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26/05/2020 | FRANCE | N°19PA01835

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 26 mai 2020, 19PA01835


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une première demande, M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'avis de la somme à payer d'un montant de 10 929,77 euros, émis à son encontre le 16 octobre 2017 par la Ville de Paris, correspondant à l'exécution d'office de l'arrêté du 19 septembre 2013 du préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, déclarant insalubre à titre remédiable le logement situé au 6ème étage porte droite de l'immeuble situé au 35 rue Stephenson dans le 18ème arrondissement de

Paris et prescrivant des travaux pour remédier à l'insalubrité constatée. Par une ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une première demande, M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'avis de la somme à payer d'un montant de 10 929,77 euros, émis à son encontre le 16 octobre 2017 par la Ville de Paris, correspondant à l'exécution d'office de l'arrêté du 19 septembre 2013 du préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, déclarant insalubre à titre remédiable le logement situé au 6ème étage porte droite de l'immeuble situé au 35 rue Stephenson dans le 18ème arrondissement de Paris et prescrivant des travaux pour remédier à l'insalubrité constatée. Par une deuxième demande, M. C... D... a demandé au tribunal d'annuler l'avis de la somme à payer d'un montant de 874,38 euros émis à son encontre le 16 octobre 2017 par la Ville de Paris, correspondant au montant forfaitaire de

8 % des dépenses engagées aux frais des propriétaires défaillants prévu à l'article L. 543-2 du code de la construction et de l'habitation.

Par un jugement n° 1719016-1719017 du 9 avril 2019, le tribunal administratif de Paris, après les avoir jointes, a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 5 juin 2019, M. D..., représenté par

Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1719016-1719017 du 9 avril 2019 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler les avis de sommes à payer n° 600431 et n° 292283 émis par la Ville de Paris le 16 octobre 2017 et de le décharger de l'obligation de payer les sommes de

10 929,77 euros et 874,38 euros;

3°) de mettre à la charge de la Ville de Paris la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient :

- à titre principal, qu'il résulte des dispositions de l'article L. 1331-30 du code de la santé publique que, si le propriétaire d'un bien est débiteur des frais avancés en ses lieu et place par l'autorité administrative, il a cédé son immeuble à un tiers qui est, de ce fait, seul redevable des sommes dont le paiement est réclamé, l'acte de cession étant opposable à la collectivité publique à compter de son dépôt au fichier immobilier intervenu avant l'émission des titres ;

- à titre subsidiaire, que s'il n'entend pas contester l'intégralité des travaux effectués par la Ville de Paris, d'une part, celle-ci n'a pas tenu compte des travaux réalisés par le syndic de l'immeuble et par lui-même et, d'autre part, elle lui demande le remboursement de travaux qui n'ont pas été mentionnés dans l'arrêté préfectoral d'insalubrité.

Une mise en demeure a été adressée le 12 novembre 2019 à la Ville de Paris qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Par ordonnance du 19 décembre 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au

20 janvier 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de la santé publique ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les conclusions de Mme Pena, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 19 septembre 2013, le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, au vu d'un rapport du service technique de l'habitat de la Ville de Paris du 30 avril 2013 concluant à l'insalubrité du logement situé au 35 rue Stephenson dans le 18ème arrondissement de Paris, a déclaré ce logement insalubre à titre remédiable et a prescrit à M. D... la réalisation de travaux dans un délai de huit mois. Par un courrier en date du 8 avril 2016, ce dernier a demandé la levée de l'arrêté d'insalubrité en se prévalant de la réalisation des travaux demandés. Par procès-verbal du 21 septembre 2016 pris sur le fondement des articles L. 1331-26 et suivants du code de la santé publique, les agents du service technique de l'habitat ont constaté que l'intéressé n'avait pas complètement satisfait aux mesures prescrites. La maire de Paris a alors mis M. D... en demeure d'exécuter l'intégralité des travaux prescrits dans le délai d'un mois. Par procès-verbal du 12 janvier 2017, l'inspectrice de salubrité du service technique de l'habitat de la Ville de Paris a constaté l'exécution partielle des travaux prescrits par l'arrêté d'insalubrité. Entre le 4 et le 14 mai 2017, la Ville de Paris a ensuite procédé à l'exécution d'office des travaux non effectués et en a réclamé le remboursement au requérant.

M. D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler les avis des sommes à payer d'un montant de 10 929,77 euros et de 874,38 euros émis à son encontre le

16 octobre 2017 par la Ville de Paris, correspondant à l'exécution d'office de l'arrêté du

19 septembre 2013 du préfet de la région d'Ile-de-France et à l'indemnité forfaitaire de 8 % des dépenses engagées mise à la charge des propriétaires défaillants. Il relève appel du jugement du 9 avril 2019 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 1331-26 du code de la santé publique : " Lorsqu'un immeuble, (...) constitue, soit par lui-même, soit par les conditions dans lesquelles il est occupé ou exploité, un danger pour la santé des occupants ou des voisins, le représentant de l'Etat dans le département, saisi d'un rapport motivé (...) du directeur du service communal d'hygiène et de santé concluant à l'insalubrité de l'immeuble concerné, invite la commission départementale compétente en matière d'environnement, de risques sanitaires et technologiques à donner son avis dans le délai de deux mois : 1° Sur la réalité et les causes de l'insalubrité ; 2° Sur les mesures propres à y remédier. (...) ". L'article L. 1331-27 de ce code poursuit : " Le représentant de l'Etat dans le département avise les propriétaires, tels qu'ils figurent au fichier immobilier (...) de la tenue de la réunion de la commission départementale compétente en matière d'environnement, de risques sanitaires et technologiques et de la faculté qu'ils ont de produire dans ce délai leurs observations. (...). Une copie est déposée à la mairie de la commune (...) où est situé l'immeuble. (...) ". En vertu de l'article L. 1331-28 II du même code : " II.- Lorsque la commission ou le haut conseil conclut à la possibilité de remédier à l'insalubrité, le représentant de l'Etat dans le département prescrit par arrêté les mesures adéquates ainsi que le délai imparti pour leur réalisation sur avis de la commission ou du haut conseil et prononce, s'il y a lieu, l'interdiction temporaire d'habiter et, le cas échéant, d'utiliser les lieux ". Aux termes de l'article L. 1331-29 dudit code : " Si les mesures prescrites par l'arrêté prévu au II de l'article L. 1331-28 pour remédier à l'insalubrité d'un immeuble n'ont pas été exécutées dans le délai imparti, le propriétaire est mis en demeure dans les conditions prévues par l'article L. 1331-28-1 de les réaliser dans le délai d'un mois. Si cette mise en demeure s'avère infructueuse, les mesures peuvent être exécutées d'office, y compris sur des locaux devenus vacants (...) V. - Le maire (...) est l'autorité administrative compétente pour réaliser d'office les mesures prescrites dans les cas visés aux I, II, III et IV. Dans ce cas, la commune (...) assure l'avance des frais si le maire (...) réalise d'office ces mesures. (...) ". Conformément à l'article L. 1331-30 : " I. - Lorsque l'autorité administrative se substitue au propriétaire défaillant et fait usage des pouvoirs d'exécution d'office qui lui sont reconnus par les articles (...) L. 1331-28, elle agit en lieu et place des propriétaires, pour leur compte et à leurs frais. / (...). / II. - La créance de la collectivité publique résultant des frais d'exécution d'office, du paiement des sommes avancées en lieu et place d'un copropriétaire défaillant, d'expulsion et de publicité ainsi que des frais qui ont, le cas échéant, été exposés pour le relogement ou l'hébergement des occupants est recouvrée comme en matière de contributions directes. /Lorsqu'une collectivité publique s'est substituée à certains copropriétaires défaillants, le montant de la créance due par ceux-ci est majoré de celui des intérêts moratoires calculés au taux d'intérêt légal, à compter de la date de notification par l'autorité administrative de la décision de substitution aux copropriétaires défaillants ". Enfin, aux termes de l'article L. 543-2 du code de la construction et de l'habitation : " Afin de prendre en compte les coûts de maîtrise d'ouvrage et d'accompagnement social supportés par les services de l'Etat, des communes ou de leurs groupements à raison des travaux et mesures prescrits par les arrêtés, mises en demeure ou injonctions pris en application des articles L. 1311-4, L. 1331-24, L. 1331-26 et L. 1331-26-1, L. 1334-2, L. 1334-16 du code de la santé publique et L. 123-3, L. 129-2, L. 129-3, L. 129-4-1, L. 511-2 et L. 511-3 du présent code, le recouvrement des dépenses engagées aux frais des propriétaires défaillants comporte, outre le montant des dépenses recouvrables prévues à ces mêmes articles, un montant forfaitaire de 8 % de ces dépenses ".

3. Le juge saisi d'un recours dirigé contre un titre exécutoire doit se prononcer au vu des circonstances de droit et de fait existant à la date de sa décision.

4. Il résulte des dispositions de l'article L. 1331-30 du code de la santé publique précité, que lorsque l'autorité administrative se substitue au propriétaire défaillant et fait usage des pouvoirs d'exécution d'office qui lui sont reconnus, elle agit en lieu et place des propriétaires, pour leur compte et à leurs frais. La date de naissance de la créance dont elle peut se prévaloir à leur encontre est alors celle de la réalisation des travaux. En l'espèce, il résulte de l'instruction que le logement en cause a été vendu par M. D..., par acte authentique du 3 mai 2014 qui stipulait, au surplus, que l'acquéreur avait connaissance de l'existence de l'arrêté d'insalubrité, qu'il avait parfaite connaissance de la situation et qu'il déclarait en faire son affaire personnelle. La vente étant intervenue avant la naissance de la créance dont se prévaut la Ville de Paris, soit le 4 mai 2017, date de début des travaux, M. D... n'était alors plus propriétaire de l'immeuble. Par ailleurs, à la date d'émission des titres de paiement, le

16 octobre 2017, la vente enregistrée le 30 mai 2017 par les services de la publicité foncière, était opposable aux tiers et ne pouvait être ignorée par la Ville de Paris.

5. Il résulte ainsi de ce qui précède que M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation des avis de sommes à payer du 16 octobre 2017 et à ce qu'il soit déchargé des sommes y afférentes.

Sur les frais de justice :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la Ville de Paris une somme de 1 500 euros à verser à M. D... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris n° 1719016 et 1719017 du 9 avril 2019 et les avis n° 600431 et 292283 de sommes à payer d'un montant de 10 929,77 euros et de 874,38 euros émis par la Ville de Paris le 16 octobre 2017 sont annulés.

Article 2 : M. D... est déchargé de l'obligation de payer la somme totale de 11 804,15 euros réclamée par la Ville de Paris.

Article 3 : La Ville de Paris versera à M. D... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent jugement sera notifié à M. C... D... et à la Ville de Paris.

Délibéré après l'audience publique du 3 mars 2020 à laquelle siégeaient :

- M. Bernier, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme A..., premier conseiller,

- Mme Mornet, premier conseiller.

Lu en audience publique le 26 mai 2020.

Le rapporteur,

M-E... A... Le président de la formation de jugement,

Ch. BERNIER

Le greffier,

N. DAHMANI

La République mande et ordonne au ministre chargé de la ville et du logement en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 10PA03855

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N° 19PA01835


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA01835
Date de la décision : 26/05/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Comptabilité publique et budget - Créances des collectivités publiques - Existence.

Santé publique - Protection générale de la santé publique - Police et réglementation sanitaire - Salubrité des immeubles.


Composition du Tribunal
Président : M. BERNIER
Rapporteur ?: Mme Marie-Dominique JAYER
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : SCP JEAN-PHILIPPE AUTIER

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-05-26;19pa01835 ?
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