Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 21 janvier 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1911224/3-1 du 24 septembre 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 15 février 2020, M. B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1911224/3-1 du 24 septembre 2019 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention "vie privée et familiale" à compter de la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à son conseil en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :
- l'avis rendu par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'a pas été pris à l'issue d'une délibération collégiale ;
- la décision est entachée d'une erreur de droit, dès lors que le préfet s'est estimé en situation de compétence liée par rapport à l'avis rendu par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;
- elle méconnaît l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
- elle est entachée d'une exception d'illégalité en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne la décision fixant le délai de départ volontaire :
- elle est entachée d'illégalité en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
- elle est entachée d'illégalité en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire.
Par un mémoire enregistré le 28 juillet 2020, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 23 décembre 2019.
Un mémoire produit pour M. B... a été enregistré le 16 novembre 2020, postérieurement à la clôture de l'instruction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
- l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 et le décret n° 2020-1406 du même jour portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif, notamment son article 5.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus, au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- et les observations de Me A..., avocat de M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant congolais, né en janvier 1969, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 21 janvier 2019, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. B... fait appel du jugement du 24 septembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. (...) ". Aux termes de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".
3. M. B... soutient qu'il n'est pas démontré que la décision a été prise à la suite d'une délibération collégiale. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'avis du 15 mai 2018 du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui s'est prononcé sur la santé de M. B..., porte la mention " Après en avoir délibéré, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) émet l'avis suivant ". Cette mention du caractère collégial de l'avis fait foi jusqu'à preuve du contraire, qui n'est pas apportée par le requérant. Dès lors, le moyen tiré de l'absence de collégialité de la délibération du collège de médecins de l'OFII doit être écarté.
4. En deuxième lieu, il ne ressort ni des termes de la décision contestée ni d'aucune autre des pièces du dossier que le préfet de police se serait cru lié par l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration pour rejeter la demande de titre de séjour de M. B....
5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable au litige : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ".
6. Le préfet de police, en se fondant sur l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 15 mai 2018, a relevé que si l'état de santé de M. B... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il pouvait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Il ressort des pièces du dossier que M. B... souffre d'un diabète de type 2 et d'hypertension artérielle. Toutefois, ni le certificat médical établi le 22 mars 2017 qui indique seulement que M. B... présente " une pathologie chronique d'une exceptionnelle gravité qui nécessite des soins quotidiens, des examens et des consultations spécialisées périodiques " et qu'il " n'est pas certain que ces traitements puissent être administrés dans son pays d'origine " ni les ordonnances datées de 2016 à 2019 ni les articles de presse faisant état de considérations générales sur le système de santé et la qualité des soins en République du Congo n'apportent d'indication sur la disponibilité du traitement effectivement suivi par le requérant dans son pays d'origine, alors que le préfet établit que les références des médicaments composant le traitement de M. B... se trouvent sur la liste des médicaments essentiels du pays. Dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le refus de titre de séjour méconnaît les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.
7. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
8. M. B... soutient que la décision de refus de titre de séjour méconnaît son droit au respect de sa vie privée et familiale, dès lors qu'il entretient une relation amoureuse avec une ressortissante française depuis 2018 et qu'il a conclu un pacte civil de solidarité le 17 juin 2019. Toutefois, eu égard au caractère récent et postérieur à l'arrêté attaqué de la conclusion du pacte civil de solidarité et à l'absence d'éléments établissant l'ancienneté de la vie commune avec sa compagne, M. B..., qui est sans charge de famille et ne justifie pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où résident ses parents ainsi que ses frères et soeurs, ne justifie pas d'une vie privée et familiale en France à laquelle la décision litigieuse porterait une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Cette décision n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
9. En premier lieu, la décision portant refus de titre de séjour n'étant entachée d'aucune des illégalités alléguées, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision invoquée à l'appui des conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français doit, en conséquence, être écarté.
10. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; ".
11. Pour les motifs exposés au point 6, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
12. Pour les motifs exposés au point 8, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
Sur la décision fixant le délai de départ volontaire :
13. Ni la décision portant refus de titre de séjour ni l'obligation de quitter le territoire français n'étant entachées des illégalités alléguées, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de ces décisions invoquée à l'appui des conclusions dirigées contre la décision fixant le délai de départ volontaire doit, en conséquence, être écarté.
Sur la décision fixant le pays de destination :
14. Ni la décision portant refus de titre de séjour ni l'obligation de quitter le territoire français n'étant entachée des illégalités alléguées, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de ces décisions invoquée à l'appui des conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination doit, en conséquence, être écarté.
15. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre des frais liés au litige ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 19 novembre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président de chambre,
- M. C..., premier conseiller,
- M. Doré, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 décembre 2020.
Le président,
J. LAPOUZADE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 20PA00575 2