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10/12/2020 | FRANCE | N°20PA00142

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 10 décembre 2020, 20PA00142


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 17 septembre 2018 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1900153 du 11 décembre 2019, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 16 janvier 2020, Mm

e B..., représentée par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1900153 du 1...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 17 septembre 2018 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1900153 du 11 décembre 2019, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 16 janvier 2020, Mme B..., représentée par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1900153 du 11 décembre 2019 du tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale ", et à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande sans délai sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre l'article L. 761-1 du code de justice administrative à verser à son conseil.

Elle soutient que l'arrêté :

- est entaché d'une incompétence du signataire de l'acte ;

- est insuffisamment motivé ;

- méconnaît l'article 6-7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'elle ne peut avoir accès à un suivi médical adapté à son handicap en Algérie ;

- méconnaît l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors que la décision aurait pour conséquence de la séparer de sa famille dont elle nécessite l'assistance au quotidien ;

- méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête de Mme B... a été communiquée au préfet du Val-de-Marne, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Par une décision du 9 octobre 2020, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris a constaté la caducité de la demande d'aide juridictionnelle de Mme B....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

- l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 et le décret n° 2020-1406 du même jour portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif, notamment son article 5.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... B..., ressortissante algérienne, né en octobre 1997, entrée en France le 29 novembre 2014, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des stipulations de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par un arrêté du 17 septembre 2018, le préfet du Val-de-Marne a rejeté sa demande et a assorti ce rejet d'une obligation de quitter le territoire français et d'une décision fixant le pays de destination. Mme B... fait appel du jugement du 11 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Par arrêté n° 2017/794 du 13 mars 2017, publié au recueil des actes administratifs du même jour, le préfet du Val-de-Marne a donné à M. F... D..., directeur des migrations et de l'intégration, délégation à l'effet de signer notamment les décisions portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte ne peut qu'être écarté.

3. La décision en litige, prise au visa de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié et du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne que le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a été saisi pour avis de la demande de Mme B..., que son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'elle peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, qu'elle est célibataire, sans charge de famille et qu'elle ne justifie pas être isolée dans son pays d'origine. Elle comporte ainsi les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde et est ainsi suffisamment motivée.

4. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7° au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. ".

5. Ainsi qu'il a été dit au point 2, le préfet de police a relevé, en se fondant sur un avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, que si l'état de santé de Mme B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle peut cependant bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... souffre d'un retard psychomoteur avec des difficultés d'apprentissage associé à un syndrome dysmorphique complexe. Toutefois, ni le certificat du Docteur Landauer du 11 décembre 2018 qui se borne à décrire sa pathologie et à conclure qu'un geste chirurgical sera nécessaire et qu'elle sera prise en charge en collaboration avec les internistes, ni les attestations du Professeur Michel de l'hôpital Henri Mondor du 4 mars 2017 et du 18 décembre 2018, lesquelles, pour la première, décrit sa pathologie sans se prononcer sur l'impossibilité de la prendre en charge en Algérie et pour la seconde, se borne à relever que son état nécessite une prise en " charge multidisciplinaire spécialisée " " impossible à envisager dans son pays d'origine " ne sont de nature à contredire le motif opposé dans la décision. Dès lors, la requérante n'est fondée à soutenir ni que la décision méconnait les stipulations précitées ni qu'elle serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

6. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...) ".

7. Il ressort des pièces du dossier que Mme B..., née le 17 octobre 1997, est entrée en France le 29 novembre 2014 à l'âge de 17 ans avec ses parents, ses deux frères et sa soeur, qu'elle est célibataire et sans charge de famille et qu'à la date de la décision attaquée, ses parents se maintenaient en France en situation irrégulière. Dans ces conditions, quand bien même ses parents auraient été régularisés et que ses collatéraux seraient convoqués en préfecture pour régulariser leur situation administrative, toutes circonstances postérieures à la décision en litige et donc sans influence sur sa légalité, la décision contestée n'a pas porté au droit de l'intéressée à sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Elle n'a ainsi pas méconnu les stipulations précitées et n'est pas non plus entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

8. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ". Mme B... n'établissant pas qu'elle ne pourrait pas bénéficier en Algérie d'un traitement approprié à sa pathologie, elle n'est pas fondée à soutenir que la décision aurait méconnu les stipulations précitées.

9. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre des frais liés au litige ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 19 novembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. C..., premier conseiller,

- M Doré, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 décembre 2020.

Le président,

J. LAPOUZADE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 20PA00142 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20PA00142
Date de la décision : 10/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Jean-François GOBEILL
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : CHARHBILI ABDELLAH

Origine de la décision
Date de l'import : 09/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-12-10;20pa00142 ?
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