Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... D... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 18 août 2016 par laquelle l'Etablissement public Musée du Louvre a décidé de procéder à une retenue de dix-huit trentièmes sur son traitement, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux reçu par l'établissement public le 11 octobre 2016.
Par un jugement n° 1702097/5-3 du 12 décembre 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des pièces complémentaires, enregistrées le 7 février 2019 et le 23 décembre 2020, M. D..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler ces décisions ;
3°) de mettre à la charge du Musée du Louvre le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision du 18 août 2018 est dépourvue de base légale dès lors que la circulaire du 30 juillet 2003 relative à la mise en oeuvre des retenues sur la rémunération des agents publics de l'Etat en cas de grève est inapplicable à sa situation ;
- la circonstance qu'il n'a pas travaillé durant les périodes litigieuses, qui étaient des périodes de repos compensateur, ne pouvait justifier légalement la retenue de traitement à laquelle il a été procédé, tant au regard de la circulaire précitée qu'en vertu de la jurisprudence du Conseil d'Etat n° 03918 du 7 juillet 1978 ;
- la prise du repos compensateur dans sa situation s'effectue dans les mêmes conditions et selon les mêmes critères que celle des congés annuels, pour lesquels le Conseil d'Etat écarte la règle de la retenue de traitement ;
- les congés annuels et les jours de repos compensateur obéissent à des régimes juridiques très proches en ce qu'ils sont attribués et rémunérés à raison des jours de service accomplis.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 mars 2019, l'Etablissement public Musée du Louvre, représenté par le cabinet Richer et Associés, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. D... de la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi de finances rectificative n° 61-825 du 29 juillet 1961 ;
- la loi nº 77-826 du 22 juillet 1977 ;
- loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 62-765 du 6 juillet 1962 ;
- le décret n° 2000-815 du 25 août 2000 ;
- le décret n° 2002-1327 du 29 octobre 2002 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public,
- et les observations de Me Du Rusquec, avocat de l'Etablissement public Musée du Louvre.
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., agent technique d'accueil, de surveillance et de magasinage de 1ère classe du ministère de la culture, a été affecté à compter du 1er janvier 2007 au sein de l'établissement public du Musée du Louvre. M. D... a participé à des journées de grève les 22 mars 2016, 30 mars 2016, 14 juin 2016, 22 juin 2016 et 28 juin 2016. Le 18 août 2016, le Musée du Louvre a informé M. D... qu'il procédait à une retenue de dix-huit trentièmes sur son traitement mensuel, à raison des journées de grève auxquelles il avait participé et des périodes d'absence comprises entre les journées des 22 mars et 30 mars 2016 ainsi que des 14 juin et 22 juin 2016, alors même qu'il s'agissait de jours non travaillés. Par lettre du 10 octobre 2016, réceptionnée le 11 octobre 2016 par le Musée du Louvre, M. D... a formé un recours gracieux contre la décision du 18 août 2016. Une décision implicite de rejet est née du silence gardé par le Musée du Louvre sur ce recours. M. D... relève appel du jugement du 12 décembre 2018 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation des deux décisions précitées.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. D'une part, aux termes de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Les fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération (...) ". Aux termes de l'article 64 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Les fonctionnaires régis par le présent titre ont droit, après service fait, à une rémunération fixée conformément aux dispositions de l'article 20 du titre Ier du statut général ". Aux termes de l'article 4 de la loi de finances rectificative du 29 juillet 1961, complété par la loi du 22 juillet 1977 susvisée : " Le traitement exigible après service fait (...) est liquidé selon les modalités édictées par la réglementation sur la comptabilité publique. / L'absence de service fait, pendant une fraction quelconque de la journée, donne lieu à une retenue dont le montant est égal à la fraction du traitement frappée d'indivisibilité en vertu de la réglementation prévue à l'alinéa précédent. / II n'y a pas service fait : 1° Lorsque l'agent s'abstient d'effectuer tout ou partie de ses heures de service ; 2° Lorsque l'agent, bien qu'effectuant ses heures de service, n'exécute pas tout ou partie des obligations de service qui s'attachent à sa fonction telles qu'elles sont définies dans leur nature et leurs modalités par l'autorité compétente dans le cadre des lois et règlements. (...) ". Et aux termes de l'article 1er du décret du 8 juillet 1962 portant règlement sur la comptabilité publique en ce qui concerne la liquidation des traitements des personnels de l'Etat : " Les traitements et les émoluments assimilés aux traitements alloués aux personnels de l'Etat et des établissements publics de l'Etat à caractère administratif visés à l'article 4 de la loi de finances n° 61-825 du 29 juillet 1961 se liquident par mois et sont payables à terme échu. Chaque mois, quel que soit le nombre de jours dont il se compose, compte pour trente jours. Le douzième de l'allocation annuelle se divise, en conséquence, par trentième ; chaque trentième est indivisible. ".
3. Il résulte de ce qui précède que l'absence de service fait due en particulier à la participation à la grève, pendant une fraction quelconque de la journée, donne lieu à une retenue dont le montant est égal à la fraction du traitement frappé d'indivisibilité en vertu des dispositions précitées, c'est-à-dire au trentième de la rémunération mensuelle. En outre, eu égard au caractère mensuel et forfaitaire du traitement tel que défini à l'article 1er du décret du 6 juillet 1962 susvisé, en cas d'absence de service fait pendant plusieurs jours consécutifs, le décompte des retenues à opérer sur le traitement mensuel d'un agent public s'élève en principe à autant de trentièmes qu'il y a de journées comprises du premier jour inclus au dernier jour inclus où cette absence de service fait a été constatée, même si durant certaines de ces journées, cet agent n'avait aucun service à accomplir. L'application des règles de décompte des retenues sur le traitement mensuel de l'agent en grève ne saurait toutefois porter atteinte à son droit au congé annuel lorsque cet agent a été, préalablement au dépôt d'un préavis de grève, autorisé par son chef de service à prendre ses congés au cours d'une période déterminée.
4. D'autre part, aux termes de l'article 1er du décret du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'Etat et dans la magistrature : " La durée du travail effectif est fixée à trente-cinq heures par semaine dans les services et établissements publics administratifs de l'Etat (...) / Le décompte du temps de travail est réalisé sur la base d'une durée annuelle de travail effectif de 1 607 heures maximum, sans préjudice des heures supplémentaires susceptibles d'être effectuées. / Cette durée annuelle peut être réduite... pour tenir compte des sujétions liées à la nature des missions et à la définition des cycles de travail qui en résultent, et notamment en cas de travail de nuit (...) ". Aux termes de l'article 1er du décret du 29 octobre 2002 portant dérogations aux garanties minimales de durée de travail et de repos applicables à certains agents en fonctions au ministère de la culture et de la communication et dans les établissements publics administratifs en relevant : " Pour les personnels exerçant de nuit des fonctions de surveillance et de sûreté dans les services du ministère de la culture et de la communication ou dans les établissements publics administratifs en relevant, le nombre annuel de nuits travaillées est fixé à 93. / Pour l'organisation de leur temps de travail, il est dérogé aux garanties minimales mentionnées au I de l'article 3 du décret du 25 août 2000 susvisé, dans les conditions suivantes : a) La durée quotidienne du travail ne peut excéder 15 h 30 (...) ". Et aux termes de l'article 2 du même décret : " En contrepartie des sujétions résultant de l'article 1er, les agents bénéficient d'une compensation égale à un dixième de la durée annuelle des 1 600 heures de travail effectif ".
5. Il ressort des pièces du dossier, notamment de l'examen du planning annuel de M. D... pour l'année 2016, que, si ce dernier a participé à un mouvement de grève lors des journées des 22 mars 2016, 30 mars 2016, 14 juin 2016, 22 juin 2016 et 28 juin 2016, il a par ailleurs été absent du service lors des journées comprises entre le 22 mars et le 30 mars 2016, ainsi qu'entre le 14 juin et le 22 juin 2016, au titre de jours de repos liés à l'aménagement de son temps de travail, sans qu'il ne soit ni soutenu ni même allégué par l'intéressé qu'au cours de ces périodes ou journées ou pour partie d'entre elles, il se serait trouvé en position de congés annuels préalablement autorisés par sa hiérarchie. Par suite et conformément aux principes mentionnés au point 3, le décompte des retenues à opérer sur le traitement de M. D... s'élevait à autant de trentièmes qu'il y avait de journées comprises du premier jour inclus au dernier jour inclus où l'absence de service fait a été constatée, même si, durant certaines de ces journées, celui-ci n'avait aucun service à accomplir. Il s'ensuit que M. D... n'est pas fondé à soutenir que les journées comprises entre le 22 mars et le 30 mars 2016 et entre le 14 juin et le 22 juin 2016, alors même qu'elles relèveraient d'un repos compensateur organisé et imposé dans le cadre d'un cycle de travail annualisé pour tenir compte des sujétions liées à son travail de nuit, devraient suivre un régime analogue à celui des congés annuels, ces derniers seuls, ainsi qu'il a été également dit au point 3, ne relevant pas des règles liées au caractère mensuel et forfaitaire du traitement tel que défini à l'article 1er du décret du 6 juillet 1962 et au décompte des retenues à opérer qui en découle. En conséquence, et sans que M. D... puisse utilement invoquer l'inapplicabilité à sa situation de la circulaire du 30 juillet 2003 relative à la mise en oeuvre des retenues sur la rémunération des agents publics de l'Etat en cas de grève, dont les dispositions sont dépourvues de caractère impératif, le directeur des ressources humaines du Musée du Louvre a pu légalement décider que le nombre de journées total à prendre en compte au titre des retenues à opérer sur le traitement de M. D... s'élevait à 18 journées.
6. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etablissement public Musée du Louvre qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. D... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. D... le versement de la somme que l'Etablissement public Musée du Louvre demande sur le fondement des mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de l'Etablissement public Musée du Louvre présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D... et à l'Etablissement public Musée du Louvre.
Délibéré après l'audience du 26 février 2021 à laquelle siégeaient :
- Mme A..., président,
- M. B..., premier conseiller,
- Mme Mach, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 mars 2021.
Le rapporteur,
P. B...
Le président,
M. A... Le greffier,
S. GASPAR
La République mande et ordonne au ministre de la culture en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
5
N° 19PA00669