Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Tahaa Golf Resort Développement a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie Française :
- sous le n° 1700375, d'annuler l'arrêté 01480 CM du 25 août 2017 retirant l'agrément fiscal qui lui avait été accordé pour la construction d'un golf international de 18 trous sur le Motu Tehotu sur l'île de Tahaa ;
- sous le n° 1700376, d'annuler l'arrêté 01481 CM du 25 août 2017 retirant l'agrément fiscal qui lui avait été accordé pour la construction d'un complexe touristique comprenant un hôtel de 113 unités sur le Motu Tehotu sur l'île de Tahaa.
Par un jugement nos 1700375, 1700376 du 15 mai 2018, le Tribunal administratif de la Polynésie française, après les avoir jointes, a rejeté ces demandes.
Procédure devant la Cour :
I) Par une requête enregistrée le 11 août 2018 sous le numéro 18PA02776, la société Tahaa Golf Resort Développement, représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1700376 du 15 mai 2018 du Tribunal administratif de la Polynésie Française ;
2°) d'annuler les deux arrêtés du 25 août 2017 portant retrait d'agréments ;
3°) de mettre à la charge du gouvernement de la Polynésie française le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- si la violation de l'obligation de production du certificat de conformité peut, en application de l'article 951-7 du code des impôts, être sanctionnée par le retrait de l'agrément, un tel retrait ne pouvait être opéré s'agissant d'un agrément réaffecté et donc transféré sur un autre projet en vertu des dispositions de l'article 916-2 du code des impôts ;
- le retrait était impossible en raison de l'expiration du délai de retrait issu du droit fiscal polynésien applicable en 2005 ; si l'article 951-7 du code des impôts ne prévoit pas de délai, le délai de reprise fixé à l'article LP. 451-1 du code des impôts doit être appliqué en vue d'assurer le respect du principe de sécurité juridique ;
- le retrait ne pouvait légalement intervenir en raison de l'expiration du délai de retrait issu du droit administratif général lequel prévoit que le retrait ne peut intervenir que dans le délai du recours contentieux ;
- la décision d'octroi de l'agrément était créatrice de droit et ne pouvait être légalement retirée ;
- le retrait procède d'un détournement de procédure et de pouvoir, l'administration entendant procéder, par le retrait d'agrément, à la remise en cause des crédits d'impôt.
Par un mémoire en défense enregistré le 12 novembre 2018, le gouvernement de la Polynésie française, représenté par Me A... C..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la société appelante d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la société Tahaa Golf Resort Développement n'a pas d'intérêt à contester les retraits d'agrément litigieux, lesquels ne lui font pas grief dès lors que les projets, objet desdits agréments, avaient été abandonnés ;
- en tout état de cause, sur le fond, aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Par une ordonnance du 13 novembre 2018, la clôture d'instruction a été fixée au
13 décembre 2018.
II) Par une requête, enregistrée le 11 août 2018, sous le numéro 18PA02777, la société Tahaa Golf Resort Développement, représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1700375 du 15 mai 2018 du Tribunal administratif de la Polynésie Française ;
2°) d'annuler les deux arrêtés du 25 août 2017 portant retrait d'agréments ;
3°) de mettre à la charge de la Polynésie française le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- si la violation de l'obligation de production du certificat de conformité peut, en application de l'article 951-7 du code des impôts, être sanctionnée par le retrait de l'agrément, un tel retrait ne pouvait être opéré s'agissant d'un agrément réaffecté et donc transféré sur un autre projet en vertu des dispositions de l'article 916-2 du code des impôts ;
- le retrait était impossible en raison de l'expiration du délai de retrait issu du droit fiscal polynésien applicable en 2005 ; si l'article 951-7 du code des impôts ne prévoit pas de délai, le délai de reprise fixé à l'article LP. 451-1du code des impôts doit être appliqué en vue d'assurer le respect du principe de sécurité juridique ;
- le retrait ne pouvait légalement intervenir en raison de l'expiration du délai de retrait issu du droit administratif général lequel prévoit que le retrait ne peut intervenir que dans le délai du recours contentieux ;
- la décision d'octroi de l'agrément était créatrice de droit et ne pouvait être légalement retirée ;
- le retrait procède d'un détournement de procédure et de pouvoir, l'administration entendant procéder, par le retrait d'agrément, à la remise en cause des crédits d'impôt.
Par un mémoire en défense enregistré le 12 novembre 2018, le gouvernement de la Polynésie française, représenté par Me A... C..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la société appelante d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la société Tahaa Golf Resort Développement n'a pas d'intérêt à contester les retraits d'agrément litigieux, lesquels ne lui font pas grief dès lors que les projets, objet desdits agréments, avaient été abandonnés ;
- en tout état de cause, sur le fonds, aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Par une ordonnance du 13 novembre 2018, la clôture d'instruction a été fixée au
13 décembre 2018.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;
- le code des impôts de la Polynésie française ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...
- les conclusions de Mme Jimenez, rapporteur public,
- les observations de Me D..., avocat de la société Tahaa Golf Resort Développement.
- et les observations de Me A... C... , avocat du gouvernement de la Polynésie française.
Considérant ce qui suit :
1. Par deux arrêtés du 25 novembre 2005, la SARL Tahaa Golf Resort Développement a bénéficié d'agréments au titre du crédit d'impôt pour investissement prévu par les dispositions des articles LP 911-1 et suivants du code des impôts de la Polynésie française, pour la construction d'un golf de 18 trous et d'un complexe touristique comprenant un hôtel de 113 unités sur le motu Tehotu sur l'île de Tahaa. Ces deux projets ayant été abandonnés, la Polynésie française a accepté, par deux arrêtés du 21 septembre 2012, la réaffectation des financements à un autre projet, porté par la société Tahiti Luxury Resort, consistant en la construction à Punaauia d'une résidence hôtelière de tourisme classée 5 étoiles de 148 unités. Par deux arrêtés du 25 août 2017, la Polynésie française a procédé au retrait des agréments délivrés en 2005 à la SARL Tahaa Golf Resort Développement. Cette dernière, après avoir en vain demandé, par deux demandes distinctes, au Tribunal administratif de la Polynésie Française, d'annuler ces deux décisions de retrait, relève appel, par les requêtes susvisées, du jugement de ce tribunal rejetant ses demandes.
2. Les requêtes susvisées présentées par la société Tahaa Golf Resort Développement, étant dirigées contre un même jugement, il y a lieu de les joindre pour qu'elle fassent l'objet d'un même arrêt.
Sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité des demandes de première instance :
3. En premier lieu, et contrairement à ce que soutient la société requérante, les arrêtés pris le 21 septembre 2012, suite à l'abandon par elle de ses projets de construction d'un golf de
18 trous et d'un complexe touristique comprenant un hôtel de 113 unités sur le motu Tehotu sur l'île de Tahaa, n'ont pas eu pour objet ni pour effet de procéder au transfert des agréments accordés pour ces projets sur un autre projet. Ces arrêtés ont seulement permis, en application de l'article 916-2 du code des impôts, la réaffectation des financements des projets abandonnés au profit d'un projet distinct, porté par une autre société, la société Tahiti Luxury Resort, et ayant fait l'objet d'un agrément distinct accordé à cette dernière.
4. En deuxième lieu, par les arrêtés litigieux du 25 août 2017, la Polynésie française s'est bornée à procéder au retrait des agréments délivrés en 2005 à la SARL Tahaa Golf Resort Développement pour ses deux projets, dont il est constant qu'ils avaient été expressément abandonnés par cette dernière en 2010.
5. En troisième lieu, la société requérante n'est pas fondée à se prévaloir du délai de quatre mois au-delà duquel l'administration ne peut retirer une décision individuelle illégale créatrice de droits, ce délai ne trouvant pas à s'appliquer en l'espèce, dès lors que le bénéfice des agréments qui lui ont été délivrés en 2005 restait subordonné à la réalisation des projets et notamment à la production, dans les délais impartis, des certificats de conformité correspondants, et que les retraits ont été opérés en raison de l'absence, au demeurant non contestée, de satisfaction de cette condition.
6. En quatrième lieu, les retraits litigieux d'agrément n'ont pas, par eux-mêmes, pour objet ni directement pour effet de procéder à la correction d'une imposition ou à la remise en cause d'un crédit d'impôt. En conséquence, leur intervention n'est pas enfermée dans le délai de reprise fixé par le code des impôts de la Polynésie française.
7. Enfin, si la société requérante soutient que le retrait litigieux procède d'un détournement de procédure ou de pouvoir, elle ne l'établit en tout état de cause pas.
8. De tout ce qui précède il résulte que la société Tahaa Golf Développement n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté ses demandes. Les conclusions à fin d'annulation présentées devant la Cour par la société requérante doivent être rejetées. Il en va de même, en conséquence, de celles présentées par elle sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Polynésie française n'ayant pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées sur le même fondement par la Polynésie française.
DECIDE :
Article 1er : Les deux requêtes susvisées de la société Tahaa Golf Resort Développement sont rejetées.
Article 2 : Les conclusions du gouvernement de la Polynésie française présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3: Le présent arrêt sera notifié à la société Tahaa Golf Resort Développement et au gouvernement de la Polynésie française.
Délibéré après l'audience du 11 décembre 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme Brotons, président de chambre,
- Mme B..., président assesseur,
- M. Magnard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 20 décembre 2019.
Le rapporteur,
S. APPECHELe président,
I. BROTONS
Le greffier,
S. DALL'AVA
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N°s 18PA02776, 18PA02777 2