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01/04/2021 | FRANCE | N°19PA03356

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 01 avril 2021, 19PA03356


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 3 juillet 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office.

Par un jugement n° 1914960 du 3 octobre 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête e

t un mémoire enregistrés les 24 octobre 2019 et 24 septembre 2020, Mme E... C..., représentée pa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 3 juillet 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office.

Par un jugement n° 1914960 du 3 octobre 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 24 octobre 2019 et 24 septembre 2020, Mme E... C..., représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1914960 du 3 octobre 2019 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de police du 3 juillet 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans le délai de trente jours à compter de la notification du présent arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder au réexamen sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt à intervenir, sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

S'agissant des moyens communs à l'ensemble des décisions :

- le signataire de l'arrêté contesté est incompétent pour le prendre ;

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé.

S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :

- elle a été prise en méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle.

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;

- elle est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle.

S'agissant de la décision portant fixation du pays de renvoi :

- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 27 novembre 2020, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Par une décision du 9 juin 2020, le président du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris a accordé l'aide juridictionnelle totale à Mme E... C....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- les décrets n° 2020-1404 et n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 portant application de la loi sur l'aide juridictionnelle ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E... C..., ressortissante colombienne née le 16 mai 1986, est entrée sur le territoire français en février 2014, selon ses propres déclarations, et a sollicité l'admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 3 juillet 2019, le préfet de police a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office. Mme E... C... fait appel du jugement du 3 octobre 2019 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

S'agissant des moyens communs à l'ensemble des décisions :

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que, devant le Tribunal administratif de Paris, Mme E... C... n'a soulevé que des moyens de légalité interne à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'arrêté contesté. Le moyen de légalité externe invoqué pour la première fois devant la Cour, tiré de ce que l'arrêté contesté serait entaché d'insuffisance de motivation, qui n'est pas d'ordre public, se rattache à une cause juridique distincte de celle afférente aux moyens invoqués en première instance et constitue, dès lors, un moyen nouveau, irrecevable en appel.

3. En second lieu, par un arrêté n° 2019-00368 du 17 avril 2019, régulièrement publié au recueil n° 75-2019-147 des actes administratifs spécial de la préfecture de police du 18 avril 2019, le préfet de police a donné à M. F... G..., signataire de la décision contestée, conseiller d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer, chef du 10ème bureau à la sous-direction de l'administration des étrangers de la direction de la police générale à la préfecture de police, délégation à l'effet de signer tous actes, arrêtés, décisions et pièces comptables, dans la limite de ses attributions, en cas d'absence ou d'empêchement d'autorités dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elles auraient été présentes ou pas empêchées, notamment en matière de police des étrangers. Partant, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté doit être écarté comme manquant en fait.

S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...) ".

5. En présence d'une demande de titre de séjour présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat de travail ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi. Il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger, ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément relatif à sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour.

6. Mme E... C... se prévaut d'un document Cerfa de demande d'autorisation de travail de la société " Dental Monitoring " et d'un contrat de travail à durée indéterminée conclu avec cette même société le 30 avril 2018 pour un poste d'agent d'entretien à temps partiel. Elle produit également des bulletins de paie du mois d'août 2016 au mois de mai 2017 pour la société " Vanoluca Deco " en qualité d'agent d'entretien puis, à compter de février 2018, pour la société " Dental Monitoring ", ainsi qu'un contrat à durée déterminée du 1er février 2018 au 30 juin 2018 conclu avec cette même société. Toutefois, ces éléments ne sont pas, à eux seuls, de nature à caractériser des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels ouvrant droit à l'admission exceptionnelle au séjour. En outre, si Mme E... C... fait valoir qu'elle résiderait, selon ses dires, depuis plus de cinq ans sur le territoire français et qu'elle entretiendrait des liens étroits avec la France, elle ne justifie ni de l'ancienneté alléguée de son séjour, ni d'une intégration particulière en France ou de la constance ou de l'intensité de ses attaches avec la France. Ainsi, c'est sans méconnaître les dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni commettre une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle que le préfet de police a pu, eu égard à ces éléments et aux conditions de séjour de l'intéressée, opposer un refus à la demande de titre de séjour présentée par Mme E... C....

7. En second lieu, la requérante ne saurait utilement se prévaloir de la circulaire n° NOR IK0900092C du 24 novembre 2009, qui est dépourvue de valeur réglementaire et qui, au demeurant, a été abrogée par la circulaire n° NOR INTK1229185C du 28 novembre 2012, qui se borne à énoncer des orientations générales, et dont les dispositions, dépourvues de tout caractère impératif, ne constituent pas des lignes directrices et sont ainsi insusceptibles d'être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir.

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. En premier lieu, la décision portant refus de séjour n'étant entachée d'aucune des illégalités alléguées, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision, invoqué au soutien des conclusions en annulation dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, doit être écarté.

9. En second lieu, compte tenu des motifs exposés aux points ci-dessus, le moyen tiré de ce que le préfet de police aurait entaché la décision contestée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de Mme E... C... doit être écarté.

S'agissant de la décision portant fixation du pays de renvoi :

10. Le moyen tiré de ce que la décision portant fixation du pays de renvoi a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. Il ne peut, dès lors, qu'être écarté.

11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme E... C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celle présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme E... C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... H... E... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 4 mars 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- Mme D..., premier conseiller,

- M. Sibilli, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 1er avril 2021.

Le rapporteur,

I. D...Le président,

S.-L. FORMERY

La greffière,

F. DUBUY-THIAM

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19PA03356


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA03356
Date de la décision : 01/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: Mme Isabelle MARION
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : CERF

Origine de la décision
Date de l'import : 07/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-04-01;19pa03356 ?
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