La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/07/2019 | FRANCE | N°18PA03647

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 12 juillet 2019, 18PA03647


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé au Tribunal administratif de Melun, d'une part, d'annuler l'arrêté en date du 7 juin 2018 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé son admission au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la reconduite, d'autre part, d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours suivant la notification du jugement à intervenir, sous as

treinte de 100 euros par jour de retard, ou de réexaminer sa situation admin...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé au Tribunal administratif de Melun, d'une part, d'annuler l'arrêté en date du 7 juin 2018 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé son admission au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la reconduite, d'autre part, d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours suivant la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou de réexaminer sa situation administrative dans les mêmes conditions de délais et d'astreinte.

Par un jugement n° 1805727 du 9 octobre 2018, le magistrat désigné du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 22 novembre 2018, MmeA..., représentée par

MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 9 octobre 2018 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler l'arrêté du 7 juin 2018 du préfet du Val-de- Marne ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou à défaut, de réexaminer sa situation administrative dans les mêmes conditions et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour et de travail ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à verser à son avocat au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la décision portant de refus de séjour :

- cette décision a été signée par une autorité incompétente ;

- cette décision est insuffisamment motivée en fait ;

- cette décision est entachée d'un défaut d'examen sérieux et particulier de sa situation ;

- cette décision est entachée d'une irrégularité de la procédure faute de consultation de la commission du titre de séjour, en violation de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision méconnaît les dispositions du 11°) de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ce qu'elle est malade, que son état de santé nécessite une prise en charge spéciale que le système sanitaire en Guinée ne permet pas car l'offre de santé est inaccessible aux personnes démunies ;

- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en ce qu'elle risque d'être exposée à des traitements inhumains et dégradants en cas de retour sans son pays ;

- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en ce qu'elle sera isolée en cas de retour en Guinée et qu'elle dispose d'attaches familiales sur le territoire français ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- cette décision est illégale à raison de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;

- cette décision est illégale en ce qu'elle a été prise en violation de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 :

- cette décision a été prise en violation de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 juin 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Julliard.

Considérant ce qui suit :

1. MmeA..., ressortissante guinéenne née le 31 décembre 1968, entrée en France le

27 février 2016 selon ses déclarations, a présenté une demande d'asile qui a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) par décision du 31 mars 2017 confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 27 mars 2018. Par un arrêté du 7 juin 2018, le préfet du Val-de-Marne a refusé son admission au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la reconduite. Elle relève appel du jugement du 9 octobre 2018 par lequel le magistrat désigné du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

Sur la légalité de la décision portant refus d'admission au séjour :

2. Si Mme A...soutient en premier lieu, que la décision litigieuse a été signée par une autorité incompétente, M. D..., directeur de l'immigration et de l'intégration signataire de l'acte en cause, disposait par un arrêté n° 2017/794 du 13 mars 2017, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du Val-de-Marne du même jour, d'une délégation de signature du préfet du Val-de-Marne. Par suite, le moyen doit être écarté.

3. Mme A...soutient, en deuxième lieu, que la décision litigieuse est insuffisamment motivée en fait. Il ressort toutefois de cette décision qu'elle mentionne notamment que la demande d'asile de Mme A...a été rejetée et qu'elle ne peut prétendre à la délivrance ni d'une carte de résident sur le fondement de l'article L. 314-11-8 ° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni d'une carte de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 du même code. Par suite, cette décision est suffisamment motivée en fait.

4. Il ne ressort, en troisième lieu, ni de la décision critiquée ni des pièces du dossier que cette décision serait entachée d'un défaut d'examen sérieux et particulier de la situation de

MmeA....

5. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) ".

6. Mme A...soutient que la décision litigieuse méconnaît les dispositions précitées de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ce qu'elle est malade, que son état de santé nécessite une prise en charge spéciale que le système sanitaire en Guinée ne permet pas, car l'offre de santé y est inaccessible aux personnes démunies. Elle a produit devant le tribunal une carte d'invalidité, plusieurs comptes-rendus d'hospitalisation notamment du 19 au 30 novembre 2017 et du 30 novembre 2017 au

12 mars 2018, ainsi que deux certificats médicaux 23 février 2018 et du 4 mai 2018 émanant, d'une part, d'un praticien hospitalier faisant état de la nécessité de soins de 5 à 6 mois pour une cure de pseudarthrose du fémur et, d'autre part, d'un psychiatre attestant que Mme A...souffre d'un stress post-traumatique avec complication anxio-dépressive nécessitant des soins dont elle ne pourrait bénéficier dans son pays d'origine. Toutefois, Mme A...qui n'a pas présenté de demande de titre de séjour en qualité de malade, n'établit en tout état de cause pas que son état de santé nécessite des soins dont le défaut pourrait avoir pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par suite, le moyen ne peut qu'être écarté.

7. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) ". Aux termes de l'article L. 312-2 de ce même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. ". Il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du titre de séjour du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11, L. 314-12 et L. 431-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions. Il résulte de ce qui précède que Mme A...ne remplissant pas les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées, le préfet du

Val-de-Marne n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour avant l'édiction de la décision contestée.

8. En sixième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

9. Si Mme A...soutient que le refus de titre de séjour méconnaît les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en ce qu'elle sera isolée en cas de retour en Guinée et qu'elle dispose d'attaches familiales sur le territoire français, elle n'apporte ni précision, ni justificatif de l'existence d'une vie privée et familiale en France alors qu'il résulte de ses déclarations qu'elle a quatre enfants en Guinée. Ce moyen ne peut qu'être écarté.

10. Enfin, Mme A...ne saurait utilement se prévaloir à l'encontre de la décision de refus de titre de séjour des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que cette décision n'a ni pour objet ni pour effet de la renvoyer en Guinée.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

11. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale à raison de l'illégalité de la décision de refus de séjour. Cette exception d'illégalité ne peut qu'être écartée.

12. En deuxième lieu, si Mme A...soutient que la décision litigieuse a été prise en violation de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, elle n'assortit ce moyen d'aucune précision permettant à la Cour d'en apprécier le bien-fondé.

13. Enfin, si Mme A...soutient que cette décision a été prise en violation de l'article

L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ce moyen est dépourvu de toute précision et doit être écarté, et dès lors, en tout état de cause, que l'intéressée ne précise pas quelles informations autres que celles dont disposait déjà le préfet, elle aurait pu utilement faire valoir avant l'adoption de la décision contestée.

14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 juin 2018 du préfet du Val-de-Marne. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent être également rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 24 juin 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme Heers, présidente de chambre,

- Mme Julliard, présidente-assesseure,

- M. Mantz, premier conseiller.

Lu en audience publique le 12 juillet 2019.

La rapporteure,

M. JULLIARDLa présidente,

M. HEERSLa greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 18PA03647 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA03647
Date de la décision : 12/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-02-01 Étrangers. Séjour des étrangers. Autorisation de séjour. Demande de titre de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: Mme Marianne JULLIARD
Rapporteur public ?: Mme JAYER
Avocat(s) : KWEMO

Origine de la décision
Date de l'import : 20/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-07-12;18pa03647 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award