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26/05/2020 | FRANCE | N°18PA02068

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 26 mai 2020, 18PA02068


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le comité d'actions sociales et culturelles (CASC) du personnel de la ville de Villejuif a saisi le Tribunal administratif de Melun d'une demande tendant, sous le numéro 1610526 à l'annulation de la délibération n° 92/2016 du 1er juillet 2016 du conseil municipal de la commune de Villejuif relative à l'adhésion au comité national d'action sociale ainsi que de la décision de rejet implicite de sa demande du 25 août 2016 tendant au retrait de cette délibération, à l'établissement d'une convention afin

d'organiser les relations entre la ville et le CASC, au versement d'une somme...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le comité d'actions sociales et culturelles (CASC) du personnel de la ville de Villejuif a saisi le Tribunal administratif de Melun d'une demande tendant, sous le numéro 1610526 à l'annulation de la délibération n° 92/2016 du 1er juillet 2016 du conseil municipal de la commune de Villejuif relative à l'adhésion au comité national d'action sociale ainsi que de la décision de rejet implicite de sa demande du 25 août 2016 tendant au retrait de cette délibération, à l'établissement d'une convention afin d'organiser les relations entre la ville et le CASC, au versement d'une somme mensuelle de 24 000 euros dans l'attente de la signature de cette convention et enfin à l'annulation de la délibération n° 191/2016 du 9 décembre 2016 de la commune de Villejuif relative à la régularisation de l'adhésion au comité national d'action sociale, outre des conclusions à fin d'injonction, des conclusions indemnitaires et des conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Sous le n° 1610778 le CASC a demandé l'annulation de la décision du maire de la commune de Villejuif révélée par sa correspondance du 8 décembre 2016 mettant fin au partenariat noué avec le comité d'actions sociales et culturelles du personnel de la ville de Villejuif.

Par un jugement n° 1610526, 1610778 du 12 avril 2018, le Tribunal administratif de Melun a décidé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions à fin d'annulation de la délibération du 1er juillet 2016 et de la décision implicite de rejet du recours gracieux formé contre elle et a rejeté le surplus des demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 juin 2018, le comité d'actions sociales et culturelles (CASC) du personnel de la ville de Villejuif, représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 12 avril 2018 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler l'ensemble des délibérations et décisions mentionnées ci-dessus ;

3°) de condamner la ville de Villejuif à lui verser une somme mensuelle de 24 000 euros à échoir pour la première fois le 1er septembre 2016, avec intérêts légaux ;

4°) d'enjoindre au maire de Villejuif de signer avec le CASC une convention dans le respect des droits acquis dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de la ville de Villejuif une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier pour insuffisance de motivation, méconnaissance du principe du contradictoire, défaut de prise en compte de ses mémoires en réplique et pour avoir soulevé d'office des moyens d'ordre public sans les communiquer aux parties ;

- les délibérations litigieuses sont entachées d'incompétence ;

- elles méconnaissent les dispositions de l'article 9 de la loi du 13 juillet 1983 ;

- ces délibérations lui ont retiré la gestion de l'action sociale au profit des personnels de la commune sans procédure contradictoire, ni consultation du personnel ;

- ces délibérations n'ont pas respecté l'avenant du 4 décembre 2015 selon lequel " une nouvelle convention devra être expressément consentie et signée ".

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 mars 2019, la commune de Villejuif, représentée par la SELARL Claisse et Associés, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge du CASC du personnel de la ville de Villejuif au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par le CASC du personnel de la ville de Villejuif ne sont pas fondés.

Par un mémoire en réplique, enregistré le 4 juin 2019, le CASC du personnel de la ville de Villejuif maintient ses conclusions par les mêmes moyens.

Par une ordonnance du 29 avril 2019, la clôture d'instruction a été reportée au 5 juin 2019 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,

- les observations de Me D... pour le CASC,

- et les observations de Me C..., pour la commune de Villejuif.

Considérant ce qui suit :

1. Le comité d'actions sociales et culturelles (CASC) du personnel de la ville de Villejuif a conclu avec la commune de Villejuif, le 15 octobre 2012, pour une durée de trois ans, une convention d'objectifs et de moyens ayant pour objet le développement de prestations socio-culturelles et sportives destinées aux agents territoriaux de la commune et du centre communal d'action sociale (CCAS). Cette convention a été prolongée jusqu'au 31 décembre 2015 par un avenant du 4 décembre 2015, puis jusqu'au 31 août 2016 par un nouvel avenant du 23 décembre 2015 puis, par une délibération n° 92/2016 du 1er juillet 2016, le conseil municipal de la commune de Villejuif a autorisé le maire de la commune à signer une convention avec le comité national d'action sociale (CNAS) pour assurer l'action sociale à destination des agents de la commune à partir du 1er septembre 2016. Par une nouvelle délibération n° 191/2016 du 9 décembre 2016 le conseil municipal a régularisé celle du 1er juillet 2016 en consultant au préalable le comité technique. Le CASC du personnel de la ville de Villejuif a saisi le Tribunal administratif de Melun de deux demandes tendant, d'une part, à l'annulation de la délibération n° 92/2016 du 1er juillet 2016 et la décision de rejet implicite de sa demande du 26 août 2016 tendant au retrait de cette délibération, à l'établissement d'une convention afin d'organiser les relations entre la ville et le CASC du personnel et au versement d'une somme mensuelle de 24 000 euros dans l'attente de la signature de cette convention, ensemble la délibération n° 191/2016 du 9 décembre 2016, d'autre part à l'annulation de la décision du maire de la commune de Villejuif révélée par sa correspondance du 8 décembre 2016 mettant fin au partenariat noué avec le CASC. Par un jugement du 12 avril 2018, le Tribunal administratif de Melun a décidé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions à fin d'annulation de la délibération du 1er juillet 2016 et de la décision implicite de rejet du recours gracieux formé contre elle et a rejeté le surplus des demandes. Le CASC du personnel de la ville de Villejuif relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort des pièces des dossiers de première instance que le tribunal avait, dans les deux instances, procédé à une clôture de l'instruction au 25 août 2017. Postérieurement à cette date, le CASC du personnel de la ville de Villejuif a présenté le 14 décembre 2017 un mémoire en défense dans chaque instance. La communication de ces deux mémoires en défense le 15 décembre 2017 a eu pour effet de rouvrir l'instruction dans les deux instances et le CASC du fait de cette communication n'est donc pas fondé à invoquer une prétendue méconnaissance du caractère contradictoire de la procédure. Toutefois, le CASC soutient aussi que ces deux mémoires en réplique du 16 mars 2018 n'ont pas été pris en compte par le tribunal. Il ressort des énonciations du jugement attaqué que si ces deux mémoires ont bien été visés, ils n'ont pas été analysés et n'ont donc pas été pris en compte par les premiers juges, le jugement attaqué visant d'ailleurs à tort l'ordonnance de clôture d'instruction au 25 août 2017 alors que, comme il vient d'être dit, la communication des deux mémoires en défense le 15 décembre 2017 a eu pour effet de rouvrir l'instruction dans les deux instances. Le CASC est donc fondé à soutenir que l'absence de prise en compte de ses mémoires en réplique entache le jugement attaqué d'irrégularité et à en demander, pour ce motif, l'annulation sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens tirés de l'irrégularité de ce jugement.

3. Il y a donc lieu pour la Cour d'annuler le jugement attaqué et de statuer immédiatement sur les demandes du CASC du personnel de la ville de Villejuif devant le Tribunal administratif de Melun.

Sur les conclusions à fin d'annulation de la délibération du conseil municipal du 9 décembre 2016 :

4. Aux termes de l'article 9 de la loi visée ci-dessus du 13 juillet 1983 : " Les fonctionnaires participent par l'intermédiaire de leurs délégués siégeant dans des organismes consultatifs à l'organisation et au fonctionnement des services publics, à l'élaboration des règles statutaires, à la définition des orientations en matière de politique de ressources humaines et à l'examen de décisions individuelles dont la liste est établie par décret en Conseil d'Etat. Ils participent à la définition et à la gestion de l'action sociale, culturelle, sportive et de loisirs dont ils bénéficient ou qu'ils organisent (...). L'Etat, les collectivités locales et leurs établissements publics peuvent confier à titre exclusif la gestion de tout ou partie des prestations dont bénéficient les agents à des organismes à but non lucratif ou à des associations nationales ou locales régies par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association. Ils peuvent participer aux organes d'administration et de surveillance de ces organismes. ". Aux termes de l'article 88-1 de la loi visée ci-dessus du 26 janvier 1984 : " Les organes délibérants des collectivités territoriales et de leurs établissements publics déterminent le type des actions et le montant des dépenses qu'ils entendent engager pour la réalisation des prestations prévues à l'article 9 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, ainsi que les modalités de leur mise en oeuvre. ".

5. En premier lieu, il ressort des termes de l'article 88-1 de la loi du 26 janvier 1984 cité ci-dessus que, contrairement à ce que soutient le CASC, le conseil municipal de Villejuif était bien compétent pour définir les modalités d'accès des agents communaux aux prestations d'action sociale.

6. En deuxième lieu, si le CASC du personnel de la ville de Villejuif fait valoir qu'il assume, depuis sa création, l'ensemble des prestations d'action sociale dont sont bénéficiaires les agents de la ville de Villejuif, cette seule circonstance ne lui confère aucun droit au renouvellement de la convention le liant à la ville et est donc sans incidence sur la légalité de la délibération litigieuse du 9 décembre 2016 . Ce moyen ne peut donc qu'être écarté.

7. En troisième lieu, le CASC du personnel de la ville de Villejuif soutient qu'aucune décision régulière n'a été prise par une autorité compétente pour lui retirer ses missions et que ce retrait n'a pas été précédé de la mise en oeuvre d'une procédure contradictoire. Toutefois, comme il a été dit ci-dessus, le CASC du personnel de la ville de Villejuif ne s'était vu confier les missions de gestion des prestations sociales des agents de la commune que jusqu'au 31 août 2016 et ne peut se prévaloir d' aucun droit au renouvellement des missions qui lui avaient été confiées après cette date. Ces moyens doivent donc être écartés comme inopérants.

8. En quatrième lieu, le CASC du personnel de la ville de Villejuif soutient que l'avenant du 4 décembre 2015 imposait à la commune de signer avec elle une nouvelle convention et avait ainsi créé des droits à son profit. Or cet avenant du 4 décembre 2015 stipulait : " La convention initiale consentie et acceptée pour une durée de 3 ans à compter de la signature par toutes les parties (article 10 de la convention) est prolongée jusqu'au 31 décembre 2015. / A l'expiration de la convention, une nouvelle convention devra être expressément consentie et signée par les parties ". Il ressort de ces stipulations qu'elles excluent la possibilité d'une reconduction ou d'une prolongation tacite de la convention et n'ouvrent aucun droit à une telle reconduction. Par suite, ce moyen doit également être écarté.

9. En dernier lieu, contrairement à ce que soutient le CASC les représentants du personnel ont bien été consultés préalablement à la délibération du 9 décembre 2016, puisque le comité technique en a été saisi le 8 novembre 2016.

10. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation de la délibération n° 191/2016 du 9 décembre 2016 de la commune de Villejuif doivent être rejetées.

Sur les conclusions à fin d'annulation de la délibération du conseil municipal du 1er juillet 2016 et de la décision qui serait révélée par un courrier du maire de la commune en date du 8 décembre 2016 :

11. En premier lieu, la délibération n° 191/2016 du 9 décembre 2016, par laquelle le conseil municipal de la ville de Villejuif a, après consultation du comité technique paritaire le 8 novembre 2016, autorisé l'adhésion de la commune au comité national d'action sociale, doit être regardée comme ayant nécessairement retiré la délibération n° 92/2016 du 1er juillet 2016 du conseil municipal de la commune de Villejuif ayant le même objet. Compte tenu du rejet des conclusions à fin d'annulation de la délibération du 9 décembre 2016, il n'y a donc plus lieu de statuer sur les conclusions à fin d'annulation de la délibération du 1er juillet 2016, de la décision implicite de rejet du recours gracieux formé contre elle, ainsi que de la décision révélée selon le CASC par le courrier du maire de la commune de Villejuif en date du 8 décembre 2016.

Sur les conclusions indemnitaires :

12. Il résulte de l'instruction que la convention du 15 octobre 2012 que le CASC du personnel de la ville de Villejuif avait conclue avec la commune expirait le 31 août 2016, de sorte que le CASC ne pouvait bénéficier de la subvention prévue par cette convention que jusqu'à cette date. Par suite, sa demande tendant au versement d'indemnités aux lieu et place de cette subvention à compter du 1er septembre 2016 ne peut qu'être rejetée. Par ailleurs, le CASC n'ayant pas démontré l'illégalité fautive des délibérations et décisions attaquées, il n'est pas fondé à demander l'indemnisation du préjudice qu'elles lui auraient causé.

Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :

13. Ces conclusions ne peuvent qu'être rejetées par voie de conséquence du rejet ou du caractère dépourvu d'objet des conclusions à fin d'annulation des demandes du CASC du personnel de la ville de Villejuif.

Sur les conclusions des parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de faire droit aux conclusions des parties présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1610526, 1610778 du 12 avril 2018 du Tribunal administratif de Melun est annulé.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin d'annulation de la délibération n° 92/2016 du 1er juillet 2016 du conseil municipal de la commune de Villejuif et de la décision qui serait révélée par le courrier du maire de Villejuif en date du 8 décembre 2016.

Article 3 : Le surplus des conclusions du comité d'actions sociales et culturelles du personnel de la ville de Villejuif devant le Tribunal administratif de Melun et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 4 : Les conclusions de la commune de Villejuif présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au comité d'actions sociales et culturelles du personnel de la ville de Villejuif et à la commune de Villejuif.

Délibéré après l'audience du 10 mars 2020 à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président assesseur,

- M. B..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 mai 2020.

Le rapporteur,

D. PAGES

Le président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

T. ROBERT

La République mande et ordonne au préfet du Val-de-Marne en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 18PA02068 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA02068
Date de la décision : 26/05/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-07 Fonctionnaires et agents publics. Statuts, droits, obligations et garanties.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : SCP WEYL

Origine de la décision
Date de l'import : 12/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-05-26;18pa02068 ?
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