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26/02/2021 | FRANCE | N°19PA03660

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 26 février 2021, 19PA03660


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Paris :

1°) à titre principal, d'ordonner avant-dire droit une expertise médicale ;

2°) à titre subsidiaire :

- de condamner l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP) à lui verser la somme de 8 000 euros au titre du préjudice d'impréparation ;

- de condamner l'AP-HP ou, à défaut, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à lui ve

rser les sommes de 25 000 euros au titre de l'ensemble de ses troubles dans ses conditions d'existenc...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Paris :

1°) à titre principal, d'ordonner avant-dire droit une expertise médicale ;

2°) à titre subsidiaire :

- de condamner l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP) à lui verser la somme de 8 000 euros au titre du préjudice d'impréparation ;

- de condamner l'AP-HP ou, à défaut, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à lui verser les sommes de 25 000 euros au titre de l'ensemble de ses troubles dans ses conditions d'existence et de 30 000 euros au titre de l'ensemble de ses préjudices patrimoniaux en lien avec sa prise en charge à l'hôpital Bichat en 2006 ;

- d'assortir ces sommes des intérêts au taux légal à compter du 24 janvier 2017 ;

4°) de mettre à la charge de l'AP-HP, au profit de son conseil, la somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement avant-dire droit en date du 22 juin 2018, le tribunal administratif de Paris a ordonné une expertise médicale avant de statuer sur les conclusions de la demande de Mme C....

Le rapport d'expertise du Dr Foult, désigné par une ordonnance du 23 juillet 2018 du vice-président du tribunal administratif de Paris, a été déposé le 6 décembre 2018.

Mme C... a demandé au tribunal administratif de Paris, dans le dernier état de ses écritures de condamner l'AP-HP à lui verser, à titre principal, la somme de 88 000 euros et, à titre subsidiaire, si seul un défaut fautif d'information était retenu par le tribunal, la somme de 43 000 euros, en raison des préjudices qu'elle a subis dans les suites de sa prise en charge à l'hôpital Bichat en 2006, augmentées des intérêts au taux légal à compter du 24 janvier 2017 et de la capitalisation des intérêts.

Par un jugement n°1707372/6-1 du 24 mai 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de Mme C....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 19 novembre 2019, Mme C..., représentée par

Me G..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1707372/6-1 du 24 mai 2019 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de condamner l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP) à lui verser la somme de 8 000 euros au titre du préjudice d'impréparation ;

3°) de condamner l'AP - HP à lui verser, à titre principal, les sommes de 25 000 euros au titre de l'ensemble de ses troubles dans ses conditions d'existence et de 55 000 euros au titre de l'ensemble de ses préjudices patrimoniaux en lien avec sa prise en charge à l'hôpital Bichat en 2006 et, à titre subsidiaire, si seul un défaut fautif d'information était retenu par la Cour, la somme de 35 000 euros, en raison des préjudices qu'elle a subis dans les suites de sa prise en charge à l'hôpital Bichat en 2006 ;

4°) d'assortir ces sommes des intérêts au taux légal à compter du 24 janvier 2017 et de leur capitalisation ;

5°) de mettre à la charge de l'AP - HP, au profit de son conseil, la somme de 2 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré du défaut de réalisation d'un bilan pré-opératoire alors qu'il s'agit d'un manquement manifeste dans sa prise en charge médicale ;

- l'expertise du Dr Foult est entachée d'irrégularités dès lors que :

. l'expert se fonde sur une radiographie qui ne lui a pas été communiquée en méconnaissance du principe du contradictoire ; en retenant ce rapport d'expertise à titre d'élément d'information, le tribunal l'a privée d'une procédure équitable au sens de l'article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

. les pièces retenues par l'expert n'ont pas de caractère probant en l'absence d'éléments permettant d'identifier la patiente et l'échelle retenue ;

. la méthode de reconstitution retenue par l'expert étayée par aucune littérature médicale et la mesure effectuée sont dénuées de caractère probant ;

. l'expert a méconnu les termes du jugement avant-dire droit en ne précisant pas les références des données médicales sur lesquelles il se fonde ;

- les premiers juges ne pouvaient pas retenir la radiographie anonyme, les mesures non sérieusement vérifiables effectuées par l'expert, la méthode de mesure par reconstitution par définition approximative et un rapport d'expertise non étayé et non conforme au jugement avant-dire droit pour rejeter sa demande ;

- elle n'a pas été informée de l'utilité des deux interventions chirurgicales, ni du risque évolutif de métatarsalgies " avec une probabilité d'apparition supérieure à 50 % " ;

- aucun bilan pré-opératoire, en particulier aucune radio pré-opératoire, n'ont été réalisés ce qui constitue un manquement manifeste dans sa prise en charge médicale ;

- le choix de l'indication thérapeutique et la réalisation du geste chirurgical ne sont pas conformes aux règles de l'art dès lors qu'une ostéotomie de raccourcissement ne doit pas être pratiquée sur un métatarse qui est déjà très court ; en raccourcissant de manière excessive le premier métatarse, le chirurgien l'a directement exposée à la survenue de métatarsalgies de transfert ;

- l'ensemble de ses préjudices extra-patrimoniaux s'élèvent à un montant total de 25 000 euros se décomposant comme suit :

. un déficit fonctionnel temporaire de 100 % pour la période du 18 au 23 juin 2006, de 50 % pour la période du 24 juin au 19 juillet 2006, de 25 % pour la période du 20 juillet au 19 août 2006, de 100 % pour la période du 20 au 26 août 2006, de 50 % pour la période du 27 août au 27 octobre 2006, de 25 % pour la période du 28 octobre au 28 novembre 2006 et de 10 % pour la période du 29 novembre 2006 au 8 décembre 2014, date de la consolidation de son état de santé ;

. une assistance par tierce personne évaluée à 2h30 par jour pendant les périodes de déficit fonctionnel temporaire de 50 % et à 1h30 par jour pendant les périodes de déficit fonctionnel temporaire de 25 % ;

. un préjudice esthétique temporaire pour la période comprise entre le 19 juin et le 28 novembre 2006 ;

. des souffrances endurées évaluées à 2,5 / 7 ;

. un déficit fonctionnel permanent évalué à 8 % du fait de la modification des appuis plantaires avec hyperkératose et déformation des orteils, des importantes douleurs et crampes et du retentissement psychologique des douleurs chroniques ;

. un préjudice esthétique évalué à 2,5 / 7 du fait de la déformation des orteils, l'usage de chaussures de tailles différentes et d'une béquille ;

. un préjudice d'agrément dès lors qu'elle ne peut plus pratiquer le footing et que ses promenades sont désormais réduites à de courtes distance avec des interruptions multiples ;

- l'ensemble de ses préjudices patrimoniaux s'élèvent à un montant total de 55 000 euros se décomposant comme suit :

. incidence professionnelle dès lors qu'elle n'a pas pu reprendre son activité professionnelle et qu'un reclassement professionnel est indispensable ;

. frais d'achat de semelles orthopédiques restant à sa charge, soit 120 euros par an ;

. aménagement du véhicule dès lors qu'elle doit envisager l'achat d'un véhicule avec une boîte automatique ;

. aide viagère dès lors qu'elle doit solliciter l'aide de tiers au quotidien évaluée à 2h par semaine jusqu'en 2018 puis à 2h30 ;

- le préjudice spécifique d'impréparation peut être évalué à 8 000 euros ;

- à titre subsidiaire, les préjudices résultant du défaut d'information peuvent être évalués à hauteur de 50 % de l'ensemble de ses préjudices extrapatrimoniaux et patrimoniaux, soit la somme totale de 35 000 euros.

Par un mémoire, enregistré le 8 janvier 2020, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°) à titre principal, de constater qu'aucune demande de Mme C... n'est dirigée à son encontre en appel et de confirmer sa mise hors de cause par le jugement du 24 mai 2019 du tribunal administratif de Paris ;

2 °) en tout état de cause, de rejeter la requête de Mme C....

Il soutient que :

- les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés ;

- les conditions de son intervention au titre de la solidarité nationale ne sont pas réunies.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 octobre 2020, l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP), représentée par Me E..., conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée à la caisse primaire d'assurance maladie de Paris qui n'a pas produit d'observations.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris du 30 août 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme F...,

- les observations de Mme Bernard, rapporteur public,

- et les observations de Me E..., avocat de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., née en 1968, a été opérée d'un hallux valgus du pied droit le 19 juin 2006 à l'hôpital Bichat qui dépend de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP). Le 21 août 2006, ont été pratiquées dans cet hôpital la même intervention au pied gauche ainsi qu'une reprise chirurgicale afin de traiter des métatarsalgies sur le matériel d'ostéosynthèse mis en place sur son pied droit. A compter de 2009, Mme C... a souffert de douleurs au niveau des pieds, survenant lors de la marche, Un traitement par antalgiques, ainsi que le port de semelles orthopédiques, lui ont alors été prescrits. Entre 2013 et 2015, elle a réalisé des examens d'imagerie par résonance magnétique et consulté plusieurs chirurgiens, lesquels ont proposé, face à la persistance des douleurs, de réaliser une intervention chirurgicale correctrice, proposition que l'intéressée a refusée. En mai 2015, elle a sollicité du tribunal administratif de Paris la désignation d'un expert. Le Dr Dufour, expert désigné par ordonnance du 6 juillet 2015, a rendu son rapport le 17 novembre 2015. Le 24 janvier 2017, Mme C... a présenté une demande indemnitaire préalable auprès de l'AP-HP qui a rejeté cette demande par une décision du 2 mars 2017. Par un jugement avant-dire droit en date du 22 juin 2018, le tribunal administratif de Paris a ordonné une nouvelle expertise médicale avant de statuer sur les conclusions de la demande de Mme C.... Le rapport d'expertise du Dr Foult, désigné par une ordonnance du 23 juillet 2018, a été déposé le 6 décembre 2018. Mme C... a demandé au tribunal administratif de Paris, dans le dernier état de ses écritures, de condamner l'AP-HP à lui verser, à titre principal, la somme de 88 000 euros et, à titre subsidiaire, si seul un défaut fautif d'information était retenu par le tribunal, la somme de 43 000 euros, en raison des préjudices qu'elle a subis dans les suites de sa prise en charge à l'hôpital Bichat en 2006, augmentées des intérêts au taux légal à compter du 24 janvier 2017 et de la capitalisation des intérêts. Par un jugement n°1707372/6-1 du 24 mai 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Mme C... relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Le respect du caractère contradictoire de la procédure d'expertise implique que les parties soient mises à même de discuter devant l'expert des éléments de nature à exercer une influence sur la réponse aux questions posées par la juridiction saisie du litige. Lorsqu'une expertise est entachée d'une méconnaissance de ce principe ou lorsqu'elle a été ordonnée dans le cadre d'un litige distinct, ses éléments peuvent néanmoins, s'ils sont soumis au débat contradictoire en cours d'instance, être régulièrement pris en compte par le juge, soit lorsqu'ils ont le caractère d'éléments de pur fait non contestés par les parties, soit à titre d'éléments d'information dès lors qu'ils sont corroborés par d'autres éléments du dossier.

3. Il ressort des termes mêmes du jugement attaqué que, pour juger, d'une part, que la circonstance que Mme C... n'ait pas été informée du risque de survenue de métatarsalgies avant les interventions chirurgicales de ses hallux valgus des pieds droit et gauche à l'hôpital Bichat les 19 juin et 21 août 2006 ne lui ouvrait pas droit d'obtenir réparation dès lors que les métatarsalgies dont elle souffre sont sans aucun lien avec ces interventions chirurgicales et, d'autre part, qu'aucune maladresse fautive lors de la réalisation de ces gestes chirurgicaux les 19 juin et 21 août 2006 n'avait été commise, le raccourcissement des premiers rayons droit et gauche étant limité à 1 à 2 millimètres, le tribunal a pris en compte les conclusions du rapport d'expertise du Dr Foult, expert désigné par le tribunal, qui s'est fondé sur ces points sur une radiographie du 27 septembre 2006 dont il a demandé la communication à l'AP-HP lors de la réunion d'expertise du 6 novembre 2018. Or, il résulte de l'instruction que ce cliché radiographique n'a pas été transmis par l'expert à Mme C... avant la remise de son rapport et n'a pas non plus fait l'objet d'un pré-rapport.

4. En prenant ainsi en compte les éléments de ce rapport d'expertise dont Mme C... n'avait pas été mise à même de discuter devant l'expert, qui ne constituaient ni des éléments de pur fait non contestés par les parties ni des appréciations corroborées par d'autres éléments du dossier, le tribunal administratif de Paris a, alors même que ce rapport avait été soumis au contradictoire devant lui, entaché son jugement d'irrégularité. Mme C... est par suite fondée, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, à demander l'annulation du jugement attaqué.

5. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme C... devant le tribunal administratif de Paris.

6. Les pièces du dossier ne permettent pas d'exclure de manière certaine l'existence d'une faute médicale, compte tenu notamment de l'argumentation développée par la requérante et étayée par plusieurs avis médicaux relatifs à l'hypothèse d'un raccourcissement excessif des premiers métatarsiens droit et gauche lors des interventions chirurgicales des 19 juin et 21 août 2006 réalisées à l'hôpital Bichat. Ainsi, l'hypothèse d'une faute au cours de la réalisation de ces gestes médicaux ne peut à ce stade être écartée sans la réalisation d'une nouvelle expertise médicale. Il y a lieu, avant de statuer sur les conclusions présentées devant la Cour par Mme C..., d'ordonner une expertise aux fins précisées ci-après.

DÉCIDE :

Article 1er : Il sera, avant de statuer sur la requête susvisée, procédé par un expert désigné par le président de la Cour, à une expertise médicale. L'expert aura pour mission de :

1°) se faire communiquer tous documents relatifs à l'état de santé de Mme C... et, notamment, tous documents relatifs au suivi médical, aux actes de soins et aux diagnostics pratiqués lors de sa prise en charge par l'hôpital Bichat en 2006 ; convoquer et entendre les parties et tous sachants ; procéder à l'examen sur pièces du dossier médical de Mme C... ainsi qu'éventuellement à son examen clinique ;

2°) décrire l'état de santé de Mme C... lorsqu'elle a été admise à l'hôpital Bichat avant chacune des interventions du 19 juin et 21 août 2006, les soins et prescriptions antérieurs à cette admission, et les conditions dans lesquelles elle a été prise en charge et soignée dans cet établissement ; décrire l'état pathologique de la requérante ayant conduit aux soins, aux interventions et aux traitements pratiqués ;

3°) donner son avis sur le point de savoir si les diagnostics établis et les traitements, interventions et soins prodigués à l'hôpital Bichat et leur suivi ont été consciencieux, attentifs, diligents et conformes aux données acquises de la science, et s'ils étaient adaptés à l'état de Mme C... et aux symptômes qu'elle présentait ; donner notamment son avis sur la pertinence des diagnostics des équipes médicales, l'utilité des gestes opératoires pratiqués et la conformité de la prise en charge de l'intéressée (investigations, traitements, soins, surveillance) aux règles de l'art et aux données acquises de la science à l'époque des faits ; l'expert précisera les références des données médicales sur lesquelles il se fonde, en retranscrivant au besoin les passages de la littérature scientifique qui lui paraîtraient pertinents; l'expert précisera en particulier d'une part, si l'indication opératoire était justifiée compte tenu de la morphologie des os des pieds de Mme C..., et d'autre part si le geste chirurgical a été correctement exécuté ou s'il peut être conclu à un raccourcissement excessif et contraire aux règles de l'art, du premier métatarsien, ou, le cas échéant, à l'existence d'autres manquements aux données de la science et aux règles de l'art ;

4°) donner son avis sur le point de savoir si le dommage corporel constaté présente un lien de causalité direct, certain et exclusif avec un manquement imputable à l'établissement, en excluant la part des séquelles à mettre en relation avec la pathologie initiale et son évolution ou avec toute autre cause étrangère à la prise en charge de Mme C... par l'établissement ; dans le cas d'une pluralité de causes à l'origine du dommage, indiquer la part imputable à chacune d'elles ;

5°) dire si le dossier médical et les informations recueillies permettent de savoir s'il a été procédé de façon complète à l'information de Mme C..., c'est-à-dire si elle a été informée, avant les actes de soins litigieux, de l'ensemble des risques fréquents et des risques graves, même rares, normalement prévisibles, qu'elle encourait en donnant son consentement à l'acte de soins en cause ; dans la négative, préciser si Mme C... a subi une perte de chance, exprimée en pourcentage, de se soustraire au risque en refusant les actes de soins pratiqués si elle en avait connu tous les dangers ou si, compte tenu des douleurs dont elle souffrait, de leur évolution probable et aussi des risques d'échec ou de complications à court ou à plus long terme susceptibles d'être provoquées par ces interventions, Mme C... aurait en toute probabilité accepté de subir ces interventions si elle avait correctement été informée des risques encourus ;

6°) donner son avis sur le point de savoir si le ou les manquements éventuellement constatés ont fait perdre à Mme C... une chance de voir son état de santé s'améliorer ou d'éviter de le voir se dégrader ; dans cette hypothèse, quantifier la perte de chance ;

7°) dire si l'état de santé de Mme C... est consolidé et, le cas échéant, fixer la date de consolidation ; dans l'hypothèse où l'état de santé de Mme C... ne serait pas consolidé, fixer l'échéance à l'issue de laquelle l'intéressée devra à nouveau être examinée ;

8°) décrire la nature et l'étendue des préjudices résultant de la prise en charge hospitalière de Mme C..., non imputables à son état antérieur ni aux conséquences prévisibles de sa prise en charge médicale par l'hôpital Bichat si celle-ci s'était déroulée normalement, en distinguant les préjudices patrimoniaux (en particulier, dépenses de santé déjà engagées et futures, frais liés au handicap dont le cas échéant frais d'assistance par tierce personne, pertes de revenus, incidence professionnelle du dommage, autres dépenses liées au dommage corporel) et les préjudices personnels (en particulier, déficit fonctionnel, souffrances endurées, préjudice esthétique, préjudice d'agrément, préjudice sexuel) et, pour chaque poste de préjudice, les préjudices temporaires avant consolidation et les préjudices permanents après consolidation ;

9°) pour le cas où la responsabilité de l'établissement de santé ne serait pas retenue, préciser les préjudices directement imputables à un ou des actes de prévention, de diagnostic ou de soins exécutés dans l'établissement ayant eu pour Mme C... des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci, en appréciant leur niveau de gravité au regard des critères fixés à l'article D. 1142-1 du code de la santé publique (pourcentage et durée du déficit fonctionnel temporaire, inaptitude à exercer l'activité professionnelle, troubles particulièrement graves y compris d'ordre économique dans les conditions d'existence) ;

10°) de façon générale, recueillir tous éléments et faire toutes autres constatations utiles de nature à éclairer la Cour dans son appréciation des responsabilités éventuellement encourues et des préjudices subis.

L'expert disposera des pouvoirs d'investigations les plus étendus. Il pourra faire toutes constatations ou vérifications propres à faciliter l'accomplissement de sa mission et éclairer le tribunal.

Article 2 : L'expert accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative, au contradictoire de Mme A... C..., l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris, l'ONIAM, la CPAM de Paris et la CPAM de la Seine-Saint-Denis. Il prêtera serment par écrit devant le greffier en chef de la Cour. L'expert déposera son rapport au greffe de la Cour en deux exemplaires et en notifiera copie aux parties dans le délai fixé par le président de la Cour dans sa décision le désignant.

Article 3 : Les frais d'expertise sont réservés pour y être statué en fin d'instance.

Article 4 : Tous droits et moyens des parties, sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt, sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C..., à l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris, à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, à la caisse primaire d'assurance maladie de Paris et à la CPAM de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 28 janvier 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme B..., présidente de chambre,

- M. Luben, président assesseur,

- Mme F..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 février 2021.

La présidente de la 8ème chambre,

H. B...

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

9

N° 19PA03660


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA03660
Date de la décision : 26/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-01-02 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé. Établissements publics d'hospitalisation. Responsabilité pour faute médicale : actes médicaux.


Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : AARPI VATIER et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-02-26;19pa03660 ?
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