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16/02/2021 | FRANCE | N°19PA00949

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 16 février 2021, 19PA00949


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé à la commission départementale d'aide sociale du Gard d'annuler la décision du 8 mars 2013 par laquelle le président du conseil départemental du Gard a rejeté sa demande du 20 novembre 2012 portant contestation d'une décision du 20 juin 2008 décidant la récupération d'un indu de 1 915,10 euros qu'il aurait indûment perçu au titre du revenu minimum d'insertion.

Par une décision du 24 février 2017, la commission départementale d'aide sociale du Gard a jugé qu'il n'y avai

t plus lieu de statuer sur la demande, dépourvue d'objet.

Procédure devant la cour ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé à la commission départementale d'aide sociale du Gard d'annuler la décision du 8 mars 2013 par laquelle le président du conseil départemental du Gard a rejeté sa demande du 20 novembre 2012 portant contestation d'une décision du 20 juin 2008 décidant la récupération d'un indu de 1 915,10 euros qu'il aurait indûment perçu au titre du revenu minimum d'insertion.

Par une décision du 24 février 2017, la commission départementale d'aide sociale du Gard a jugé qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur la demande, dépourvue d'objet.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 mai 2017, M. C... a demandé à la commission départementale d'aide sociale du Gard d'annuler sa décision du 24 février 2017.

Il soutient qu'il n'a pas volontairement réglé l'indu réclamé prélevé sur son compte bancaire et que la décision de répétition n'est pas justifiée, le bénéfice de l'aide à la création ou à la reprise d'une entreprise (ACCRE) n'étant pas exclusif de celui du revenu minimum d'insertion pendant six mois renouvelables à compter de la date de création de l'entreprise.

Le 11 février 2019, la commission départementale d'aide sociale du Gard a transmis la requête de M. C... au tribunal administratif de Nîmes.

Par une ordonnance du 26 février 2019, le président du tribunal administratif de Nîmes a transmis le dossier de la requête de M. C... à la cour administrative d'appel de Paris.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 avril 2019, le département du Gard conclut au rejet de la requête.

Il soutient que M. C..., qui a exercé une activité d'achat et revente de véhicules d'occasion à compter du 1er juin 2007, eu égard à son régime d'imposition, ne pouvait à compter de cette date ouvrir droit au revenu minimum d'insertion quand bien même aurait-il été bénéficiaire de l'aide à la création d'entreprise.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 ;

- le décret n° 98-1070 du 27 novembre 1998 ;

- le décret n°2018-928 du 29 octobre 2018 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... a bénéficié du revenu minimum d'insertion (RMI) à compter d'avril 2016. Le 21 mars 2008, la caisse d'allocations familiales (CAF) lui a indiqué, qu'à la suite de la création d'une activité indépendante d'achat et revente de véhicules d'occasion, il n'aurait pas dû percevoir ce revenu et qu'il était redevable de la somme de 4 456,94 pour la période du 1er juin 2007 au 29 février 2008. Le 20 juin 2008, à la suite d'un recours gracieux formé par M. C..., la somme réclamée a été ramenée à 1 915,10 euros. Le 30 septembre 2008, la créance de la CAF a été transférée au département, lequel a émis un titre de recettes et le recouvrement de la créance a été mis en oeuvre par la paierie départementale. Le 20 novembre 2012, M. C... a contesté devoir la somme réclamée auprès du président du conseil général du Gard. Par courrier du

8 mars 2013, sa demande a été rejetée au motif qu'à la suite d'une mesure d'opposition à tiers détenteur ayant donné lieu à saisie attribution à partir du compte bancaire de l'intéressé, la dette avait été entièrement soldée. M. C... relève appel de la décision du 24 février 2017 par laquelle la commission départementale d'aide sociale du Gard a rejeté son recours contre la décision du département du Gard du 8 mars 2013, au motif qu'il était dépourvu d'objet.

Sur la régularité de la décision de la commission départementale d'aide sociale du Gard :

2. Il ressort de l'examen de sa décision que la commission départementale d'aide sociale du Gard a considéré que la demande présentée par M. C... était devenue sans objet, au motif que l'indu d'allocation RMI était soldé au jour de sa décision et que, dès lors, l'objet du litige avait disparu en cours d'instruction. Toutefois, quand bien même une saisie attribution sur le compte bancaire de M. C... aurait-elle permis au département du Gard de recouvrer la somme de 1 915,10 euros le 26 décembre 2012 -soit avant même l'intervention de la décision attaquée et l'introduction du recours, et non en cours d'instruction comme l'a considéré la commission- une telle circonstance n'a pas eu effet de rendre sans objet la contestation de l'indu par le requérant. Par suite, c'est à tort que la commission départementale d'aide sociale du Gard a estimé que la demande dont elle était saisie était devenue sans objet et a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur cette demande. Sa décision du 24 février 2017 doit, dès lors, être annulée.

3. Il y a lieu pour la cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de

M. C....

Sur la demande de M. C... devant la commission départementale d'aide sociale du Gard :

4. Aux termes de l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles : " Toute personne résidant en France dont les ressources (...) n'atteignent pas le montant du revenu minimum (...), qui est âgée de plus de vingt-cinq ans ou assume la charge d'un ou plusieurs enfants nés ou à naître et qui s'engage à participer aux actions ou activités définies avec elle, nécessaires à son insertion sociale ou professionnelle, a droit, dans les conditions prévues par la présente section, à un revenu minimum d'insertion ". En vertu de l'article R. 262-15 du même code dans sa version alors applicable : " Les personnes relevant de l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ou des bénéfices non commerciaux peuvent prétendre à l'allocation de revenu minimum d'insertion lorsqu'au cours de l'année de la demande et depuis l'année correspondant au dernier bénéfice connu elles n'ont employé aucun salarié et ont été soumises au régime d'imposition prévus aux articles 50-0 et 102 ter du Code général des impôts et qu'en outre le dernier chiffre d'affaires annuel connu actualisé, le cas échéant, n'excède pas, selon la nature de l'activité exercée, les montants fixés auxdits articles ". Aux termes de l'article R. 262-16 dudit code : " Lorsque les conditions fixées aux articles R. 262-14 et R.262-15 ne sont pas satisfaites, le président du conseil général peut, à titre dérogatoire et pour tenir compte de situations exceptionnelles, décider que les droits de l'intéressé à l'allocation de revenu minimum d'insertion seront examinés ". Aux termes de l'article L. 262-41 alinéa 1er du même code dans sa rédaction en vigueur après l'intervention de la loi du 23 mars 2006 : " Tout paiement indu d'allocation est récupéré par retenue sur le montant des allocations à échoir ou, si le bénéficiaire opte pour cette solution ou n'est plus éligible au revenu minimum d'insertion, par remboursement de la dette en un ou plusieurs versements. Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale d'aide sociale dans les conditions définies à l'article L. 262-39. En cas de précarité de la situation du débiteur, la créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général, sauf en cas de manoeuvre frauduleuse ou de fausse déclaration ". Enfin, aux termes de l'article L. 262-41 alinéa 4 du code de l'action sociale et des familles : " En cas de précarité de la situation du débiteur, la créance peut être remise ou réduite sauf en cas de manoeuvre frauduleuse ou de fausse déclaration ".

5. Lorsque le recours dont il est saisi est dirigé contre une décision qui, remettant en cause des paiements déjà effectués, ordonne la récupération d'un indu de revenu de solidarité active ou d'aide exceptionnelle de fin d'année, il entre dans l'office du juge d'apprécier, au regard de l'argumentation du requérant, le cas échéant, de celle développée par le défendeur et, enfin, des moyens d'ordre public, en tenant compte de l'ensemble des circonstances de fait qui résultent de l'instruction, la régularité comme le bien-fondé de la décision de récupération d'indu. Il lui appartient, s'il y a lieu, d'annuler ou de réformer la décision ainsi attaquée, pour le motif qui lui paraît, compte tenu des éléments qui lui sont soumis, le mieux à même, dans l'exercice de son office, de régler le litige.

6. Il ressort des pièces du dossier que M. C..., bénéficiaire du droit au revenu minimum d'insertion (RMI), s'est vu réclamer un indu de 1 916,10 euros au titre de ce revenu, au motif qu'il exerçait une activité de travailleur indépendant, de micro-entrepreneur imposé au régime réel à compter du 1er juin 2007, et qu'il ne pouvait cumuler l'aide à la création ou à la reprise d'une entreprise (ACCRE) et le RMI. Le requérant a contesté cette décision en se prévalant de la possibilité de cumuler momentanément les deux aides et de percevoir le RMI pendant au moins six mois.

7. Le bénéfice de l'ACCRE permet à ses bénéficiaires de profiter d'une exonération de charges sociales, d'un prêt à taux 0 de la part de l'Etat (6 000 euros en l'espèce) en complément d'autres financements tout en percevant des minimas sociaux durant les premiers mois de l'activité (entre trois et six mois selon l'allocation). En présence d'un tel dispositif, et alors qu'il ressort des pièces du dossier que M. C... n'employait aucun salarié et n'avait pas réalisé un chiffre d'affaires excédant les maximas légaux, n'avait perçu aucun revenu au titre de l'ACCRE, pour considérer que les sommes perçues au titre du RMI sur la période litigieuse n'étaient pas dues par l'intéressé, le département du Gard ne pouvait se borner à relever que ce dernier avait bénéficié de l'ACCRE, sans rechercher si la perception de cette aide pouvait être au cas d'espèce cumulée avec celle du RMI et, au surplus, sans rechercher en vertu des dispositions de l'article R. 262-16 du code de l'action sociale et des familles précitées, si l'intéressé pouvait bénéficier de la dérogation applicable aux travailleurs indépendants. Au vu des moyens soulevés par les parties, et sans que soit opposable la seule circonstance que l'indu avait été réglé à la date de la décision attaquée, il résulte de ce qui précède que le département du Gard ne pouvait, pour ce seul motif, rejeter la contestation du bien-fondé de sa créance et que la décision de son président du 8 mars 2013 doit en conséquence être annulée, avec toutes conséquence de droit quant au remboursement de la somme indument prélevée sur le compte bancaire de l'intéressé.

DECIDE :

Article 1er : La décision de la Commission départementale d'aide sociale du Gard en date du

24 février 2017 et la décision du président du conseil général du Gard du 8 janvier 2013, sont annulées.

Article 2 : L'indu d'allocations de revenu minimum d'insertion mis à la charge de M. C... est annulé.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au département du Gard.

Délibéré après l'audience du 2 février 2021 à laquelle siégeaient :

M. D..., premier vice-président,

Mme B..., premier conseiller,

Mme Mornet, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 février 2021.

Le rapporteur,

M-D. B...Le président,

M. D...

Le greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

1

N° 08PA04258

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N° 19PA00949


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA00949
Date de la décision : 16/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

04-02-03-03 Aide sociale. Différentes formes d'aide sociale. Aide sociale aux personnes âgées. Allocation personnalisée d'autonomie.


Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Marie-Dominique JAYER
Rapporteur public ?: Mme PENA

Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-02-16;19pa00949 ?
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