Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'une part, d'annuler la décision du 9 juillet 2018 par laquelle la commission d'équivalence des diplômes pour l'accès à la fonction publique territoriale a rejeté sa demande d'équivalence pour l'accès au concours de professeur territorial d'enseignement artistique, d'autre part, d'enjoindre au président de la commission d'équivalence des diplômes de réexaminer sa situation, sous astreinte.
Par un jugement n° 1815808 du 16 A... 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 21 avril 2020 et un mémoire en récapitulatif enregistré le 14 décembre 2020, Mme A... représentée par la SCP Manuel Gros, Héloïse Hichter et associés, demande la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 16 A... 2020 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler la décision du 9 juillet 2018 par laquelle la commission d'équivalence des diplômes pour l'accès à la fonction publique territoriale a rejeté sa demande d'équivalence pour l'accès au concours de professeur territorial d'enseignement artistique ;
3°) d'enjoindre au président de la commission d'équivalence des diplômes de réexaminer sa situation sous astreinte.
4°) de mettre à la charge de l'administration la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier en ce que le tribunal a omis de répondre à une branche du moyen tiré de la méconnaissance de l'article 10 du décret n° 2007-196 du 13 février 2007 relatif aux équivalences de diplômes requises pour se présenter aux concours d'accès aux corps et cadres d'emplois de la fonction publique, en ce que sa profession de concertiste de haut niveau aurait pu lui permettre d'accéder au stage d'adaptation ou à une épreuve d'aptitude préalable au concours ;
- la commission n'a procédé à aucune recherche de compensation des différences entre les diplômes au regard de la totalité de l'expérience professionnelle comparable de Mme A..., en méconnaissance de l'article 10 du décret n° 2007-196 du 13 février 2007 relatif aux équivalences de diplômes requises pour se présenter aux concours d'accès aux corps et cadres d'emplois de la fonction publique et à la directive 2005/36 CE ; la commission devait analyser et prendre en compte l'activité professionnelle même exercée à temps partiel ; Mme A... dispose d'une expérience professionnelle en qualité de musicienne d'orchestre, soliste et chambriste mais également d'enseignante depuis 1985 ; la commission a ajouté une condition non prévue en exigeant d'elle un enseignement pouvant aller jusqu'au niveau de professionnalisation ;
- c'est à tort que le tribunal a considéré que les dispositions de l'article 11 du décret du 13 février 2007 ne permettaient de tenir compte de l'expérience professionnelle que lorsque le candidat ne possède aucun diplôme ; Mme A... a vocation à bénéficier de ces dispositions ;
- la décision litigieuse est entachée d'une erreur d'appréciation des expériences professionnelles dont la commission s'est bornée à examiner les modalités selon le nombre d'heures d'enseignement délivrées et non les compétences pédagogiques qu'elles avaient permis à Mme A... d'acquérir ; la participation à des jurys d'examens confère des compétences pédagogiques ; elle justifie de nombreuses expériences professionnelles en qualité d'enseignante depuis 30 ans et de l'intégralité des compétences pédagogiques requises pour participer au concours de professeur d'enseignement artistique ;
- la décision litigieuse est entachée d'une discrimination fondée sur l'origine de son diplôme, en violation de l'article 21 de la Charte des droits fondamentaux de l'union européenne et de l'article 14 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Par un mémoire en défense enregistré le 4 décembre 2020, le Centre national de la fonction publique territoriale, en la personne de son président en exercice, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à la condamnation de Mme A... à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés ;
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne,
- la directive 2005/36/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 septembre 2005,
- le décret n° 92-894 du 2 septembre 1992,
- le décret n° 2007-196 du 13 février 2007,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C...,
- les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public,
- les observations de Me Robillard, avocat de Mme A...,
- et les observations de Me B..., avocat du Centre national de la fonction publique territoriale.
Considérant ce qui suit :
1. Mme D... A..., titulaire de diplômes de violoncelliste délivrés en 1997 par l'école supérieure de musique et des arts de la scène de Hanovre et en 1999 par l'école supérieure de musique " Hanns Eisler " de Berlin, a présenté une demande d'équivalence à la commission d'équivalence de diplômes pour l'accès à la fonction publique territoriale afin de se présenter au concours d'assistant territorial spécialisé d'enseignement artistique, spécialité " musique ". Par une décision du 9 juin 2009, la commission d'équivalence de diplômes pour l'accès à la fonction publique territoriale a décidé que sa formation et les connaissances acquises en complément lui permettaient de se présenter à ce concours. Mme A... a présenté une nouvelle demande afin de se présenter au concours de professeur territorial d'enseignement artistique, spécialité " musique " qui a été rejetée le 14 septembre 2012 par la commission d'équivalence de diplômes pour l'accès à la fonction publique territoriale. A la suite d'une nouvelle saisine, la commission a émis, le 9 A... 2015, une nouvelle décision défavorable. Par un jugement du 10 décembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses requêtes dirigées contre ces deux décisions. Saisie d'une troisième demande émanant de Mme A..., la commission d'équivalence des diplômes lui a opposé une nouvelle décision de refus le 9 juillet 2018. Elle relève appel du jugement du 16 A... 2020 par lequel le tribunal a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette dernière décision.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Mme A... soutient que le tribunal a omis de répondre à une branche du moyen tiré de la méconnaissance de l'article 10 du décret n° 2007-196 du 13 février 2007 relatif aux équivalences de diplômes requises pour se présenter aux concours d'accès aux corps et cadres d'emplois de la fonction publique, en ce que sa profession de concertiste de haut niveau aurait pu lui permettre d'accéder au stage d'adaptation ou à une épreuve d'aptitude préalable au concours. Il ressort des écritures de première instance de la requérante qu'elle y reprochait à la commission d'avoir fait une mauvaise application de cet article, ajoutant qu'" Il lui appartenait à ce titre de proposer à Madame A..., selon son choix, d'effectuer un stage d'adaptation ou un examen d'aptitude avant de pouvoir accéder aux épreuves du concours. ". Cette seule mention de la faculté de la commission de lui proposer le stage d'adaptation ou l'examen d'aptitude prévu par les dispositions précitées ne se présentait ainsi pas comme un moyen distinct de celui tiré de la méconnaissance de l'article 10 du décret du 13 février 2007, ni même comme une branche de ce moyen, mais comme un argument auquel le tribunal n'était pas tenu de répondre à peine d'irrégularité de son jugement. Par suite ce dernier n'est pas entaché d'irrégularité.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Aux termes de l'article 10 du décret du 13 février 2007 susvisé : " Lorsque le candidat justifie soit d'un titre de formation dont la durée est inférieure d'au moins un an à celle requise par le cycle d'études nécessaire pour obtenir le titre requis, soit d'un titre portant sur des matières substantiellement différentes de celles couvertes par le titre de formation requis, la commission, après avoir vérifié, le cas échéant, que les connaissances acquises par le candidat au cours de son expérience professionnelle sont de nature à compenser en tout ou en partie les différences substantielles de durée ou de matière constatées, peut exiger que le candidat, selon son choix, accomplisse un stage d'adaptation d'une durée maximale de trois ans ou se soumette à une épreuve d'aptitude préalablement à son inscription au concours (...)". Aux termes de l'article 11 de ce décret : " Le candidat qui justifie de l'exercice d'une activité professionnelle salariée ou non salariée, exercée de façon continue ou non, pendant une durée totale cumulée d'au moins trois ans à temps plein dans l'exercice d'une profession comparable par sa nature et son niveau à celle à laquelle la réussite au concours permet l'accès peut également demander à la commission l'autorisation de s'inscrire au concours. Les périodes de formation initiale ou continue, quel que soit le statut de la personne, ainsi que les stages et les périodes de formation en milieu professionnel accomplis pour la préparation d'un diplôme ou d'un titre ne sont pas pris en compte dans le calcul de la durée d'expérience requise. / Lorsque la commission constate que l'expérience professionnelle n'a pas été acquise dans une profession comparable, elle peut proposer au candidat de se soumettre, après en avoir défini le contenu soit à un stage d'adaptation d'une durée maximale de trois ans, soit à une épreuve d'aptitude préalablement au concours ".
4. Mme A... soutient, en premier lieu, que la décision litigieuse est entachée d'une erreur d'appréciation de son expérience professionnelle dont la commission s'est bornée à examiner les modalités, selon le nombre d'heures d'enseignement délivrées, et non les compétences pédagogiques qu'elles lui avaient permis d'acquérir sans rechercher si cette expérience, même exercée à temps non complet, permettait de compenser les différences entre les diplômes. Elle fait valoir qu'il lui appartenait à ce titre de lui proposer, selon son choix, d'effectuer un stage d'adaptation ou un examen d'aptitude avant de pouvoir accéder aux épreuves du concours.
5. Il ressort de décision litigieuse que la commission a considéré d'une part, que les diplômes présentés par Mme A... sanctionnent une formation d'un niveau inférieur ou égal à celui du diplôme requis pour l'accès au concours mais que leurs enseignements ne comportent pas de composantes pédagogiques musicales similaires à celles délivrées par les diplômes requis et que, d'autre part, l'expérience professionnelle présentée, avait été essentiellement acquise en qualité de professeur à temps non complet dans des structures communales ou associatives, qu'aucun élément du dossier ne démontrait que l'intéressée avait exercé au sein d'une structure formant des publics aux pratiques artistiques pouvant aller jusqu'à un niveau de professionnalisation et que cette expérience ne permettait donc pas à l'intéressée de démontrer qu'elle avait acquis et mis en oeuvre l'ensemble des compétences et des connaissances délivrées par le diplôme requis au concours. Il ressort donc des termes de la décision litigieuse que la commission a examiné si les différentes expériences professionnelles que lui soumettait Mme A... permettaient, tant par leur durée que leur nature, de compenser l'absence d'enseignement à la pédagogie de son cursus universitaire, en application des dispositions précitées de l'article 10 du décret du 13 février 2007. Il ne ressort en revanche pas de cette décision que la commission aurait fondé son appréciation de l'équivalence sur la seule circonstance que Mme A... a exercé son activité d'enseignement à temps non complet, ni qu'en relevant que son expérience pédagogique se limitait à certains publics, elle aurait ajouté une condition non prévue par les dispositions de l'article 10 du décret du
13 février 2007. Par ailleurs, en ne faisant pas usage de sa faculté de proposer à Mme A... d'accomplir un stage d'adaptation ou de se soumettre à une épreuve d'aptitude préalable, la commission n'a pas fait une inexacte application de ces dispositions. Enfin, si Mme A... soutient également que, pour les mêmes motifs, la décision en litige méconnaît la directive 2005/36/CE du 7 septembre 2005 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles, elle n'assortit pas ce moyen des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.
6. En deuxième lieu, si Mme A... soutient qu'elle pouvait également bénéficier des dispositions précitées de l'article 11 du décret du 13 février 2007, il y a lieu, par adoption des motifs retenus aux points 9, 10 et 11 et du jugement attaqué, d'écarter ce moyen.
7. En troisième lieu, Mme A... soutient qu'elle dispose d'une expérience professionnelle en qualité de musicienne d'orchestre, soliste et chambriste, que la participation à des jurys d'examens lui confère des compétences pédagogiques, qu'elle justifie de nombreuses expériences professionnelles en qualité d'enseignante depuis 30 ans et de l'intégralité des compétences pédagogiques requises pour participer au concours de professeur d'enseignement artistique. Il ressort toutefois des pièces du dossier que si elle fait valoir de nouvelles expériences en qualité d'enseignante depuis la précédente décision de rejet de sa demande d'équivalence du 9 A... 2015, consistant en des participations à des " masterclass " en 2015, 2016, 2017 et 2018, il s'agit de stages de deux à trois jours et qu'elle n'exerçait son activité de professeur de violoncelle au sein de l'école de musique communale de Fouesnant-les-Glénau que depuis le 6 septembre 2017 à hauteur de 5,35 heures hebdomadaires seulement. Si elle se prévaut, en outre, de sa participation à des jurys d'examens qui ne peut être regardée comme une expérience comparable à celle de l'enseignement et de sa participation à la préparation d'une brochure pédagogique entre 2016 et 2017, l'ensemble de ces éléments est insuffisant pour établir que la commission aurait entaché sa décision d'une erreur d'appréciation en estimant que la dimension pédagogique de son expérience professionnelle restait insuffisante pour considérer qu'elle avait acquis et mis en oeuvre l'ensemble des compétences et des connaissances délivrées par le diplôme requis au concours.
8. Enfin, si Mme A... soutient que la décision litigieuse est entachée d'une discrimination fondée sur l'origine de son diplôme, en violation de l'article 21 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et de l'article 14 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, elle n'apporte pas plus en appel qu'en première instance d'élément de nature à faire présumer l'existence d'une telle discrimination. Ce moyen ne peut qu'être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Sur les frais de l'instance :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que le Centre national de la fonction publique territoriale, qui n'est pas la partie perdante, verse à Mme A... la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière la somme que demande le Centre national de la fonction publique territoriale sur ce même fondement.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du Centre national de la fonction publique territoriale présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A... et au Centre national de la fonction publique territoriale.
Copie en sera adressée pour information au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 12 A... 2021, à laquelle siégeaient :
- Mme C..., présidente,
- M. Mantz, premier conseiller,
- Mme Portes, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 A... 2021.
La présidente-rapporteure
M. C...L'assesseur le plus ancien,
P. MANTZ
Le greffier,
S. GASPAR
La présidente-rapporteure
M. C...L'assesseur le plus ancien,
P. MANTZ
La République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 20PA01230 6