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13/05/2020 | FRANCE | N°19PA00681

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 13 mai 2020, 19PA00681


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société RS.T a demandé au Tribunal administratif de Paris de lui accorder la décharge, en droits et pénalités, des cotisations de taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux, les locaux de stockage et les surfaces de stationnement, qu'elle a acquittées au titre des années 2014 à 2016.

Par un jugement n° 1709203/2-1 du 11 décembre 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire,

enregistrés respectivement les 8 février et 25 juillet 2019, la société RS.T, représentée par Me...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société RS.T a demandé au Tribunal administratif de Paris de lui accorder la décharge, en droits et pénalités, des cotisations de taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux, les locaux de stockage et les surfaces de stationnement, qu'elle a acquittées au titre des années 2014 à 2016.

Par un jugement n° 1709203/2-1 du 11 décembre 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement les 8 février et 25 juillet 2019, la société RS.T, représentée par Me B... E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1709203/2-1 du 11 décembre 2018 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de lui accorder la décharge sollicitée devant le tribunal ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier, dès lors que les premiers juges n'ont pas pris en compte les documents produits à l'appui de la note en délibéré ;

- c'est à tort que le tribunal a refusé de lui accorder la restitution demandée, dès lors que les locaux en cause relèvent de l'exonération prévue au 3° du V de l'article 231 ter du code général des impôts, s'agissant de locaux commerciaux d'une superficie inférieure à 2 500 mètres carrés ;

- la nature commerciale de ces locaux se déduisait des pièces qui étaient produites et que le tribunal a dénaturées ;

- elle se déduit également des définitions données par l'instruction BOI-IF-AUT-50-10. ;

- si le ministre a admis, dans son mémoire en défense produit devant la Cour, le

bien-fondé de sa requête concernant les locaux en cause hormis le 7ème étage, c'est à tort qu'il persiste, concernant cet étage, à prétendre qu'il conviendrait de maintenir l'imposition au motif que la surface taxable devrait être fixée à 104,05 m2 alors qu'elle justifie par les documents produits que la surface du 7ème étage à retenir est inférieure à 100 m2, seuil en deçà duquel l'imposition n'est pas due.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 5 juillet 2019 et 10 février 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au non-lieu à statuer à hauteur de sommes qui feront l'objet d'un prochain dégrèvement et pour le reste au rejet de la requête.

Il soutient que :

- l'administration admet au vu des documents présentés par la requérante que les locaux de l'immeuble du 22 René Boulanger sont utilisés par la locataire pour l'exercice d'une activité commerciale, à l'exclusion de ceux du 7ème étage et prononce en conséquence au titre des années 2014, 2015 et 2016 des dégrèvements à hauteur respectivement de 22 420 euros, 22 269 euros et 22 041 euros ;

- pour le reste, aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Une intervention a été enregistrée le 5 juillet 2019, pour la société Espaces Vocation Paris, représentée par Me C... A..., suivie d'un mémoire complémentaire enregistré le

30 juillet 2019 par lesquels la société Espaces Vocation Paris conclut à ce que la Cour fasse droit aux conclusions de la requête de la société RS.T, et mette à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les locaux litigieux relèvent de l'exonération prévue au 3° du V de l'article 231 ter du code général des impôts ;

- l'administration a d'ailleurs admis le bien-fondé de la requête concernant les locaux en cause, hormis le 7ème étage, mais c'est à tort qu'elle persiste, concernant cet étage, à prétendre qu'il conviendrait de maintenir l'imposition au motif que la surface taxable devrait être fixée à

104,05 m2 alors qu'il est justifié par une attestation de géomètre que la surface du 7ème étage à retenir est inférieure à 100 m2.

Par ordonnance du 10 février 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 25 février 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- les conclusions de Mme Jimenez, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., avocat de la société Espaces Vocation Paris.

Considérant ce qui suit :

1. La société RS.T est propriétaire d'un immeuble situé 22 rue René Boulanger à Paris (75010), au titre duquel elle s'est spontanément acquittée, au titre des années 2014 à 2016, de la taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux, les locaux de stockage et les surfaces de stationnement prévue à l'article 231 ter du code général des impôts. L'administration fiscale ayant rejeté le 13 avril 2017, la réclamation présentée en vue d'obtenir la décharge des sommes versées à ce titre, la société RS.T a demandé en vain au Tribunal administratif de Paris de lui accorder cette décharge. Par la présente requête, elle relève appel du jugement n° 1709203/2-1 du 11 décembre 2018 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande.

Sur l'étendue du litige :

2. Par décision en date du 14 août 2019, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux de la région d'Ile de France et de Paris a prononcé des dégrèvements au titre des années 2014, 2015 et 2016 à concurrence respectivement de 22 420 euros, 22 289 euros et 22 041 euros. Les conclusions de la requête de la société RS.T relatives à ces impositions sont, dans cette mesure, devenues sans objet.

Sur l'intervention de la société Espaces Vocation Paris :

3. La société Espaces Vocation Paris, en sa qualité de preneur des locaux en cause, justifie, eu égard à la nature et à l'objet du litige, d'un intérêt suffisant à intervenir au soutien de la requête de la société RS.T. Son intervention est dès lors recevable.

Sur la régularité du jugement :

4. Aux termes de l'article R. 731-3 du code de justice administrative : " A l'issue de l'audience, toute partie à l'instance peut adresser au président de la formation de jugement une note en délibéré ". Lorsqu'il est saisi, postérieurement à la clôture de l'instruction et au prononcé des conclusions du rapporteur public, d'une note en délibéré émanant d'une des parties à l'instance, le juge administratif doit dans tous les cas en prendre connaissance avant la séance au cours de laquelle sera rendue la décision. S'il a toujours la faculté, dans l'intérêt d'une bonne justice, de rouvrir l'instruction et de soumettre au débat contradictoire les éléments contenus dans la note en délibéré, il n'est tenu de le faire, à peine d'irrégularité de sa décision, que si cette note contient, soit l'exposé d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit l'exposé d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office.

5. Il ressort du dossier de première instance, transmis à la Cour par le Tribunal administratif de Paris, que la société Espaces Vocation Paris, intervenante à l'instance introduite par la société RS.T devant le tribunal, a produit une note en délibéré le 30 novembre 2018, accompagnée de pièces jointes. Les premiers juges ont visé cette note dans le jugement attaqué. Contrairement à ce que soutient la société requérante, les circonstances invoquées dans ces documents n'étaient pas d'une nature telle que les premiers juges auraient été tenus, à peine d'irrégularité de leur jugement, de rouvrir l'instruction et de soumettre au débat contradictoire les éléments contenus dans cette note en délibéré ou y annexés.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

6. Aux termes de l'article R. 194-1 du Livre des procédures fiscales: " Lorsque, ayant donné son accord au redressement ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. / Il en est de même lorsqu'une imposition a été établie d'après les bases indiquées dans la déclaration souscrite par un contribuable ou d'après le contenu d'un acte présenté par lui à la formalité de l'enregistrement ". En l'espèce, la société requérante ayant été imposée conformément aux déclarations qu'elle a spontanément déposées, elle supporte, en application des dispositions du 2ème alinéa de l'article R. 194-1 précité, la charge de la preuve de l'exagération des impositions qu'elle conteste.

7. Aux termes de l'article 231 ter du code général des impôts : " I. - Une taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux, les locaux de stockage et les surfaces de stationnement annexées à ces catégories de locaux est perçue, dans les limites territoriales de la région d'Ile-de-France, composée de Paris et des départements de l'Essonne, des Hauts-de-Seine, de la Seine-et-Marne, de la Seine-Saint-Denis, du Val-de-Marne, du Val-d'Oise et des Yvelines. / III. - La taxe est due : 1°) Pour les locaux à usage de bureaux, qui s'entendent, d'une part, des bureaux proprement dits et de leurs dépendances immédiates et indispensables (...) ; 2° Pour les locaux commerciaux, qui s'entendent des locaux destinés à l'exercice d'une activité de commerce de détail ou de gros et de prestations de services à caractère commercial ou artisanal ainsi que de leurs réserves attenantes couvertes ou non et des emplacements attenants affectés en permanence à la vente (....) / V. - Sont exonérés de la taxe : (...) 3° Les locaux à usage de bureaux d'une superficie inférieure à 100 mètres carrés, les locaux commerciaux d'une superficie inférieure à 2 500 mètres carrés, les locaux de stockage d'une superficie inférieure à 5 000 mètres carrés et les surfaces de stationnement de moins de 500 mètres carrés annexées à ces catégories de locaux (...) ".

8. Le ministre a admis dans son mémoire en défense produit devant la Cour, que les documents présentés par la société requérante démontrent que les locaux de l'immeuble du

22 René Boulanger sont utilisés par la locataire pour l'exercice d'une activité commerciale, à l'exclusion de ceux du 7ème étage. En conséquence, des dégrèvements partiels, mentionnés au point 2 ont été prononcés. En revanche, l'assujettissement à la taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux, les locaux de stockage et les surfaces de stationnement, a été maintenu en ce qui concerne le 7ème étage de l'immeuble, qui selon le ministre abriterait cinq bureaux et présenterait une surface à prendre en compte pour le calcul de la taxe, supérieure à 100 mètres carrés.

9. La société requérante et l'intervenante contestent cette évaluation en soutenant que, durant les années en cause, la surface à prendre en compte pour le calcul de la taxe litigieuse était, au niveau du 7ème étage, inférieure à 100 mètres carrés, et produisent une attestation de géomètre établie le 30 juillet 2019, assortie d'un plan.

10. Toutefois, l'attestation mentionnée au point précédent, eu égard à sa date, ne permet pas d'attester de la surface des locaux à usage de bureau au cours des années en cause, dès lors qu'il ressort, tant du plan produit par la requérante que de celui établi le 4 juillet 2011, sur lequel se fondait l'administration, que les locaux du 7ème étage comportent une superficie de bureaux proprement dits de 77,78 m2, de palier et dégagements de 3,01 m2, et de sanitaires de 6,78 m2, lesquels constituent une dépendance immédiate et indispensable des bureaux au sens du 1° du III de l'article 231 ter, ainsi que des locaux d'une hauteur inférieure à 1,80 m de 16,48 m2, soit une superficie totale de 104,05 m2, à laquelle il convient, au surplus, d'ajouter un bureau d'une superficie de 6 m2, situé en rez-de-chaussée et utilisé par la directrice de la société, selon les écritures produites par la société Espaces Vocation Paris, non contestées par la société requérante. Il suit de là que l'administration est fondée à soutenir que les locaux devant être pris en compte au titre de la taxe sur les bureaux sont d'une superficie supérieure à 100 m2 et que la société requérante n'est, en conséquence, pas fondée à revendiquer le bénéfice de l'exonération prévue par le 3° du V de l'article 231 ter.

11. De tout ce qui précède, il résulte que la société RS.T n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande s'agissant des cotisations de taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux, les locaux de stockage et les surfaces de stationnement auxquelles elle reste assujettie pour les années 2014 à 2016. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, eu égard au dégrèvement prononcé en cours d'instance, d'accorder à la société RS.T et à la société Espaces Vocation Paris une somme de 1 000 euros chacune sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : L'intervention de la société Espaces Vocation Paris est admise.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête à hauteur du dégrèvement prononcé par l'administration le 14 août 2019.

Article 3 : L'Etat versera à la société RS.T et à la société Espaces Vocation Paris une somme de 1 000 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la société RS.T et des conclusions présentées par la société Espaces Vocation Paris est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI RS.T, au ministre de l'action et des comptes publics et à la société Espaces Vocation Paris.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 11 mars 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme D..., président assesseur,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 mai 2020.

Le président de la 2ème chambre,

I. BROTONS

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 19PA00681 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA00681
Date de la décision : 13/05/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Sylvie APPECHE
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : TZA AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/06/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-05-13;19pa00681 ?
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