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30/06/2020 | FRANCE | N°19PA03602

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 30 juin 2020, 19PA03602


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... F... D... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 30 avril 2019 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant son pays de renvoi.

Par un jugement n° 1905338 du 9 octobre 2019, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Par une requête enregistrée le 15 novembre 2019, M. D..., représenté par Me A..., demande

à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 9 octobre 2019 du Tribunal administratif de Me...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... F... D... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 30 avril 2019 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant son pays de renvoi.

Par un jugement n° 1905338 du 9 octobre 2019, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Par une requête enregistrée le 15 novembre 2019, M. D..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 9 octobre 2019 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler l'arrêté du 30 avril 2019 du préfet du Val-de-Marne ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;

4°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;

5°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne, dans tous les cas, de lui délivrer dans les quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, un récépissé conformément aux articles R. 311-4 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision contestée est entachée d'un vice de procédure en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour, en application de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il remplissait les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 de ce code ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet du Val-de-Marne a entaché son arrêté d'une erreur de droit en ne réexaminant sa situation qu'au regard de l'article L. 313-14 du code précité ;

- il aurait dû exercer son pouvoir discrétionnaire de régularisation au vu de sa situation particulière ;

- il a méconnu l'autorité de la chose jugée par le jugement du Tribunal administratif de Paris du 17 novembre 2018 qui a annulé pour méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales l'arrêté du 14 novembre 2018 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an ;

- il a entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle.

La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant égyptien né le 2 mai 1987, est entré en France le 10 février 2012 muni d'un visa de court séjour. Par un arrêté du 14 novembre 2018, le préfet de police l'a obligé à quitter sans délai le territoire français, et a pris à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. Par un jugement n° 1820858 du 17 novembre 2018, le magistrat désigné du Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté. M. D... a alors sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il relève appel du jugement du 9 octobre 2019 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 avril 2019 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

2. En premier lieu, M. D... se borne à reproduire en appel les moyens qu'il avait développés en première instance, sans les assortir d'éléments nouveaux, tirés de ce que le préfet n'a pas suffisamment motivé sa décision et qu'il a méconnu l'autorité de la chose jugée par le jugement du Tribunal administratif de Paris du 17 novembre 2018. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les juges de première instance, d'écarter ces moyens.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale. 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention ''vie privée et familiale'' est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".

4. M. D... déclare être entré sur le territoire français le 10 février 2012 et y résider depuis sans interruption, y disposer d'attaches familiales dès lors qu'il vit maritalement avec une ressortissante espagnole depuis 2016 et que ses frères et leurs enfants y vivent également, y travailler depuis 2016 et bénéficier d'une promesse d'embauche. Toutefois, il ne démontre pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de vingt-cinq ans. Par ailleurs, la communauté de vie avec sa compagne, établie seulement depuis le mois de mai 2017, revêtait un caractère récent à la date de la décision contestée. En outre, il ne démontre avoir travaillé que très partiellement entre juillet et décembre 2016 et n'apporte aucun élément de nature à démontrer une particulière insertion dans la société française alors qu'il admet lui-même ne parler que " passablement français ". Enfin, le caractère habituel de son séjour en France n'est attesté que depuis juin 2014, soit moins de cinq ans à la date de la décision contestée, la seule production de courriers, d'attestations de transport et de deux retraits bancaires n'établissant qu'une présence ponctuelle en France entre 2012 et 2014. Dans ces conditions, le préfet n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, la décision litigieuse n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.

5. En troisième lieu, l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. (...) ". Il résulte de ces dispositions que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour, lorsqu'il envisage de refuser un titre mentionné à l'article L. 312-2, que du cas des étrangers qui remplissent effectivement l'ensemble des conditions de procédure et de fond auxquelles est subordonnée la délivrance d'un tel titre, et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent des articles auxquels les dispositions de l'article L. 312-2 précitées renvoient.

6. Il résulte de ce qui a été dit au point 4 que M. D... ne pouvait prétendre à la délivrance de plein droit d'un titre de séjour au titre de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet n'était, par suite, pas tenu de saisir la commission du titre de séjour avant de statuer sur sa demande.

7. En quatrième lieu, si M. D... soutient que le préfet du Val-de-Marne a entaché son arrêté d'une erreur de droit en ne réexaminant sa situation qu'au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sans examiner si la décision méconnaissait notamment l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il ressort des termes mêmes de la décision litigieuse que le préfet précise qu'elle ne contrevient pas aux stipulations des articles 3 et 8 de la convention précitée. Le moyen manque donc en fait.

8. Enfin, M. D... soutient que le préfet aurait dû faire usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation compte tenu de l'ensemble des éléments de sa situation personnelle. Toutefois, ainsi qu'il a été dit aux points 2 et 4, le préfet a examiné la situation particulière du demandeur qui ne justifie pas de l'existence de motifs d'admission exceptionnelle ou de considérations humanitaires au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen doit être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... F... D... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 12 juin 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme B..., présidente,

- M. Mantz, premier conseiller,

- Mme Mach, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 juin 2020.

La présidente,

M. B...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19PA03602


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA03602
Date de la décision : 30/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière - Légalité interne - Droit au respect de la vie privée et familiale.


Composition du Tribunal
Président : Mme JULLIARD
Rapporteur ?: Mme Marianne JULLIARD
Rapporteur public ?: M. BARONNET
Avocat(s) : ETTALBI

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-06-30;19pa03602 ?
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