Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La Chambre de commerce et d'industrie de Nouvelle-Calédonie a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie de condamner la société Technique et Travaux (TET) et la société QBE Insurance Limited à lui verser la somme de 425 623 834 francs CFP, somme à parfaire à l'issue des opérations d'expertise.
Par un jugement n° 1500464 du 25 septembre 2018, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande et l'a condamnée à verser à la société TET la somme de 30 000 000 francs CFP. Procédure devant la Cour
I. Par une requête, enregistrée sous le n° 18PA03673, le 26 novembre 2018 et un mémoire ampliatif enregistré le 26 janvier 2019, la Chambre de commerce et d'industrie de Nouvelle-Calédonie (CCI-NC), représentée par LexCity Avocats, demande à la Cour :
- d'annuler le jugement du 25 septembre 2018 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;
- de rejeter l'ensemble des demandes indemnitaires de la société TET représentée par la SELARL Marie-Laure Gastaud ;
- de condamner la société TET représentée par la SELARL Marie-Laure Gastaud à lui verser les sommes de 26 868 175 francs CFP au titre des travaux de remise en état et de 171 471 760 francs CFP au titre des surcoûts consécutifs au retard de cinq mois dans l'achèvement des travaux ;
- de condamner la société TET représentée par la SELARL Marie-Laure Gastaud à lui payer la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- le rapport d'expertise ne met en évidence aucune faute du maître d'ouvrage dans la conduite du projet dont le programme n'a été modifié que de façon mineure ; il conclut à la piètre qualité des prestations de la maîtrise d'oeuvre et que la société Colas Nouvelle-Calédonie n'a pas rempli sa mission avec célérité et sérieux ;
- plusieurs expertises établissent la responsabilité de la société TET dans le sinistre survenu le 15 septembre 2009 ; le manquement de la société TET à ses obligations contractuelles est constitutif d'une faute ;
- le préjudice de la CCI-NC lié aux surcoûts de remise en état, déduction faite du remboursement de la compagnie d'assurance QBE, est de 28 708 166 francs CFP ;
- le préjudice de la CCI-NC lié au retard de cinq mois dans le délai d'achèvement des travaux, déduction faite du remboursement de la compagnie d'assurance Tout Risque Chantier est de 198 339 935 francs CFP à parfaire ;
- si le jugement attaqué rejette la demande indemnitaire en l'absence de production de la décision habilitant le directeur de la CCI-NC à résilier le marché, l'assemblée générale de la CCI-NC a expressément habilité le Président à contracter tout marché et toutes les pièces y afférentes ; le préjudice de la CCI-NC lié à la défaillance de la société TET et à la résiliation du marché est de 227 283 899 francs CFP TTC à parfaire, se décomposant en des coûts de réparations des désordres et malfaçons à hauteur de 47 326 165 francs CFP TTC, des coûts de prolongation des missions confiées aux différents constructeurs pour un montant de 114 555 614 francs CFP, en un coût de la seconde police d'assurance Tout Risque Chantier conclus avec QBE pour un montant de 3 135 198 francs CFP TTC et des réclamations des entreprises ;
Par un mémoire en défense enregistré le 6 mai 2019, la compagnie d'assurances QBE International Limited, représentée par la SELARL d'avocats Olivier, conclut à l'irrecevabilité de la requête en ce qu'elle est dirigée contre elle, à la confirmation du jugement attaqué, au rejet de la requête et à la condamnation de la CCI-NC à lui verser la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- la juridiction administrative est incompétente pour connaître des demandes présentées à l'encontre de l'assureur ;
- l'autorité de la chose jugée par la Cour administrative d'appel de Paris le 14 avril 2014 s'impose en ce qui concerne les relations de la CCI-NC et de la société TET ;
- le décompte final n'a été ni établi ni notifié dans le respect des textes applicables ;
- aucun élément ne permet de justifier les demandes et aucun lien n'est établi entre ces demandes avec une quelconque faute de la société TET de nature à engager sa responsabilité ;
Par un mémoire enregistré le 19 mars 2020, la société TET représentée par la SELARL Marie-Laure Gastaud conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la CCI-NC à lui verser la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- la CCI-NC n'apporte aucun élément nouveau en appel pour établir la responsabilité de la société TET en se bornant à invoquer deux avis non contradictoires établis par ses prestataires, les sociétés APAVE et SECE, alors que le rapport d'expertise de M. B... a retenu la responsabilité partagée de la maîtrise d'ouvrage, de la maîtrise d'oeuvre et de la société Colas Nouvelle-Calédonie dans le sinistre survenu sur la couverture ;
- le rapport d'expertise retient un retard de douze mois imputables aux entreprises intervenantes dans l'allongement du chantier ; la CCI-NC ne démontre pas que les sommes qu'elle sollicite se rattachent directement et exclusivement à l'incident de 2009 ;
- elle se contente d'invoquer des préjudices divers dont la plupart sont incertains et en tout état de cause, surévalués ;
- la CCI-NC ne remet pas sérieusement en cause le jugement entrepris qui a écarté ses prétentions fondées sur la responsabilité contractuelle de la société TET tout comme les surcoûts consécutifs à la défaillance de la société TET et à la résiliation de son marché à ses frais et risques ;
- il n'est pas justifié que l'exécutif de la CCI-NC ait été habilité à prononcer la résiliation litigieuse conformément à l'article 4 de la délibération n° 136/CP relative aux marchés publics en Nouvelle-Calédonie ; cette résiliation signée le 15 octobre 2010 est intervenue en méconnaissance de l'article 5 du CCAG Travaux applicable au marché en litige ; la CCI-NC ne conteste pas utilement le point 18 du jugement attaqué en ce qui concerne le prétendu abandon de chantier ;
- ni la requête ni le mémoire ampliatif de la CCI-NC ne contiennent de critique du jugement attaqué en ce qu'il a partiellement fait droit aux conclusions indemnitaires de la société TET et l'a condamnée à verser à cette dernière la somme de 30 000 000 francs CFP ; ses conclusions dirigées contre l'article 2 du jugement attaqué sont en conséquence irrecevables ;
- elle s'en rapporte à ses écritures de première instance ;
Un mémoire a été enregistré le 7 mai 2020 pour la Chambre de commerce et d'industrie de Nouvelle-Calédonie (CCI-NC).
II. Par une requête enregistrée sous le n° 19PA00842, le 22 février 2019, la Chambre de commerce et d'industrie de Nouvelle-Calédonie (CCI-NC), représentée par LexCity Avocats, demande à la Cour :
- d'ordonner le sursis à exécution du jugement n° 1500464 du 25 septembre 2018 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie sur le fondement de l'article R. 811-17 du code de justice administrative ;
- de condamner la société TET représentée par la SELARL Marie-Laure Gastaud à lui payer la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- le jugement du 25 septembre 2018 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie l'expose à un risque de perte définitive des sommes mises à sa charge dès lors que la société TET a été placée en redressement judiciaire puis en liquidation judiciaire par jugement du 19 janvier 2011 du Tribunal mixte de commerce de Nouméa ;
- les moyens énoncés dans la requête de fond et le mémoire ampliatif revêtent un caractère sérieux parce que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, d'une part, l'assemblée générale de la CCI-NC avait expressément habilité le Président à contracter tout marché et signer toutes les pièces y afférentes et d'autre part, il ressort clairement du rapport d'expertise que la société TET avait abandonné le chantier.
Par un mémoire enregistré le 19 mars 2020, la société TET représentée par la SELARL Marie-Laure Gastaud conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la CCI-NC à lui verser la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que le seul moyen invoqué au soutien de la demande de sursis à exécution du jugement attaqué étant le placement en liquidation judiciaire de la société TET, aucun moyen invoqué ne peut être regardé comme sérieux ;
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D...,
- les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public,
- les observations de Me A... pour la chambre de commerce et d'industrie de Nouvelle-Calédonie (CCI-NC),
- et les observations de Me C... pour la SELARL Marie-Laure Gastaud.
Considérant ce qui suit :
1. La chambre de commerce et d'industrie de Nouvelle-Calédonie (CCI-NC),a décidé d'engager des travaux d'extension et de réaménagement de l'aérogare passagers de l'aéroport international de Nouméa - La Tontouta. A cette fin, elle a d'abord confié la maîtrise d'oeuvre du projet, en vertu d'un marché n° 2005-INV-001 signé le 1er mars 2005, à un groupement solidaire constitué par la société Jacques Rougerie Architecte et la société OTH Méditerranée, aux droits de laquelle est venue la société Egis Bâtiments Méditerranée. Après avoir procédé à la résiliation amiable de ce marché, la CCI-NC a, par un marché n° 2011-INV-001 signé le 1er juillet 2011, confié la poursuite de cette mission de maîtrise d'oeuvre à un nouveau groupement solidaire constitué par la SARL Archipel, la SAS Jacques Rougerie Architecte, la SARL ECEP et la SARL CAPSE NC. Dans le cadre des marchés de travaux, allotis en 21 lots, la CCI-NC a notamment confié le lot n° 2 " Charpente / Couverture / Bardage / Métallerie " à la société Technique et Travaux (TET) pour un montant de 540 593 761 francs CFP HT. Ce marché a été résilié aux torts de la société TET par un ordre de service n° 24 en date du 15 octobre 2010 à compter du 18 octobre suivant. La CCI-NC a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie la condamnation de la société TET et de son assureur la société QBE Insurance Limited à lui verser la somme de 425 623 834 francs CFP soit la somme de 198 339 935 francs CFP au titre des fautes commises dans l'exécution de ses prestations à l'origine de l'effondrement d'une partie de la charpente le 15 septembre 2009 et une somme de 227 283 899 francs CFP au titre du décompte général du marché résilié le 18 octobre 2010. Par des conclusions reconventionnelles, la société TET a conclu à la condamnation de la CCI-NC à l'indemniser d'une somme de 143 828 893 francs CFP en réparation des préjudices subis du fait de la résiliation irrégulière de son marché, au titre de travaux supplémentaires non rémunérés et de la restitution de la retenue de garantie. Par un jugement du 25 septembre 2018, dont la CCI-NC relève appel et demande le sursis à exécution, le Tribunal administratif a rejeté sa demande et l'a condamnée à verser à la société TET la somme de 30 000 000 francs CFP.
2. Les requêtes visées ci-dessus sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un même arrêt.
Sur la requête n° 18PA03673 :
3. Aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. / L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours ".
4. La société TET fait valoir que ni la requête ni le mémoire ampliatif de la CCI-NC ne contiennent de critique du jugement attaqué. Il ressort en effet des pièces du dossier que cette requête ne contient aucun moyen à l'appui de la demande d'annulation du jugement attaqué et que le mémoire ampliatif, enregistré le 26 janvier 2019 au greffe de la Cour et parvenu après l'expiration du délai de recours, n'a pas pu régulariser le défaut de motivation de cette requête. Il s'ensuit qu'elle doit être rejetée comme irrecevable.
Sur la requête n° 19PA00842 :
5. La Cour se prononçant, par le présent arrêt, sur les conclusions de la CCI-NC tendant à l'annulation du jugement du 25 septembre 2018 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, les conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont privées d'objet. Il n'y a, par suite, pas lieu d'y statuer.
Sur les autres conclusions :
6. Les conclusions indemnitaires de la Chambre de commerce et d'industrie de Nouvelle-Calédonie étant rejetées, ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. Il y a lieu, en revanche, de mettre à sa charge au titre de ces mêmes dispositions, une somme de 1 500 euros à verser à la société TET représentée par la SELARL Marie-Laure Gastaud et de 1 500 euros à verser à la compagnie d'assurances QBE Insurance Limited.
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 19PA00842.
Article 2 : La requête n° 18PA03673 de la Chambre de commerce et d'industrie de Nouvelle-Calédonie est rejetée.
Article 3 : La Chambre de commerce et d'industrie de Nouvelle-Calédonie versera à la société TET représentée par la SELARL Marie-Laure Gastaud et à la compagnie d'assurances QBE Insurance Limited une somme de 1 500 euros chacune, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la Chambre de commerce et d'industrie de Nouvelle-Calédonie, à la société Technique et Travaux représentée par la SELARL Marie-Laure Gastaud et à la société QBE Insurance Limited.
Copie en sera adressée au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie.
Délibéré après l'audience du 12 juin 2020, à laquelle siégeaient :
- Mme D..., présidente,
- M. Mantz, premier conseiller,
- Mme Mach, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 juillet 2020.
La présidente,
M. D...
La République mande et ordonne à la ministre des outre-mer en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Nos 18PA03673... 2