Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté en date du 19 février 2018 par lequel le préfet de police a refusé de lui renouveler son titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination, outre des conclusions à fin d'injonction et des conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1804735/6-2 du 17 juillet 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 22 janvier 2019, Mme B... représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) avant dire droit, d'ordonner au préfet de police de communiquer l'entier dossier de l'OFII la concernant ;
2°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 17 juillet 2018 ;
3°) d'annuler l'arrêté du 19 février 2018 ;
4°) d'enjoindre au préfet de police à titre principal de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale ", à titre subsidiaire de réexaminer sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
La décision de refus de titre de séjour :
- est entachée d'un vice de procédure et d'une erreur de droit, l'administration ayant instruit sa demande dans le cadre de dispositions législatives et réglementaires postérieures au 1er janvier 2017 alors que sa demande était antérieure ;
- est entachée d'un vice de procédure, la compétence des trois médecins signataires de l'avis du collège de médecins de l'Office de l'immigration et de l'intégration et du médecin coordonnateur de zone n'étant pas établie ;
- est entachée d'un vice de procédure dès lors que le nom du médecin rapporteur n'est pas mentionné et que le préfet ne justifie pas que le médecin ayant établi le rapport médical n'a pas siégé au sein du collège de médecins ;
- est entachée d'un vice de procédure, les délibérations précédant l'avis du collège de médecins n'ayant pas été communiquées ;
- est entachée d'erreur de droit, le préfet de police de Paris s'étant estimé lié par l'avis du collège de médecins de l'Office de l'immigration et de l'intégration du 26 juillet 2017 ;
- méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
La décision lui faisant obligation de quitter le territoire français :
- est illégale, par voie de conséquence de l'illégalité de la décision de refus de renouvellement de titre de séjour ;
- méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile
- est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
La décision fixant le pays de destination :
- est insuffisamment motivée ;
- est illégale, en conséquence de l'illégalité de la décision d'obligation de quitter le territoire français ;
- méconnaît les articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 décembre 2019, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.
Par un mémoire en réplique, enregistré le 3 janvier 2020, Mme B... demande que la Cour prononce un non-lieu à statuer sur les conclusions à fin d'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi et elle maintient le surplus de ses conclusions.
Elle reprend ses précédents moyens s'agissant du refus de titre de séjour et, s'agissant des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi, elle soutient qu'elle est désormais munie d'un récépissé de demande de carte de séjour valable jusqu'au 19 février 2020 qui a eu pour effet de les abroger implicitement.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., ressortissante guinéenne (Guinée Conakry) née le 20 mars 1991, est entrée en France le 18 septembre 2011 selon ses déclarations, elle a bénéficié de titres de séjour en raison de son état de santé, dont le dernier expirait le 12 novembre 2016 et dont elle a sollicité sans succès le renouvellement. Elle a alors demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 19 février 2018 par lequel le préfet de police de Paris a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle sera éloignée. Mme B... relève appel du jugement du 17 juillet 2018 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
S'agissant de la décision de refus de titre de séjour :
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur jusqu'au 31 décembre 2016 : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police (...) ". Aux termes de l'article 13 de la loi du 7 mars 2016 : " L'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié : (...) / 3° Le 11° est ainsi rédigé : " 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé (...) ". Aux termes de l'article 67 de la loi du 7 mars 2016 : " (...) V. (...) le 3° de l'article 13 [entre] en vigueur le 1er janvier 2017. / VI. (...) Le 3° de l'article 13 (...) [s'applique] aux demandes présentées après son entrée en vigueur ".
3. En premier lieu, les moyens tirés des vices de procédure doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges aux points 3 à 11 du jugement attaqué.
4. En deuxième lieu, il ressort des termes même de la décision attaquée que le préfet de police a porté une appréciation sur la situation de Mme B... " au vu des éléments du dossier " et " après un examen approfondi de sa situation ". Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police se serait cru lié par l'avis du collège des médecins de l'OFII pour rejeter la demande de titre de séjour Mme B.... Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.
5. Mme B... fait valoir qu'elle souffre d'une névrose post-traumatique liée à un mariage forcé dans son pays d'origine ainsi qu'aux violences et maltraitances dont elle a été victime par son ancien mari, et que l'absence de soins se traduirait par des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Toutefois, à l'appui de ces allégations, Mme B... se borne à produire un unique rapport médical établi le 13 décembre 2016 par le docteur Belcour, médecin psychiatre agréé, qui mentionne que Mme B... serait dans une situation d'une extrême gravité en absence de soins spécialisés. Ce seul document ne saurait suffire à remettre en cause l'appréciation portée par le collège des médecins de l'OFII qui ont estimé que si son état de santé nécessitait une prise en charge médicale, le défaut de celle-ci ne devrait pas entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité.
6. En quatrième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme B... ait sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par ailleurs, le préfet de police ne s'est pas fondé sur ces dispositions pour refuser le titre de séjour demandé par l'intéressée. Par suite, Mme B... ne peut utilement invoquer leur méconnaissance.
7. En cinquième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ".
8. Mme B... fait valoir qu'elle réside en France depuis sept ans, dont quatre en situation régulière, et qu'elle doit y demeurer pour continuer de disposer d'un suivi médical. Toutefois Mme B... n'a produit aucune pièce de nature à justifier de l'ancienneté de sa présence en France. En outre, il ressort des pièces du dossier que Mme B..., célibataire et sans charge de famille en France, n'est pas dépourvue d'attaches dans son pays d'origine où résident ses parents et sa fratrie. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en prenant la décision attaquée, le préfet de police aurait porté une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale par rapport au but poursuivi, ou aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
9. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation de la décision de refus de titre de séjour doivent être rejetées, sans qu'il y ait lieu avant dire droit d'ordonner au préfet de police de communiquer l'entier dossier de l'OFII la concernant.
S'agissant des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination :
10. Mme B... s'étant vu délivrer un récépissé de sa demande de carte de séjour valable jusqu'au 19 février 2020 et l'autorisant à travailler, le préfet de police a abrogé implicitement les décisions mentionnées ci-dessus. Par suite, les conclusions tendant à l'annulation de ces décisions sont devenues dépourvues d'objet.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
11. D'une part, le présent arrêt n'implique nullement qu'un titre de séjour soit délivré à Mme B.... D'autre part, les conclusions subsidiaires de Mme B... à fin de réexamen de sa situation administrative sont sans objet dès lors que, comme il a été dit au point précédent, ce réexamen est déjà en cours. Les conclusions à fin d'injonctions doivent donc être rejetées.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées à ce titre par Mme B....
D EC I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions d'annulation des décisions du 19 février 2018 par lesquelles le préfet de police a fait obligation à Mme B... de quitter le territoire français et a fixé son pays de renvoi.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 7 janvier 2020 à laquelle siégeaient :
- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
- M. Niollet, président-assesseur,
- M. A..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 21 janvier 2020.
Le rapporteur,
D. PAGES
Le président,
O. FUCHS TAUGOURDEAU
Le greffier,
P. TISSERAND
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19PA00371