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19/11/2019 | FRANCE | N°18PA00069

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 19 novembre 2019, 18PA00069


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société PWC Support Services a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 5 octobre 2015 par laquelle l'inspecteur du travail a refusé d'autoriser le licenciement de M. A... di Borgo, ainsi que la décision par laquelle le ministre du travail a implicitement confirmé ce refus, et d'enjoindre au ministre de réexaminer sa demande d'autorisation de licenciement de M. A... di Borgo.

Par un jugement n° 1607331 du 8 novembre 2017, le tribunal administratif de Paris a rejeté l

a demande de la société PWC Support Services.

Procédure devant la cour :

P...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société PWC Support Services a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 5 octobre 2015 par laquelle l'inspecteur du travail a refusé d'autoriser le licenciement de M. A... di Borgo, ainsi que la décision par laquelle le ministre du travail a implicitement confirmé ce refus, et d'enjoindre au ministre de réexaminer sa demande d'autorisation de licenciement de M. A... di Borgo.

Par un jugement n° 1607331 du 8 novembre 2017, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de la société PWC Support Services.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 8 janvier 2018, la société PWC Support Services, représentée par Me D... E... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 8 novembre 2017 ;

2°) d'annuler la décision de l'inspecteur du travail du 5 octobre 2015 ;

3°) d'annuler la décision par laquelle le ministre du travail a implicitement confirmé la décision de l'inspecteur du travail ;

4°) d'enjoindre au ministre du travail de réexaminer sa demande d'autorisation de licencier M. A... di Borgo ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la convocation n'avait pas à faire état de la possibilité pour M. A... di Borgo de recourir à l'assistance de représentants du personnel au sein de l'UES non salarié de l'entreprise, laquelle n'est pas distincte de l'entreprise ;

- une irrégularité éventuelle n'aurait pas en tout état de cause privé ce salarié d'une garantie.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 mars 2019, le ministre du travail conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

M. A... di Borgo, à qui la requête a été communiquée le 30 janvier 2018 n'a pas produit de mémoire.

La clôture de l'instruction est intervenue le 17 avril 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- et les conclusions de Mme Pena, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... di Borgo a été recruté en qualité de consultant pour la société SMG Advisory en 2005. Il a été élu membre du comité d'entreprise et délégué du personnel en 2013. Le 31 juillet 2015, son employeur a demandé à l'inspecteur du travail l'autorisation de le licencier en invoquant un motif disciplinaire. Par une décision du 5 octobre 2015, l'inspecteur du travail, qui a considéré que la procédure était irrégulière et que les faits reprochés ne justifiaient pas une demande de licenciement, par ailleurs liée au mandat de M. A... di Borgo, a refusé son autorisation. Le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a implicitement rejeté le recours hiérarchique dont il avait été saisi le 6 novembre 2015.

La société PWC Support Services relève appel du jugement du 8 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux décisions.

2. En vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des représentants du personnel, qui bénéficient dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent d'une protection exceptionnelle, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement. A ce titre, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, l'autorité administrative doit, notamment, s'assurer de la régularité de la procédure de licenciement suivie avant sa saisine et, à cet égard, vérifier en particulier que le salarié était pleinement informé des modalités d'assistance auxquelles il avait droit, en fonction de la situation de l'entreprise, pour son entretien préalable.

3. L'article L. 1232-2 du code du travail dispose que : " L'employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable " et l'article

L. 1232-4 du même code dispose que : " Lors de son audition, le salarié peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise. / Lorsqu'il n'y a pas d'institutions représentatives du personnel dans l'entreprise, le salarié peut se faire assister soit par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise, soit par un conseiller du salarié choisi sur une liste dressée par l'autorité administrative. / La lettre de convocation à l'entretien préalable adressée au salarié mentionne la possibilité de recourir à un conseiller du salarié et précise l'adresse des services dans lesquels la liste de ces conseillers est tenue à sa disposition ". L'article R. 1232-1 de ce code dispose enfin que : " La lettre de convocation prévue à l'article L. 1232-2 indique l'objet de l'entretien entre le salarié et l'employeur. / (...) Elle rappelle que le salarié peut se faire assister pour cet entretien par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise ou, en l'absence d'institutions représentatives dans l'entreprise, par un conseiller du salarié ". Il résulte de ces dispositions que la lettre de convocation à l'entretien préalable au licenciement doit mentionner les modalités d'assistance du salarié applicables en fonction de la situation de l'entreprise. A ce titre, lorsque l'entreprise appartient à une unité économique et sociale (UES) dotée d'institutions représentatives du personnel, elle doit mentionner la possibilité pour le salarié convoqué de se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise ou d'une autre entreprise appartenant à l'UES. Toutefois, la procédure n'est pas entachée d'irrégularité s'il est établi que le salarié a été pleinement informé, en temps utile, des modalités d'assistance auxquelles il avait droit, en fonction de la situation de l'entreprise, pour son entretien préalable.

4. Il ressort des pièces du dossier d'une part que la société SMG Advisory, qui employait M. A... di Borgo, faisait partie d'une unité économique et sociale dotée d'institutions représentatives du personnel, d'autre part, que la lettre du 6 juillet 2015 convoquant M. A... di Borgo à l'entretien préalable indiquait à ce dernier qu'il pouvait se faire assister " par une personne de [son] choix appartenant obligatoirement au personnel de l'entreprise ". Cette lettre, dès lors qu'elle ne mentionnait pas la possibilité offerte au salarié protégé de se faire assister par un salarié d'une autre entreprise de l'unité économique et sociale, ne renseignait pas M. A... di Borgo de manière complète sur ses droits en matière d'assistance lors de l'entretien.

5. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... di Borgo aurait été, par ailleurs et d'une autre manière, pleinement informé, en temps utile, des modalités d'assistance auxquelles il avait droit pour son entretien préalable. Cette complète information ne saurait se déduire de la circonstance que M. A... di Borgo aurait été assisté d'une salariée de la société SMG Finance, autre entité de l'unité économique et sociale, lors d'un précédent entretien préalable à un licenciement qui a eu lieu le 12 novembre 2014 dès lors, notamment, que la lettre de convocation à cet entretien, en date du 31 octobre 2014, comportait les mêmes lacunes que la lettre du

6 juillet 2015. Pour établir qu'elle a satisfait à son obligation d'informer pleinement le salarié protégé, la société requérante ne saurait utilement se prévaloir d'un jugement du tribunal administratif de Paris du 7 mars 2017, au demeurant annulé par arrêt n°17PA01525 de la cour administrative d'appel de Paris du 22 janvier 2019, postérieur à la convocation du 6 juillet 2015 et qui portait sur un précédent refus d'autoriser le licenciement de M. A... di Borgo.

6. Il résulte de ce qui précède que la lettre de convocation du 6 juillet 2015 était, ainsi qu'il vient d'être dit, irrégulière et, d'autre part, qu'il n'est pas établi que M. A... di Borgo aurait été informé en temps utile, par tout autre moyen, de la possibilité de se faire assister par un salarié d'une autre entreprise de l'UES. Dès lors, la procédure suivie étant irrégulière, l'autorité administrative était tenue, pour ce seul motif, de refuser l'autorisation sollicitée.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de l'inspecteur du travail du 5 octobre 2015 et du rejet implicite par le ministre du travail de son recours hiérarchique.

8. Les conclusions aux fins d'annulation de la société PWC Support Services ayant été rejetées, ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative doivent l'être par voie de conséquence.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société PWC Support Services est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société PWC Support Services, au ministre du travail et à M. A... di Borgo.

Délibéré après l'audience publique du 5 novembre 2019 à laquelle siégeaient :

- M. B..., président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Jayer, premier conseiller,

- Mme Mornet, premier conseiller.

Lu en audience publique le 19 novembre 2019.

L'assesseur le plus ancien,

M-C... Le président de la formation de jugement,

président-rapporteur,

Ch. B...

Le greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre du travail en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 10PA03855

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N° 18PA00069


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA00069
Date de la décision : 19/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

66-07-01-02-01 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Procédure préalable à l'autorisation administrative. Entretien préalable.


Composition du Tribunal
Président : M. BERNIER
Rapporteur ?: M. Christian BERNIER
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : CABINET OXYNOMIA AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 18/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-11-19;18pa00069 ?
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