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23/09/2020 | FRANCE | N°19PA02897

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 23 septembre 2020, 19PA02897


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris :

1°) Sous le numéro 1706100, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels il a été assujetti au titre de l'année 2010 pour des montants de 801 638 euros et de 242 817 euros ;

2°) Sous le numéro 1706099, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels il a été assujett

i au titre de l'année 2011 pour des montants de 2 862 084 euros et de 874 907 euros ;

3°) Sou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris :

1°) Sous le numéro 1706100, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels il a été assujetti au titre de l'année 2010 pour des montants de 801 638 euros et de 242 817 euros ;

2°) Sous le numéro 1706099, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels il a été assujetti au titre de l'année 2011 pour des montants de 2 862 084 euros et de 874 907 euros ;

3°) Sous le numéro 1706097, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels il a été assujetti au titre de l'année 2012 pour des montants de 3 861 657 euros et de 1 243 251 euros ;

Par un jugement n° 1706100, 1706099,1706097/1-3 du 3 juillet 2019, le Tribunal administratif de Paris, après avoir constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer à hauteur des dégrèvements intervenus en cours d'instance, a rejeté le surplus de ces demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 4 septembre 2019, 6 décembre 2019 et 27 mars 2020, M. B..., représenté par Me C... D..., demande à la Cour :

1°) de réformer ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 3 juillet 2019 en tant qu'il a rejeté ses demandes ;

2°) de prononcer la décharge des impositions restant en litige.

Il soutient que :

- le juge n'a pas statué sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales en ce qui concerne les années 2011 et 2012 ;

- la lettre du 20 novembre 2014 par laquelle l'administration répond à sa demande de communication est postérieure à la mise en recouvrement des impositions ;

- son conseil était habilité à demander communication des documents obtenus de tiers par l'administration ;

- l'absence de communication de ces documents entraine la méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ;

- la proposition de rectification en date du 28 novembre 2013 adressée à la société ASL Diffusion ne lui a pas été communiquée ;

- sa demande du 27 octobre 2014, qui était antérieure à la mise en recouvrement, portait sur les documents visés dans les lettres qui lui avaient adressées par l'administration, et non sur les documents joints à ces lettres ;

- certains des documents en cause n'étaient pas joints aux propositions de rectification ;

- les prélèvements sociaux et la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus ne sont pas motivés ;

- l'administration n'a pas indiqué l'adresse des sociétés auxquelles elle a eu recours pour déterminer les marges brutes des activités de tissus et de téléphonie ;

- l'administration a méconnu les dispositions des articles L. 57 et L. 76 B du livre des procédures fiscales en ne précisant pas tous les éléments permettant d'identifier les pièces obtenues dans le cadre du droit de communication et ayant permis les rehaussements notifiés à la société ;

- l'administration a méconnu le principe de loyauté.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 mars 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 7 mai 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au

22 mai 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E...,

- les conclusions de Mme Jimenez, rapporteur public,

- et les observations de Me D..., représentant M. B....

Une note en délibéré, enregistrée le 12 septembre 2020, a été présentée par Me D... pour M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme A... B... ont fait l'objet, en 2013, d'un examen contradictoire de situation fiscale personnelle à l'issue duquel l'administration leur a notifié, par trois propositions de rectification du 6 décembre 2013, des rehaussements en matière d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre des années 2010, 2011 et 2012, correspondant à des distributions opérées par l'EURL ASL Diffusion, dont M. B... était le gérant et associé unique, assortis de la majoration de 80 % pour manoeuvres frauduleuses. M. B... relève appel du jugement du

3 juillet 2019 en ce que le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge, en droits et pénalités, des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels il a été assujetti en conséquence au titre des années 2010, 2011 et 2012.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Les premiers juges ont clairement indiqué que les impositions contestées étaient relatives aux années 2010, 2011 et 2012 et ont statué sur le moyen qui leur était soumis tiré de la méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales. Contrairement à ce qui est soutenu, la circonstance qu'ils aient, au point 8. du jugement, décrit la nature des redressements en cause en faisant référence, notamment, à la proposition de rectification notifiée au titre de l'année 2010, ne permet pas de considérer qu'ils n'ont statué sur ce moyen qu'en ce qui concerne l'année 2010. Le moyen tiré d'une telle omission à statuer ne peut par suite qu'être écarté.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

3. Aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L.57 ou de la notification prévue à l'article L.76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ". Il incombe en conséquence à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en oeuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu'elle a utilisés pour fonder les rectifications, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. Cette obligation ne s'impose à l'administration que pour les seuls renseignements effectivement utilisés pour fonder les rectifications.

4. M. B... soutient en premier lieu qu'aucune information ne lui a été donnée sur l'origine des informations obtenues dans le cadre du droit de communication et qui ont servi à opérer les rehaussements notifiés à la société ASL diffusion ainsi que les rehaussements qui lui ont été notifiés en conséquence dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. Il ne résulte pas de l'instruction que les documents obtenus de l'INPI ainsi que les actes de cession de parts du 17 juillet 2012 et du 18 janvier 2013, s'ils ont été cités par le vérificateur pour caractériser l'entreprise en cause, aient été utilisés pour fonder les rehaussements litigieux. Par ailleurs, le vérificateur a indiqué, dans les propositions de rectification adressées à M. B..., que les factures d'achat qui lui étaient opposées trouvaient leur origine dans les perquisitions effectuées dans les locaux des sociétés HR et Finaxis et que les relevés bancaires utilisés avaient été communiqués par les établissements bancaires dans lesquels la société détenait des comptes. Il a ensuite précisé la teneur des informations obtenus auprès de ces établissements. M. B... ne saurait par suite valablement soutenir que l'administration aurait méconnu l'obligation d'information procédant des dispositions précitées de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales.

5. M. B... fait valoir en second lieu que le service ne lui a pas communiqué avant la mise en recouvrement des impositions, malgré la demande de son conseil du 27 octobre 2014, les documents recueillis auprès de tiers et ayant été utilisés pour fonder les rectifications en litige. Toutefois, la demande dont il se prévaut, qui tendait à la " communication de la copie des documents visés dans les courriers adressés à M. A... dans le cadre de l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle ", ne saurait être regardée, eu égard à sa formulation générale et imprécise, comme tendant à la communication de documents qui n'étaient pas déjà joints aux propositions de rectification qui lui avaient été notifiées. En ce qui concerne plus particulièrement la proposition de rectification en date du 28 novembre 2013 adressée à la société ASL Diffusion, un tel document ne saurait être en tout état de cause regardé comme un document obtenu de tiers au sens des dispositions précitées du livre des procédures fiscales. Par suite, le moyen tiré de ce que l'administration aurait méconnu ces dispositions ne peut qu'être écarté, sans que M. B... puisse utilement faire valoir que l'administration aurait méconnu le principe de loyauté au motif qu'elle aurait affirmé, dans un mémoire du 5 octobre 2017, qu'aucune demande de communication émanant du contribuable n'avait été présentée, dès lors qu'une telle affirmation, intervenue au cours de la procédure contentieuse, est sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition.

6. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ". Aux termes de l'article R. 57-1 de ce livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification de redressement doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile. Lorsque l'administration fiscale entend fonder un redressement sur des éléments de comparaison issus de données chiffrées provenant d'autres entreprises, elle doit, pour assurer le caractère contradictoire de la procédure, sans méconnaître le secret professionnel protégé par l'article L. 103 du livre des procédures fiscales, désigner nommément ces entreprises mais ne fournir au contribuable que des moyennes ne lui permettant pas de connaître, fût-ce indirectement, les données propres à chacune d'elles.

7. Il résulte, en premier lieu, de l'examen des propositions de rectification adressées à M. et Mme B... le 6 décembre 2013 qu'elles exposaient les motifs des rectifications affectant le revenu imposable des contribuables, de manière à leur permettre de formuler leurs observations de façon entièrement utile. La circonstance qu'elles n'aient pas repris et détaillés tous les éléments exposés dans la proposition de rectification adressée à la société ASL Diffusion ne saurait, par elle-même, caractériser un défaut de motivation et par suite une méconnaissance des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales.

8. Il résulte en second lieu de l'examen des propositions de rectification adressées à

M. et Mme B... le 6 décembre 2013 que le vérificateur a explicité les conséquences financières des rehaussements, et, s'agissant plus particulièrement des prélèvements sociaux et de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus, indiqué les fondements juridiques des rehaussements, les bases d'imposition et les taux appliqués. M. B... ne saurait en conséquence faire valoir que les propositions de rectification seraient insuffisamment motivées sur ce point.

9. Enfin, les propositions de rectification adressées à M. et Mme B... le 6 décembre 2013 précisent la raison sociale des entreprises du secteur concerné auxquelles il a été fait référence pour déterminer les marges brutes des activités. La seule circonstance que les adresses de ces sociétés n'auraient pas été fournies ne révèle aucune méconnaissance des règles rappelées au point 6.

10. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus de ses demandes.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France.

Délibéré après l'audience du 9 septembre 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- M. Soyez, président assesseur,

- M. E..., premier conseiller.

Lu en audience publique le 23 septembre 2020.

Le rapporteur,

F. E...Le président,

I. BROTONS

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

7

2

N° 19PA02897


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA02897
Date de la décision : 23/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : BIAGINI

Origine de la décision
Date de l'import : 03/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-09-23;19pa02897 ?
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