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13/11/2020 | FRANCE | N°19PA02996

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 13 novembre 2020, 19PA02996


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... E... a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner la ville de Paris à lui verser une somme de 35 000 euros en réparation du préjudice moral résultant du harcèlement moral qu'elle estime avoir subi.

Par un jugement n° 1715678/2-3 du 18 juillet 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 16 septembre 2019, Mme E..., représentée par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler

le jugement n° 1715678/2-3 du 18 juillet 2019 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... E... a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner la ville de Paris à lui verser une somme de 35 000 euros en réparation du préjudice moral résultant du harcèlement moral qu'elle estime avoir subi.

Par un jugement n° 1715678/2-3 du 18 juillet 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 16 septembre 2019, Mme E..., représentée par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1715678/2-3 du 18 juillet 2019 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

2°) de condamner la ville de Paris à lui verser une somme de 35 000 euros en réparation du préjudice moral résultant du harcèlement moral qu'elle estime avoir subi ;

3°) de mettre à la charge de la ville de Paris le versement de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle est victime de harcèlement moral et apporte des attestations médicales permettant d'en faire présumer l'existence ;

- la mutation d'office dont elle a fait l'objet n'est pas justifiée par l'intérêt du service et traduit l'existence d'un harcèlement moral à son encontre ;

- ces agissements ont participé à la dégradation de ses conditions de travail et ont entraîné son état dépressif.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 mars 2020, la ville de Paris, représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme E... une somme de 2 400 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable dès lors qu'elle ne contient l'exposé d'aucun moyen d'appel en méconnaissance de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ;

- les moyens soulevés par Mme E... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 94-415 du 24 mai 1994 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mach, premier conseiller,

- les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public,

- et les observations de Me Bandry, avocat de la ville de Paris.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E..., adjoint d'animation et d'action sportive de première classe, affectée à compter du 1er septembre 2014 à l'école élémentaire Claude Bernard, située dans le 19ème arrondissement à Paris, a été mutée dans l'intérêt du service à l'école maternelle Mont-Cenis, située dans le 18ème arrondissement à Paris à compter du 1er septembre 2017. Mme E... relève appel du jugement du 18 juillet 2019 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la ville de Paris à lui verser une indemnité en réparation du préjudice moral subi résultant du harcèlement moral dont elle estime avoir été victime.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligation des fonctionnaires : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. (...). ".

3. Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. Pour être qualifiés de harcèlement moral, les agissements en cause doivent excéder les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique. Dès lors qu'elle n'excède pas ces limites, une simple diminution des attributions justifiée par l'intérêt du service, en raison d'une manière de servir inadéquate ou de difficultés relationnelles, n'est pas constitutive de harcèlement moral.

4. D'une part, Mme E... soutient être victime d'agissements visant à la déstabiliser et ayant pour effet une dégradation de ses conditions de travail et une altération de sa santé mentale. En se bornant à faire valoir à cet égard que sa hiérarchie a multiplié les mesures vexatoires pour la contraindre à une mutation qu'elle ne souhaitait pas et à évoquer une probable discrimination raciale, Mme E... n'apporte aucun élément de fait, ni aucune précision sur la nature des agissements qui seraient imputables à sa hiérarchie. Si Mme E... produit des arrêts de travail pour la période de janvier à mai 2017 à raison d'un état dépressif pour harcèlement ainsi que deux attestations médicales d'un psychiatre et d'un sophrologue indiquant qu'elle est prise en charge pour des difficultés relationnelles professionnelles et qu'elle se dit victime de discrimination, de complot et de harcèlement par sa hiérarchie, ces documents, qui ne précisent pas davantage la nature des agissements et relatent les propos tenus par l'intéressée, ne sont pas à eux seuls susceptibles de faire présumer l'existence d'un harcèlement moral.

5. D'autre part, Mme E... invoque l'existence de griefs infondés à son encontre en vue d'une mutation injustifiée et caractérisant l'existence d'un harcèlement moral. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport circonstancié établi par le chef de la circonscription des affaires scolaires et de la petite enfance du 19ème arrondissement du 28 avril 2017, que Mme E... a adopté une attitude trop directive avec l'ensemble des équipes d'animation et de service, a rencontré des difficultés relationnelles avec certains enseignants et le directeur de l'école et a remis fréquemment en cause les conseils et directives du coordinateur territorial de l'action éducative du secteur, ce qui a entraîné une perte de confiance de sa hiérarchie et du directeur de l'école et a compromis le fonctionnement du service. Si l'intéressée fait valoir qu'elle a relevé et dénoncé des dysfonctionnements en matière d'hygiène et de sécurité des locaux et d'organisation des services en charge du ménage, il n'est pas contesté qu'en sollicitant notamment le ménage quotidien de certains locaux du centre de loisirs, elle a donné des ordres contraires au règlement prévoyant le lavage hebdomadaire des sols. Il résulte de l'instruction que, dans ces circonstances, la maire de Paris a prononcé la mutation d'office de Mme E... à l'école maternelle Mont-Cenis, située dans le 18ème arrondissement à Paris à compter du 1er septembre 2017 pour exercer les fonctions de responsable du point d'accueil. Cette mesure, justifiée par l'intérêt du service en raison de difficultés notamment relationnelles et qui n'a au demeurant pas modifié les attributions de l'intéressée, n'a pas excédé les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique et n'est pas constitutive d'un harcèlement moral. Par suite, Mme E... n'est pas fondée à soutenir que la ville de Paris a méconnu les dispositions de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 et a commis une faute de nature à engager sa responsabilité.

6. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la ville de Paris, que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la ville de Paris, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que Mme E... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de Mme E... le versement de la somme que la ville de Paris demande sur le fondement des mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la ville de Paris au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... E... et à la ville de Paris.

Délibéré après l'audience du 30 octobre 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme A..., président de chambre,

- M. Mantz, premier conseiller,

- Mme Mach, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 novembre 2020.

Le rapporteur,

A-S MACHLe président,

M. A...Le greffier,

S. GASPARLa République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 19PA02996


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA02996
Date de la décision : 13/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-07-01-01 Fonctionnaires et agents publics. Statuts, droits, obligations et garanties. Statut général des fonctionnaires de l'État et des collectivités locales. Droits et obligations des fonctionnaires (loi du 13 juillet 1983).


Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: Mme Anne-Sophie MACH
Rapporteur public ?: M. BARONNET
Avocat(s) : SCP CLAISSE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 24/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-11-13;19pa02996 ?
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