La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/05/2020 | FRANCE | N°18PA03988

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 13 mai 2020, 18PA03988


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du

11 septembre 2018 par lequel le préfet du Val-d'Oise lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné d'office et lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant une durée de douze mois.

Par un jugement n° 1816578/2-2 du 30 novembre 2018, le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté préfectoral en tant qu'il re

fuse à M. E... B... le bénéfice d'un délai de départ volontaire et interdit à l'intéressé d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du

11 septembre 2018 par lequel le préfet du Val-d'Oise lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné d'office et lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant une durée de douze mois.

Par un jugement n° 1816578/2-2 du 30 novembre 2018, le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté préfectoral en tant qu'il refuse à M. E... B... le bénéfice d'un délai de départ volontaire et interdit à l'intéressé de retourner sur le territoire français durant un délai de douze mois, et a mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 800 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

I) Par une requête, enregistrée sous le n° 18PA03988 le 20 décembre 2018, le préfet du

Val-d'Oise demande à la Cour d'annuler ce jugement n° 1816578/2-2 du Tribunal administratif de Paris du 30 novembre 2018 en ce qu'il a annulé son arrêté du 11 septembre 2018 en tant qu'il porte interdiction de retour sur le territoire français durant un délai de douze mois.

Il soutient qu'aucune circonstance humanitaire ne justifiait que M. B... ne fasse pas l'objet d'une interdiction de retour sur le territoire français

II) Par une requête enregistrée sous le n° 19PA00201 le 14 janvier 2019, M. B..., représenté par Me D... A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1816578/2-2 du 30 novembre 2018 en tant que le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-d'Oise lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

2°) de confirmer le jugement du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il a annulé les décisions lui refusant le bénéfice d'un délai de départ volontaire et portant interdiction de retour sur le territoire français pendant un délai de douze mois, contenues dans l'arrêté du 11 septembre 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" dans le mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail, dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté litigieux, en tant qu'il lui fait obligation de quitter le territoire français, est entaché d'insuffisance de motivation dans la mesure où il ne précise pas qu'il est marié et qu'il vit en France depuis 4 ans ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle de la mesure d'éloignement ;

- l'absence d'octroi d'un délai de départ volontaire et l'interdiction de retour sont illégales et leur annulation devra être confirmée.

La clôture d'instruction a été fixée, dans ces deux affaires, au 6 mars 2019.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

- la convention de Genève du 28 juillet 1951,

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant,

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne,

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- le code des relations entre le public et l'administration,

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991,

- le code de justice administrative ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. E... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du

11 septembre 2018 par lequel le préfet du Val-d'Oise lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné et lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant une durée de douze mois. D'une part, par la requête n° 18PA03988, le préfet de police relève appel du jugement n° 1816578/2-2 du 30 novembre 2018 rendu par ce tribunal, en tant qu'il a annulé sa décision portant interdiction de retour sur le territoire français durant un délai de douze mois. D'autre part, par la requête n° 19PA00201, M. B... demande à la Cour d'annuler le même jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation dudit arrêté préfectoral en ce qu'il lui fait obligation de quitter le territoire français. Il y a lieu de joindre ces deux requêtes dirigées contre un même jugement afin qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt.

Sur l'obligation de quitter le territoire français contestée par M. B... :

2. M. B... reprend en appel les moyens qu'il invoquait en première instance, tirés de ce que l'arrêté préfectoral du 11 septembre 2018 est insuffisamment motivé en ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français qu'il contient, de ce que cette décision viole les stipulations de l'article 8 de la convention susvisée, et de ce qu'elle procède d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences d'une telle mesure sur sa situation personnelle. Il y a lieu pour la Cour, par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge aux points 3 à 8 de son jugement, d'écarter ces moyens, qui ne sont assortis en appel d'aucun justificatif ni arguments nouveaux et pertinents.

3. Il suit de là que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'obligation de quitter le territoire français édictée par arrêté préfectoral du 11 septembre 2018.

Sur l'interdiction de retour pour une durée de douze mois :

4. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté préfectoral contesté : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour./ (...)/Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence des cas prévus au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français / (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".

5. Il résulte des termes de l'arrêté préfectoral du 11 septembre 2018 ainsi que des écritures du préfet du Val-d'Oise que, pour édicter l'interdiction de retour litigieuse, le préfet s'est fondé sur le 1er alinéa du III de l'article L. 571-1 rappelé ci-dessus, qui concerne soit le cas d'un étranger auquel un délai de départ volontaire a été refusé, soit le cas d'un étranger qui n'a pas obtempéré à l'obligation de quitter le territoire français dans le délai qui lui était imparti. Or, le préfet du

Val-d'Oise ne conteste pas devant la Cour l'annulation par le premier juge de la décision de refus d'octroi d'un délai de départ volontaire ayant assorti l'obligation de quitter le territoire français faite à M. B.... Dès lors, eu égard à l'effet de cette annulation, ce refus est supposé n'avoir jamais existé. Dans ces conditions, M. B... ne se trouvait pas dans l'un des cas mentionnés au 1er alinéa du III de l'article L. 511-1. susrappelé, et par suite, une interdiction de retour sur le territoire français ne pouvait légalement être faite à l'intéressé sur le fondement de ce 1er alinéa, cela alors même que, comme le soutient le préfet du Val-d'Oise, aucune circonstance humanitaire ne justifiait que l'autorité administrative ne prononçât pas une telle interdiction à l'encontre de l'intéressé, qui vivait en France avec son épouse, comme lui de nationalité albanaise et en situation irrégulière, et leur fils né en 2016.

6. Il suit de là que le préfet du Val-d'Oise, qui ne présente en tout état de cause devant la Cour, aucune demande de substitution de base légale, n'est pas fondé, par les moyens qu'il invoque, à se plaindre de ce que le tribunal administratif a annulé l'interdiction de retour sur le territoire français prononcée à l'encontre de M. B....

7. De tout ce qui précède, il résulte que la requête du préfet du Val-d'Oise doit être rejetée. Il en va de même des conclusions aux fins d'annulation présentées par M. B... dans sa requête d'appel ainsi que de ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte, le présent arrêt n'appelant pas de mesure d'exécution. Par voie de conséquence, les conclusions présentées par M. B... dans sa requête d'appel sur le fondement l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête n° 18PA03988 du préfet du Val-d'Oise est rejetée.

Article 2 : La requête n° 19PA00201 de M. B... est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. E... B....

Copie en sera adressée au préfet du Val-d'Oise.

Délibéré après l'audience du 11 mars 2020, où siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme C..., président assesseur,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 mai 2020.

Le président de la 2ème chambre,

I. BROTONS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

Nos 18PA03988...


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA03988
Date de la décision : 13/05/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Sylvie APPECHE
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : BREVAN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/06/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-05-13;18pa03988 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award