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10/12/2020 | FRANCE | N°20PA00669

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 10 décembre 2020, 20PA00669


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 8 mars 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de 30 jours, en fixant le pays de destination et d'enjoindre au préfet de police, dans le délai de 15 jours du jugement à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à titre principal, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice admini

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 8 mars 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de 30 jours, en fixant le pays de destination et d'enjoindre au préfet de police, dans le délai de 15 jours du jugement à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à titre principal, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de lui délivrer un titre de séjour et, à titre subsidiaire, sur le fondement de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour pendant la durée de ce réexamen.

Par un jugement n° 1912628 du 26 novembre 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 20 février 2020, M. B..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1912628 du 26 novembre 2019 du Tribunal administratif de Paris rejetant sa demande de première instance.

2°) d'annuler la décision de refus de séjour du 8 mars 2019 ;

3°) d'annuler la décision d'obligation de quitter le territoire français du 8 mars 2019 ;

4°) d'annuler la décision fixant le pays de renvoi du 8 mars 2019 ;

5°) d'enjoindre au préfet de police, dans le délai de 15 jours de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à titre principal, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, sur le fondement de l'article L. 911-2 du même code, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour pendant la durée de ce réexamen.

Il soutient que :

- le jugement du 26 novembre 2019 est insuffisamment motivé.

S'agissant de la décision de refus de titre de séjour :

- la décision est insuffisamment motivée ;

- la décision viole le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision viole le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision viole l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

- la décision est insuffisamment motivée ;

- la décision est illégale par la voie de l'exception d'illégalité du refus de lui délivrer un titre de séjour ;

- la décision viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :

- la décision est illégale par la voie de l'exception d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 septembre 2020, le préfet de police a conclu au rejet de la requête ;

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Par une décision du 22 janvier 2020, le président du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris a accordé l'aide juridictionnelle totale à M. B....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 ;

- les décrets n° 2020-1404 et n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant sénégalais, né le 1er juin 1983, est entré en France, sous couvert d'un visa de court séjour, le 31 mai 2014. Le 13 mars 2015, il a présenté une demande de protection internationale qui a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 23 septembre 2015, et dont la légalité a été confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), le 18 mars 2016. Le 4 septembre 2018, M. B... a sollicité son admission au séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 8 mars 2019, le préfet de police a rejeté sa demande de titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français en fixant le pays de renvoi. Par un jugement du 26 novembre 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté les conclusions présentées par M. B... à l'encontre de l'arrêté du 8 mars 2019. M. B... fait appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

3. M. B... soutient que les premiers juges n'ont pas fait apparaître dans les motifs de leur décision, les nombreux éléments de preuve qu'il a produit à l'appui de sa demande de première instance attestant sa présence continue en France, son implication au travail ainsi que certaines attaches sur le territoire français. Il résulte néanmoins des motifs mêmes du jugement attaqué que le Tribunal administratif de Paris a expressément répondu aux moyens soulevés par le requérant tirés de la méconnaissance des dispositions des 7° et 11° de l'article L. 313-11 ainsi que celles du L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle. En particulier, le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, a indiqué que " l'intéressé, célibataire et sans charge de famille en France, n'atteste pas être démuni d'attaches familiales à l'étranger où résident ses parents et le reste de sa fratrie ". Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de ce jugement doit ainsi être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

Sur les moyens communs aux trois décisions :

4. L'arrêté attaqué cite les textes applicables à la situation de l'intéressé et mentionne que si l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale, le défaut de celle-ci ne devrait pas entraîner des conséquences d'une extrême gravité et que M. B... qui se déclare célibataire et sans charge de famille en France n'est pas démuni d'attaches familiales à l'étranger où résident ses parents et le reste de sa fratrie. Il s'ensuit que la décision attaquée comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui la fondent et que le moyen tiré de son défaut de motivation ne peut qu'être écarté.

Sur les moyens propres à chaque décision :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

5. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...). La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État (...) ".

6. Il ressort des pièces du dossier que le préfet de police a suivi l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), le 1er juillet 2018, aux termes duquel l'état de santé de M. B... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. M. B... produit des certificats médicaux précisant qu'il est atteint d'une hépatite B nécessitant une surveillance hospitalière dont l'absence pourrait avoir de graves conséquences sur sa santé. Toutefois, ces certificats, datés des 12, 13 et 31 juillet 2017 ont été établis plus d'un an et demi avant la décision attaquée et ne sont pas de nature à démontrer qu'à la date du 8 mars 2019, l'état de santé de M. B... nécessitait des soins dont le défaut serait de nature à entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police aurait méconnu les dispositions susmentionnées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

7. Si le requérant se prévaut d'un séjour sur le territoire français de près de cinq années, il est célibataire et sans charge de famille. Il ne justifie pas exercer une activité professionnelle, est bénéficiaire de l'aide médicale d'État et est hébergé par une association d'aide aux réfugiés et aux immigrés. Par ailleurs, il ne produit aucun élément de nature à établir de l'intensité de ses liens avec la France alors qu'il a vécu jusqu'à l'âge de 31 ans au Sénégal et qu'hormis un frère, l'ensemble des membres de sa famille vit au Sénégal ou à l'étranger. Dans ces conditions, le requérant n'établit pas que le préfet de police aurait méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. Le préfet de police n'a pas porté atteinte au droit au respect à la vie privée et familiale que M. B... tient des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 7 du présent arrêt.

En ce qui concerne la décision d'obligation de quitter le territoire français :

9. En l'absence d'illégalité de la décision de refus de séjour, le moyen tiré de l'illégalité de la décision d'obligation de quitter le territoire français par la voie de l'exception d'illégalité du refus de séjour ne peut qu'être écarté.

10. Le préfet de police n'a pas porté atteinte au droit au respect à la vie privée et familiale que M. B... tient des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 7 du présent arrêt.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

11. En l'absence d'illégalité de la décision d'obligation de quitter le territoire français, le moyen tiré de l'illégalité de la décision fixant le pays de renvoi par la voie de l'exception d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 26 novembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- Mme A..., premier conseiller,

- M. Sibilli, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 décembre 2020.

Le rapporteur,

I. A...Le président,

S. L. FORMERY

La greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 20PA00669 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA00669
Date de la décision : 10/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: Mme Isabelle MARION
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : PARTOUCHE-KOHANA

Origine de la décision
Date de l'import : 22/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-12-10;20pa00669 ?
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