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01/10/2020 | FRANCE | N°19PA03881

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 01 octobre 2020, 19PA03881


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Premièrement, Mme D... F... épouse E... a demandé au tribunal administratif de Melun, d'une part, d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet de Seine-et-Marne a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour en date du 2 août 2017 et, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 12 juin 2018 par lequel le préfet de Seine-et-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays où elle pou

rrait être reconduite.

Par un jugement nos 1800435, 1805301 du 1er octobre 2019,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Premièrement, Mme D... F... épouse E... a demandé au tribunal administratif de Melun, d'une part, d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet de Seine-et-Marne a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour en date du 2 août 2017 et, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 12 juin 2018 par lequel le préfet de Seine-et-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays où elle pourrait être reconduite.

Par un jugement nos 1800435, 1805301 du 1er octobre 2019, le tribunal administratif de Melun a joint et rejeté les demandes de Mme E....

Deuxièmement, M. B... E... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 12 juin 2018 par lequel le préfet de Seine-et-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays où il pourrait être reconduit.

Par un jugement n° 1805263 du 1er octobre 2019, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête enregistrée le 2 décembre 2019 sous le n° 19PA03881, un mémoire complémentaire enregistré le 4 décembre 2019 et un mémoire en réplique enregistré le 28 janvier 2020, M. et Mme E..., représentés par Me G..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1805263 du tribunal administratif de Melun en date du 1er octobre 2019 ;

2°) d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet de Seine-et-Marne a rejeté leur demande de régularisation du 2 août 2017 et les arrêtés du 12 juin 2018 par lesquels il a refusé de leur délivrer un titre de séjour ;

3°) d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de leur délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi relative à l'aide juridictionnelle.

Ils soutiennent que :

- les premiers juges ont commis une erreur de fait dès lors que le jugement ne mentionne pas la demande de titre de séjour du 2 août 2017 ;

- les arrêtés contestés du 12 juin 2018 sont entachés d'un défaut d'examen sérieux de leur situation dès lors qu'ils comportent des erreurs de fait ;

- ils sont entachés d'erreur manifeste d'appréciation de leurs conséquences sur leur situation personnelle ;

- ils méconnaissent les stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision implicite de rejet de leur demande de régularisation en date du 2 août 2017 est entachée d'un défaut de motivation dès lors que le préfet de Seine-et-Marne n'a pas fait droit à leur demande de communication des motifs.

Par un mémoire en défense enregistré le 28 janvier 2020, le préfet de Seine-et-Marne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

II. Par une requête enregistrée le 5 décembre 2019, sous le n° 19PA03939, un mémoire en réplique enregistré le 28 janvier 2020, des pièces et un mémoire complémentaires enregistrés le 6 août 2020, Mme F... épouse E..., représentée par Me G..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 1800435, 1805301 du 1er octobre 2019 du tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet de Seine-et-Marne a rejeté la demande de régularisation du 2 août 2017 et les arrêtés du 12 juin 2018 par lesquelles il a refusé de délivrer un titre de séjour à M. et Mme E... ;

3°) d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme E... invoque les mêmes moyens que dans la requête enregistrée sous le n° 19PA03881.

Par un mémoire en défense enregistré le 28 janvier 2020, le préfet de Seine-et-Marne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, à savoir l'irrecevabilité du moyen tiré d'un défaut de motivation de la décision implicite par laquelle le préfet de Seine-et-Marne a rejeté la demande de régularisation du 2 août 2017, ce moyen étant fondé sur une cause juridique distincte de celle des moyens de légalité interne invoqués en première instance et constituant donc une demande nouvelle irrecevable en appel.

M. E... et Mme E... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par des décisions du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris du 5 novembre 2019.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E..., ressortissante algérienne, est entrée en France en août 2011 sous couvert d'un visa de type C avec ses enfants pour rendre visite à son père malade. Son époux, également ressortissant algérien, est entré en France en mai 2012 sous couvert d'un visa de type C. Par des courriers du 12 août 2016 et du 2 août 2017, Mme E... a demandé la régularisation de sa situation au regard du séjour en France auprès de la préfecture de Seine-et-Marne. Par des courriers reçus le 21 novembre 2017 et le 11 décembre 2017, son avocat a demandé les motifs des décisions implicites de rejet nées sur ses demandes. En mars 2018, M. et Mme E... ont, tous deux, sollicité la délivrance d'un titre de séjour. Par deux arrêtés du 12 juin 2018, le préfet de Seine-et-Marne a rejeté leurs demandes et leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. M. et Mme E... font appel des jugements du 1er octobre 2019 par lesquels le tribunal administratif de Melun a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation, d'une part, de la décision implicite de rejet de la demande de titre de séjour du 2 août 2017 et, d'autre part, des arrêtés du 12 juin 2018.

2. Les requêtes de M. et Mme E... et de Mme E... sont dirigées contre les mêmes jugements et ont fait l'objet d'une instruction commune. En conséquence, il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt.

Sur la régularité du jugement nos 1800435, 1805301 :

3. A supposer même que le tribunal ait commis, comme soutenu, une erreur de fait en ne mentionnant pas la demande de titre de séjour formulée par la requérante par un courrier du 2 août 2017, une telle erreur affecterait le bien-fondé du jugement, dont il appartient au juge d'appel de connaitre dans le cadre de l'effet dévolutif, et non sa régularité.

Sur la décision implicite de rejet de la demande de régularisation du 2 août 2017 :

4. Devant le tribunal administratif, Mme E... n'a soulevé que des moyens tirés de l'illégalité interne de la décision implicite par laquelle le préfet de Seine-et-Marne a rejeté la demande de délivrance d'un titre de séjour qu'elle avait présentée par un courrier du 2 août 2017. Si devant la Cour, les requérants soutiennent en outre que cette décision serait entachée d'un défaut de motivation, ce moyen, fondé sur une cause juridique distincte, constitue une demande nouvelle irrecevable en appel.

Sur les arrêtés du 12 juin 2018 :

5. En premier lieu, si les arrêtés du 12 juin 2018 par lesquels le préfet de Seine-et-Marne a refusé de délivrer un titre de séjour à M. et Mme E... mentionnent à tort qu'ils auraient présenté leur demande sur le fondement du b) de l'article 7 de l'accord franco-algérien et comportent des mentions relatives à des tiers, à savoir une promesse d'embauche émanant de la société Djill transport s'agissant de M. E... et le nom d'un tiers s'agissant de Mme E..., ces erreurs, pour regrettables qu'elles soient, ne suffisent pas à établir un défaut d'examen de leur situation personnelle, alors qu'il ressort de la motivation de ces arrêtés que le préfet de Seine-et-Marne a examiné leur demande au regard de leur vie privée et familiale.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an, portant la mention vie privée et familiale, est délivré de plein droit : (...) 5° au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autorisation de séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs de refus (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. Les requérants font valoir que Mme E... est entrée en France en août 2011 accompagnée de leurs deux premiers enfants nés en 2004 et 2006, que son époux les a rejoints en mai 2012, qu'ils sont hébergés par leur famille à Bois-le-Roi (77), que deux autres enfants sont nés sur le territoire français en 2011 et 2015 et que leurs enfants sont scolarisés. Il ressort toutefois des pièces du dossier qu'ils se sont maintenus sur le territoire français malgré les précédentes mesures d'éloignement prises à leur encontre en 2012 et 2015. En outre, s'il ressort des attestations produites par les requérants que M. E... est accompagnateur bénévole du service périscolaire de la commune et que Mme E... est employée dans le domaine du service à la personne, ils ne justifient, compte tenu notamment du caractère récent de cet emploi, d'aucune insertion professionnelle en France. Dans ces conditions, alors qu'il est constant qu'ils ne sont pas dépourvus d'attaches dans leur pays d'origine où leurs enfants pourront poursuivre leur scolarité, M. et Mme E... ne sont, compte tenu de l'ancienneté et des conditions de leur séjour en France, pas fondés à soutenir que le préfet aurait méconnu les stipulations précitées du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ou celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

8. En dernier lieu, dans les circonstances précédemment décrites, il ne ressort pas des pièces du dossier que les arrêtés contestés seraient entachés d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de leurs conséquences sur la situation personnelle et familiale des requérants.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction sous astreinte, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes de M. et Mme E... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E..., à Mme D... F... épouse E... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Seine-et-Marne.

Délibéré après l'audience du 10 septembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Gobeill, premier conseiller,

- M. A..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 1er octobre 2020.

Le rapporteur,

F. A...

Le président,

J. LAPOUZADE

La greffière,

M. C...La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Nos 19PA03881, 19PA03939 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19PA03881
Date de la décision : 01/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. François DORE
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : COTE-ZERBIB

Origine de la décision
Date de l'import : 13/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-10-01;19pa03881 ?
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