Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. L... J..., d'une part, l'Union pour la défense de l'égalité et de la liberté de circuler motorisé (UDELCIM), M. D... M... et M. F... E..., d'autre part, la Fédération française des automobilistes citoyens (FFAC) enfin, ont demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté n° 2017-P-0007 du 14 janvier 2017 par lequel la maire de Paris et le préfet de police ont instauré une zone à circulation restreinte dans la commune de Paris pour une durée de cinq ans.
Par un jugement n°1704331, 1704613, 1704617, 1704678 du 11 juin 2018, le Tribunal administratif de Paris, après les avoir jointes, a rejeté ces requêtes. Procédure devant la Cour :
I. Par une requête enregistrée sous le n° 18PA02330, le 11 juillet 2018 et un mémoire en réplique enregistré le 16 mars 2020 l'UDELCIM, M. D... M... et M. F... E..., représentés par Me Tabet demandent à la Cour :
- d'annuler le jugement du 11 juin 2018 du Tribunal administratif de Paris ;
- d'annuler l'arrêté n° 2017-P-0007 du 14 janvier 2017 par lequel la maire de Paris et le préfet de police ont instauré une zone à circulation restreinte dans la commune de Paris pour une durée de cinq ans ;
- d'ordonner la publication du dispositif de l'arrêt à intervenir dans trois journaux et magazines au choix de l'association UDELCIM, aux frais de la ville de Paris dans la limite de 1 000 euros par insertion ;
- de mettre solidairement à la charge de la ville de Paris et de l'Etat les entiers dépens de la procédure ;
- de mettre solidairement à la charge de la ville de Paris et de l'Etat une somme de
10 000 euros au bénéfice de l'UDELCIM, de 600 euros au bénéfice de M. M... et de 600 euros au bénéfice de M. E..., en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- leur requête est recevable ;
- ils disposent d'un intérêt à agir contre l'arrêté litigieux ;
- le président de l'UDELCIM a qualité pour agir ;
- l'arrêté litigieux a été signé par une autorité incompétente ;
- cet arrêté est dépourvu de motivation ;
- la procédure est entachée d'irrégularité ; la consultation du public sur le fondement de l'article L. 2213-4-1 III du code général des collectivités locales ne respecte pas le délai de quatre jours prévu à l'article L. 123-19-1 du code de l'environnement ; de nombreuses institutions concernées n'ont pas été consultées, notamment les villes limitrophes de Paris, le conseil régional d'Ile-de-France et le groupement des autorités responsables de transport (GART) ; l'étude menée est lacunaire en ce qu'elle n'expose pas les bénéfices attendus de la création d'une zone de circulation restreinte (ZCR) en termes d'amélioration de la qualité de l'air et de diminution de l'exposition de la population à la pollution atmosphérique ;
- l'arrêté litigieux est entaché d'erreurs manifestes d'appréciation ; le trafic routier n'est pas la première cause de la pollution de Paris ; l'arrêté n'opère pas de distinction entre les véhicules selon leur contribution à la pollution de l'air en méconnaissance de l'objectif de cohérence énoncé à l'article L. 2213-2 du code général des collectivités territoriales ; il discrimine les véhicules non classés parmi lesquels les bus de la RATP sans que la ville de Paris ne développe les transports en commun et ne mette un terme à la pénurie de taxis ; la ville de Paris ne démontre pas que les valeurs limites fixées par la directive 2008/50/CE soient dépassées ; la ville ne démontre pas l'efficacité des mesures de restriction de la circulation prises par la ville de Paris depuis juillet 2016 ; la création d'une zone à circulation restreinte (ZCR) n'est une mesure ni adaptée ni cohérente avec l'objectif poursuivi ;
- cet arrêté porte une atteinte grave au principe d'égalité des usagers du domaine public en introduisant des différences de traitement injustifiées entre conducteurs placés dans une situation identique, sans que ces différences soient justifiées par un motif d'intérêt
général ;
- cet arrêté porte atteinte à la liberté d'aller et de venir des riverains de la voie publique, détenteurs d'un véhicule concerné par les mesures de restriction de circulation ;
- cet arrêté porte une atteinte disproportionnée à leur droit de propriété ;
- cet arrêté crée une discrimination au détriment des propriétaires d'un véhicule concerné par les mesures de restriction de circulation avec lequel ils exercent leur activité professionnelle, notamment ceux ayant des horaires décalés et les propriétaires les moins fortunés dès lors que les aides financières proposées ne concernent que l'achat d'un véhicule neuf ;
Par un mémoire en défense enregistré le 7 novembre 2018, le préfet de police conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés ;
Par un mémoire en défense enregistré le 17 janvier 2020, la ville de Paris représentée par Me Falala, conclut au rejet de la requête et à la condamnation solidaire des requérants à lui verser la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice;
Elle soutient que :
- les requérants sont dépourvus d'intérêt et de qualité pour agir ;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés ;
II. Par une requête enregistrée sous le n° 18PA02617, le 30 juillet 2018,
M. L... J..., représenté par Me Tabet demande à la Cour :
- d'annuler le jugement du 11 juin 2018 du Tribunal administratif de Paris ;
- d'annuler l'arrêté n° 2017-P-0007 du 14 janvier 2017 par lequel la maire de Paris et le préfet de police ont instauré une zone à circulation restreinte dans la commune de Paris pour une durée de cinq ans ;
- de condamner solidairement la ville de Paris et l'Etat à lui verser une somme de 5 000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi qu'aux entiers dépens de la procédure.
Il soutient que :
- l'arrêté litigieux est dépourvu de motivation quant aux circonstances de fait permettant de justifier le choix des catégories de véhicules concernés par la zone de circulation restreinte (ZCR) ;
- la procédure est entachée d'irrégularité ; la consultation du public sur le fondement de l'article L. 2213-4-1 III du code général des collectivités locales ne respecte pas le délai de quatre jours prévu à l'article L. 123-19-1 du code de l'environnement ; de nombreuses institutions concernées n'ont pas été consultées, notamment les villes limitrophes de Paris, le conseil régional d'Ile-de-France et le groupement des autorités responsables de transport (GART) ; l'étude menée est lacunaire en ce qu'elle n'expose pas les bénéfices attendus de la création d'une ZCR en termes d'amélioration de la qualité de l'air et de diminution de l'exposition de la population à la pollution atmosphérique ;
- cet arrêté porte atteinte au droit de propriété protégé par l'article 1er du premier protocole additionnel de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, par l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et par l'article 17 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne pour les propriétaires de véhicules respectant la norme Euro 1 ;
- cet arrêté porte atteinte à la liberté d'aller et venir pour les résidents de Paris ;
- cet arrêté porte atteinte à la liberté d'entreprendre et à la liberté de commerce et d'industrie pour les professionnels qui utilisent leur véhicule pour l'exercice de leur activité comme l'exposant qui est avocat et se trouve privé de la possibilité de se rendre auprès des juridictions parisiennes, franciliennes et de province ou d'honorer ses rendez-vous extérieurs au moyen de son véhicule ;
- cet arrêté porte une atteinte au principe d'égalité en ce que les avocats sont exclus des dérogations prévues alors qu'ils se trouvent dans la même situation que plusieurs catégories de bénéficiaires de ces dérogations ;
- cet arrêté comporte une mesure d'interdiction inadéquate au but poursuivi et porte atteinte au principe de proportionnalité en ce que l'interdiction de circuler vise des véhicules dont il n'est pas établi qu'ils seraient systématiquement plus polluants et qui représentent une part infime du parc automobile français, ce qui permet de supposer que leur contribution à la pollution globale est très faible ; ni la maire de Paris ni le préfet de police n'ont produit d'élément venant contredire les rapports produits par l'exposant ;
- l'arrêté litigieux est entaché d'erreurs manifestes d'appréciation ; une erreur sur les causes de la pollution de Paris, en ce que le trafic routier n'est pas la première cause de la pollution de Paris ; les autobus parisiens et le métro contribuent plus à la pollution que les véhicules particuliers ; une erreur sur la catégorie des véhicules polluants dès lors que l'arrêté n'opère pas de distinction entre les véhicules selon leur contribution à la pollution de l'air en méconnaissance de l'objectif de cohérence énoncé à l'article L. 2213-2 du code général des collectivités territoriales ; il discrimine les véhicules non classés parmi lesquels les bus de la RATP sans que la ville de Paris ne développe les transports en commun et ne mette un terme à la pénurie de taxis ; une erreur sur la valeur limite des polluants émis puisque la mairie de Paris ne démontre pas que les valeurs limites fixées par la directive 2008/50/CE soient dépassées ni que les véhicules interdits par l'arrêté litigieux contribuent significativement aux émissions de dioxine de carbone et de particules fines, seuls polluants dont la concentration est supérieure aux seuils définis par cette directive; les mesures prises ne sont donc ni adaptées ni cohérentes ;
- la ville de Paris ne démontre pas l'efficacité des mesures de restriction qu'elle a prises depuis juillet 2016 ; alors qu'elle a limité le nombre de véhicules en circulation et fermé les voies sur berges, la qualité de l'air ne cesse de se détériorer ; la création d'une ZCR est une mesure ni adaptée ni cohérente avec l'objectif poursuivi ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 novembre 2018, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense enregistré le 21 janvier 2020, la ville de Paris représentée par Me Falala, conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. J... à lui verser la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice ;
Elle soutient que :
- le requérant est dépourvu d'intérêt à agir contre la décision attaquée en tant qu'elle concerne des véhicules autres que les automobiles ;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés ;
III. Par une requête enregistrée sous le n° 18PA02716, le 6 août 2018, la Fédération française des automobilistes citoyens (FFAC), représentée par Me Constantini demande à la Cour :
- d'annuler le jugement du 11 juin 2018 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation et d'injonction ;
- d'annuler l'arrêté n° 2017-P-0007 du 14 janvier 2017 par lequel la maire de Paris et le préfet de police ont instauré une zone à circulation restreinte dans la commune de Paris pour une durée de cinq ans à l'exception de son article 6 portant abrogation de l'arrêté n° 2016-P-0114 du 24 juin 2016 ;
- d'enjoindre à la mairie de Paris et au préfet de police de Paris de retirer, à leurs frais exclusifs, l'ensemble des panneaux matérialisant la zone à circulation restreinte dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard jusqu'au retrait complet de ces panneaux ;
- de mettre solidairement à la charge de la ville de Paris et de l'Etat une somme de
1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté attaqué est entaché d'une irrégularité de procédure en ce que le délai de quatre jours entiers entre la clôture de la consultation du public et la prise de décision, prévu par l'article L. 120-1 du code de l'environnement, n'a pas été respecté ; l'exposé des motifs de la décision ne résume ni même ne renvoie aux observations et propositions du public ; cette irrégularité a privé le public d'une garantie de voir ses observations et propositions prises en compte ;
- l'étude préalable au projet d'arrêté est lacunaire en ce qu'elle ne comprend pas d'exposé des bénéfices en termes d'amélioration de la qualité de l'air et de diminution de l'exposition de la population à la pollution atmosphérique, en violation de l'article
L. 2213-4-1 III du code général des collectivités territoriales alors qu'aucune impossibilité technique n'empêchait la mairie de Paris de faire réaliser cette étude ; l'étude préalable méconnaît l'article R. 2213-1-0-1 du code général des collectivités territoriales en ce qu'elle ne comporte pas l'évaluation de la réduction des émissions de polluants atmosphériques ; elle n'évalue que les gains d'émissions par rapport au renouvellement naturel du parc automobile et est par conséquent trompeuse ; ces lacunes ont vicié l'information du public ;
- l'arrêté litigieux porte une atteinte injustifiée et disproportionnée au droit de propriété puisque l'interdiction spatiale et temporelle des véhicules concernés les rend impropres à leur usage normal ;
- l'arrêté litigieux porte atteinte à la liberté d'aller et de venir des propriétaires de ces véhicules, notamment les riverains ;
- l'arrêté litigieux porte atteinte au principe d'égalité entre usagers du domaine public et de la voierie routière dès lors que le mécanisme du retrofit est limité par l'arrêté du
21 juin 2016 aux seuls poids lourds, autocars et autobus et qu'à la date de l'arrêté, aucun texte ne permettait à un usager de faire valoir que son véhicule ne devrait pas être soumis aux interdictions de circuler en raison de son niveau réel d'émission de polluants atmosphériques ;
- les conséquences de cet arrêté sont néfastes économiquement et pèsent sur les particuliers les plus modestes et à mobilité réduite ;
Par un mémoire en défense enregistré le 2 novembre 2018 le ministre de l'intérieur conclut à sa mise hors de cause ;
Il soutient qu'il n'est pas compétent pour représenter en appel le préfet de police dans l'exercice de ses pouvoirs de police municipale ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 janvier 2020, la ville de Paris, représentée par Me Falala, conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- la FFAC est dépourvue d'intérêt à agir ;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la constitution,
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
- la charte des droits fondamentaux de l'union européenne,
- la directive 2008/50/CE du 21 mai 2008,
- le code général des collectivités territoriales,
- le code de l'environnement,
- le code de la route,
- l'arrêté du 15 mai 2013 visant les conditions d'installation et de réception des dispositifs de post-équipement permettant de réduire les émissions de polluants des véhicules en service,
- l'arrêté du 21 juin 2016 établissant la nomenclature des véhicules classés en fonction de leur niveau d'émission de polluants atmosphériques,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Julliard,
- les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public,
- les observations de Me Falala, pour la ville de Paris,
- les observations de Me Tabet, pour l'UDELCIM, M. D... M... et M. F... E...,
- et les observations de Me Costantini, pour la Fédération Française de Automobilistes Citoyens ;
Considérant ce qui suit :
1. Par trois requêtes qu'il y a lieu de joindre, l'Union pour la défense de l'égalité et de la liberté de circuler motorisé (UDELCIM), M. D... M... et M. F... E..., M. L... J... et la Fédération française des automobilistes citoyens (FFAC) relèvent appel du jugement du 11 juin 2018 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté n° 2017-P-0007 du 14 janvier 2017 par lequel la maire de Paris et le préfet de police ont instauré une zone à circulation restreinte (ZCR) dans la commune de Paris pour une durée de cinq ans.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la légalité externe de l'arrêté en litige :
2. En premier lieu, le moyen tiré de ce que l'arrêté litigieux a été signé par une autorité incompétente manque en fait ainsi que l'a jugé le tribunal administratif par des motifs qu'il y a lieu d'adopter..
3. En deuxième lieu, si M. J... soutient que l'arrêté litigieux est dépourvu de motivation quant aux circonstances de fait permettant de justifier le choix des catégories de véhicules concernés par la ZCR, il ressort de la lecture de cet arrêté qu'il vise " l'étude justifiant la création d'une zone de circulation restreinte ", expose les motifs ayant conduit à son édiction et évoque " les véhicules les plus polluants " en se référant en son article 1er " aux catégories de véhicules non classés , conformément à la classification établie par l'arrêté du 21 juin 2016 susvisé", laquelle établit la nomenclature des véhicules classés en fonction de leur niveau d'émission de polluants atmosphériques en application de l'article R. 318-2 du code de la route. L'arrêté comporte ainsi, et en tout état de cause, des considérations de fait suffisamment détaillées.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 2213-4-1 III du code général des collectivités territoriales : " Le projet d'arrêté, accompagné d'une étude présentant l'objet des mesures de restriction, justifiant leur nécessité et exposant les bénéfices environnementaux et sanitaires attendus de leur mise en oeuvre, notamment en termes d'amélioration de la qualité de l'air et de diminution de l'exposition de la population à la pollution atmosphérique, est soumis pour avis, par l'autorité compétente, aux autorités organisatrices de la mobilité dans les zones et dans leurs abords, aux conseils municipaux des communes limitrophes, aux gestionnaires de voirie, ainsi qu'aux chambres consulaires concernées. A l'expiration d'un délai fixé par le décret prévu au V du présent article, cet avis est réputé favorable. ". Aux termes de l'article R. 2213-1-0-1 du même code : " L'étude justifiant la création d'une zone à circulation restreinte telle que mentionnée au III de l'article L. 2213-4-1 comporte notamment un résumé non technique, une description de l'état initial de la qualité de l'air sur la zone concernée ainsi qu'une évaluation : 1° De la population concernée par les dépassements ou le risque de dépassement des normes de qualité de l'air ; 2° Des émissions de polluants atmosphériques dues au transport routier sur la zone concernée ;3° De la proportion de véhicules concernés par les restrictions et, le cas échéant, les dérogations prévues ;4° Des réductions des émissions de polluants atmosphériques attendues par la création de la zone à circulation restreinte. "
5. Les appelants soutiennent que l'étude menée est lacunaire en ce qu'elle n'expose pas les bénéfices attendus de la création d'une ZCR en termes d'amélioration de la qualité de l'air et de diminution de l'exposition de la population à la pollution atmosphérique, en violation des dispositions précitées des articles L. 2213-4-1 III et R. 2213-1-0-1 du code général des collectivités territoriales, alors qu'aucune impossibilité technique n'empêchait la mairie de Paris de faire réaliser cette étude, et que l'étude menée n'évalue que les gains d'émissions par rapport au renouvellement naturel du parc automobile, de telles lacunes étant de nature à vicier l'information du public. Il ressort toutefois de l'étude prospective dans le cadre de la création d'une ZCR à Paris réalisée par Air Parif en octobre 2016 qu'elle comporte après l'exposé de la méthodologie retenue, une évaluation, d'une part, de la population exposée à des niveaux excessifs de pollution, d'autre part, des émissions liées au trafic routier et, enfin, de l'impact de la création d'une ZCR sur ces émissions. Par suite, cette étude était conforme aux prescriptions du code général des collectivités territoriales et n'a pas été de nature à vicier l'information du public sur les motifs justifiant l'édiction de l'arrêté litigieux. Ce moyen doit être écarté.
6. En quatrième lieu, aux termes de l'articles L. 123-19-1 du code de l'environnement : " Le projet de décision ne peut être définitivement adopté avant l'expiration d'un délai permettant la prise en considération des observations et propositions du public. Sauf en cas d'absence d'observations et propositions, ce délai ne peut être inférieur à quatre jours à compter de la date de clôture de la consultation. (...) ". En signant l'arrêté litigieux le 14 janvier 2017, alors que la procédure de consultation avait été clôturée le 10 janvier 2017, ses auteurs n'ont pas méconnu le délai de quatre jours visé par les dispositions précitées, qui ne présente pas le caractère d'un délai franc.
7. En cinquième lieu, les appelants soutiennent que de nombreuses institutions concernées n'ont pas été consultées, notamment les villes limitrophes de Paris, le conseil régional d'Ile-de-France et le groupement des autorités responsables de transport (GART). Toutefois, d'une part, le préfet de police soutient sans être contredit, que plusieurs communes limitrophes de Paris ont émis des observations sur le projet parmi les 16 institutions et représentants professionnels consultés. D'autre part, les dispositions de l'article L. 2213-4-1 III du code général des collectivités territoriales ne prévoient la consultation ni de conseils régionaux, ni du GART. Ce moyen ne peut donc qu'être écarté.
8. Si les appelants soutiennent, en sixième lieu, que l'exposé des motifs de l'arrêté litigieux ne résume ni même ne renvoie aux observations et propositions du public, aucune disposition législative ou réglementaire ne prévoit que la décision instaurant une ZCR doive comporter un résumé des observations recueillies lors de la consultation du public. Il ressort en tout état de cause de l'arrêté litigieux qu'il vise " les avis recueillis dans le cadre de la consultation s'étant déroulée du 13 octobre 2016 au 15 décembre 2016 conformément aux dispositions des articles L. 2214-3-1 R. 2213-1-0-1 du code général des collectivités territoriales ". Ce moyen doit donc également être écarté.
En ce qui concerne la légalité interne de l'arrêté en litige :
9. Les appelants soutiennent que l'arrêté litigieux est entaché d'erreurs manifestes d'appréciation et que la création d'une ZCR n'est une mesure ni adaptée ni cohérente avec l'objectif poursuivi.
10. En premier lieu, en ce qui concerne les valeurs limites fixées par la directive 2008/50/CE, il résulte du point 9 de l'exposé des motifs de cette directive, que " Lorsque les objectifs en matière de qualité de l'air ambiant définis dans la présente directive ne sont pas atteints, les États membres devraient prendre des mesures en vue de respecter les valeurs limites et les niveaux critiques et, si possible, d'atteindre les valeurs cibles et les objectifs à long terme ". L'arrêté en litige expose : " Considérant que les concentrations mesurées en dioxyde d'azote et en particules PM10 et PM2.5 dépassent de façon répétée à Paris les seuils réglementaires fixés par la directive 2008/50/CE et atteignent, pour le dioxyde d'azote jusqu'au double du seuil réglementaire d'après les relevés d'AirParif ". De plus, il ressort de l'étude prospective dans le cadre de la création d'une ZCR à Paris réalisée par Air Parif en octobre 2016 qu'en ce qui concerne les particules PM10, le dépassement de la valeur limite journalière (35 jours supérieurs à 50 ug/m3) a été constaté en 2015 sur environ 20% du réseau routier parisien et 10% de la superficie parisienne, exposant potentiellement 200 000 personnes à un dépassement, qu'en ce qui concerne les particules PM2,5, si la valeur limite est respectée, 5% des Parisiens soit environ 100 000 habitants sont potentiellement exposés à un air excédant la valeur cible annuelle (20 ug/m3) et la totalité du territoire parisien est concerné par le dépassement de l'objectif de qualité (10 ug/m3), qu'en ce qui concerne le dioxyde d'azote (NO2), la valeur limite annuelle (40 ug /m3) est dépassée en 2015 sur près de 500 kms d'axes routiers parisiens, ce qui concerne 1,2 million d'habitants, soit plus d'un Parisien sur deux, qu'en ce qui concerne le benzène, si la valeur limite fixée par la directive (5 ug/m3) est respectée à Paris, l'objectif de qualité français (2 ug/m3) est dépassé en 2015 sur environ 150 km de voiries et concerne 1000 000 habitants environ. Par suite, la maire de Paris et le préfet de police ont pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, prendre en compte tant le dépassement des valeurs limite fixées par la directive que celui de valeurs cibles plus contraignantes, définies au niveau national, pour prendre la mesure contestée. Le moyen doit être écarté.
11. Les appelants soutiennent, en deuxième lieu, que le trafic routier n'est pas la première cause de la pollution de Paris. S'il ressort des pièces du dossier que le trafic routier n'est que la troisième source de pollution atmosphérique en Ile-de-France (14%) derrière le secteur résidentiel et tertiaire (30%) et l'industrie manufacturière (24%), cette seule circonstance n'est pas de nature à priver d'utilité l'arrêté attaqué, lequel vise " la part significative du trafic routier régulièrement constatée par Airparif au niveau de Paris et de la région Ile-de-France dans les émissions de polluants, notamment le dioxyde d'azote et les particules fines ". Il résulte en effet de l'étude prospective dans le cadre de la création d'une ZCR à Paris réalisée par Air Parif en octobre 2016 que le trafic routier constitue, au regard de sa part dans les émissions parisiennes des polluants atmosphériques, " un des leviers d'action permettant de réduire la pollution de l'air et l'exposition de la population ", représentant le principal contributeur aux émissions d'oxyde d'azote (NOx) avec 73% des émissions parisiennes, 42% des émissions primaires en particules PM10 et 40% des émissions primaires en particules plus fines PM2,5 en 2014. En outre, la circonstance alléguée que la ville de Paris n'aurait pris aucune mesure visant à diminuer les polluants émis par le secteur tertiaire et résidentiel, à la supposer établie, est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée.
12. Les requérants soutiennent, en troisième lieu, que l'arrêté en litige comporte une mesure d'interdiction inadéquate au but poursuivi en ce que qu'il n'opère pas de distinction entre les véhicules selon leur contribution à la pollution de l'air, en méconnaissance de l'objectif de cohérence énoncé à l'article L. 2213-2 du code général des collectivités territoriales. Toutefois, l'arrêté en cause, qui trouve son fondement légal dans les dispositions de l'article L. 2213-4-1 du code général des collectivités territoriales, applique les critères objectifs de la classification établie par l'arrêté du 21 juin 2016 établissant la nomenclature des véhicules classés en fonction de leur niveau d'émission de polluants atmosphériques, en application de l'article R. 318-2 du code de la route, lequel prévoit en son article 1er que " Les véhicules routiers à moteur sont classés en fonction de leur niveau d'émission de polluants atmosphériques locaux (...). Cette classification s'opère en fonction de la catégorie de véhicule, de sa motorisation et lorsque l'information est disponible, en fonction de la norme " Euro " figurant dans la rubrique V.9 du certificat d'immatriculation (...) ou à défaut, en fonction de la date de première immatriculation (...) ". Par suite, l'utilisation de tels critères n'est pas inadéquate au but poursuivi. En outre, l'arrêté attaqué n'a, par lui-même, ni pour objet ni pour effet d'interdire aux propriétaires de véhicules équipés d'un dispositif de traitement des émissions polluantes installé postérieurement à la première mise en circulation de celui-ci de faire, conformément à l'article 3 de l'article R. 318-2 du code de la route, reconnaître son classement dans une classe supérieure dans les conditions prévues par l'arrêté du 15 mai 2013 visant les conditions d'installation et de réception des dispositifs de post-équipement permettant de réduire les émissions de polluants des véhicules en service. Le moyen ne peut donc qu'être écarté.
13. En quatrième lieu, les appelants font valoir que la mesure est inadaptée à l'objectif poursuivi dès lors que les véhicules diesel répondant à la norme Euro 2 seront autorisés à circuler alors qu'ils contribuent pour 96% à l'émission de particules fines PM10 et PM 2,5, contre 4% pour les moteurs à essence et représentent 52% du parc automobile en Ile-de-France. Il ressort toutefois des pièces du dossier que les véhicules deux roues motorisés, qui fonctionnent exclusivement à l'essence, sont les premiers contributeurs des émissions de composés organiques volatils avec 48% des émissions, soit 7% des émissions franciliennes et que les véhicules particuliers à essence contribuent pour 17% à ces émissions, soit 2% du total francilien. Par suite, l'interdiction des véhicules à essence les plus polluants ne peut être regardée comme insignifiante ni inadaptée au but poursuivi. En outre, l'arrêté litigieux étend l'interdiction de circulation à compter du 1er juillet 2017 aux véhicules de " catégorie 5 ", tous équipés de moteur diesel. Par suite, les auteurs de l'arrêté ont pu légalement, pour répondre à l'objectif de lutte contre la pollution atmosphérique locale liée au trafic routier, édicter la mesure d'interdiction sans cibler prioritairement les véhicules roulant au diesel.
14. En cinquième lieu, la circonstance que l'arrêté en litige vise, parmi les véhicules non classés, les bus de la RATP sans que la ville de Paris ne développe les transports en commun ou ne mette un terme à la pénurie de taxis, à la supposer établie, est sans incidence sur la légalité dudit arrêté.
15. En sixième lieu, si l'arrêté en litige porte atteinte à la liberté d'aller et de venir des détenteurs d'un véhicule concerné par les mesures de restriction de circulation, cette atteinte, qui est atténuée par les limites spatio-temporelles de l'interdiction et la possibilité pour les propriétaires desdits véhicules d'utiliser des modes de transport alternatifs, n'est pas disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été édictée.
16. En septième lieu, pour les mêmes motifs, l'atteinte au droit d'usage des propriétaires des véhicules concernés est en rapport avec l'objectif poursuivi et n'est pas disproportionné aux buts en vue desquels l'interdiction a été édictée. Les appelants ne sont, par suite, pas fondés à soutenir que l'arrêté litigieux porterait une atteinte disproportionnée à leur droit de propriété protégé par l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, par l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et par l'article 17 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.
17. En huitième lieu, les appelants soutiennent que cet arrêté porte atteinte à la liberté d'entreprendre et à la liberté de commerce et d'industrie des personnes qui utilisent leur véhicule pour l'exercice de leur activité professionnelle, à l'instar de M. J... qui est avocat et se trouve privé de la possibilité de se rendre auprès des juridictions parisiennes, franciliennes et de province ou d'honorer ses rendez-vous extérieurs au moyen de son véhicule. Toutefois, il ressort de l'arrêté litigieux qu'il prévoit des dérogations pour certaines professions pour lesquelles l'usage du véhicule est indispensable à l'exercice de leur activité professionnelle, en particulier les personnes dont l'activité professionnelle est le transport de personnes ou de marchandises ou dont le véhicule fait l'objet d'un aménagement spécifique, d'autre part, M. J... n'établit pas que l'usage de son véhicule serait indispensable à l'exercice de sa profession. Ce moyen doit être écarté.
18. En neuvième lieu, M. J... qui n'établit pas se trouver dans une situation identique à celle des bénéficiaires des dérogations citées au point précédent, n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté litigieux méconnaîtrait le principe d'égalité.
19. Si les appelants soutiennent, en dixième lieu, que l'arrêté litigieux emporte une discrimination au détriment des propriétaires de véhicules les moins fortunés dès lors que les aides financières proposées par les pouvoirs publics ne concernent que l'achat d'un véhicule neuf, il est constant que l'arrêté ne vise pas les propriétaires de véhicules en fonction de leurs revenus et qu'existent des alternatives aux déplacements en voiture, notamment moins onéreuses que l'entretien d'un véhicule telles que l'usage des transports commun. Ce moyen ne peut qu'être écarté.
20. En onzième lieu, les appelants font valoir que la différence de traitement introduite par l'article 3 de l'arrêté litigieux prévoyant que les mesures de restriction de circulation ne s'appliquent pas pendant une durée de trois ans aux véhicules de collection, est injustifiée. A supposer toutefois que cette dérogation ne soit justifiée ni par une différence de contribution à la pollution atmosphérique de ces véhicules par rapport aux véhicules identiques du même âge, ni par un motif d'intérêt général, il est constant que les appelants contestent non le principe des dérogations accordées à certaines catégories de véhicules mais les mesures de restriction appliquées aux véhicules qui n'en bénéficient pas. Par suite, ce moyen est inopérant à l'appui de conclusions tendant à l'annulation de ces restrictions pour l'ensemble des véhicules visés par l'arrêté litigieux.
21. Enfin, en tout état de cause, les appelants n'établissent pas que l'arrêté litigieux aurait des conséquences néfastes économiquement ou que les mesures de restriction prises par la ville de Paris depuis juillet 2016 seraient dépourvues d'efficacité.
22. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir opposées aux requêtes, que les appelants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté n° 2017-P-0007 du 14 janvier 2017 par lequel la maire de Paris et le préfet de police ont instauré une zone à circulation restreinte (ZCR) dans la commune de Paris pour une durée de cinq ans.
Sur les autres conclusions :
23. Le rejet des conclusions à fin d'annulation des requêtes entraîne, par voie de conséquence, celui des autres conclusions de ces requêtes.
Sur les frais de l'instance :
24. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions des parties présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Les requêtes de l'Union pour la défense de l'égalité et de la liberté de circuler motorisé (UDELCIM), de M. D... M... et de M. F... E..., de M. L... J... et de la Fédération française des automobilistes citoyens (FFAC) sont rejetées.
Article 2 : Les conclusions de la ville de Paris présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'Union pour la défense de l'égalité et de la liberté de circuler motorisé (UDELCIM), à M. D... M..., à M. F... E..., à
M. L... J..., à la Fédération française des automobilistes citoyens (FFAC), à la maire de Paris et au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 11 septembre 2020, à laquelle siégeaient :
- Mme Heers, président,
- Mme Julliard, présidente-assesseure,
- Mme Mach, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 25 septembre 2020.
La rapporteure,
M. JulliardLe président,
M. HeersLe greffier,
A.BENZERGUA
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Nos 18PA02330... 2