La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/04/2020 | FRANCE | N°17PA03753

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 22 avril 2020, 17PA03753


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société calédonienne d'étanchéité (SOCALET) a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie. de condamner la Chambre de commerce et d'industrie de Nouvelle-Calédonie (CCI-NC) à lui verser la somme globale de 17 542 970 francs CFP au titre de rémunération complémentaire due pour l'exécution du marché n° 2007-INV-005/01 relatif à la réalisation de travaux de démolition, de gros oeuvre et d'étanchéité dans le cadre de l'extension et du réaménagement de l'aérogare de l'aéroport in

ternational de Nouméa et d'assortir cette condamnation des intérêts légaux à compter de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société calédonienne d'étanchéité (SOCALET) a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie. de condamner la Chambre de commerce et d'industrie de Nouvelle-Calédonie (CCI-NC) à lui verser la somme globale de 17 542 970 francs CFP au titre de rémunération complémentaire due pour l'exécution du marché n° 2007-INV-005/01 relatif à la réalisation de travaux de démolition, de gros oeuvre et d'étanchéité dans le cadre de l'extension et du réaménagement de l'aérogare de l'aéroport international de Nouméa et d'assortir cette condamnation des intérêts légaux à compter de la date de sa demande indemnitaire, avec capitalisation des intérêts.

Par un jugement n° 1500024 du 14 septembre 2017, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour

Par une requête, enregistrée le 10 décembre 2017, la société calédonienne d'étanchéité (Socalet), représentée par la SELARL DetS Legal, demande à la Cour :

- d'annuler le jugement du 14 septembre 2017 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;

- de condamner la Chambre de commerce et d'industrie de Nouvelle-Calédonie à lui verser la somme globale de 17 542 970 francs CFP à titre de rémunération complémentaire due pour l'exécution du marché et d'assortir cette somme des intérêts légaux à compter de la demande indemnitaire, avec capitalisation de ces intérêts ;

- de condamner la Chambre de commerce et d'industrie de Nouvelle-Calédonie à lui verser la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le tribunal a dénaturé les faits et inversé la charge de la preuve ; elle a valablement lié le contentieux par un mémoire en réclamation même intitulé " mémoire ampliatif " dont la teneur était explicite, suivi d'un mémoire complémentaire ; les bases de calcul de la créance figurent dans les devis et les justifications factuelles sont apportées par les procès-verbaux de constat, correspondances et comptes-rendus de chantiers joints au mémoire ; ni la CCI-NC, ni le maître d'oeuvre n'ayant contesté la complétude de la réclamation ou du mémoire complémentaire après leur réception, ils ne pouvaient l'invoquer lors de la phase contentieuse ; le principe de loyauté contractuelle prévaut dès lors que le décompte général définitif n'est jamais intervenu ; en tout état de cause, elle démontre par la production de bordereaux contresignés que les réclamations ont été notifiées ;

- la responsabilité de la CCI-NC est engagée à raison du retard et de la désorganisation du chantier ; ce préjudice s'élève à 15 779 000 XPF HT, soit 16 567 950 XPF TTC, comprenant les frais d'encadrement et de réunions de chantier pour un montant de 1 563 500 XPF, les frais d'encadrement et de contrôle du chantier pour un montant de 1 386 500 XPF, les frais de recherche de fuites et de mise en eau pour un montant de 8 053 500 XPF HT et les pertes d'exploitation pour un montant de 4 775 500 XPF ;

- elle a été contrainte de réaliser des travaux supplémentaires de réalisation d'étanchéité liquide de plots béton coques nord et sud de l'ouvrage, indispensables à l'exécution de celui-ci dans les règles de l'art, ce que la CCI-NC n'a jamais contesté durant la phase d'exécution, pour un montant de 885 020 XPF TTC ;

Par un mémoire en défense enregistré le 10 février 2020, la société Egis Bâtiments Méditerranée représentée par Me D... conclut à titre principal à la confirmation du jugement attaqué, subsidiairement au rejet des conclusions d'appel en garantie de la Chambre de commerce et d'industrie de Nouvelle-Calédonie dirigée contre elle et à la condamnation de la société Socalet ou le cas échéant, de la Chambre de Commerce et d'Industrie de Nouvelle Calédonie, à lui verser la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 modifiée relative à la Nouvelle-Calédonie ;

- la délibération n° 136/CP du 1er mars 1967 portant réglementation des marchés publics ;

- le décret n° 76-131 du 6 février 1976 portant réorganisation de la Chambre de Commerce et d'Industrie de Nouvelle-Calédonie ;

- la délibération n° 64/CP du 10 mai 1989 fixant le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux et aux marchés publics de fournitures courantes et de services passés en application de la délibération n° l36 du 1er mars 1967 ;

- le code de justice administrative ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public,

- et les observations de Me E... pour la société Socalet.

Considérant ce qui suit :

1. La Chambre de commerce et d'industrie de Nouvelle-Calédonie (CCI-NC) a décidé d'engager des travaux d'extension et de réaménagement de l'aérogare passagers de l'aéroport international de Nouméa - La Tontouta. Dans le cadre de ce marché de travaux, alloti, la CCI-NC a notamment confié le lot n° 1 " Démolition/Gros oeuvre/Etanchéité ", à un groupement d'entreprises composé de la société Colas Nouvelle-Calédonie, mandataire du groupement solidaire, de la société Fondacal et de la société Socalet. Selon l'acte d'engagement signé le 27 décembre 2007, le montant du marché n° 2007-INV-005/01, correspondant au lot n° 1, s'élève à 963 892 717 francs CFP, les travaux confiés à la SARL Socalet s'élevant, pour leur part, à 39 957 349 francs CFP. La société Socalet a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie de condamner la CCI-NC à lui verser la somme globale de 17 542 970 francs CFP au titre de rémunération complémentaire due pour l'exécution du marché et d'assortir cette condamnation des intérêts légaux à compter de la date de sa demande indemnitaire, avec capitalisation des intérêts. Par un jugement du 14 septembre 2017 dont elle relève appel, le tribunal a rejeté sa demande.

Sur la recevabilité de la demande :

2. Aux termes du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux (CCAG) approuvé par la délibération n° 64/CP du 10 mai 1989 susvisée applicable au marché en cause : " 2.31. Au sens du présent document, des entrepreneurs sont considérés comme groupés s'ils ont souscrit un acte d'engagement unique. II existe deux sortes d'entrepreneurs groupés : les entrepreneurs groupés solidaires et les entrepreneurs groupés conjoints. Les entrepreneurs groupés sont solidaires lorsque chacun d'eux est engagé pour la totalité du marché et doit palier une éventuelle défaillance de ses partenaires : l'un d'entre eux, désigné dans l'acte d'engagement comme mandataire, représente l'ensemble des entrepreneurs

vis-à-vis du maître de l'ouvrage, de la personne responsable du marché et du maître d'oeuvre pour l'exécution du marché. Les entrepreneurs groupés sont conjoints lorsque, les travaux étant divisés en lots dont chacun est assigné à l'un des entrepreneurs, chacun d'eux est engagé pour le ou les lots qui lui sont assignés : l'un d'entre eux, désigné dans l'acte d'engagement comme mandataire, est solidaire de chacun des autres dans les obligations contractuelles de celui-ci à l'égard du maître de l'ouvrage jusqu'à la date, définie au I de l'article 44, à laquelle ces obligations prennent fin. Le mandataire représente, jusqu'à la date ci-dessus, l'ensemble des entrepreneurs conjoints, vis-à-vis du maître de l'ouvrage, de la personne responsable du marché et du maître d'oeuvre, pour l'exécution du marché. Il assure, sous sa responsabilité, la coordination de ces entrepreneurs en assumant les tâches d'ordonnancement et de pilotage des travaux. Dans le cas où l'engagement n'indique pas si les entrepreneurs groupés sont solidaires ou conjoints : Si les travaux sont divisés en lots dont chacun est assigné à l'un des entrepreneurs et si l'un de ces derniers est désigné dans l'acte d'engagement comme mandataire, les entrepreneurs sont conjoints ". Aux termes de l'article 13.52. : " Le mandataire ou l'entrepreneur est seul habilité à présenter les projets de décomptes et à accepter le décompte général ; sont seules recevables les réclamations formulées ou transmises par ses soins. ". Aux termes de l'article 49.11 : " Si un différend survient entre le maître d'oeuvre et l'entrepreneur, sous 1a forme de réserves faites à un ordre de service ou sous toute autre forme, l'entrepreneur remet au maître d'oeuvre, aux fins de transmission à la personne responsable du marché, un mémoire exposant les motifs et indiquant les montants de ses réclamations. ".

3. Il ressort, d'une part, de l'acte d'engagement signé le 27 décembre 2007 que si le groupement auquel appartenait la société Socalet y est qualifié de solidaire, les travaux y sont divisés en trois lots clairement attribués à chacun des trois entrepreneurs et la société Colas Nouvelle-Calédonie y est désignée comme mandataire du groupement. Par suite, en application des stipulations précitées, ce groupement doit être regardé comme conjoint, et son mandataire seul habilité à formuler ou transmettre les réclamations pour ses membres.

4. D'autre part, un mémoire en réclamation doit, aux termes des stipulations précitées, exposer les motifs et indiquer les montants réclamés. Il doit à ce titre, pour permettre au maître d'ouvrage de statuer sur cette demande, préciser de façon détaillée les chefs de réclamation et comporter les bases de calcul des sommes réclamées.

5. Il résulte de l'instruction que le mémoire de réclamation adressé le 26 mars 2014 au maître d'oeuvre pour le compte de la société Socalet aux fins de transmission au maître d'ouvrage n'a été ni présenté, ni transmis par le mandataire du groupement auquel appartenait cette société. Ni ce mémoire de réclamation, ni le mémoire complémentaire transmis au maître d'ouvrage le 1er septembre 2014, soit postérieurement au rejet implicite de la réclamation du 25 mars 2014, qui récapitulent les différentes demandes de rémunérations complémentaires en exécution du marché, ne comportent les détails de ces demandes en particulier les bases de calcul des montants réclamés, ni ne renvoient à des justificatifs permettant d'en vérifier l'exactitude. Par suite, la réclamation de la société Socalet, sur la recevabilité ou le bien-fondé de laquelle la CCI-NC ne s'est pas prononcée avant la phase contentieuse, ne répondait pas aux exigences du CCAG travaux, sans que l'appelante puisse utilement se prévaloir du principe de loyauté des relations contractuelles. Par suite, la société Socalet n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a considéré que sa demande était irrecevable et a rejeté pour ce motif sa requête.

Sur les dépens :

6. Les conclusions indemnitaires de la société Socalet étant rejetées, ses conclusions au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées également. Il y a lieu, en revanche, de mettre à sa charge, au titre de ces mêmes dispositions, une somme de 1 500 euros à verser à la société Egis Bâtiments Méditerranée.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Socalet est rejetée.

Article 2 : La société Socalet versera à la société Egis Bâtiments Méditerranée une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3: Le présent arrêt sera notifié à la société calédonienne d'étanchéité (SOCALET), à la société Egis Bâtiments Méditerranée et à la Chambre de commerce et d'industrie de Nouvelle-Calédonie.

Copie en sera adressée au Haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie, aux sociétés Archipel, Jacques Rougerie architecte, ECEP, Capse NC .

Délibéré après l'audience du 6 mars 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme A..., président de chambre,

- Mme B..., présidente assesseure,

- M. Mantz, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 22 avril 2020.

Le président de la 4ème chambre,

M. A... La République mande et ordonne à la ministre des Outre-Mer en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 17PA03753 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA03753
Date de la décision : 22/04/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-03 Marchés et contrats administratifs. Exécution technique du contrat.


Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: Mme Marianne JULLIARD
Rapporteur public ?: M. BARONNET
Avocat(s) : DS LEGAL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/06/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-04-22;17pa03753 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award