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24/10/2019 | FRANCE | N°18PA00870

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 24 octobre 2019, 18PA00870


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... E... et Mme B... E... ont demandé au tribunal administratif de Paris de condamner la société de gestion de fonds de garantie de l'accession sociale à la propriété (SGFGAS) à leur verser une somme de 13 414,26 euros en réparation du préjudice résultant du retard de son intervention dans l'instruction de leur demande de prêt à taux zéro.

Par un jugement n° 1611494 du 2 février 2018, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par

une requête et un mémoire enregistrés le 15 mars 2018 et le 8 mars 2019, M. et Mme E..., représen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... E... et Mme B... E... ont demandé au tribunal administratif de Paris de condamner la société de gestion de fonds de garantie de l'accession sociale à la propriété (SGFGAS) à leur verser une somme de 13 414,26 euros en réparation du préjudice résultant du retard de son intervention dans l'instruction de leur demande de prêt à taux zéro.

Par un jugement n° 1611494 du 2 février 2018, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 15 mars 2018 et le 8 mars 2019, M. et Mme E..., représentés par Me A..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner la SGFGAS à leur verser une indemnité de 13 414,26 euros ;

3°) de mettre à la charge de la SGFGAS le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- en subordonnant, dans un premier temps, l'octroi d'un prêt à taux zéro à la production d'une convention homologuée par le juge aux affaires familiales établissant la composition de leur foyer familial, la SGFGAS a imposé une condition que ne prévoyait aucun texte ;

- l'interprétation des textes applicables ne posait aucune difficulté et le retard avec lequel la demande de prêt déposée le 25 février 2011 a été validée est injustifié ;

- leur préjudice matériel est constitué par le surcoût du prêt, estimé à hauteur de 3 174,26 euros et, d'autre part, et par les frais d'un garde-meuble à hauteur de 240 euros ;

- les incertitudes qui ont pesé sur la réalisation de leur projet immobilier alors que Mme E... attendait d'accoucher sont à l'origine d'un préjudice moral évalué à 10 000 euros.

Par deux mémoires enregistrés le 24 mai 2018 et le 11 avril 2019, la SGFGAS conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit à mise à la charge de M. et Mme E... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête de M. et Mme E..., similaire à la demande soumise aux premiers juges, est dépourvue d'éléments nouveaux ;

- sa responsabilité n'est pas engagée ;

- elle n'intervient pas directement dans l'attribution des prêts à taux zéro et n'a donc pas fait obstacle à la demande soumise au Crédit Agricole qui est de l'entière responsabilité des établissements de crédit ;

- le point sur lequel elle a été interrogée par le Crédit Agricole n'avait pas été clairement tranché par l'administration ;

- elle a répondu dans un délai rapide et dans un sens favorable aux requérants ;

- ni l'existence des préjudices, ni leur quantum, ne sont justifiés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'arrêté du 30 décembre 2010 ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- les conclusions de Mme Pena, rapporteur public,

- et les observations de Me F..., représentant M. et Mme E....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme E... ont déposé, le 25 février 2011, à Lyon une demande de prêt à taux zéro d'un montant de 37 200 euros auprès d'une agence du Crédit agricole centre-est en vue de l'acquisition d'un bien immobilier à Tassin-la-Demi-Lune. Ce crédit leur a été en définitive accordé par la banque le 13 avril 2011. M. et Mme E..., qui estiment que le délai mis par cette banque pour instruire leur demande a été trop long, mettent en cause la responsabilité de la société de gestion de fonds de garantie de l'accession sociale à la propriété (SGFGAS) qui aurait tardé à répondre à une question qui lui avait été posée par l'agence bancaire portant sur la composition du dossier de demande. Ils relèvent appel du jugement du 19 janvier 2018 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à ce que la SGFGAS les indemnise du préjudice qu'ils estiment avoir subi du fait d'un retard fautif.

2. L'article L. 31-10-1 du code de la construction et de l'habitation prévoit que les établissements de crédit et les sociétés de financement peuvent consentir des prêts ne portant pas intérêt pour financer la primo-accession à la propriété. Il résulte du b) de l'article L. 31-10-4 de ce code que les modalités du prêt sont notamment fonction du nombre des personnes destinées à occuper le logement à titre de résidence principale. L'article R. 31-10-4 du même code dispose que " l'emprunteur doit, au moment de la demande du prêt, fournir les pièces justificatives permettant à l'établissement de crédit ou à la société de financement de vérifier qu'il satisfait aux conditions du prêt ". Le contrôle de l'éligibilité des emprunteurs à souscrire un prêt à taux zéro et l'octroi d'un tel prêt relèvent de la compétence et de la responsabilité des établissements de crédit ou des sociétés de financement.

3. Par ailleurs, la société de gestion du fonds de garantie de l'accession sociale à la propriété, dont l'existence a été prévue par l'article 126 de la loi du 30 décembre 1992 de finances pour 1993, aujourd'hui codifié à l'article L. 312-1 du code de la construction et de l'habitation, est chargée, dans le cadre de la politique menée par l'Etat en vue de favoriser l'accession au crédit immobilier et à la propriété des ménages aux revenus modestes ou n'ayant jamais été propriétaires de leur résidence principale, de la gestion et du suivi pour le compte de l'Etat des crédits d'impôt dus par celui-ci au titre des avances remboursables ne portant pas intérêt consenties à des personnes physiques pour l'acquisition ou la construction d'une résidence principale en accession à la première propriété. Pour l'exercice de cette mission, la SGFGAS est notamment habilitée à enregistrer les déclarations de prêts, à vérifier leur éligibilité au dispositif du crédit d'impôt, à diligenter des contrôles auprès des établissements de crédit, qui doivent avoir préalablement conclu avec elle une convention afin de pouvoir bénéficier du crédit d'impôt, à établir le montant du crédit d'impôt dû à ces établissements et à le communiquer à l'administration fiscale, et enfin à produire des éléments statistiques utiles à l'évaluation du dispositif. Dans le cadre des prérogatives de puissance publique qui lui ont été conférées pour l'exécution de la mission de service public dont elle est investie, la SGFGAS peut être amenée à répondre à des questions portant notamment sur l'interprétation de la réglementation applicable qui lui seraient posées par les établissements de crédit, seuls compétents pour accorder ou refuser les prêts.

4. En l'espèce, il résulte de l'instruction que, dans le cadre de la demande de prêt à taux zéro formulée le 25 février 2011 par M. et Mme E..., la question s'est posée de savoir si, pour justifier de la preuve de la composition de la famille qui occuperait le logement pour l'acquisition duquel le financement était sollicité, la production d'une convention homologuée par le juge des affaires familiales réglant la situation des enfants en garde alternée était exigée, ainsi qu'il ressortait d'une question/réponse figurant à cette date sur le site officiel du ministère du logement ou, si à défaut, une attestation sur l'honneur prévue par l'article 5 de l'arrêté du

30 décembre 2010 relatif aux conditions d'application de dispositions concernant les prêts ne portant pas intérêt consentis pour financer la primo-accession à la propriété pouvait suffire, compte tenu aux modalités d'entrée en vigueur complexes figurant à l'article 12 de ce texte. Après avoir initialement répondu à l'établissement bancaire que la convention homologuée par le juge des affaires familiales devait être jointe à la demande, la SGFGAS, directement saisie par le conseil des demandeurs le vendredi 18 mars 2011, a soumis la difficulté aux services compétents du ministère en charge du logement le mardi 21 mars 2011 en proposant à titre exceptionnel de considérer que le dossier de M. et de Mme E... satisfaisait aux conditions réglementaires. Avisée par l'établissement bancaire le vendredi 24 mars 2011 que l'avis d'imposition de

M. E... pour 2009 faisait mention de la garde alternée, la SGFGAS a fait savoir le mercredi 30 mars 2011 que dans ces conditions le Crédit Agricole ne pouvait refuser le prêt par le motif tiré de l'absence de production d'une convention homologuée par le juge. A la suite de quoi, le prêt à taux zéro a été accordé par l'établissement bancaire le 13 avril 2011.

5. En l'espèce, la SGFGAS a saisi sans délai le ministère chargé du logement de la difficulté qui lui avait été soumise par l'agence du Crédit Agricole et a fait connaitre sa réponse, dans les jours qui ont suivi la production d'un élément nouveau qui permettait de donner satisfaction aux demandeurs. Aucun retard fautif de la SGFGAS n'engage la responsabilité de cet organisme. En tout état de cause, les préjudices matériels et moraux allégués ne sont pas établis.

6. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SGFGAS, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par les requérants et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. et Mme E... à verser à la SGFGAS une somme de 3 000 euros au titre de ces dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme E... est rejetée.

Article 2 : M. et Mme E... verseront la somme de 3 000 euros à la société de gestion du fonds de garantie à l'accession sociale à la propriété sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme E... et à la société de gestion du fonds de garantie à l'accession sociale à la propriété

Délibéré après l'audience du 10 octobre 2019, à laquelle siégeaient :

- M. D..., premier vice-président,

- M. C..., président assesseur,

- Mme Mornet, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 24 octobre 2019.

Le rapporteur,

Ch. C...Le président,

M. D...

Le greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 10PA03855

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA00870
Date de la décision : 24/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-01-03-01 Responsabilité de la puissance publique. Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité. Agissements administratifs susceptibles d'engager la responsabilité de la puissance publique. Retards.


Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: M. Christian BERNIER
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : SCP LEHMAN ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-10-24;18pa00870 ?
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