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25/06/2020 | FRANCE | N°19PA00168

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 25 juin 2020, 19PA00168


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) A la découverte de soi a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et en pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2009 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010.

Par un jugement n° 1702587 en date du 12 novembre 2018, le Tribu

nal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requê...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) A la découverte de soi a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et en pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2009 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010.

Par un jugement n° 1702587 en date du 12 novembre 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 11 janvier 2019 et des mémoires en réplique enregistrés le 26 septembre 2019 et le 29 novembre 2019, la société A la découverte de soi représentée par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1702587 du Tribunal administratif de Paris en date du

12 novembre 2018 ;

2°) de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2009 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été mis à sa charge pour la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010, ainsi que des intérêts de retard et des pénalités correspondants ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société requérante soutient que :

- la proposition de rectification en date du 16 décembre 2011 est insuffisamment motivée, les motifs de droit et la méthode de calcul du rappel de taxe sur la valeur ajoutée n'étant pas exposés ; cette irrégularité constitue une erreur substantielle au sens de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales sanctionnée par la décharge de l'ensemble de l'imposition ;

- les travaux ont été payés pour leur montant toutes charges comprises par ses associés et remboursés par la société par le biais des comptes courants d'associés ;

- la taxe sur la valeur ajoutée peut être regardée comme ayant été acquittée par la société ;

- la remise en cause de son droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ne peut pas justifier un rappel, puisqu'elle n'a collecté aucune taxe ;

- à titre subsidiaire, il y a lieu de réduire le rappel de taxe sur la valeur ajoutée en litige du montant du crédit de taxe non remis en cause ;

- les associés ont en outre consenti des avances en espèces à la société et payé en espèces des dépenses pour son compte ;

- si les versements ont été effectués au profit de la société Bio Beauté, cela ne suffit pas à en justifier la réintégration compte tenu des liens existant entre les deux sociétés ;

- la position de l'administration est incohérente s'agissant des abandons de créances.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 juillet 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de

covid-19 ;

- la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif modifiée ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société à responsabilité limitée (SARL) A la découverte de soi, créée le 5 novembre 2008, exploite un salon de massage thaïlandais. A la suite d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er novembre 2008 au 31 décembre 2010, la société A la découverte de soi s'est vue notifier, par une proposition de rectification en date du 16 décembre 2011, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010 et une cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2009. Elle relève appel du jugement en date du 12 novembre 2018 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande de décharge de ces impositions et des intérêts de retard correspondants.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile.

4. La proposition de rectification adressée à la société A la découverte de soi le 16 décembre 2011 mentionne les impôts concernés par les rectifications, les années ou période d'imposition, ainsi que les motifs, le fondement légal et le montant des rehaussements envisagés. En particulier, s'agissant du rappel de taxe sur la valeur ajoutée dû au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010, la proposition de rectification expose le mode de calcul de ce rappel, qui tient compte du crédit de taxe déclaré par la société à l'issue de la période contrôlée et des intérêts de retard. Par suite, le moyen tiré d'une insuffisance de motivation de la proposition de rectification ne peut qu'être écarté. Il en résulte que la société A la découverte de soi n'est pas fondée à soutenir que la procédure au terme de laquelle les impositions en litige ont été établies est entachée d'une irrégularité substantielle au sens des dispositions de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales.

Sur le bien-fondé des impositions litigieuses :

Sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

5. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d4une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. 2. Le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible chez le redevable. ". Aux termes du 2 de l'article 269 du même code : " La taxe et exigible : (...) / c) Pour les prestations de services autres que celles visées au b bis, lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération ou, sur option du redevable, d'après les débits. (...) ".

6. Il résulte de ces dispositions qu'un assujetti ne peut exercer son droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les éléments du prix d'une opération imposable que lorsqu'il s'est acquitté du prix demandé pour les biens qui lui ont été livrés ou pour les services qui lui ont été rendus et qu'il détient une facture mentionnant la taxe sur la valeur ajoutée.

7. En premier lieu, la société A la découverte de soi a mentionné, dans sa déclaration de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er novembre au 31 décembre 2008, un crédit de taxe sur la valeur ajoutée de 17 372 euros correspondant à hauteur de 14 210 euros à la taxe ayant grevé des prestations de travaux réalisées par la société Trois Frères Renov et à hauteur de 327,71 euros à la taxe ayant grevé des prestations de services effectuées par la société Gesteco. La société requérante soutient que les factures correspondantes, libellées à son nom, ont été payées par ses associés. Elle n'en justifie toutefois pas en se bornant à produire des attestations rédigées par la société Trois Frères Renov dont il ressort seulement qu'elle a perçu en espèces de M. C... la somme totale de 16 000 euros, dès lors qu'il n'est pas établi que ces versements correspondaient au règlement, d'ailleurs très partiel, de la facture du 30 décembre 2008 qui s'élevait à 86 710 euros toutes taxes comprises, deux des trois attestations mentionnant en outre que le paiement a été réalisé pour le compte de Ban Sin Thai.

8. En second lieu, s'agissant du montant du rappel de taxe sur la valeur ajoutée en litige, il résulte de l'instruction et notamment du tableau des conséquences financières figurant dans la proposition de rectification du 16 décembre 2011, qu'au cours de la période considérée, la société A la découverte de soi, qui a perçu des recettes à compter de l'année 2009, a procédé à des imputations de taxe sur la valeur ajoutée collectée sur le crédit de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle avait initialement déclaré. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que le service aurait omis de tenir compte d'un crédit de taxe de 2 834 euros qui n'a pas été remis en cause.

Sur les rehaussements en matière d'impôt sur les sociétés :

9. Aux termes de l'article 38 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " (...) 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. (...) ".

10. Pour l'application de ces dispositions, il appartient dans tous les cas au contribuable de justifier l'inscription d'une dette au passif de son bilan.

11. Dans le cadre de la vérification de comptabilité de la société A la découverte de soi, l'administration a constaté que les comptes courants d'associés ouverts aux noms de M. C..., de Mme D... et de Mme B..., dans les écritures comptables de la société, présentaient au profit de leurs titulaires respectifs, un solde créditeur de 36 860 euros, 27 660 euros et 36 860 euros au 31 décembre 2009. Le service a considéré que la société ne justifiait pas de la réalité de sa dette à l'égard de ses trois associés et a réintégré ces sommes au résultat imposable de son exercice clos le 31 décembre 2009.

12. En premier lieu, il résulte de l'instruction que pour établir l'existence de ces dettes à l'égard de ses associés, la société A la découverte de soi a produit, au cours du contrôle, des pièces justifiant de versements par les trois associés à la société BGF ou à la société Bio Beauté, dénomination commerciale de la société BGF. La société requérante soutient que la société Bio Beauté devait à l'origine exploiter le salon de massage dont elle avait pris en charge les travaux et l'aménagement du local commercial et que, pour des raisons financières, elle avait été remplacée par la société A la découverte de soi constituée par les mêmes associés. Toutefois, alors que la société Bio Beauté est une personne morale distincte de la société A la découverte de soi, cette dernière ne produit aucun élément permettant d'établir un lien entre les sommes apportées à la société Bio Beauté et les crédits en litige inscrits sur les comptes courants d'associés ouverts dans les livres de la société A la découverte de soi, faute notamment de justifier qu'elle viendrait aux droits et obligations de la société Bio Beauté. Pour la même raison, les pièces attestant de paiements réalisés par les sociétés Bio Santé et BGF ne peuvent pas justifier de l'inscription des sommes correspondantes au crédit des comptes courants des associés de la société A la découverte de soi.

13. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que la société requérante a également produit des attestations établies par la société Trois Frères Renov dont il ressort que cette société a perçu en espèces de M. C..., la somme totale de 16 000 euros. Ces pièces ne suffisent toutefois pas à justifier que ces versements ont été effectués en règlement de la facture du 30 décembre 2008, d'un montant toutes taxes comprises de 86 710 euros, libellée au nom de la société A la découverte de soi et que M. C... se trouvait subrogé dans les droits du créancier à l'égard de celle-ci. Ces attestations ne permettent ainsi pas d'établir l'existence d'une dette de la société requérante à l'égard de son associé, M. C.... De même, la société requérante ne justifie pas du paiement par ce dernier de la somme de 1 999,71 euros due à la société Gesteco.

14. En troisième lieu, si la société requérante fait également valoir que les soldes créditeurs des comptes courants d'associés correspondent également pour partie au remboursement de dépenses exposées en espèces par ses associés pour l'exploitation de l'activité de massage, elle n'en justifie pas par la seule production de copies de tickets de caisse ou de factures qui ne permettent ni d'identifier la personne qui aurait fait l'avance de ces dépenses, ni d'établir que celles-ci auraient été engagées dans l'intérêt de la société.

15. En dernier lieu, les mentions des tickets bancaires produits attestant de trois dépôts de 2 100 euros en espèces ne permettent pas d'identifier la personne à l'origine de ces versements. Par suite, c'est à bon droit que le service a considéré que les sommes correspondantes ne constituaient pas un passif justifié et qu'il les a réintégrées dans le résultat imposable de la société A la découverte de soi.

16. Il résulte de tout ce qui précède que la société A la découverte de soi n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL A la découverte de soi est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée A la découverte de soi et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée au directeur général des finances publiques d'Île-de-France et de Paris.

Délibéré après l'audience du 11 juin 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme Poupineau, président,

- Mme Lescaut, premier conseiller,

- M. A..., premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 juin 2020.

Le président,

V. POUPINEAU

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 19PA00168 6


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA00168
Date de la décision : 25/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Détermination du bénéfice net.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée - Liquidation de la taxe - Déductions.


Composition du Tribunal
Président : Mme POUPINEAU
Rapporteur ?: M. François DORE
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : OLLIVIER BELBOL

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-06-25;19pa00168 ?
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