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10/12/2020 | FRANCE | N°19PA03606

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 10 décembre 2020, 19PA03606


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 27 septembre et 1er octobre 2019, M. C... a demandé au Tribunal administratif de Melun :

1°) d'annuler l'arrêté du 27 septembre 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office et l'a interdit de retour pour une durée d'un an ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de procéder sans d

lai à l'effacement de son inscription au fichier du système d'informations Schengen.

Par un jug...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 27 septembre et 1er octobre 2019, M. C... a demandé au Tribunal administratif de Melun :

1°) d'annuler l'arrêté du 27 septembre 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office et l'a interdit de retour pour une durée d'un an ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de procéder sans délai à l'effacement de son inscription au fichier du système d'informations Schengen.

Par un jugement n° 1908715 en date du 2 octobre 2019, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a annulé les décisions du 27 septembre 2019 l'obligeant à quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination et lui interdisant de retourner sur le territoire français pendant un an et a enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de prendre toute mesure propre à mettre fin au signalement de M. C... dans le système d'information Schengen ;

Procédure devant la Cour :

Par une requête sommaire et un mémoire ampliatif, enregistrés les 15 novembre et 26 novembre 2019, le préfet de la Seine-Saint-Denis demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1908715 rendu par le tribunal administratif de Melun le 2 octobre 2019;

2°) de rejeter, dans toutes ses prétentions, la demande de première instance présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Melun.

Il soutient que :

- le tribunal administratif de Melun a commis une erreur d'appréciation des faits en jugeant que M. C... avait présenté une demande d'asile sur le fondement des articles L. 743-l, L. 743-2, R. 741-1 et R. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les moyens soulevés en première instance tirés de l'insuffisante motivation de l'arrêté du 27 septembre 2019 et de la violation par ce même arrêté de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des articles L. 741-1, L.743-2 et R. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.

La requête a été communiquée à M. C... qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 ;

- les décrets n° 2020-1404 et n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., né le 6 novembre 1980, est arrivé, dépourvu de passeport et de tout document de voyage, à l'aéroport de Roissy Paris Charles de Gaulle le 10 septembre 2019 en provenance d'Erevan (Arménie). Il a été interpelé par les services de la police aux frontières et a fait l'objet de décisions de refus d'entrée pour défaut de passeport et de placement en zone d'attente. Il a alors présenté une demande d'entrée en France au titre de l'asile. Il a été entendu par un agent de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides. Après avoir recueilli l'avis de cet agent, le ministre de l'intérieur a rejeté, le 12 septembre 2019, la demande d'entrée en France au titre de l'asile présentée par M. C.... Le 16 septembre 2019, M. C... a introduit une requête enregistrée sous le n° 1920040 au greffe du tribunal administratif de Paris contre cette décision de refus d'entrée au titre de l'asile. Une ordonnance de rejet du tribunal administratif de Paris pour tardiveté de cette requête a été prise le 23 septembre 2019. M. C... a refusé les 21, 24 et 26 septembre 2019, soit à trois reprises, d'embarquer sur un vol à destination d'Erevan. Le 26 septembre 2019, à 13 h 55, il a été placé en garde à vue pour le délit de soustraction à l'exécution d'une mesure de refus d'entrée en France. Le 27 septembre 2019, M. C... a fait l'objet d'un arrêté de placement au centre de rétention administrative du Mesnil-Amelot et d'un arrêté d'obligation de quitter le territoire français sans délai, à destination de tout pays où il est légalement admissible et d'interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an, ainsi que d'un signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen. Le préfet de la Seine-Saint-Denis fait appel du jugement du 2 octobre 2019 par lequel le Tribunal administratif de Melun a annulé cet arrêté et lui a enjoint de prendre toute mesure propre à mettre fin au signalement de M. C... dans le système d'information Schengen.

Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif :

2. Le Tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté du 27 septembre 2019 au motif que le préfet de la Seine-Saint-Denis ne pouvait pas prendre une obligation de quitter le territoire français à l'encontre de M. C... dans la mesure où ce dernier devait être regardé comme ayant présenté une nouvelle demande d'asile sur le territoire français. Il ressort cependant des pièces du dossier que M. C... a demandé l'asile le 12 septembre 2019, alors qu'il se trouvait dans la zone d'attente de l'aéroport de Roissy Paris Charles de Gaulle. Si M. C... a déclaré au cours de sa garde à vue dans les locaux de la direction centrale de la police aux frontières, être venu en France pour demander l'asile politique, cette seule déclaration ne saurait s'analyser comme une nouvelle demande d'asile présentée alors que l'intéressé se trouvait sur le territoire français. C'est donc à tort que le tribunal administratif de Melun s'est fondé sur ce motif pour annuler l'arrêté contesté.

3. Il appartient toutefois à la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C... devant le tribunal administratif de Melun.

Sur la légalité des décisions contestées :

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

4. En premier lieu, la décision comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Le moyen tiré de son insuffisante motivation ne peut donc qu'être écarté.

5. En deuxième lieu, en l'absence de formulation d'une nouvelle demande d'asile pendant sa garde à vue sur le territoire français, M. C... ne peut utilement soutenir que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait violé les articles L. 741-1, L. 743-2 et R. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatifs à l'enregistrement des demandes d'asile formées par les étrangers présents sur le territoire français.

6. Enfin, le moyen tiré de la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant en tant qu'il est invoqué à l'encontre d'une décision d'obligation de quitter le territoire français.

En ce qui concerne le refus d'un délai de départ volontaire :

7. En premier lieu, le visa de l'article L. 511-1, II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les motifs tirés de ce que M. C... n'a pas pu justifier de document de voyage en cours de validité et qu'il n'a pas déclaré de lieu de résidence effective ou permanente en France constituent une motivation en droit et en fait suffisante de la décision de refus de lui accorder un délai de départ volontaire.

8. En deuxième lieu, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas entaché, pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle du requérant.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

9. M. C... n'apporte aucun élément permettant d'attester qu'il serait effectivement en danger en cas de retour dans son pays d'origine. Le moyen tiré de la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français pendant la durée d'un an :

10. Le visa de l'article L. 5ll-1, III du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les motifs tirés de que M. C..., en dépit d'une décision de refus d'entrée en France au titre de l'asile s'est opposé à son embarquement à destination de l'Arménie à trois reprises et ne justifie pas de liens personnels, professionnels et familiaux en France, alors que son épouse et ses deux enfants résident encore en Arménie constituent une motivation en droit et en fait suffisante de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français.

11. Au vu du comportement de M. C... qui s'est opposé à trois reprises au refus d'entrée sur le territoire français et de la circonstance que ce dernier n'a aucuns liens personnels, professionnels et familiaux avec la France, il n'apparait pas que le préfet de la Seine-Saint-Denis ait entaché sa décision d'une erreur d'appréciation.

12. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Seine-Saint-Denis est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté du 27 septembre 2019 et a enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de prendre toute mesure propre à mettre fin au signalement de M. C... dans le système d'information Schengen.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n°1908715 en date du 2 octobre 2019 du Tribunal administratif de Melun est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. C... devant le Tribunal administratif de Melun est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A... C....

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 12 novembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- M. Platillero, président-assesseur,

- Mme B..., premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 décembre 2020.

Le rapporteur,

I. B...Le président,

S.-L. FORMERY

Le greffier,

F. DUBUY-THIAM

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision

N° 19PA03606 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA03606
Date de la décision : 10/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: Mme Isabelle MARION
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT

Origine de la décision
Date de l'import : 22/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-12-10;19pa03606 ?
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