Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... G..., M. I... et Mme H... ont demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Assistance publique - hôpitaux de Paris d'une part à verser à M. D... G... la somme de 147 355 euros, avec intérêts au taux légal à compter du jugement, en réparation des préjudices que lui ont causés les fautes commises lors de sa prise en charge entre le 7 et le 9 avril 2017 à l'hôpital Trousseau, et d'autre part à verser à M. I... la somme de 150 000 euros et à Mme F... la somme de 150 598 euros, avec intérêts au taux légal à compter du jugement, en réparation des préjudices que lui ont causés ces mêmes fautes.
Par un jugement n° 1915901/6-1 du 24 juillet 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande, a mis à la charge de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris le versement à la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme de la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, a rejeté le surplus des conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme et a mis à la charge définitive de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris les frais de l'expertise, taxés et liquidés par l'ordonnance du 4 juillet 2019.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 17 septembre 2020, M. D... G..., représenté par ses parents, M. I... et Mme H..., représentés par Me B..., demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1915901/6-1 du 24 juillet 2020 du tribunal administratif de Paris ;
2°) de condamner l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à verser :
- à M. D... G... la somme de 147 355 euros correspondant :
* au déficit fonctionnel temporaire total à hauteur de 75 euros ;
* au déficit fonctionnel temporaire partiel à hauteur de 280 euros ;
* au déficit fonctionnel permanent à hauteur de 13 500 euros ;
* au préjudice scolaire à hauteur de 2 500 euros ;
* aux souffrances endurées (pretium doloris) à hauteur de 8 000 euros ;
* au préjudice sexuel à hauteur de 15 000 euros ;
* au préjudice esthétique à hauteur de 3 000 euros ;
* au préjudice d'agrément à hauteur de 5 000 euros ;
* au préjudice d'établissement à hauteur de 100 000 euros ;
- à M. I... la somme de 150 000 euros correspondant à son préjudice moral ;
- à Mme H... la somme de 150 598 euros correspondant :
* à son préjudice moral à hauteur de 150 000 euros ;
* à ses pertes de revenus à hauteur de 598 euros ;
ces sommes devant porter intérêt au taux légal à compter de la date de l'arrêt à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris le versement de la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- c'est à tort que le jugement a accueilli la fin de non-recevoir soulevée par l'Assistance publique - hôpitaux de Paris tirée de la tardiveté de leur demande devant le tribunal administratif ;
- le jugement attaqué est entaché de contradiction dans ses motifs et son dispositif en ce qu'il a mis à la charge de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris les frais de l'expertise tout en rejetant leur demande indemnitaire pour une prétendue forclusion ;
- la responsabilité de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris est engagée du fait de l'erreur fautive de diagnostic ;
- l'Assistance publique - hôpitaux de Paris doit être condamnée à leur verser les indemnités demandées dans leurs conclusions.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 janvier 2021, l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, représentée par Me E..., demande à la cour :
1°) de rejeter la requête ; à cette fin, elle soutient que la demande de première instance des consorts G... était irrecevable pour forclusion ;
2°) de rejeter les conclusions susceptibles d'être formées par la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme ;
3°) par la voie de l'appel provoqué, de réformer le jugement n° 1915901/6-1 du 24 juillet 2020 du tribunal administratif de Paris en ce qu'il l'a condamnée à verser à la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; à cette fin, elle soutient que si les premiers juges ont à bon droit retenu que les prestations servies par l'organisme social sont dépourvues de tout lien avec le fait générateur de responsabilité, c'est, en revanche, à tort qu'ils ont condamné l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, qui n'était pas la partie perdante, à verser à la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public,
- et les observations de Me C... substituant Me B..., avocat des consorts G....
Considérant ce qui suit :
1. M. D... G..., alors âgé de quatorze ans, a présenté une douleur dans la zone uro-génitale qui l'a conduit à consulter le 7 avril 2017 son médecin traitant qui, devant une forte suspicion de torsion testiculaire gauche, l'a adressé en urgence à l'hôpital Armand-Trousseau à Paris. Après avoir été examiné dans le service des urgences pédiatriques médico-chirurgicales de cet hôpital, le diagnostic d'une épididymite a été posé malgré l'absence de signe clinique urinaire, sans qu'un prélèvement bactériologique et une échographie ne soient effectués et sans que l'avis d'un chirurgien ne soit demandé, et M. G... a été renvoyé chez lui avec un traitement antibiotique et antalgique ainsi qu'une solution antiseptique cutanée. A la suite d'un gonflement important du scrotum, il est retourné au service des urgences du même hôpital le 9 avril 2017. Une échographie ayant alors montré une torsion avec nécrose du testicule gauche, il y a été hospitalisé le 9 avril 2017 et opéré le lendemain pour orchidectomie gauche. Une orchidopexie a été réalisée en ambulatoire le 3 mai 2017. Il a été revu en consultation de contrôle le 29 juin 2017.
Sur le bien-fondé de la requête :
2. En premier lieu, les consorts G... reprennent en appel l'argumentation qu'ils avaient développée dans leur mémoire de première instance enregistré le 29 janvier 2020 à l'encontre de la fin de non-recevoir soulevée par l'Assistance publique - hôpitaux de Paris. Il y a lieu d'écarter ce moyen par l'adoption du motif retenu par le tribunal administratif de Paris relatif à la forclusion.
3. En second lieu, aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. / L'Etat peut être condamné aux dépens. ". Il résulte de ces dispositions que le juge administratif peut, en raison des circonstances particulières d'une affaire, décider de faire supporter les frais d'expertise à la partie qui l'emporte.
4. Il résulte de l'instruction que, dans les circonstances particulières de l'espèce, constituées par l'erreur de diagnostic non contestée commise par le service public hospitalier, les premiers juges ont pu, tout en rejetant pour forclusion la demande indemnitaire présentée par les consorts G..., mettre les frais de l'expertise à la charge de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, bien qu'elle ne soit pas dans ce litige la partie tenue aux dépens, sans entacher le jugement de contradiction dans ses motifs et son dispositif.
5. Il résulte de tout ce qui précède que la requête des consorts G... doit être rejetée.
Sur les conclusions à fin d'appel provoqué de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris :
6. Si l'erreur de diagnostic commise le 7 avril 2017 lors de l'examen de M. G... au sein du service des urgences pédiatriques médico-chirurgicales de l'hôpital Armand-Trousseau était de nature à engager la responsabilité de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à l'égard du patient et, indirectement, de ses parents, il résulte de l'instruction que M. G..., qui avait été victime d'une torsion testiculaire et qui a été opéré le 10 avril 2017 pour une orchidectomie gauche, aurait en tout état de cause dû être opéré en urgence le jour même de sa consultation à l'hôpital, le
7 avril 2017, soit, dans l'hypothèse soutenue par les consorts G... selon laquelle la douleur serait apparue le jour même de la consultation, pour récupérer ou du moins de préserver la fonction hormonale du testicule, soit, comme il ressort du dossier d'hospitalisation du patient à l'hôpital Trousseau, que la douleur soit apparue le 31 mars et ait persisté le lendemain 1er avril pour disparaître ensuite spontanément, avec toutefois, durant la semaine qui a suivi, une augmentation progressive de la taille du testicule, pour réapparaître le 7 avril 2017, et que, le testicule gauche étant ainsi nécrosé depuis une semaine, il ait fallu procéder à une orchidectomie. De même, l'orchidopexie réalisée le 3 mai 2017 est sans lien avec l'erreur de diagnostic initial du 7 avril 2017. Par suite, si les premiers juges ont, à bon droit, estimé, dans le point 9 du jugement, " que les fautes de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, réalisées à l'hôpital Trousseau le 7 avril 2017, ont uniquement entrainé la persistance des douleurs de M. G... entre le 7 et le 10 avril 2017 " et qu'ainsi " les demandes à fin de remboursement des frais médicaux et pharmaceutiques entre le 10 avril 2017 et le 2 mai 2017 présentées par la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme sont nécessairement sans lien avec les souffrances endurées par M. G... avant l'établissement par l'hôpital Trousseau du diagnostic le 9 avril 2017. D'autre part, les sommes engagées pour les hospitalisations de M. G... les 9 et 10 avril 2017, puis le 3 mai 2017 lors de la seconde opération ayant permis la fixation de son testicule droit, ne sont également pas imputables à la faute commise par l'Assistance publique - hôpitaux de Paris " pour rejeter les conclusions à fin de remboursement des prestations servies, présentées par la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme, et celles relatives aux intérêts et à l'indemnité forfaitaire de gestion prévue par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, c'est à tort, dès lors que l'Assistance publique - hôpitaux de Paris n'était pas, vis-à-vis de la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme, la partie tenue aux dépens ou la partie perdante au sens de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative, qu'ils l'ont condamnée, dans le point 12 du jugement et dans l'article 2 de son dispositif, à verser à la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il s'ensuit que le jugement du 24 juillet 2020 du tribunal administratif de Paris doit être annulé dans cette mesure et que et les conclusions présentées à ce titre au tribunal par la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête des consorts G... est rejetée.
Article 2 : Le jugement n° 1915901/6-1 du 24 juillet 2020 du tribunal administratif de Paris est annulé en tant que, dans l'article 2 de son dispositif, il a condamné l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à verser à la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et les conclusions présentées à ce titre au tribunal par la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... G..., à M. I..., à Mme H..., à l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, à la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme et au ministre des solidarités et de la santé.
Délibéré après l'audience du 4 mars 2021, à laquelle siégeaient :
- Mme Vinot, président de chambre,
- M. A..., président assesseur,
- Mme Collet, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 mars 2021.
La présidente de la 8ème Chambre,
H. VINOT
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20PA02730