Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... E... a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013, dans la mesure où elles procèdent des bénéfices non commerciaux issus de l'activité exercée en Russie.
Par un jugement n° 1703728/1-1 du 20 novembre 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 28 novembre 2019, M. E..., représenté par
Me A... C..., demande à la Cour :
1°) d'infirmer ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 20 novembre 2019 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions résultant des bénéfices non commerciaux rattachés à la base fixe située en Russie ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'article 14 de la convention signée à Paris le 26 novembre 1996 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune attribue à la Russie le droit d'imposer les sommes en litige ;
- l'article 23 de la convention ne s'applique qu'en cas de double imposition ;
- il dispose d'une base fixe en Russie ;
- les sommes de 47 183 euros au titre de l'année 2012 et 50 322 euros au titre de l'année 2013 doivent être extournées de sa base taxable.
Par un mémoire en défense enregistré le 28 avril 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- la demande de M. E... est recevable dans la limite, en base, des rehaussements opérés suite au contrôle ;
- la demande est irrecevable faute de moyens en tant qu'elle concerne la rectification tenant à une omission de recettes ;
- les moyens soulevés par M. E... ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 2 juin 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au
16 juin 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention signée à Paris le 26 novembre 1996 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. D...,
- et les conclusions de Mme Jimenez, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. E... relève appel du jugement du 20 novembre 2019 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013.
2. Exerçant une activité en France et en Russie, dont les bénéfices non commerciaux ont été déclarés au titre des années 2012 et 2013, M. E... a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de ces deux années à l'issue de laquelle ces bénéfices ont été rehaussés. Sans contester avoir son domicile fiscal en France et être passible dès lors de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de ses revenus en application de l'article 4 A du code général des impôts, et sans remettre en cause le bien-fondé des rehaussements qui lui ont été notifiés, il demande, par ce qui doit être regardé comme une demande de compensation, la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013 au motif qu'il serait en droit de bénéficier de l'exonération des bénéfices non commerciaux découlant de l'activité exercée en Russie au titre de ces années, en se prévalant des stipulations du 1 de l'article 14 de la convention fiscale conclue entre la France et la Russie le
26 novembre 1996.
Sur le droit interne :
3. Aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : " Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus. (...) ". Aux termes de l'article 4 B du même code : " 1. Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : / a. les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; / b. celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ; / c. celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques (...) ". Aux termes de l'article 12 du même code : " L'impôt est dû chaque année à raison des bénéfices ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même année ". Enfin, aux termes de l'article 92 du même code : " 1. Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus ".
4. M. E... ne conteste pas avoir eu son domicile fiscal en France au cours des années 2012 et 2013. En outre, il est constant que les sommes en litige, perçues par lui, avaient le caractère de bénéfices non commerciaux. Par suite, ces sommes étaient imposables en France à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices non commerciaux conformément aux dispositions précitées de l'article 92 du code général des impôts.
Sur le droit conventionnel :
5. Aux termes des stipulations du 1. de l'article 14 de la convention signée à Paris le
26 novembre 1996 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune : " Les revenus qu'un résident d'un Etat contractant tire d'une profession libérale ou d'autres activités de caractère indépendant ne sont imposables que dans cet Etat, à moins que ce résident ne dispose de façon habituelle dans l'autre Etat contractant d'une base fixe pour l'exercice de ses activités. S'il dispose d'une telle base fixe, les revenus sont imposables dans l'autre Etat contractant mais uniquement dans la mesure où ils sont imputables à cette base fixe.". Aux termes de l'article 23 de la même convention : " 1. En ce qui concerne la France, les doubles impositions sont évitées de la manière suivante : a) Les revenus qui proviennent de Russie, et qui ne sont imposables que dans cet Etat conformément aux dispositions de la présente Convention, sont pris en compte pour le calcul de l'impôt français lorsque leur bénéficiaire est un résident de France et qu'ils ne sont pas exemptés de l'impôt sur les sociétés en application de la législation interne française. Dans ce cas, l'impôt russe n'est pas déductible de ces revenus, mais le bénéficiaire a droit à un crédit d'impôt imputable sur l'impôt français. Ce crédit d'impôt est égal : i) pour tous les revenus non mentionnés au ii, au montant de l'impôt correspondant à ces revenus ; /(...)/ c) il est entendu que l'expression "montant de l'impôt français correspondant à ces revenus" employée au a désigne : (...) ii) lorsque cet impôt dû à raison de ces revenus est calculé par application d'un barème progressif, le produit du montant des revenus nets considérés par le taux résultant du rapport entre l'impôt effectivement dû à raison du revenu net global imposable selon la législation française et le montant de ce revenu net global". Il résulte de ces stipulations que, si la convention réserve à la Russie le droit d'imposer les revenus qu'un résident français tire d'une profession libérale ou d'autres activités de caractère indépendant dans la mesure où ces revenus sont imputables à une base fixe située en Russie, sa capacité contributive est déterminée en France sur la base de la totalité des revenus qu'il perçoit, quelle que soit leur origine, et que la double imposition est éliminée par l'attribution d'un crédit d'impôt imputable sur le montant de l'impôt français et égal au montant de l'impôt français correspondant aux revenus imposables en Russie. Il suit de là que M. E... ne saurait en tout état de cause demander que ses revenus d'origine russe ne soient pas pris en compte pour le calcul de son imposition en France, et est tout au plus fondé à demander bénéfice d'un crédit d'impôt dans les conditions fixées par l'article 23 de la convention.
6. Si le requérant indique avoir procédé à la ventilation de son chiffre d'affaires et de ses charges entre la France, où il a sa résidence fiscale, et la Russie, où il dispose d'une base fixe constituant une source de revenus, il ne produit pas, alors qu'il est seul en mesure de le faire et qu'il a la charge de la preuve du bien-fondé de la demande de compensation dont il se prévaut, les pièces justificatives permettant de justifier de la ventilation des bases sur lesquelles il a été taxé, entre celles qui se rattachent à l'activité exercée en France et celles qui sont rattachables à la base fixe dont il dispose en Russie. La production de contrats de prestations de services relatifs à l'activité exercée en Russie ainsi que de trois procès-verbaux de prestations de services effectuées dans ce pays, d'ailleurs afférents à la seule année 2012 et qui ne permettent pas de constater l'encaissement effectif des sommes concernées, ne saurait à elle seule permettre de justifier de la ventilation susmentionnée. Au surplus, les calculs effectués par l'intéressé ne prennent en compte ni l'intégralité des recettes réalisées en France, ni les rehaussements notifiés en matière de frais de transport. Enfin, M. E... ne saurait en tout état de cause utilement invoquer, eu égard à sa date, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, la circonstance que l'interlocutrice départementale aurait accepté d'exclure de la base de la taxe sur la valeur ajoutée une somme représentative des prestations se rattachant à cette base fixe.
7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité des conclusions de la requête, que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que le requérant demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.
Délibéré après l'audience du 18 novembre 2020, à laquelle siégeaient :
- Mme Brotons, président,
- M. Soyez, président-assesseur,
- M. D..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 décembre 2020.
Le rapporteur,
F. D...Le président,
I. BROTONS
Le greffier,
I. BEDR
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19PA03815