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31/12/2019 | FRANCE | N°17PA01863

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 31 décembre 2019, 17PA01863


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société OBM Construction a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner la région Ile-de-France à lui régler la somme de 44 594,68 euros TTC, assortie des intérêts moratoires à compter du 28 février 2012 ainsi que la capitalisation de ces intérêts, en règlement de travaux supplémentaires exécutés dans le cadre du lot n° 1 " Bâtiments démontables des travaux de restructuration et d'extension du Lycée Frédéric Mistral de Fresnes.

Par une ordonnance du 31 mars 2014, le Prési

dent du Tribunal administratif de Paris a transmis au Tribunal administratif de Melun la re...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société OBM Construction a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner la région Ile-de-France à lui régler la somme de 44 594,68 euros TTC, assortie des intérêts moratoires à compter du 28 février 2012 ainsi que la capitalisation de ces intérêts, en règlement de travaux supplémentaires exécutés dans le cadre du lot n° 1 " Bâtiments démontables des travaux de restructuration et d'extension du Lycée Frédéric Mistral de Fresnes.

Par une ordonnance du 31 mars 2014, le Président du Tribunal administratif de Paris a transmis au Tribunal administratif de Melun la requête présentée par la société OBM Construction.

Par un jugement n° 1403198 du 24 mars 2017, le Tribunal administratif de Melun a, d'une part, condamné la région Ile-de-France à verser à la société OBM Construction la somme de 40 391,03 euros TTC, assortie des intérêts moratoires au taux de 2, 04 % à compter du

17 février 2014 jusqu'au complet mandatement des sommes considérées et de leur capitalisation à compter du 29 mars 2016, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, d'autre part condamné M. A... G..., la société Projetud et la société EPDC à garantir la région Ile-de-France de la condamnation prononcée à son encontre à hauteur de 60 %.

Procédure devant la Cour

Par une requête enregistrée le 31 mai 2017 et un mémoire en réplique enregistré le 9 juillet 2019, la Région Ile-de-France, représentée par Me B..., demande à la Cour :

A titre principal :

1°) d'annuler le jugement du 24 mars 2017 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) de rejeter la demande de la société OBM Construction présentée devant le Tribunal administratif de Melun ;

A titre subsidiaire :

3°) d'annuler le jugement du 24 mars 2017 du Tribunal administratif de Melun en tant que celui-ci a fixé à 60% le montant de la garantie appelée à l'encontre de M. A... G..., la société Projetud et la société EPDC ;

4°) de condamner M. A... G..., la société Projetud et la société EPDC à la garantir à hauteur de 100 % du montant de la condamnation prononcée à son encontre ;

En tout état de cause :

5°) de condamner la société OBM Construction à lui verser la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- le jugement attaqué a été rendu en violation du principe du contradictoire ;

- le jugement attaqué est entaché d'une contradiction de motifs ;

- le lot n° 1 " Bâtiments démontables " comprend l'intégralité des prestations les concernant y compris l'alimentation et l'évacuation des paillasses dans les installations démontables ; le lot n°4 " Fluides " ne comprend aucune référence aux bâtiments démontables ; l'article 2 du CCTP du lot n° 1 fait référence à la " mise en place " de 52 paillasses, impliquant l'alimentation et l'évacuation ; l'article 13.2.4 du CCTP prévoit que l'attributaire du lot devait réaliser les canalisations et d'évacuation ; contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, le devis de la société intimée portait sur la fourniture des paillasses et non leur mise en place, la circonstance que la demande de la maîtrise d'oeuvre comportât de manière erronée l'alimentation et les branchements des paillasses ne permettant pas de conclure que ces prestations n'étaient pas comprises dans le lot ; la société intimée ne saurait se prévaloir de l'avis du comité consultatif interrégional de Paris de règlement amiable des différends ou litiges relatifs aux marchés publics qui n'a qu'une valeur consultative ; elle opère une confusion entre la fourniture des paillasses, leur mise en place et les travaux de raccordement en soutenant que le CCTP aurait renvoyé par ses articles 9.3.1 " Mobiliers des salles " et 13.4 " prestations à la charge des lots plomberie ", CVC et paillasses " à des prestations incluses dans d'autres lots du marché ; si le titulaire du lot n° 4 " Fluides ", la société UTB, a été retenue pour fournir les paillasses, leur mise en place et leur raccordement dans le bâtiment provisoire n° 5 était faite par le titulaire du lot n° 1 ; l'article 2 du CCTP renvoie aux plans du DCE dans lesquels figurent les 52 paillasses ; la société intimée reconnaît que leur mise en place lui incombait en vertu des stipulations de l'article 9.3.1 du CCTP ; les prestations exclues du lot n° 1 sont expressément mises à la charge du lot n°7 VRD au termes de l'article 13.2.1 du CCTP et n'y figure pas la réalisation des canalisations de distribution et d'évacuation ; ces prestations peuvent relever des " ouvrages divers pour la finition des travaux du présent lot exécutés dans les règles de l'art " au sens de l'article 2 du CCTP ; les prestations visées par le lot n°4 décrites par le DCE à l'article 3.1.5.3 ne visent pas les bâtiments provisoires démontables ; le CCAP était parfaitement clair et prévoyait à l'article 3.3.1 qu' " une omission sur un plan ou une pièce écrite n'a en aucun cas pour effet de soustraire l'entrepreneur à l'obligation d'exécuter l'intégralité des ouvrages tels qu'ils sont définis dans le marché et conformément aux règles de l'art " et la société intimée n'a posé aucune question avant la remise de son offre ou la signature du marché ; la demande de devis par courriel du 23 novembre 2010 adressée à la société intimée ne saurait s'analyser comme une demande de prestation supplémentaire ; par suite, ces prestations ne sauraient être regardées comme des travaux supplémentaires ;

- à supposer que ces prestations puissent être regardées comme des travaux supplémentaires pouvant faire l'objet d'une indemnisation, c'est à raison d'une faute exclusive du maître d'oeuvre dans la rédaction du CCTP du lot n° 1 dont elle était seule responsable, aucune faute ne pouvant être retenue contre la Région ; les membres du groupement de maîtrise d'oeuvre doivent être condamnés à garantir à 100 % la Région de l'éventuelle condamnation prononcée contre elle.

Par un mémoire en défense enregistré le 26 octobre 2018 et un mémoire récapitulatif enregistré le 27 septembre 2019, la société OBM Construction représentée par la SCP Pacreau

et Courcelles conclut dans le dernier état de ses écritures au rejet de la requête, à la confirmation du jugement attaqué et à la condamnation de la Région Ile-de-France à lui verser la somme de

4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 ;

- le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 approuvant le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public,

- et les observations de Me D..., pour la région Ile-de-France.

Considérant ce qui suit :

1. Dans le cadre de la restructuration partielle et de l'extension du Lycée Fréderic Mistral de Fresnes, la Région Ile-de-France, dont la société d'aménagement et d'équipement de la région Ile-de-France (SAERP) était le mandataire, a attribué à un groupement conjoint composé de la société OBM Construction et de la société OBM Location, aujourd'hui radiée, le lot n° 1 " bâtiments démontables " par un contrat signé le 7 mars 2008 pour un montant de

997 165,55 euros TTC. La maîtrise d'oeuvre a été confiée à M. G..., architecte mandataire et à deux cotraitants la société Projetud et la société EPDC. Par un ordre de service n° 1 du

10 mars 2009, la SAERP a ordonné le démarrage des travaux à compter du 6 avril 2009. Par courriel du 23 novembre 2010, un représentant de la société Projetud a demandé à la société OBM Construction d'établir un devis relatif à l'installation de " paillasses " dans les salles de classes des bâtiments démontables comprenant l'alimentation et les branchements, " incluant toute sujétions (bac à acides, etc...) suivant les quantités précisées sur plan annexés ". La société OBM Construction a transmis un devis n° 6 en date du 13 janvier 2011, concernant la mise en place de ces paillasses pour un coût de 238 488,60 euros TTC, a indiqué lors de la réunion de chantier du 23 février 2011 que " l'évacuation des paillasses " ne relevait pas de son lot et a transmis un devis complémentaire n° 8 établi le 9 mars 2011 concernant la mise en place des alimentations et évacuations pour les paillasses dans le bâtiment n° 5 pour un coût de 49 193,58 euros TTC. La société Projetud a rejeté ce devis en estimant que les prestations relatives à l'alimentation des paillasses étaient dues par la société OBM au titre du marché. Cette dernière a établi un devis n°10 du 31 mars 2011 relatif à la mise en place des alimentations et évacuations par réseaux spécialisés pour les paillasses dans le bâtiment n° 5 pour un coût de 53 595,79 euros et a transmis ce devis avec une lettre de réserve. La société SAERP a adressé à la société OBM Construction un ordre de service n° 9, daté du 31 mars 2011 ordonnant l'exécution des travaux de mise en place des alimentations et évacuations pour les paillasses dans le bâtiment n°5 et ajoutant que les prestations étaient dues au titre du marché initial. Par une lettre du 8 avril 2011, la société OBM Construction a adressé une lettre de réclamation à la Région Ile-de-France contestant cet ordre de service pour un montant nul et en a adressé une copie au maître d'oeuvre. Par un courrier du 12 avril 2011, la maîtrise d'oeuvre a indiqué que ces travaux était dus par la société OBM au titre du marché à l'exception du raccordement de 17 paillasses supplémentaires, lettre à laquelle la société OBM a répondu le 20 avril 2011. Par un courrier du 20 mai 2011, la société SAERP a mis la société OBM en demeure de réaliser ces ouvrages, mise en demeure à laquelle la société OBM Construction a répondu le 23 mai 2011. La SAERP a émis un ordre de service n° 10 le 6 juin 2011 admettant, au titre de prestations supplémentaires, la seule mise en place de l'alimentation et de l'évacuation pour les 17 paillasses installées dans le bâtiment n° 5 pour un montant de 13 204,76 euros. Saisi par la société OBM Construction, le comité consultatif interrégional de Paris de règlement amiable des différends ou litiges relatifs aux marchés publics, lors de sa séance du 27 mai 2013, a rendu un avis aux termes duquel il a recommandé à la Région Ile-de-France de régler à la société OBM construction une somme de 33 771,76 euros HT au titre du solde du marché conclu le 27 mai 2008. La Région Ile-de-France n'ayant pas donné suite à cet avis, la société OBM Construction a saisi le Tribunal administratif de Melun qui a, d'une part, condamné la Région Ile-de-France à lui verser la somme de 40 391,03 euros TTC, assortie des intérêts moratoires au taux de 2, 04 % à compter du 17 février 2014 jusqu'au complet mandatement des sommes considérées et de leur capitalisation à compter du 29 mars 2016, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, d'autre part condamné M. A... G..., la société Projetud et la société EPDC à garantir la région Ile-de-France de la condamnation prononcée à son encontre à hauteur de 60 %. La Région Ile-de-France relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce : " Postérieurement à la clôture de l'instruction ordonnée en application de l'article précédent, le président de la formation de jugement peut inviter une partie à produire des éléments ou pièces en vue de compléter l'instruction. Cette demande, de même que la communication éventuelle aux autres parties des éléments et pièces produits, n'a pour effet de rouvrir l'instruction qu'en ce qui concerne ces éléments ou pièces. ".

3. La Région Ile-de-France soutient, d'une part, que le jugement attaqué est entaché d'une violation du principe du contradictoire en ce qu'après l'envoi de l'avis d'audience le 6 février 2017 et l'intervention de la clôture de l'instruction le 10 février 2017, la formation de jugement a formulé une demande de pièces, en vue de compléter l'instruction, adressée à l'EURL G..., à la société EPDC et au mandataire liquidateur Gilles Pellegini et que l'EURL G... a produit de nouvelles pièces entre l'audience du 7 mars 2017 et la lecture du jugement le 24 mars 2017, qui n'ont pas été communiquées à l'ensemble des parties. S'il ressort, en effet, du dossier de première instance que, le 1er mars 2017, la formation de jugement a demandé aux membres du groupement de maîtrise d'oeuvre l'acte d'engagement signé avec la Région Ile-de-France ainsi que l'y autorisaient les dispositions précitées de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative, l'absence de communication de cet acte à la Région Ile-de-France n'a pas été, en l'espèce, de nature à préjudicier à ses droits dès lors qu'elle ne pouvait en ignorer la teneur. Il en résulte que l'absence de communication de cette production à l'appelante n'a pas entaché le jugement attaqué d'une violation du principe du respect du contradictoire.

4. Le jugement n'est, d'autre part, entaché d'aucune insuffisance de motivation, contrairement à ce que soutient la Région Ile-de-France.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

5. En premier lieu, la Région Ile-de-France soutient que le jugement attaqué est entaché d'une contradiction de motifs en ce qu'après avoir reconnu la responsabilité totale de la maîtrise d'oeuvre dans l'élaboration des documents contractuels, il a limité sa responsabilité à 60 % du montant du dommage. Toutefois, il résulte du point 22 dudit jugement que s'il reconnaît une faute imputable au groupement de maîtrise d'oeuvre, il indique également qu'il n'est pas démontré que le maître d'ouvrage " n'aurait pu l'anticiper en faisant usage de son pouvoir de direction du chantier ou en relisant les documents contractuels " et ne reconnaît qu'une contribution de la maîtrise d'oeuvre à la réalisation du préjudice subi. Par suite, le jugement attaqué n'est entaché d'aucune contradiction de motifs.

Sur la condamnation de la Région Ile-de-France :

6. Le titulaire d'un marché à prix forfaitaire n'a pas droit à la rémunération des travaux qui n'ont pas été commandés par le maître d'ouvrage même s'ils présentent un caractère utile. En revanche, il a droit au paiement, par le maître d'ouvrage, des prestations supplémentaires qui lui ont été réclamées par ordre de service ainsi qu'à l'indemnisation de travaux supplémentaires réalisés sans ordre de service, à la condition toutefois, qu'ils soient indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art.

7. La Région Ile-de-France soutient que le lot n° 1 " Bâtiments démontables " comprend l'intégralité des prestations les concernant, y compris l'alimentation et l'évacuation des paillasses dans les installations démontables et fait valoir que l'article 2 du cahier des clauses techniques particulières (CCTP) de ce lot, qui renvoie aux plans du dossier de consultation des entreprises (DCE) dans lesquels figurent les 52 paillasses, implique l'alimentation et l'évacuation de celles-ci dès lors qu'il prévoit les " ouvrages divers pour la finition des travaux du présent lot exécutés dans les règles de l'art ". En revanche, le lot n° 4 " Fluides " ne comprend aucune référence aux bâtiments démontables. Enfin, la Région Ile-de-France se prévaut de l'article 3.3.1 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) aux termes duquel " une omission sur un plan ou une pièce écrite n'a en aucun cas pour effet de soustraire l'entrepreneur à l'obligation d'exécuter l'intégralité des ouvrages tels qu'ils sont définis dans le marché et conformément aux règles de l'art " et de ce que la société intimée n'a posé aucune question avant la remise de son offre ou la signature du marché.

8. D'une part, aux termes de l'article 2 du CCTP du lot n° 1 du marché litigieux relatif aux " Bâtiments démontables " : " Les prestations à la charge du présent lot comprennent comme décrit dans le présent CCTP et dans les autres : (...) Electricité (...), Chauffage, Plomberie et Ventilation - Raccordements sur les arrivées de fluides en attente, laissées par le lot VRD (notamment EF, EV, EU, EP et EDF). (...) Cette liste n'est pas évidemment limitative ". L'article 9.3.1 de ce cahier portant " Mobiliers des salles " indique " Mise en place des éléments suivants : (...) Paillasses (voir lots paillasses) ". L'article 13.2.1 relatif aux prestations de " Plomberie sanitaire " indique : " Prestations à la charge du lot VRD " et l'article 13.2.3 indique que : " le lot VRD prévoira toutes les alimentations et évacuations nécessaires, dans les diamètres appropriés au bon fonctionnement de l'installation (...) ". Enfin, l'article 13.4 de ce cahier portant " Prestations à la charge des lots Plomberie, CVC et paillasses " indique : " Voir les CCTP des lots concernés ".

9. D'autre part, le DCE relatif aux " Equipements des salles spécialisées " décrivant la construction générale des paillasses et le raccordement des fluides indique en son article 1 .1 que " L'installation des équipements se fera dans le bâtiment A ". Le DCE relatif au lot " Plomberie-Sanitaires " indique en son article 3.1.5.3 que : " Les paillasses des salles de TP seront évacuées par un réseau spécifique. Le présent lot devra les réseaux principaux et les attentes au droit de chaque paillasse ".

10. Contrairement à ce que soutient la Région Ile-de-France, il ne résulte d'aucune des dispositions précitées du CCTP du lot n° 1 " Bâtiments démontables " attribué à la société OBM Construction, ni d'aucune autre stipulation contractuelle que cette entreprise devait être regardée comme chargée de l'alimentation et de l'évacuation des paillasses, dont le réseau d'évacuation, comme elle le fait valoir, est un réseau indépendant des autres réseaux d'évacuation et spécifique du fait du traitement particulier des eaux dans un bac anti-acide avant leur rejet dans le réseau public des eaux usées, dans les bâtiments provisoires dont elle avait la charge. La circonstance que les plans figurant dans le DCE mettent en évidence l'existence de paillasses ne suffisait pas à lui attribuer cette prestation en l'absence de toute autre indication claire et précise dans les pièces du marché et sans que les stipulations précitées du CCAP puissent être regardées comme permettant de suppléer à cette lacune. Il résulte au contraire de l'instruction que c'est sur demande d'un représentant de la maîtrise d'oeuvre, la société Projetud, en date du 23 novembre 2010, que la société OBM a établi un devis permettant " d'établir le chiffrage de l'aménagement en paillasses des salles, comprenant l'alimentation et les branchements, incluant toutes sujétions suivant les quantités précisées sur plan annexé ". Il en résulte que c'est à bon droit que le tribunal a considéré que la réalisation des travaux de raccordement et de l'évacuation des paillasses, qui n'était pas expressément mentionnée au marché, ni dans les documents contractuels des autres lots, n'était pas incluse dans le marché initial et s'analysait comme des travaux supplémentaires, indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art. Il y a lieu, en conséquence et en l'absence de contestation par la Région Ile-de-France du montant de ces travaux supplémentaires, de confirmer sa condamnation à verser à la société OBM Construction, la somme de 40 391,03 euros TTC, augmentée des intérêts moratoires au taux légal à compter du 17 février 2014 et à la capitalisation de ces intérêts.

Sur l'appel en garantie de la région Ile-de-France à l'encontre du groupement de maîtrise d'oeuvre :

11. Aux termes de l'article 11 du CCTP de la maîtrise d'oeuvre : " Les études d'avant projet définitif (...) ont pour objet de : (...) justifier les solutions techniques retenues, notamment en ce qui concerne les installations techniques. (...) Les études d'avant projet définitif (A.P.D) relatives à la présente opération se présentent notamment par l'élaboration des documents suivants : a : Devis descriptif de l'ensemble des travaux : notice explicative et descriptive, incluant la définition des matériaux à mettre en oeuvre et les justifications des solutions techniques retenues (...) Les études de projet, fondées sur le programme arrêté et sur les études d'avant-projets approuvées par le maître de l'ouvrage ainsi que sur les prescriptions de celui-ci, découlant du permis de construire et autres autorisations administratives, définissent la conception générale de l'ouvrage. / Ces études de projet ont pour objet de : préciser par des plans, coupes et élévations, les formes des différents éléments de la construction, la nature et les caractéristiques des matériaux et les conditions de leur mise en oeuvre ; déterminer l'implantation et l'encombrement de tous les éléments de structure et de tous les équipements techniques ; précisés les tracés des alimentations et évacuations de tous les fluides et, en fonction du mode de dévolution des travaux, coordonner les informations et contraintes nécessaires à l'organisation spatiale des ouvrages. (...) Ces études de projet se traduisent pour l'opération visée par le présent CCTP, par l'élaboration des documents suivants : a. Devis descriptif détaillé des travaux. Le devis descriptif détaillé des travaux (par corps d'état) est constitué par : 1 notice explicative et descriptive détaillée ; 1 note de synthèse permettant d'apprécier clairement les limites des prestations ; l'ensemble de ces 2 documents servant de base à l'élaboration du (des) Cahiers des clauses techniques particulières (CCTP) du (des) marché(s) de travaux dus au titre de l'élément ACT. (...) e. Rédaction de documents (CCAP et AE). A partir des cadres-types du Cahier des clauses administratives particulières (CCAP) et de l'Acte d'engagement (AE) du maître de l'ouvrage, élaboration du CCAP et de l'AE qui, après mise au point définitive en phase ACT, seront joints au dossier de consultation des entreprises. (...) Les documents suivants qui, établis par le maître d'oeuvre, feront partie du Dossier de consultation des Entreprises sont les suivants : Le(s) Cahier(s) des clauses techniques particulières (CCTP) du (des) marchés de travaux (en cas de marchés de travaux séparés, il y aura autant de CCTP que de marchés, étant précisé que chacun des CCTP aura une partie commune à tous les marchés (...) ".

12. La Région Ile-de-France demande la condamnation du groupement de maîtrise d'oeuvre à la garantir de la condamnation prononcée à son encontre au titre des travaux supplémentaires. Il résulte en effet des stipulations précitées qu'il incombait à la maîtrise d'oeuvre, chargée des études des travaux et de l'élaboration des documents contractuels, d'intégrer à ces derniers les prestations de raccordement et d'évacuation des paillasses prévues dans les bâtiments provisoires et qu'en omettant de le faire, elle a commis une faute qui engage sa responsabilité à l'égard du maître d'ouvrage. Ce dernier est par suite fondé à demander que le groupement de maîtrise d'oeuvre la garantisse de l'intégralité de la condamnation dont il fait l'objet. Le jugement doit en conséquence être réformé sur ce point.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la société OBM Construction qui n'est pas dans la présente instance, la partie perdante, verse à la Région Ile-de-France la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière la somme que demande la société OBM Construction sur le fondement de ces mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La société Alain G..., la société Projetud et la société EPDC sont condamnées à garantir la Région Ile-de-France de la totalité de la condamnation prononcée à son encontre par le jugement du 24 mars 2017 du Tribunal administratif de Melun.

Article 2 : Le jugement n° 1403198 du 24 mars 2017 du Tribunal administratif de Melun est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de La Région Ile-de-France est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de la société OBM Construction au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la Région Ile-de-France et à la société OBM Construction.

Copie en sera adressée à la société Alain G..., à la société Projetud et à la société EPDC.

Délibéré après l'audience du 3 décembre 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme C..., président de chambre,

- Mme E..., présidente assesseure,

- Mme Mach, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 31 décembre 2019.

La rapporteure,

M. E...Le président,

M. C...Le greffier,

S. GASPAR

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 17PA01863 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA01863
Date de la décision : 31/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Exécution financière du contrat - Rémunération du co-contractant - Indemnités - Travaux supplémentaires.

Marchés et contrats administratifs - Rapports entre l'architecte - l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage - Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage - Actions en garantie.


Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: Mme Marianne JULLIARD
Rapporteur public ?: M. BARONNET
Avocat(s) : SCP PACREAU et COURCELLES

Origine de la décision
Date de l'import : 14/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-12-31;17pa01863 ?
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