Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... B... a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'annuler la décision implicite du ministre des armées du 28 janvier 2019 rejetant sa demande du
27 novembre 2018 d'intégration au sein de ce même ministère au titre d'un contrat à durée indéterminée de droit public, d'enjoindre à la ministre des armées de tirer toutes les conséquences de l'annulation sollicitée et de procéder à son intégration au sein d'une unité du ministère des armées en Nouvelle-Calédonie dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens de l'instance.
Par un jugement n° 1900159 du 31 octobre 2019, le Tribunal administratif de
Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 27 décembre 2019 et 15 octobre 2020,
Mme B..., représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie du
31 octobre 2019 ;
2°) d'annuler la décision implicite du ministre des armées du 28 janvier 2019 rejetant sa demande présentée le 27 novembre 2018 d'intégration au sein du ministère des armées au titre d'un contrat à durée indéterminée de droit public ;
3°) d'enjoindre à l'administration de tirer toutes conséquences de cette annulation et de procéder dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt à son intégration dans le cadre d'un contrat de droit public à durée indéterminée, au sein d'une unité située en Nouvelle Calédonie ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal a, à tort jugé, que le litige relevait de la compétence du juge judiciaire alors qu'en application de la jurisprudence du Conseil d'Etat, les agents qui travaillent dans le service d'un maitre tailleur de l'armée sont des agents de l'Etat qui participent à un service public administratif et qu'ainsi, les agents contractuels de ce service sont des agents de droit public ;
- ne pas reconnaitre ce statut à tous les agents concernés porterait une atteinte injustifiée au principe d'égalité entre agents participant à un service public ;
- le tribunal a commis une autre erreur de droit en se fondant sur le droit du travail calédonien alors que la gestion des établissements de l'IGESA en Nouvelle-Calédonie relève du droit national ;
- sa demande de première instance était recevable dès lors qu'avant sa demande du
27 novembre 2018, elle n'avait présenté à l'administration aucune autre demande qui aurait fait l'objet d'un rejet et ainsi sa demande n'était pas tardive.
Par un mémoire en défense enregistré le 22 juillet 2020, le ministre des armées demande à la Cour de rejeter la requête.
Il soutient que :
- le litige relève de la compétence du juge administratif dès lors que le code du travail de Nouvelle-Calédonie, dont l'application relève du juge judiciaire, s'applique à Mme B..., et qu'en application d'une jurisprudence constante du Tribunal des Conflits et du Conseil d'Etat les agents contractuels de l'Etat exerçant en Nouvelle-Calédonie ne relèvent pas d'un statut de droit public ;
- la demande de première instance était en tout état de cause tardive car la décision implicite contestée faisait suite à une première demande en date du 25 avril 2017 rejetée par décision du 8 juin 2017 notifiée le 21 juin suivant et la formation d'une nouvelle demande, identique, n'a pu faire naitre un nouveau délai de recours.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi organique n° 99-209 et la loi n° 99-210 du 19 mars 1999, relatives à la
Nouvelle-Calédonie ;
- le code du travail de la Nouvelle-Calédonie
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E...,
- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,
- et les observations de Me A..., représentant Mme B....
Une note en délibéré, enregistrée le 5 novembre 2020, a été présentée pour Mme B....
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., salariée en Nouvelle-Calédonie du maître ouvrier Gérard qui assurait l'exécution des commandes de l'Etat jusqu'au 31 mai 2017, a sollicité auprès du ministère des armées la requalification de son contrat de travail de droit privé en contrat de droit public, mais sa demande a été rejetée par une décision du 8 juin 2017. Par un courrier du 27 novembre 2018 adressé au service du commissariat des armées du ministère des armées, Mme B... a saisi l'administration d'une nouvelle demande de requalification de son contrat de travail en contrat à durée indéterminée de droit public au sein du ministère des armées dans une unité de Nouvelle-Calédonie située à Nouméa qui a été rejetée implicitement le 28 janvier 2019. Mme B... a alors saisi le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'une demande tendant à titre principal à l'annulation de la décision implicite de rejet du 28 janvier 2019 née du silence gardé par l'administration sur sa demande formée le 27 novembre 2018 et à la requalification de son contrat de travail en contrat de droit public. Le tribunal a toutefois rejeté cette demande comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaitre, par un jugement du 31 octobre 2019 dont elle interjette appel.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. L'article Lp. 111-1 du code du travail de Nouvelle-Calédonie prévoit l'application de ce code, dont le contrôle relève du juge judiciaire, à tous les " salariés " de Nouvelle-Calédonie et aux personnes qui les emploient. L'article Lp. 111-2 du même code définit comme salarié entrant dans son champ d'application : " toute personne physique qui s'est engagée à mettre son activité professionnelle, moyennant rémunération, sous la direction et l'autorité d'une autre personne physique ou morale publique ou privée ". Par ailleurs ne sont exclues du champ d'application du code du travail de Nouvelle-Calédonie, aux termes de son article Lp. 111-3, que les " personnes relevant d'un statut de fonction publique ou d'un statut de droit public ".
3. Mme B... soutient que les agents qui travaillent dans le service d'un maître tailleur de l'armée sont des agents de l'Etat, et qu'ainsi les agents contractuels de ce service sont des agents de droit public. Toutefois s'agissant des agents contractuels exerçant en Nouvelle-Calédonie, il résulte des dispositions qui viennent d'être citées du code du travail calédonien, qu'un agent contractuel, même de l'Etat, qui ne relève pas d'un statut de fonction publique ou d'un statut de droit public, au sens de l'article Lp. 111-3 du code du travail de Nouvelle-Calédonie, est soumis au code du travail de Nouvelle-Calédonie, et n'est pas dans la même situation qu'un agent exerçant des fonctions comparables en métropole. Elle n'est par suite pas fondée à soutenir que le litige l'opposant à l'Etat ne relevait pas de la compétence du juge judiciaire.
4. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaitre. Sa requête ne peut qu'être rejetée y compris ses conclusions à fins d'injonction et celles présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et au ministre des armées.
Délibéré après l'audience du 20 octobre 2020, à laquelle siégeaient :
- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
- M. Niollet, président-assesseur,
- Mme E... premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 novembre 2020.
Le rapporteur,
M-I. E...Le président,
O. FUCHS TAUGOURDEAU
Le greffier,
T. ROBERT
La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19PA04228