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15/02/2021 | FRANCE | N°20PA02725

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 15 février 2021, 20PA02725


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... O... et Mme L... O..., agissant tant en leur nom propre qu'en qualité de représentants légaux de leur fils mineur C..., ainsi que Mme H... O..., M. F... O..., Mme D... O... et Mme E... I... ont demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à leur verser, en réparation des préjudices résultant du décès d'J... O..., les sommes de 67 714,21 euros au titre des préjudices de M. G... O... et de Mme L... O..., de 19 400 euros au titre du préjudice de

C... O..., de 19 400 euros au titre du préjudice de Mme H... O..., de 4 85...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... O... et Mme L... O..., agissant tant en leur nom propre qu'en qualité de représentants légaux de leur fils mineur C..., ainsi que Mme H... O..., M. F... O..., Mme D... O... et Mme E... I... ont demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à leur verser, en réparation des préjudices résultant du décès d'J... O..., les sommes de 67 714,21 euros au titre des préjudices de M. G... O... et de Mme L... O..., de 19 400 euros au titre du préjudice de C... O..., de 19 400 euros au titre du préjudice de Mme H... O..., de 4 850 euros au titre du préjudice de M. F... O..., de 4 850 euros au titre du préjudice de Mme D... O... et de 4 850 euros au titre du préjudice de Mme E... I....

Par un jugement n° 1817977/6-3 du 23 juillet 2020, le tribunal administratif de Paris a condamné l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à verser la somme totale de 51 529,32 euros à M. et Mme G... et Valérie O... en réparation de leurs préjudices propres, à verser à M. et Mme G... et Valérie O... la somme de 18 000 euros en leur qualité de représentants légaux de C... O..., à verser à Mme H... O... la somme de 18 000 euros, à verser à M. F... O... la somme de 2 700 euros, à verser à Mme D... O... la somme de 2 700 euros et à verser à Mme E... I... la somme de

2 700 euros, et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en production de pièces, enregistrés respectivement le

17 septembre 2020 et le 21 septembre 2020, M. G... O... et Mme L... I... épouse O..., agissant tant en leur nom propre qu'en qualité de représentants légaux de leur fils mineur C..., Mme H... O..., M. F... G... O...,

Mme D... K... épouse O... et Mme E... A... épouse I..., représentés par

Me P..., demandent à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 1817977/6-3 du 23 juillet 2020 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de condamner l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à indemniser les préjudices subis par les ayants-droit de M. J... O... à hauteur de 97 %, de la manière suivante :

- 24 250 euros au titre du préjudice d'affection de M. G... O..., père de

M. J... O... ;

- 24 250 euros au titre du préjudice d'affection de Mme L... I... épouse O..., mère de M. J... O... ;

- 19 400 euros au titre du préjudice d'affection de Mme H... O..., soeur de

M. J... O... ;

- 19 400 euros au titre du préjudice d'affection de M. C... O..., frère de

M. J... O... ;

- 4 850 euros au titre du préjudice d'affection de M. F... G... O..., grand-père paternel de M. J... O... ;

- 4 850 euros au titre du préjudice d'affection de Mme D... K... épouse O..., grand-mère paternelle de M. J... O... ;

- 4 850 euros au titre du préjudice d'affection de Mme E... A... épouse I..., grand-mère maternelle de M. J... O... ;

- 10 030,27 euros au titre des frais funéraires supportés par M. G... O... et Mme L... O... ;

- 747,60 euros au titre des divers frais de déplacement en train supportés par M. G... O... et Mme L... O... pour les besoins de l'expertise ;

- 4 082,29 euros au titre de la perte du supplément familial de traitement de Mme L... O..., fonctionnaire de l'éducation nationale ;

- 4 354,05 euros au titre de la perte des allocations familiales subie par M. G... O... et Mme L... O... ;

3°) de condamner l'Assistance publique - hôpitaux de Paris aux entiers dépens de l'instance ;

4°) de mettre à la charge de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris le versement de la somme de 2 500 euros à chacun des ayants-droit de M. J... O... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- si le jugement dont le jugement dont la réformation est demandée a reconnu à bon droit la responsabilité de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris dans le décès de M. J... O... et l'a condamnée à réparer les conséquences de son manquement, c'est à tort qu'il a retenu que le pourcentage de perte de chance était de 90 %, en contradiction avec les deux rapports d'expertise médicale ;

- les préjudices subis par eux doivent être intégralement indemnisés, conformément à leurs conclusions.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 décembre 2020, l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, représentée par Me M..., demande à la cour :

1°) de rejeter la requête ; à cette fin, elle soutient que les moyens soulevés par les consorts O... et I... ne sont pas fondés.

2°) par la voie de l'appel incident :

- à titre principal, d'annuler le jugement du 23 juillet 2020 du tribunal administratif de Paris et de rejeter la demande présentée par les consorts O... et I... devant le tribunal administratif de Paris ; à cette fin, elle soutient qu'elle n'est pas responsable d'un retard dans la réalisation de l'intervention chirurgicale.

- à titre subsidiaire, de réformer le jugement du 23 juillet 2020 du tribunal administratif de Paris et de ramener les indemnités allouées à de plus justes proportions ; à cette fin, elle soutient que le taux de perte de chance de 90% retenu par les premiers juges doit être ramené à 80% pour tenir compte de la spécificité du patient au regard de la population générale des patients atteints de la maladie de Marfan.

Par un acte enregistré le 25 septembre 2020, M. G... O... a été désigné en tant que représentant unique des requérants par Me P... à la suite de la demande qui lui a été faite en application de la disposition de l'article R. 611-2 du code de justice administrative

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de Mme G..., rapporteur public,

- et les observations de Me N..., substituant Me P..., avocat des consorts O..., et Me M..., avocat de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris.

Considérant ce qui suit :

1. M. J... O..., né le 24 novembre 1998, était atteint d'un syndrome de Marfan, diagnostiqué à l'âge de deux ans. Cette maladie d'origine génétique (en l'espèce, une mutation du gène TGFBR2) des fibres élastiques est responsable de modifications ligamentaires multiples au niveau du squelette et de la vision, susceptibles d'être corrigées ou appareillées ; elle est également responsable d'une modification congénitale évolutive de l'élasticité des vaisseaux du fait d'une anomalie de la fibrilline, à l'origine d'une dilatation progressive de la racine de l'aorte concernant les sinus de Valsalva, la jonction sino-tubulaire et les deux premiers centimètres de l'aorte ascendante, qui conduit à une rupture ou une dissection mortelle, raison pour laquelle une intervention chirurgicale doit être pratiquée à partir du constat d'un certain diamètre de cette aorte ou d'une certaine rapidité d'accroissement de ce diamètre. M. J... O... était suivi, dans le cadre d'une consultation multidisciplinaire régulière, au sein du centre national de référence pour le syndrome de Marfan et apparentés de l'hôpital Bichat Claude G..., à Paris, dans lequel il a de surcroît participé de 2010 à 2013 à un protocole de recherche mené en double aveugle. Il a été victime le 1er juin 2014 d'un malaise et a été conduit par les secours au centre hospitalier Alpes-Léman, où une échographie cardiaque a mis en évidence une dissection de l'aorte ; eu égard à la nécessité d'une intervention chirurgicale cardiaque, il a alors été transféré aux Hôpitaux universitaires de Genève, où un scanner thoraco­abdominal, pratiqué en urgence, a confirmé la dissection de l'aorte thoracique ascendante de type A. Une prise en charge chirurgicale immédiate a été mise en oeuvre afin de remplacer la racine aortique. Pendant l'induction anesthésique, un arrêt cardio-respiratoire est survenu, faisant suspecter une rupture de 1'aorte ; un massage cardiaque et une circulation extra-corporelle ont été mis en oeuvre, mais rendus vains par l'apparition d'un saignement actif dans le tube endotrachéal et la cavité buccale. Le décès a alors été constaté.

2. M. G... O... et Mme L... O..., parents d'J..., ont saisi la commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux de Rhône Alpes, qui s'est dessaisie au profit de la commission de conciliation et d'indemnisation d'Ile-de-France, qui a désigné un expert chirurgien cardiaque le 11 juin 2015, lequel a rendu son rapport le 22 juillet 2015. Cette commission a ensuite désigné le 2 mars 2016 un nouvel expert chirurgien cardiaque, qui a rendu son rapport le 6 juin 2016. Le 12 juillet 2016, la commission de conciliation et d'indemnisation d'Ile-de-France a émis l'avis, complété par une décision rectificative du 23 mars 2017, que le retard de trois mois entre la consultation du 3 janvier 2014 à l'hôpital Bichat et l'envoi le 3 avril 2014 aux parents d'J... O... de l'ordonnance concernant les examens complémentaires à réaliser, causé par un défaut d'organisation médicale et para-médicale au sein de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, était de nature à engager la responsabilité de celle-ci dans la survenue du décès d'J... O... à hauteur de 97%.

3. Le 17 janvier 2017 puis le 14 août 2018, l'Assistance publique - hôpitaux de Paris a proposé aux requérants un règlement amiable du litige par une offre d'indemnisation transactionnelle concernant le préjudice moral subi par chacun des membres de la famille Q...'J... O... et le remboursement des frais d'obsèques. M. et Mme O... n'ont pas accepté cette offre et ont saisi le tribunal administratif de Paris qui, par le jugement du 23 juillet 2020 dont la réformation est demandée, a condamné l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à verser la somme totale de 51 529,32 euros à M. et Mme G... et Valérie O... en réparation de leurs préjudices propres, à verser à M. et Mme G... et Valérie O... la somme de 18 000 euros en leur qualité de représentants légaux de C... O..., à verser à Mme H... O... la somme de 18 000 euros, à verser à M. F... O... la somme de 2 700 euros, à verser à Mme D... O... la somme de 2 700 euros et à verser à Mme E... I... la somme de 2 700 euros, et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Sur la responsabilité de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris :

4. Aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute (...) ".

5. Il résulte de l'instruction que M. J... O..., qui était régulièrement suivi au sein du centre national de référence pour le syndrome de Marfan et apparentés de l'hôpital Bichat Claude G..., et qui a plus particulièrement participé de 2010 à 2013 à un protocole de recherche, a fait l'objet d'un examen le 3 juillet 2013, puis d'un électrocardiogramme de 24 heures (dit Holter) le 21 novembre 2013, puis d'une échographie cardiaque le 3 janvier 2014 dans le cadre d'une consultation multidisciplinaire pour les patients atteints d'un syndrome de Marfan ; le compte-rendu de cette consultation, signé du médecin responsable du centre national de référence pour le syndrome de Marfan et apparentés, indiquait que le diamètre mesuré au niveau des sinus de Valsalva était de 34 mm et celui de l'aorte ascendante sus-sinusale de 41 mm, en constatant ainsi une dilatation de la partie initiale de l'aorte, qui semblait toutefois stable au niveau des sinus de Valsalva, et proposait de réaliser un examen de l'ensemble des vaisseaux par un scanner ou une imagerie par résonance magnétique à l'hôpital Bichat. Le dossier médical de M. J... O... a ensuite été examiné le 10 janvier 2014 lors d'une réunion de synthèse multidisciplinaire, et un courrier du 28 janvier 2014 a été adressé à M. et Mme O... par le responsable du centre national de référence, qui comportait en pièce jointe ce compte-rendu, qui précisait que l'équipe médicale multidisciplinaire souhaitait compléter le bilan cardio-vasculaire par un scanner ou une imagerie par résonance magnétique de l'ensemble des vaisseaux et qui rappelait qu'il était important qu'une échographie cardiaque annuelle soit réalisée et que le traitement par Atenolol 50 mg/jour soit poursuivi. A la réception de ce courrier, un contact téléphonique a eu lieu entre le centre national de référence et M. et Mme O..., qui préféraient que cet examen soit réalisé non à l'hôpital Bichat mais à proximité de leur domicile de Boëge (Haute-Savoie), et qui souhaitaient que leur soient indiqués les hôpitaux à proximité de leur domicile techniquement aptes à réaliser l'examen projeté, et qu'une ordonnance leur soit adressée à cette fin. Le 3 avril 2014, une lettre-ordonnance a été adressée par le centre national de référence à M. Vaudaux­Ruth afin que soit réalisé un angioscanner. Cet angioscanner, qui a été réalisé le 15 mai 2014 à la clinique d'Argonay, a mis en évidence des diamètres de 49 millimètres au niveau de la partie initiale de l'aorte ascendante, de

36-37 millimètres au niveau de la jonction sino­tubulaire, de 41-42 millimètres au niveau des sinus de Valsalva et de 30 millimètres au niveau de l'anneau aortique. Le médecin qui a effectué cet angioscanner dit en avoir transmis les résultats par télécopie à l'hôpital Bichat le jour même, ce que conteste l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, le seul élément probant sur ce point versé au dossier étant un bordereau de transmission envoyé par M. O... daté du 26 mai 2014. Le médecin cardiologue responsable du centre national de référence a pris connaissance de cet angioscanner le 28 mai 2014 et, après avoir demandé une relecture et consulté d'autres praticiens de l'équipe médicale, a posé une " indication opératoire sans tarder " (une hospitalisation a alors été programmée pour le 12 juin) et en a informé le 30 mai 2014 M. et Mme O..., qui ont expliqué la situation à leur fils le jour même.

6. Si d'autres délais (et notamment celui entre la lettre-prescription adressée le 3 avril 2014 par le centre national de référence et la réalisation de l'angioscanner le 15 mai 2014) ne sont pas imputables à l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, le fait de n'avoir envoyé au patient que le

3 avril 2014 la lettre-ordonnance susmentionnée, alors que la réalisation d'un scanner ou une imagerie par résonance magnétique de l'ensemble des vaisseaux avait été préconisée dès l'examen du 3 janvier 2014 et confirmée lors de la réunion de synthèse multidisciplinaire du 10 janvier 2014, et qu'un contact téléphonique avait eu lieu à ce sujet entre le centre national de référence et M. et Mme O... début février 2014, à la réception du courrier du 28 janvier 2014 du centre national de référence, constitue une faute dans l'organisation et le fonctionnement du service public hospitalier, de nature à engager la responsabilité de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, dont elle ne saurait s'exonérer aux motifs que le centre national de référence était alors administrativement débordé du fait de l'absence d'une secrétaire et de l'arrivée d'une nouvelle cadre de santé après une longue vacance du poste, et que M. et Mme O..., qui étaient au courant de la gravité de l'affection dont leur fils était atteint, auraient dû être plus vigilants, après le contact téléphonique du début du mois de février 2014, quant à l'envoi effectif de cette ordonnance.

7. Cependant, il résulte de l'instruction qu'à la date des faits reprochés, au premier semestre 2014, les données de la science médicale, telles qu'elles ressortent des recommandations de la société européenne de cardiologie publiées en 2012 (Guidelines on the management of valvular heart disease), recommandaient (indication de classe I) d'opérer les patients atteints de la maladie de Marfan lorsqu'ils présentaient un diamètre de l'aorte ascendante supérieur ou égal à

50 millimètres et, lorsque ce diamètre était supérieur ou égal à 45 millimètres et/ou que son augmentation était supérieure à 2 millimètres par an, posaient une indication de classe IIa : l'opération devrait être envisagée, en tenant compte des opinions sur l'utilité ou l'efficacité de celle-ci. En l'espèce, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise déposé le 2 juin 2016, que le diamètre de l'aorte ascendante (dite aussi aorte tubulaire), mesuré 2 centimètres au-dessus de la jonction sino-tubulaire était, chez le patient, de 35 millimètres le 3 juillet 2013, de 41 millimètres lors de l'échographie cardiaque du 3 janvier 2014 et de 49 millimètres lors de l'angioscanner du

15 mai 2014, M. J... O... présentant la particularité, jamais rencontré chez une autre personne atteinte de syndrome de Marfan, de connaître une dilatation de l'aorte tubulaire alors que le diamètre aortique au niveau des sinus de Valsalva (mesuré à 35 millimètres le 3 juillet 2013 et à 34 millimètres le 3 janvier 2014) restait stable, bien que cette zone soit pourtant habituellement sujette, chez ces malades, à dilatation, comme l'avait noté le cardiologue responsable du centre national de référence dans le compte-rendu de consultation du 3 janvier 2014. Ainsi, à la date de l'examen du 3 janvier 2014, la mesure du diamètre de l'aorte tubulaire au-dessus de la jonction sino-tubulaire, qui avait augmenté de 6 millimètres en six mois, et au niveau des sinus de Valsalva qui, lui, était resté stable, ne justifiait pas une indication opératoire, mais seulement, comme l'a fait le cardiologue responsable du centre national de référence, de prévoir un bilan cardio-vasculaire par un scanner ou une imagerie par résonance magnétique de l'ensemble des vaisseaux. De son côté, l'angioscanner pratiqué seulement le 15 mai 2014 à la clinique d'Argonay, s'il a mis en évidence des diamètres de 49 mm au niveau de la partie initiale de l'aorte ascendante, soit une augmentation de 8 millimètres depuis le 3 janvier 2014, et de 41-42 millimètres au niveau des sinus de Valsalva, soit une augmentation de 7-8 millimètres depuis le 3 janvier 2014, n'imposait pas, au regard des recommandations précitées, que soit posée une indication opératoire en urgence dès lors que le patient restait dans le cadre de l'indication de classe IIa (ces recommandations, de plus, citant une étude sur le taux de survenue d'événements en fonction du diamètre aortique publié en 2012 selon laquelle les événements graves, du type des dissections, étaient exceptionnels, quoique possibles, pour un diamètre aortique inférieur ou égal à 50 millimètres), mais seulement de poser une indication opératoire à bref délai, comme l'a fait le médecin cardiologue responsable du centre national de référence lorsqu'il a pris connaissance le 28 mai 2014 des résultats de cet angioscanner, une hospitalisation étant prévue pour le 12 juin. Par suite, le retard mis à la réalisation de l'angioscanner du 15 mai 2014, qui au surplus n'est qu'en partie imputable à l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, n'a fait perdre aucune chance de survie immédiate à M. J... O..., dont le décès du fait d'une dissection aortique est la conséquence du syndrome de Marfan dont il était atteint. Il s'ensuit que le jugement du tribunal administratif de Paris du 23 juillet 2020 doit être annulé et la demande présentée par les consorts O... devant ce tribunal rejetée.

Sur les frais liés à l'instance :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demandent les consorts O... au titre des frais liés à l'instance et exposés par eux.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1817977/6-3 du 23 juillet 2020 du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée par les consorts O... devant le tribunal administratif de Paris, ainsi que leurs conclusions présentées en appel, sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... O..., désigné comme représentant unique par l'acte du 25 septembre 2020, à l'Assistance publique - hôpitaux de Paris et au ministre des solidarités et de la santé.

Délibéré après l'audience du 28 janvier 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Vinot, président de chambre,

- M. B..., président assesseur,

- Mme Larsonnier, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 15 février 2021.

Le rapporteur,

I. B...Le président,

H. VINOT

Le greffier,

C. POVSELa République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

8

N° 20PA02725


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA02725
Date de la décision : 15/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-01 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé. Établissements publics d'hospitalisation.


Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: M. Ivan LUBEN
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : VITAL-DURAND ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-02-15;20pa02725 ?
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