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19/11/2020 | FRANCE | N°19PA03898

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 19 novembre 2020, 19PA03898


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 20 mai 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui octroyer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de 30 jours et a fixé le pays à destination duquel elle sera éloignée.

Par un jugement n° 1913108/1-1 du 16 octobre 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 2 décembre

2019, Mme D..., représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1913108...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 20 mai 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui octroyer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de 30 jours et a fixé le pays à destination duquel elle sera éloignée.

Par un jugement n° 1913108/1-1 du 16 octobre 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 2 décembre 2019, Mme D..., représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1913108/1-1 du 16 octobre 2019 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler les décisions du 20 mai 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui octroyer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de 30 jours et a fixé le pays à destination duquel elle sera éloignée ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter du jugement à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou à défaut de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail dans l'attente de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient :

S'agissant de la décision de refus de séjour :

- elle méconnait les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnait son droit à sa vie privée et familiale ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de séjour sur laquelle elle se fonde ;

- elle méconnait les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de séjour sur laquelle elle se fonde ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention précitée ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 août 2020, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 7 novembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D..., ressortissante de la République du Congo, née le 27 janvier 1958, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour. Par un arrêté du 20 mai 2019, le préfet de police lui a refusé l'octroi d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle sera éloignée. Mme D... relève appel du jugement du 16 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

En ce qui concerne la décision de refus de séjour :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) ".

3. Pour refuser de lui délivrer un titre de séjour, le préfet de police, s'est fondé sur l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et a relevé que si l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge dont le défaut pourrait entrainer pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle peut cependant bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Les pièces communiquées par Mme D..., à savoir des certificats médicaux rédigés dans des termes généraux, un certificat du docteur Bouenizabila, postérieur à la décision attaquée et qui décrit l'état des médicaments disponibles en 2016 soit 3 ans auparavant, ainsi que la liste nationale des médicaments essentiels de la République du Congo, qui ne saurait établir que les médicaments qui lui sont prescrits en France ne sont pas disponibles dans son pays d'origine, ne permettent pas de remettre en cause le motif opposé par le préfet, ce dernier ayant établi que plusieurs médicaments, dont la Simvastatine et l'Amlodipine, sont référencés au CHU de Brazaville, dont il n'est pas établi qu'il serait fermé au moment de la décision contestée. Enfin, les coupures de presse très générales sur les difficultés rencontrées par les retraités de la Fonction publique de la République du Congo, versées au dossier par la requérante, ne sont pas de nature à établir qu'elle ne pourrait accéder financièrement à ces soins. Mme D... n'est ainsi pas fondée à soutenir que le préfet de police, en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 précité.

4. Aux termes de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance - 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sécurité publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

5. Si Mme D... soutient que résident en France ses enfants, trois étant de nationalité française et que l'une d'entre eux, qu'elle aide au quotidien, est titulaire d'une carte de séjour temporaire pour soins, il ressort cependant des pièces du dossier qu'elle est entrée en France en 2017 à l'âge de 59 ans et qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où réside son époux selon les mentions non contestées de la décision attaquée. Dans ces conditions, elle n'est pas fondée à soutenir que le préfet de police aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale, tel que garanti par les stipulations précitées, une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a pris son arrêté.

6. Il ne résulte pas de ce qui précède que la décision serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

7. Pour les motifs exposés ci-dessus, la décision de refus de séjour n'étant entachée d'aucune des illégalités alléguées, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision, invoqué au soutien des conclusions en annulation dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, doit être écarté.

8. Aux termes de l'article L. 511-4 du même code : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ".

9. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 3, la décision n'a pas méconnu les dispositions précitées.

10. Pour les mêmes motifs que ceux rappelés au point 5, la décision n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la même convention.

11. Il ne ressort pas des termes de la décision qu'elle serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

12. Pour les motifs exposés ci-dessus, la décision de refus de séjour n'étant entachée d'aucune des illégalités alléguées, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision, invoqué au soutien des conclusions en annulation dirigées contre la décision fixant le pays de destination, doit être écarté.

13. Aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

14. Si Mme D... soutient que son retour en République du Congo sera pour elle, compte tenu de l'impossibilité de s'y faire soigner, générateur de risques pour sa vie, il ressort de ce qui a été dit au point 4 ci-dessus que ce risque n'est pas établi. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

15. Il ne résulte pas de ce qui précède que la décision serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

16. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre des frais liés au litige ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 22 octobre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président,

- M. Diémert, président-assesseur,

- M. B..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 novembre 2020.

Le rapporteur,

J.-F. B...Le président,

J. LAPOUZADE

Le greffier,

A. LOUNIS La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19PA03898


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19PA03898
Date de la décision : 19/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Jean-François GOBEILL
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : MILEO

Origine de la décision
Date de l'import : 05/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-11-19;19pa03898 ?
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