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03/02/2021 | FRANCE | N°20PA00933

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 03 février 2021, 20PA00933


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2006.

Par un jugement n° 1812775/1-1 du 29 janvier 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 11 mars et 17 juillet 2020, Mme C..., représentée

par Me B... D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 29 janvier 2020 du Tribunal...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2006.

Par un jugement n° 1812775/1-1 du 29 janvier 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 11 mars et 17 juillet 2020, Mme C..., représentée par Me B... D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 29 janvier 2020 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les documents qui lui sont opposés ont été obtenus de manière illicite, et ne peuvent être utilisés sauf à méconnaitre les dispositions de l'article L. 10 AA du livre des procédures fiscales ;

- l'administration fiscale n'a pas respecté le principe de loyauté dans l'administration de la preuve en utilisant des documents obtenus de manière illicite ;

- les documents ont été reconnus illicites par l'autorité judiciaire ;

- les données informatiques ne lui sont pas opposables en raison d'une manipulation effectuée par l'administration ;

- la doctrine BOI-IR-BASE-10-10-10-10-20161128 n° 20 permet de calculer les revenus perçus sur la base du taux de change moyen.

Par un mémoire en défense enregistré le 2 juillet 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 11 septembre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au

28 septembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E...,

- les conclusions de Mme Jimenez, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., substituant Me D..., représentant Mme C..., présentées par voie téléphonique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... relève appel du jugement du 29 janvier 2020 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge, en droits et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2006.

2. A la suite de la transmission spontanée, par le procureur de la République de Nice, conformément à l'obligation qui résulte de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, de deux procès-verbaux des 2 septembre 2009 et 12 janvier 2010, les services fiscaux ont exercé leur droit de communication auprès de l'autorité judiciaire, le 28 juillet 2014, et consulté l'enquête pénale qui concernait Mme C... et son ex-époux. Il est apparu que le couple était titulaire d'avoirs non déclarés sur des comptes bancaires en Suisse à la banque HSBC par l'intermédiaire de deux sociétés sises aux Iles Vierges britanniques dont ils étaient les

ayant-droits économiques. C'est sur la base des informations ainsi obtenues que l'administration a, selon la procédure de taxation d'office, établi les impositions litigieuses.

3. En premier lieu, la circonstance que, préalablement au contrôle, l'administration aurait disposé d'informations relatives aux intéressés issues de documents obtenus de manière frauduleuse par un tiers est, par-elle-même, sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition. Il suit de là que le moyen tiré par les requérants de l'irrégularité de la procédure d'imposition en raison de l'obtention illégale des données à l'origine des rectifications contestées ne peut qu'être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 10-0 AA du livre des procédures fiscales : " Dans le cadre des procédures prévues au présent titre, à l'exception de celles mentionnées aux articles L. 16 B et L. 38, ne peuvent être écartés au seul motif de leur origine les documents, pièces ou informations que l'administration utilise et qui sont régulièrement portés à sa connaissance (...) en application des droits de communication qui lui sont dévolus par d'autres textes ". Par une décision n° 2013-679 DC du 4 décembre 2013, le Conseil constitutionnel a jugé que ces dispositions ne sauraient, sans porter atteinte aux exigences découlant de l'article 16 de la Déclaration de 1789, permettre aux services fiscaux et douaniers de se prévaloir de pièces ou documents obtenus par une autorité administrative ou judiciaire dans des conditions déclarées ultérieurement illégales par le juge.

5. Il ne résulte pas de l'instruction que les modalités d'obtention décrites au point 2. des pièces transmises par l'autorité judiciaire à l'administration fiscale ayant exercé son droit de communication aient été déclarées illégales par le juge compétent. Au contraire, la chambre commerciale de la Cour de Cassation a, dans sa décision du 31 janvier 2012 n° 11-13.097, refusé de constater l'illicéité de la perquisition à laquelle a procédé le procureur de la République de Nice le 20 janvier 2009. Les informations ainsi obtenues, et qui sont opposées au contribuable dans le présent litige ne peuvent donc être regardées comme ayant été obtenues par une autorité administrative ou judiciaire dans des conditions déclarées ultérieurement illégales par le juge. La circonstance que les informations contenues dans ces documents et obtenues de manière licite tant par les autorités judiciaires que par les autorités administratives aient été auparavant portées à la connaissance de l'administration dans des conditions illicites ne sauraient affecter leur caractère probant ni permettre de regarder l'administration fiscale comme ayant manqué à son devoir de loyauté.

6. En troisième lieu, la circonstance que les autorités pénales suisses auraient constaté que les données du fichier HSBC qui leurs avaient été transmises par les autorités françaises n'auraient pas été exactement les mêmes que celles que ces dernières autorités auraient saisies ne saurait à elle-seule permettre de regarder les données qui sont opposées au contribuable comme dépourvues de caractère probant.

7. Enfin, aux termes de l'article 151 du code général des impôts : " Pour l'application de l'article L. 69 du Livre des procédures fiscales, l'impôt sur les revenus des avoirs à l'étranger est établi sur le produit du montant de ces avoirs par la moyenne annuelle des taux de rendement brut à l'émission des obligations des sociétés privées ". En retenant le taux de change en vigueur à la date où le montant des avoirs a été déterminé, soit à la date du 31 décembre 2005, le service n'a pas méconnu les dispositions précitées. Si Mme C... demande le bénéficie de la doctrine référencée BOI-IR-BASE-10-10-10-10 20161128 relative aux déclarations du revenu global, le paragraphe n° 20 de cette doctrine permet aux contribuables qui déclarent des revenus de source étrangère, à titre de règle pratique, de les convertir sur la base d'un taux de change annuel moyen, en évitant de recourir au taux de change au jour de l'encaissement de chaque élément de leur revenu. Cette doctrine ne prévoit pas d'appliquer ce taux moyen à la conversion d'un capital, soit en l'espèce le montant des avoirs constatés au 31 décembre 2005. Par suite, la requérante n'est pas fondée à demander le bénéficie de la doctrine dans les prévisions de laquelle elle n'entre pas.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que la requérante demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction nationale des vérifications de situations fiscales.

Délibéré après l'audience du 20 janvier 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- M. E..., premier conseiller,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 février 2021.

Le rapporteur,

F. E...Le président,

I. BROTONS

Le greffier,

I. BEDR

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

7

2

N° 20PA00933


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA00933
Date de la décision : 03/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : WATSON, FARLEY et WILLIAMS

Origine de la décision
Date de l'import : 12/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-02-03;20pa00933 ?
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