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13/02/2020 | FRANCE | N°19PA02428

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 13 février 2020, 19PA02428


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune d'Ivry-sur-Seine a demandé au tribunal administratif de Melun d'ordonner, à défaut de restitution volontaire des lieux dans le mois de la notification de la décision à intervenir, l'expulsion de Mme D... C..., ainsi que de tous occupants de son chef, des lieux qu'elle occupe au sein de l'école maternelle située 47, rue Gabriel Péri dans cette commune.

Par un jugement n°1803471 du 28 juin 2019, le tribunal administratif de Melun a enjoint à Mme C... de quitter sans délai l'appartement q

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune d'Ivry-sur-Seine a demandé au tribunal administratif de Melun d'ordonner, à défaut de restitution volontaire des lieux dans le mois de la notification de la décision à intervenir, l'expulsion de Mme D... C..., ainsi que de tous occupants de son chef, des lieux qu'elle occupe au sein de l'école maternelle située 47, rue Gabriel Péri dans cette commune.

Par un jugement n°1803471 du 28 juin 2019, le tribunal administratif de Melun a enjoint à Mme C... de quitter sans délai l'appartement qu'elle occupe au 47, rue Gabriel Péri à Ivry-sur-Seine et prévu qu'à défaut d'exécution dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, la commune d'Ivry-sur-Seine pourrait procéder d'office à cette expulsion, au besoin avec le concours de la force publique.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête enregistrée le 25 juillet 2019 sous le numéro 19PA02428, Mme C..., représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 28 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Melun lui a enjoint de quitter sans délai l'appartement qu'elle occupe au 47, rue Gabriel Péri à Ivry-sur-Seine ;

2°) de surseoir à son expulsion de cet appartement jusqu'au mois de juin 2020 et de lui donner acte qu'elle propose le règlement d'une indemnité d'occupation se rapportant à ce logement.

Mme C... soutient que :

- elle a cherché à se reloger, mais, sans solution adaptée à sa situation et alors que la commune ne lui a rien proposé de convenable, elle a dû rester dans les lieux ;

- elle a besoin que lui soit accordé un délai pour quitter le logement puisqu'elle ne pourra être relogée qu'en juin 2020, à la livraison du logement qu'elle a acheté en l'état futur d'achèvement ; elle est âgée et dispose de faibles revenus ;

- elle propose de régler une indemnité d'occupation du logement jusqu'en juin 2020, bien que son logement ne dispose plus d'eau chaude ni de chauffage.

Par un mémoire en défense enregistré le 29 août 2019, la commune d'Ivry-sur-Seine, représentée par Me G..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme C... une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a intérêt et qualité pour agir ;

- la juridiction administrative est compétente en ce qui concerne les litiges relatifs à l'occupation du domaine public ;

- la commune n'est pas favorable à ce qu'un délai soit donné à la requérante pour quitter les lieux ; il ne saurait excéder en tout état de cause deux à trois mois ;

- le juge ne peut pas prononcer le règlement d'une indemnité d'occupation qui excéderait les limites de la saisine ;

- les autres moyens invoqués ne sont pas fondés.

II. Par une requête enregistrée le 4 août 2019 sous le numéro 19PA02596, Mme C..., représentée par Me A..., demande à la Cour de prononcer le sursis à exécution du jugement n°1803471 du 28 juin 2019 du tribunal administratif de Melun, jusqu'au mois de juin 2020.

Elle soutient que les conditions sont remplies pour un sursis, dès lors que l'exécution du jugement aurait des conséquences difficilement réparables et qu'elle est dans une situation d'urgence.

Par un mémoire en défense enregistré le 29 août 2019, la commune d'Ivry-sur-Seine, représentée par Me G..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme C... une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de Mme C..., articulée comme une demande de suspension, n'entre pas dans la compétence du juge des référés, alors que la requérante ne démontre pas que sont réunies les conditions prévues par l'article R. 811-17 du code de justice administrative ;

- le moyen tiré de l'urgence est inopérant ;

- il n'y a ni conséquences difficilement réparables ni moyen sérieux à l'encontre de la décision des premiers juges.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- les conclusions de Mme Guilloteau, rapporteur public,

- les observations de Me G..., avocat de la commune d'Ivry-sur-Seine.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 7 décembre 1987 portant concession à titre gratuit d'un logement par nécessité absolue de service au titulaire du poste de concierge, la commune d'Ivry-sur-Seine a attribué un logement au sein de l'école maternelle Gabriel Péri à Mme C..., concierge titulaire de deuxième catégorie. Cet arrêté a prévu par son article 2 que cette concession prendrait fin en tout état de cause à la date à laquelle le bénéficiaire cesserait ses fonctions. Mme C... a pris sa retraite à effet du 26 janvier 2013. En conséquence, par un arrêté du 31 octobre 2012, le maire de la commune a mis fin, à compter du 26 janvier 2013, à la concession de logement de fonction accordée à Mme C.... Toutefois, celle-ci s'est maintenue dans le logement après cette date. La commune d'Ivry-sur-Seine a saisi en avril 2018 le tribunal administratif de Melun d'une demande tendant à ce que soit ordonnée son expulsion de ce logement. Par le jugement contesté du 28 juin 2019, le tribunal administratif de Melun a enjoint à Mme C... de quitter sans délai cet appartement et prévu qu'à défaut d'exécution dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, la commune d'Ivry-sur-Seine pourrait procéder d'office à cette expulsion, au besoin avec le concours de la force publique.

2. Les requêtes de Mme C... enregistrées devant la Cour sous les nos 19PA02428 et 19PA02596 tendent l'une à l'annulation et l'autre au sursis à exécution d'un même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Il est constant que l'appartement concédé à Mme C..., situé au sein de l'école maternelle Gabriel Péri et destiné à assurer son gardiennage, constitue un bien affecté au service public de l'enseignement et spécialement aménagé à cet effet qui fait partie du domaine public communal. L'arrêté du 31 octobre 2012 du maire de la commune ayant mis fin, à compter du 26 janvier 2013, à la concession de logement de fonction accordée à Mme C..., celle-ci doit être regardée depuis cette date comme occupante sans titre d'une dépendance du domaine public.

4. Aux termes de l'article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Nul ne peut, sans disposer d'un titre l'y habilitant, occuper une dépendance du domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 ou l'utiliser dans des limites dépassant le droit d'usage qui appartient à tous ". Aux termes de l'article L. 1 du même code : " Le présent code s'applique aux biens et aux droits, à caractère mobilier ou immobilier, appartenant à l'Etat, aux collectivités territoriales et à leurs groupements, ainsi qu'aux établissements publics ".

5. Les autorités chargées de la police et de la conservation du domaine public sont tenues, par application des principes régissant la domanialité publique, de veiller à la conformité de son utilisation à sa destination et d'exercer à cet effet les pouvoirs qu'elles tiennent de la législation en vigueur pour faire cesser les occupations sans titre. L'autorité propriétaire ou gestionnaire du domaine public est recevable à demander au juge administratif l'expulsion de l'occupant irrégulier du domaine public.

6. D'une part, dès lors que Mme C... occupait sans titre le logement concerné, le moyen qu'elle soulève, tiré de l'absence de solution de relogement notamment du fait selon elle du peu de diligence de la commune pour l'y aider, est sans incidence sur le bien-fondé de la demande d'expulsion formée par la commune d'Ivry-sur-Seine auprès du tribunal administratif de Melun.

7. D'autre part, Mme C... demande qu'un délai lui soit accordé jusqu'en juin 2020 pour libérer les lieux qu'elle occupe irrégulièrement, sans invoquer aucun texte ni principe supérieurs mais en faisant valoir son âge, ses difficultés de relogement et l'acquisition qu'elle a faite d'un logement en l'état futur d'achèvement qui lui sera livré à cette date. Cependant, compte tenu du temps qui lui a été laissé depuis janvier 2013 pour organiser son relogement et de l'avantage qu'a constitué l'occupation gratuite de son logement pendant plusieurs années et, par ailleurs, des projets de localisation du centre de loisirs de la commune en partie sur l'emprise du logement qu'elle occupe, il ne résulte pas de l'instruction que le délai d'un mois qui lui a été accordé par le tribunal administratif pour quitter les lieux avant une exécution d'office méconnaitrait les exigences qui s'attachent au respect de sa dignité ou porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale.

8. Enfin, si Mme C... propose de régler une indemnité d'occupation jusqu'au terme du délai qu'elle souhaite obtenir, il n'appartient pas au juge administratif saisi d'une demande d'expulsion d'un occupant sans titre du domaine public de prononcer une telle mesure. Le moyen soulevé tiré de ce que le logement n'était plus convenablement équipé ne peut à cet égard qu'être écarté.

9. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun lui a enjoint de libérer sans délai les lieux qu'elle occupe au 47, rue Gabriel Péri à Ivry-sur-Seine et a autorisé la commune d'Ivry-sur-Seine, à défaut d'exécution dans un délai d'un mois suivant le jugement, à procéder d'office à son expulsion, au besoin avec le concours de la force publique.

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution :

10. Dès lors qu'il est statué, par le présent arrêt, sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement du 28 juin 2019 du tribunal administratif de Melun, les conclusions de la requête de Mme C... enregistrée sous le numéro n°19PA02596 tendant à ce qu'il soit sursis à son exécution sont devenues sans objet.

Sur les frais liés à l'instance :

11. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de Mme C... une somme de 500 euros à verser à la commune d'Ivry-sur-Seine au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 19PA02596.

Article 2 : La requête n° 19PA02428 de Mme C... est rejetée.

Article 3 : Mme C... versera à la commune d'Ivry-sur-Seine, une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... et à la commune d'Ivry-sur-Seine.

Délibéré après l'audience du 23 janvier 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme F..., présidente de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- Mme E..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 février 2020.

Le rapporteur, La présidente,

M. E... S. F...

Le greffier,

M. B...

La République mande et ordonne au préfet de Val-de-Marne en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°19PA02428, 19PA02596


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19PA02428
Date de la décision : 13/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: Mme Mathilde RENAUDIN
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : ARNOLD

Origine de la décision
Date de l'import : 27/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-02-13;19pa02428 ?
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