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19/11/2020 | FRANCE | N°19PA03252

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 19 novembre 2020, 19PA03252


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 11 mars 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant son pays de destination.

Par un jugement n° 1912875/5-3 du 18 septembre 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires enregi

strés les 17 octobre 2019, 31 octobre 2019 et 8 novembre 2019, Mme A..., représentée par Me C.....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 11 mars 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant son pays de destination.

Par un jugement n° 1912875/5-3 du 18 septembre 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires enregistrés les 17 octobre 2019, 31 octobre 2019 et 8 novembre 2019, Mme A..., représentée par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1912875/5-3 du 18 septembre 2019 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 11 mars 2019 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer le titre sollicité ou à défaut de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et une carte temporaire de séjour dans un délai de quinze jours sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à verser à son conseil en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Elle soutient que :

- le traitement médical approprié pour son fils n'est pas disponible en Algérie ;

- elle justifie d'une insertion professionnelle particulière sur le territoire français ;

- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 juillet 2020, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 octobre 2019 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- et les observations de Me C..., avocat de Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante algérienne, est entrée en France en septembre 2014, avec son fils, né le 12 août 2003. Elle a sollicité son admission exceptionnelle au séjour en tant que parent d'un étranger mineur malade en se prévalant de l'état de santé de son fils. Par un arrêté du 11 mars 2019, le préfet de police a rejeté cette demande et l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours en fixant le pays de destination. Mme A... fait appel du jugement du 18 septembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux différents titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers en général et aux conditions de leur délivrance s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 111-2 du même code, " sous réserve des conventions internationales ". Or, l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régit d'une manière complète et exclusive les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, ainsi que les règles concernant la nature et la durée de la validité des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés. Toutefois, si les dispositions de l'article L. 311-12 ne sont pas applicables aux ressortissants algériens dont la situation est entièrement régie par les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, cette circonstance n'interdit pas au préfet, dans le cadre de son pouvoir discrétionnaire d'appréciation, d'examiner comme il l'a fait, si un ressortissant algérien peut bénéficier d'une autorisation provisoire de séjour pour accompagner un enfant malade.

3. Il ressort des pièces du dossier que l'enfant de Mme A... est suivi en France pour une maladie de Crohn depuis avril 2014. Pour refuser la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour à Mme A..., le préfet de police s'est notamment fondé sur l'avis du 9 septembre 2018 du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui précisait que si l'état de santé son fils nécessite une prise en charge dont le défaut peut entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut bénéficier effectivement, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé en Algérie, d'un traitement approprié dans son pays d'origine. A cet égard, le préfet de police a produit en première instance des documents attestant de la disponibilité en Algérie des médicaments Humira et Imurel et du supplément nutritionnel Modulen, prescrits à l'intéressé à la date de la décision attaquée, ainsi que des listes de gastro-entérologues et de pédiatres exerçant à Alger. Mme A... produit pour la première fois en appel, un certificat médical du 30 septembre 2019 établi par un pédiatre du centre médical hospitalier de Montreuil faisant état de l'indisponibilité d'un traitement approprié dans son pays d'origine ainsi qu'un certificat médical du 8 octobre 2019, établi par un docteur du service de gastroentérologie et nutrition pédiatriques de l'hôpital Robert Debré indiquant qu'il doute que la prise en charge médicale appropriée soit disponible dans son pays d'origine. Ces certificats sont toutefois rédigés en des termes généraux et ne sont ainsi pas suffisamment circonstanciés pour remettre en cause l'avis de l'Office français de l'immigration et de l'intégration quant à la disponibilité d'un traitement approprié en Algérie. Enfin, si la requérante produit un nouveau certificat médical daté du 30 septembre 2019 mentionnant " l'utilisation d'autres biothérapies dont l'accessibilité est complexe (ustekinumab ou vedolizumab par exemple) ", cette circonstance est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée dès lors qu'elle se rapporte à des faits survenus postérieurement. Au demeurant, si Mme A... justifie que ces deux médicaments ne sont pas disponibles en Algérie, il ne ressort d'aucune pièce du dossier qu'ils auraient été effectivement prescrits à son fils ou que d'autres molécules ne pourrait pas y être substitués. Dans ces conditions, le préfet de police a pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, refuser de régulariser la situation de Mme A... dans le cadre de son pouvoir discrétionnaire.

4. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

5. Mme A... fait valoir qu'elle travaille depuis plusieurs mois et produit à ce titre un bulletin de salaire. Toutefois, l'intéressée ne justifie pas d'une insertion professionnelle particulière par ces seuls éléments. En outre, il ressort des pièces du dossier qu'elle n'est pas dépourvue de toutes attaches familiales dans son pays d'origine où résident son époux, ses quatre autres enfants et où elle a au moins vécu jusqu'à l'âge de quarante-huit ans. Enfin, Mme A... ne fait état d'aucune circonstance faisant obstacle à ce que son fils puisse poursuivre sa scolarité en Algérie. Dans ces conditions, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté contesté a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations précitées une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris.

6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police

Délibéré après l'audience du 22 octobre2020, à laquelle siégeaient :

- M. D..., président de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- M. Gobeill, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 19 novembre 2020.

Le président-assesseur,

S. DIÉMERTLe président,

J. D...La greffière,

A. LOUNIS La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 19PA03252 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19PA03252
Date de la décision : 19/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. François DORE
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : MENAGE

Origine de la décision
Date de l'import : 05/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-11-19;19pa03252 ?
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