêté de mise à la retraite d'office pour invalidité de M. B... au seul motif qu'il n'était pas tenu de le retirer ou de l'abroger. Or, s'il est vrai que le préfet de police n'était pas tenu de faire droit à la demande de M. B..., qui n'entrait pas dans les prévisions de l'article L. 242-3 du code des relations entre le public et l'administration, il n'en demeure pas moins qu'il avait la faculté d'y faire droit en vertu de l'article L. 242-4 du même code. Dans ces conditions, le préfet de police ne pouvait, sans entacher sa décision d'erreur de droit, se borner à constater qu'il n'y était pas tenu de faire droit à la demande de M. B..., sans examiner s'il pouvait ou non procéder au retrait ou à l'abrogation de sa mise à la retraite d'office, compte tenu de l'intérêt tant de M. B... que de celui du service.

4. Il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Le présent arrêt, eu égard au motif d'annulation retenu, n'implique pas nécessairement que M. B... soit réintégré dans ses anciennes fonctions mais seulement que le préfet de police réexamine sa situation. Dès lors, en vertu de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, il y a lieu d'enjoindre au préfet de police de procéder à ce réexamen dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il soit nécessaire en l'espèce d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1806626/5-1 du 4 juillet 2019 du Tribunal administratif de Paris et la décision implicite par laquelle le préfet de police a implicitement rejeté la demande de

M. B... en date du 7 février 2018 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de réexaminer la situation de M. B... dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5: Le présent arrêt sera notifié à M. D... B..., au ministre de l'intérieur et au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 19 mars 2021 à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président assesseur,

- M. C..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au Greffe, le 2 avril 2021.

Le rapporteur,

D. PAGES

Le président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

K. PETIT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 19PA02920 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA02920
Date de la décision : 02/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : CABINET COLL AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-04-02;19pa02920 ?
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