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14/02/2020 | FRANCE | N°18PA20798

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 14 février 2020, 18PA20798


Vu la procédure suivante :

M. F... B... a saisi le Tribunal administratif de la Réunion d'une demande tendant à la condamnation de la région Réunion à lui verser une somme de 13 369 euros en réparation de la perte de chance de bénéficier d'une pension de retraite d'un montant supérieur, outre des conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1500995 du 23 novembre 2017, le Tribunal administratif de la Réunion a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour:

Par une requête, enregistrée le 23 février 2

018 au greffe de la Cour administrative d'appel de Bordeaux, M. B..., représenté par Me ...

Vu la procédure suivante :

M. F... B... a saisi le Tribunal administratif de la Réunion d'une demande tendant à la condamnation de la région Réunion à lui verser une somme de 13 369 euros en réparation de la perte de chance de bénéficier d'une pension de retraite d'un montant supérieur, outre des conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1500995 du 23 novembre 2017, le Tribunal administratif de la Réunion a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour:

Par une requête, enregistrée le 23 février 2018 au greffe de la Cour administrative d'appel de Bordeaux, M. B..., représenté par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 23 novembre 2017 du Tribunal administratif de la Réunion;

2°) de condamner la région Réunion à lui verser une somme de 13 369 euros en réparation de la perte de chance de bénéficier d'une pension de retraite d'un montant supérieur ;

3°) de mettre à la charge de la région Réunion une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la région Réunion a commis une erreur de droit fautive quant à sa date de promotion au 8ème échelon de son grade ;

- la région Réunion a commis une faute s'agissant des modalités de consultation de la commission administrative paritaire ;

- elle a également commis une faute du fait de la notification tardive de son arrêté d'avancement d'échelon ;

- ces fautes ont entraîné une perte de chances sérieuses de bénéficier d'une pension de retraite supérieure ; le préjudice qu'il subi de ce fait doit être évalué à une somme de 13 369 euros.

Par une ordonnance du 1er mars 2019, le Président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la Cour la requête de M. B....

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 mai 2019, la région Réunion, représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et demande, en outre, qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 14 mai 2019, la clôture d'instruction a été reportée au 14 juin 2019 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 87-1107 du 30 décembre 1987 ;

- le décret n° 88-547 du 6 mai 1988 ;

- le décret n° 89-229 du 17 avril 1989 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,

- et les observations de Me D... pour la région Réunion.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., chef d'équipe d'exploitation des travaux publics de l'Etat, détaché auprès de la région Réunion en qualité d'agent de maîtrise territorial, a été admis, sur sa demande, à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er février 2013. Sa pension de retraite a alors été liquidée sur la base du 7ème échelon de son grade. Son avancement au 8ème échelon de son grade n'ayant pas été pris en compte, il a saisi le Tribunal administratif de la Réunion d'une demande tendant à la condamnation de la région Réunion à l'indemniser à hauteur de 13 369 euros en invoquant la perte de chance sérieuse de bénéficier d'une pension de retraite d'un montant supérieur calculée sur le 8ème échelon de son grade. M. B... relève appel du jugement du 23 novembre 2017 par lequel le Tribunal administratif de la Réunion a rejeté sa demande.

2. Aux termes de l'article L. 15 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " I. - Aux fins de liquidation de la pension, le montant de celle-ci est calculé en multipliant le pourcentage de liquidation tel qu'il résulte de l'application de l'article L. 13 par le traitement ou la solde soumis à retenue afférents à l'indice correspondant à l'emploi, grade, classe et échelon effectivement détenus depuis six mois au moins par le fonctionnaire (...) au moment de la cessation des services valables pour la retraite ou, à défaut, par le traitement ou la solde soumis à retenue afférents à l'emploi, grade, classe et échelon antérieurement occupés d'une manière effective, sauf s'il y a eu rétrogradation par mesure disciplinaire. (...) ".

3. En premier lieu, M. B... soutient que la région Réunion a commis une erreur de droit dans la mesure où il aurait dû être promu dès le 5 mai 2012.

4. Aux termes de l'article 11 du décret du 6 mai 1988 visé ci-dessus portant statut particulier du cadre d'emplois des agents de maîtrise territoriaux dans sa rédaction applicable au présent litige : " Le grade d'agent de maîtrise comprend les échelons prévus pour l'échelle 5 de rémunération. " . Le II de l'article 4 du décret du 30 décembre 1987 portant organisation des carrières des fonctionnaires territoriaux de catégories C et D visé ci-dessus, fixe la durée maximale et la durée minimale du temps passé dans le 7ème échelon de l'échelle 5 respectivement à quatre ans et trois ans. Or, il résulte de l'instruction que M. B... a été promu dans son corps d'origine au grade de chef d'équipe d'exploitation des travaux publics de l'Etat à compter du 1er janvier 2010 et reclassé à cette date au 7ème échelon de ce grade et à la même date dans son corps de détachement, au 7ème échelon du grade d'agent de maîtrise territorial, avec un report d'ancienneté d'un mois et vingt-six jours. M. B... a bénéficié en outre d'une bonification d'un mois d'ancienneté. Par suite, M.B... ne pouvait être promu à l'ancienneté minimale au 8ème échelon de son grade avant le 5 octobre 2012, comme l'a jugé à juste titre le tribunal. Dès lors, il n'est pas fondé à soutenir que la région Réunion aurait commis une illégalité fautive en s'abstenant de le promouvoir à cet échelon à compter du 5 mai 2012.

5. En deuxième lieu, l'article 30 de la loi du 26 janvier 1984 visée ci-dessus portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale dispose, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Les commissions administratives paritaires (...) connaissent des questions d'ordre individuel résultant de l'application, notamment, (...) [de l'article] 78 (...) de la présente loi. ". Aux termes de l'article 78 de la même loi, dans sa rédaction applicable au présent litige : " L'avancement d'échelon a lieu de façon continue d'un échelon à l'échelon immédiatement supérieur. Il est fonction à la fois de l'ancienneté et de la valeur professionnelle, telle qu'elle est définie à l'article 17 du titre Ier du statut général, du fonctionnaire. Il se traduit par une augmentation de traitement. / L'avancement d'échelon est prononcé par l'autorité territoriale. L'avancement d'échelon à l'ancienneté maximale est accordé de plein droit. L'avancement d'échelon à l'ancienneté minimale peut être accordé au fonctionnaire dont la valeur professionnelle le justifie. ". Il résulte de ces dispositions que la décision prise par l'autorité territoriale concernant l'avancement d'échelon d'un agent à l'ancienneté minimale doit être précédée d'un avis de la commission administrative paritaire compétente. Enfin, selon l'article 27 du décret du 17 avril 1989 visé ci-dessus relatif aux commissions administratives paritaires des collectivités territoriales et de leurs établissements publics : " (...) La commission se réunit au moins deux fois par an. (...) ".

6. En l'espèce, il résulte de l'instruction que la commission administrative paritaire de la région Réunion s'est réunie le 21 novembre 2012 pour statuer notamment sur la proposition d'avancement de M. B... qui, ainsi qu'il vient d'être dit au point 4, ne pouvait être promu avant le 5 octobre 2012 et que l'arrêté le promouvant au 8ème échelon de son grade a été pris le 12 décembre 2012, soit vingt-et-un jours plus tard. Dans ces conditions, ni la date à laquelle s'est réunie la commission ni celle à laquelle a été pris l'arrêté le promouvant avec effet rétroactif au 5 octobre 2012, ne révèlent une lenteur fautive de la région susceptible d'engager sa responsabilité.

7. En troisième lieu, l'arrêté portant promotion d'échelon a été notifié à M. B... le 22 février 2013, soit deux mois et dix jours après son édiction et donc avec retard. Toutefois, le retard pris par l'administration à lui notifier l'arrêté le promouvant est sans lien de causalité direct et certain avec le préjudice dont M. B... demande réparation et résultant selon lui de la perte de chance de bénéficier d'une pension de retraite sur la base du traitement afférent au 8ème échelon de son grade.

8. Enfin alors que le compte-rendu d'entretien professionnel de l'année 2011, établi le 23 mars 2012 et notifié le 18 juillet 2012, faisait état, à la rubrique " Perspectives d'évolution professionnelle ", des mentions " Passage au grade de chef d'équipe principal " et " Retraite envisagée dans moins d'un an ", ainsi que d'un avis favorable à un éventuel avancement d'échelon à l'ancienneté minimale, il ne résulte pas de l'instruction que M. B..., avant de présenter le 28 juin 2012 sa demande d'admission à la retraite à compter du 1er février 2013, ou même après le dépôt de cette demande, aurait interrogé les services de la région sur ses perspectives d'avancement de grade ou d'échelon, ou sur les modalités de liquidation de sa future pension de retraite. Il n'est pas établi ni même soutenu que les services de la région, qui n'étaient pas tenus à une obligation d'information sur ce point, lui auraient fourni des informations erronées qui l'auraient convaincu de faire valoir ses droits à la retraite dès le 1er février 2013 ou dissuadé de rester en activité le temps nécessaire pour que soient satisfaites, au regard des dispositions du code des pensions civiles et militaires de retraite, les conditions d'ancienneté minimale de détention de son dernier échelon.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Réunion a rejeté sa demande indemnitaire. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées. Enfin, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées au titre du même article par la région Réunion.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la région Réunion présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3: Le présent arrêt sera notifié à M. F... B... et à la région Réunion. Copie en sera adressée au ministre des outre-mer et au préfet de la région Réunion.

Délibéré après l'audience du 5 février 2020 à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- M. A..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 février 2020.

Le rapporteur,

D. PAGES

Le président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

P. TISSERAND

La République mande et ordonne au préfet de la Réunion concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18PA20798


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA20798
Date de la décision : 14/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-13 Fonctionnaires et agents publics. Contentieux de la fonction publique.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : SELARL SOLER-COUTEAUX / LLORENS

Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-02-14;18pa20798 ?
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