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05/02/2020 | FRANCE | N°19PA01222

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 05 février 2020, 19PA01222


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 1er août 2017 du directeur spécialisé des finances publiques pour l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) en tant qu'elle lui interdit l'accès aux locaux de la direction et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 400 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1715884 du 7 février 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
>Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 3 avril 2019 Mme B..., r...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 1er août 2017 du directeur spécialisé des finances publiques pour l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) en tant qu'elle lui interdit l'accès aux locaux de la direction et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 400 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1715884 du 7 février 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 3 avril 2019 Mme B..., représentée par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 7 février 2019 ;

2°) d'annuler la décision du 1er août 2017 du directeur spécialisé des finances publiques pour l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) ayant notamment pour objet de lui interdire l'accès aux locaux de la direction ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce qu'il n'a pas été signé par le président, le rapporteur et le greffier d'audience en méconnaissance de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- le tribunal a à tort, jugé que la décision attaquée avait le caractère d'une mesure d'ordre intérieur alors qu'elle contient une accusation à son égard et qu'elle a vocation à figurer dans son dossier ;

- cette décision revêt le caractère d'une sanction disciplinaire déguisée, prise sans respecter la procédure disciplinaire applicable et notamment sans consultation du conseil de discipline ;

- elle prononce une sanction disciplinaire qui n'est prévue par aucun texte ;

- le tribunal a à tort, pris en compte pour retenir la qualification de mesure d'ordre intérieur la circonstance qu'elle serait en congé en août 2017 alors qu'il s'agissait d'une circonstance de fait sans incidence sur la qualification de la mesure contestée ;

- la décision contestée porte atteinte à l'exercice du droit syndical ;

- elle porte atteinte également à la règle de liberté d'accès aux locaux reconnue à tous les agents.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 octobre 2019, le ministre de l'économie et des finances demande à la Cour de rejeter la requête.

Il soutient que :

- la requête est irrecevable car dirigée contre une mesure d'ordre intérieur ;

- elle est irrecevable également car dépourvue d'objet, la décision en cause ayant produit tous ses effets à la date d'introduction de la requête ;

- elle est irrecevable faute d'intérêt de la requérante à la contester ;

- le moyen tiré de la méconnaissance des droits de la défense et de la procédure disciplinaire est inopérant dès lors que la décision attaquée n'a pas le caractère d'une sanction disciplinaire ;

- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 9 octobre 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 12 novembre 2019.

Un mémoire a été présenté après clôture de l'instruction pour Mme B....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- et les conclusions de M. Baffray, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., contrôleur principal des finances publiques, affectée au sein de la direction spécialisée des finances publiques (DSFP) pour l'AP-HP, a fait l'objet d'une mutation à la direction régionale des finances publiques de Paris prenant effet au 1er septembre 2017 et était en congé au mois d'août de cette année-là. Par lettre du 1er août 2017, lui confirmant par ailleurs la régularisation d'absences pour raisons syndicales, le directeur spécialisé des finances publiques a fait état d'une altercation intervenue le jour même avec un agent de la DSFP, lui a notifié une interdiction de se présenter dans les locaux de la direction à compter du 2 août 2017 et lui a demandé de rendre la clef du local syndical et du panneau d'affichage syndical, ainsi que son badge, dans les meilleurs délais. Mme B... a alors saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à l'annulation de cette décision mais le tribunal a rejeté cette demande pour irrecevabilité par un jugement du 7 février 2019 dont elle interjette appel.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article R. 721-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". Il ressort de ces dispositions que seule la minute du jugement, et non les copies de celui-ci adressées aux parties, doit comporter à peine d'irrégularité, la signature du président de la formation de jugement, du magistrat rapporteur et du greffier d'audience. Par suite le défaut de ces signatures sur l'exemplaire du jugement communiqué aux parties est sans incidence sur la régularité de ce jugement. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que la minute du jugement litigieux comporte bien les trois signatures requises. Le moyen manque dès lors en fait.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Ainsi que l'a, à juste titre, rappelé le tribunal, les mesures prises à l'égard d'agents publics qui, compte tenu de leurs effets, ne peuvent être regardées comme leur faisant grief, constituent de simples mesures d'ordre intérieur insusceptibles de recours. Il en va ainsi des mesures qui, tout en modifiant leur affectation ou les tâches qu'ils ont à accomplir, ne portent pas atteinte aux droits et prérogatives qu'ils tiennent de leur statut ou de leur contrat ou à l'exercice de leurs droits et libertés fondamentaux, ni n'emportent de perte de responsabilités ou de rémunération. Le recours contre de telles mesures, à moins qu'elles ne traduisent une discrimination ou une sanction, est irrecevable.

4. Si Mme B... fait valoir qu'une lettre d'un supérieur hiérarchique comportant un rappel à l'ordre d'un agent ou contenant de sévères critiques à son égard ne peut être regardée comme une mesure d'ordre intérieur, notamment lorsqu'elle est versée au dossier de l'intéressé, elle n'établit pas, en tout état de cause, que la lettre litigieuse du directeur spécialisé des finances publiques du 1er août 2017, qui ne comporte aucune mention à cet égard, aurait été versée à son dossier, se bornant à soutenir qu'elle aurait " vocation " à l'être. Par ailleurs, il ressort de ses termes mêmes que cette lettre, comme l'indique d'ailleurs Mme B... elle-même, a aussi pour objet de lui indiquer que ses absences avaient été régularisées et de lui apporter des précisions sur ses congés, avant de faire état d'une altercation intervenue le jour même avec un agent de la DSFP, et de lui notifier une interdiction de se présenter dans les locaux de la direction à compter du 2 août 2017, en lui demandant par ailleurs de rendre la clef du local d'affichage syndical ainsi que le badge d'accès. Ainsi cette lettre, qui n'a pas pour objet exclusif de prendre la mesure d'interdiction contestée, ne comporte par ailleurs pas de rappel à l'ordre ni de critique mais, en tant qu'elle porte interdiction d'accès aux locaux et demande de remise des clés et badges de l'intéressée, se borne à prendre des mesures destinées à éviter toute nouvelle possible altercation. Par ailleurs, pour apprécier si cette mesure ne portait pas atteinte aux droits et prérogatives de Mme B..., le tribunal a pu à juste titre, contrairement à ce qu'elle soutient, tenir compte des circonstances concrètes de l'espèce et de ce qu'elle était en congé tout le mois d'août et, en raison de sa mutation au 1er septembre, n'avait ainsi plus vocation à accéder aux locaux en cause, même pour l'exercice de ses activités syndicales, pour lesquelles elle n'établit ni même n'allègue qu'elle aurait eu l'intention d'interrompre ses congés du mois d'août pour entreprendre quelque action que ce soit nécessitant l'accès aux locaux ou la possibilité d'affichage. Enfin si elle fait valoir qu'au sein du service en cause existerait un principe de liberté d'accès aux locaux, y compris pendant les congés, auquel la décision porterait atteinte, une telle règle, dont l'existence n'est en tout état de cause pas établie, n'a pas le caractère d'un droit ou d'une prérogative, mais d'une simple mesure d'organisation du service, à laquelle l'administration peut prévoir des exceptions dans l'intérêt du bon fonctionnement de ce service. Ainsi Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la mesure contestée porterait atteinte à ses droits ou prérogatives professionnelles, pas plus qu'à l'exercice de ses activités syndicales. Pour les mêmes motifs, cette mesure, qui revêt ainsi le caractère d'une mesure d'ordre intérieur, ne peut être regardée comme constitutive d'une sanction disciplinaire déguisée. Dans ces conditions, la décision litigieuse était ainsi, à tous égards, insusceptible de recours.

5. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Sa requête ne peut par suite qu'être rejetée dans toutes ses conclusions, y compris celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'économie et des finances.

Délibéré après l'audience du 21 janvier 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- Mme D... premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 février 2020.

Le rapporteur,

M-I. D...Le président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

A-L. CHICHKOVSKY PASSUELLO

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19PA01222


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA01222
Date de la décision : 05/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

01-01-05-02-02 Actes législatifs et administratifs. Différentes catégories d'actes. Actes administratifs - notion. Actes à caractère de décision. Actes ne présentant pas ce caractère.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: Mme Marie-Isabelle LABETOULLE
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : BOUKHELOUA

Origine de la décision
Date de l'import : 11/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-02-05;19pa01222 ?
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