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22/12/2020 | FRANCE | N°20PA00822

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 22 décembre 2020, 20PA00822


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... D... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 6 novembre 2018 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1912279/5-2 du 30 janvier 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 4 mars 2020 et un mémoire enregistré le 15 septembre 2020, Mme D..., représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugem

ent n° 1912279/5-2 du 30 janvier 2020 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du pr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... D... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 6 novembre 2018 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1912279/5-2 du 30 janvier 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 4 mars 2020 et un mémoire enregistré le 15 septembre 2020, Mme D..., représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1912279/5-2 du 30 janvier 2020 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police en date du 6 novembre 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 400 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le préfet de police n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ;

- sa présence en France ne caractérise aucune menace pour l'ordre public ;

- la décision contestée méconnaît les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense enregistré le 11 septembre 2020 le préfet de police conclut au rejet de la requête

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par Mme D... n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- et les observations de Me A... pour Mme D....

Considérant ce qui suit :

1. Mme D..., ressortissante nigériane née en 1982, entrée en France le 20 juillet 2010 selon ses déclarations, a obtenu un titre de séjour valable entre le 5 novembre 2012 et le 4 novembre 2013, renouvelé pour la période comprise entre le 7 février 2014 et le 6 février 2015. A la suite de son incarcération au sein de la maison d'arrêt de Fleury-Mérogis, entre le 16 mai 2014 et le 18 avril 2016, elle a de nouveau sollicité son admission au séjour en septembre 2016. Par un arrêté du 6 novembre 2018, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour. Mme D... relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de Mme D....

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / [...] 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant [...] ".

4. Le préfet de police a refusé de délivrer un titre de séjour à Mme D... au motif, d'une part, que la nationalité française de son fils, né le 29 septembre 2010, résulterait d'une reconnaissance frauduleuse de paternité, d'autre part, que sa présence en France constituerait une menace pour l'ordre public. Si le préfet de police n'établit pas la réalité de la fraude dont il se prévaut, il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme D..., placée en détention à compter du 16 mai 2014, a été condamnée à quatre années d'emprisonnement, dont une année avec sursis, pour proxénétisme aggravé et traite d'êtres humains, par un jugement du Tribunal correctionnel de Lille en date du 15 décembre 2015. Compte tenu de la gravité de ces faits, commis en dernier lieu en mai 2014, le préfet de police a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation, retenir que la présence en France de Mme D... constituait une menace pour l'ordre public. Dans ces circonstances, et eu égard en particulier à la gravité des infractions commises par Mme D..., il ne résulte pas de l'instruction que le préfet de police aurait pris une décision différente s'il n'avait pas retenu la fraude parmi les motifs de son refus de délivrer à Mme D... un titre de séjour. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 doit être écarté.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / [...] 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée [...] ".

6. Mme D... se prévaut de la présence à ses côtés de son fils français, de son activité professionnelle en qualité d'agent de nettoyage entre décembre 2013 et mars 2014, puis pendant sa détention à la maison d'arrêt de Fleury-Mérogis, enfin de la circonstance qu'elle a suivi diverses formations, notamment en langue française et en hôtellerie. Toutefois, au regard du but d'ordre public poursuivi, et alors par ailleurs que Mme D... est célibataire et n'établit pas son intégration sur le territoire français, ces seules circonstances sont insuffisantes pour estimer qu'en prenant l'arrêté attaqué, qui n'a ni pour objet ni pour effet de la séparer de son enfant, le préfet de police aurait porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale. Dès lors, les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que l'arrêté contesté serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur la situation personnelle de Mme D....

7. En quatrième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.

8. Eu égard à la menace pour l'ordre public que représente la présence en France de Mme D..., et alors que la décision portant refus de titre de séjour n'implique pas, par elle-même, que l'intéressée quitte la France ni qu'elle soit séparée de son enfant, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée méconnaîtrait les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant. Par suite, le moyen doit être écarté.

9. Enfin, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. [...] [HP1]".

10. Eu égard à sa situation personnelle et familiale, telle qu'elle a été mentionnée aux points précédents, Mme D... n'établit pas que le préfet de police aurait méconnu, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen doit être écarté.

11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte ainsi que celles présentées en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er: La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... D... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 8 décembre 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme Hamon, président,

- M. Segretain, premier conseiller,

- M. C..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 22 décembre 2020.

Le rapporteur,

K. C...Le président,

P. HAMON

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

[HP1] le TAS n'a pas été demandé sur ce fondement mais le préfet l'a examiné d'office dans sa décision donc OK

N° 20PA00822 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA00822
Date de la décision : 22/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme HAMON
Rapporteur ?: M. Khalil AGGIOURI
Rapporteur public ?: Mme STOLTZ-VALETTE
Avocat(s) : MILLOT

Origine de la décision
Date de l'import : 16/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-12-22;20pa00822 ?
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