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04/07/2019 | FRANCE | N°19PA01263,19PA01265

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 04 juillet 2019, 19PA01263,19PA01265


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 24 janvier 2019 par lequel le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai.

Par un jugement n° 1901571 du 4 février 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête enregistrée le 10 avril 2019 sous le n° 19PA01263, M. D..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) de surseoir à statuer p

our saisir le Conseil d'Etat d'une demande d'avis sur le fondement de l'article L. 113-1 du code de just...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 24 janvier 2019 par lequel le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai.

Par un jugement n° 1901571 du 4 février 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête enregistrée le 10 avril 2019 sous le n° 19PA01263, M. D..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) de surseoir à statuer pour saisir le Conseil d'Etat d'une demande d'avis sur le fondement de l'article L. 113-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler le jugement n° 1901571 du 4 février 2019 du tribunal administratif de Paris ;

3°) d'annuler l'arrêté du 24 janvier 2019 du préfet de police ;

4°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale ", ou une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail ; à titre subsidiaire, de lui enjoindre de procéder au réexamen de sa situation administrative et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail dans le délai de deux mois suivant l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me C...sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ou, si l'aide juridictionnelle ne lui est pas accordée, à verser à M. D...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il est nécessaire de saisir le Conseil d'Etat d'une demande d'avis afin de savoir si l'obligation de quitter le territoire français prononcée le 24 janvier 2019 se substitue à l'obligation de quitter le territoire prononcée le 9 février 2017, non exécutée et assortie d'une interdiction de retour de deux ans ;

- l'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée en droit et en fait ;

- elle n'a pas été précédé d'un examen sérieux de sa situation ;

- il n'a pas bénéficié d'une procédure contradictoire préalable, en méconnaissance des articles L. 121-1 et L. 121-2 du code des relations entre le public et l'administration et du droit d'être entendu garanti par le droit de l'Union européenne ;

- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur de fait et d'un défaut de base légale car il est entré régulièrement en France ;

- elle méconnait son droit au respect de sa vie privée et familiale protégé par l'article 6 paragraphe 5 de l'accord franco-algérien et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnait l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision lui refusant un délai de départ volontaire est insuffisamment motivée ; elle ne démontre pas que le préfet a procédé à un examen particulier de sa situation ;

- sa situation ne permet pas de caractériser un risque de fuite ;

- les circonstances particulières de l'espèce justifiaient qu'il lui soit accordé un délai de départ volontaire ; la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

II. Par une requête enregistrée le 10 avril 2019 sous le numéro 19PA01265, M. D...demande à la Cour :

1°) de prononcer, sur le fondement de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement n° 1901571 du 4 février 2019 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement comporte des conséquences difficilement réparables ;

- il se prévaut de plusieurs moyens susceptibles de créer un doute sérieux sur le bien-fondé du jugement et la légalité des décisions attaquées.

Par un mémoire en défense enregistré le 29 mai 2019, le préfet de police conclut au rejet des deux requêtes.

Il soutient que :

- la saisine pour avis du Conseil d'Etat ne se justifie pas ;

- les moyens de la requête sont infondés ;

- si le requérant établit la régularité de son entrée en France, il est demandé à la Cour de prononcer une substitution de motif, la décision pouvant être fondée à l'issue de l'exercice d'un même pouvoir d'appréciation sur le 2° du I de l'article L. 511-1.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Pellissier a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant algérien né en juin 1993 et entré en France en décembre 2015 selon ses déclarations, a fait l'objet le 9 février 2017 d'une obligation de quitter le territoire français sans délai prononcée par le préfet du Rhône et assortie d'une interdiction de retour sur le territoire français de deux ans. Le 23 janvier 2019, il a été interpellé lors d'un contrôle d'identité à la gare du nord à Paris, sans pouvoir justifier de la régularité de son séjour en France. Par arrêté du 24 janvier 2019, le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai. M. D... demande l'annulation, d'une part, le sursis à exécution, d'autre part, du jugement du 4 février 2019 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Paris a refusé de prononcer l'annulation de cet arrêté préfectoral.

Sur les conclusions aux fins de transmission du dossier au Conseil d'Etat pour avis :

2 La faculté de transmettre le dossier au Conseil d'Etat pour avis prévue par les dispositions de l'article L. 113-1 du code de justice administrative constituant un pouvoir propre du juge, les conclusions de M. D...tendant à ce que la Cour transmette le dossier au Conseil d'Etat en application de ces dispositions sont irrecevables et doivent être rejetées.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

3. L'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; / 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa (...) sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré (...).

4. En premier lieu, l'arrêté attaqué vise l'article L. 511-1 I 1° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui constitue le fondement de droit de l'obligation de quitter le territoire français, et mentionne que M.D..., de nationalité algérienne, n'a pu justifier être entré régulièrement sur le territoire français et n'est pas titulaire d'un titre de séjour en cours de validité, ce qui constitue le motif de fait de cette mesure. Il comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui le fondent et respecte les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile et de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, Le moyen tiré d'une insuffisante motivation de l'arrêté litigieux doit être écarté.

5. En deuxième lieu, la circonstance que la motivation de l'arrêté ne rappelle pas l'ensemble des considérations de fait que M. D... a pu faire valoir lors de son audition par les services de police ne saurait démontrer que cet arrêté n'a pas été pris à la suite d'un examen particulier de la situation de l'intéressé.

6. En troisième lieu, l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration dispose : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ". L'article L. 121-2 du même code précise : " Les dispositions de l'article L. 121-1 ne sont pas applicables : 1° En cas d'urgence ou de circonstances exceptionnelles (...) 3° Aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire particulière (...) ". Aux termes des dispositions de l'article L. 122-1 du même code : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix (...) ".

7. Il ressort des dispositions du livre V du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment de son article L. 512-1, que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à un étranger l'obligation de quitter le territoire français. Dès lors, les articles L. 121-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration, qui fixent les règles générales de procédure applicables aux décisions administratives devant être motivées, ne sauraient être utilement invoqués à l'encontre d'une décision portant obligation de quitter le territoire français prise sur le fondement du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, même si elle n'intervient pas à la suite d'une demande de l'étranger en vue de la délivrance d'un titre de séjour. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions ne peut dès lors qu'être écarté.

8. En quatrième lieu, le droit d'être entendu préalablement à toute décision qui affecte sensiblement et défavorablement les intérêts de son destinataire constitue l'une des composantes du droit de la défense, tel qu'il est énoncé notamment au 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, et fait partie des principes généraux du droit de l'Union européenne ayant la même valeur que les traités. Il garantit à toute personne la possibilité de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours de la procédure administrative, afin que l'autorité compétente soit mise à même de tenir compte de l'ensemble des éléments pertinents pour fonder sa décision. Ce droit n'implique pas systématiquement l'obligation, pour l'administration, d'organiser, de sa propre initiative, un entretien avec l'intéressé, ni même d'inviter ce dernier à produire ses observations, mais suppose seulement que, informé de ce qu'une décision lui faisant grief est susceptible d'être prise à son encontre, il soit en mesure de présenter spontanément des observations écrites ou de solliciter un entretien pour faire valoir ses observations orales. Enfin, une atteinte à ce droit n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle la décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision, ce qu'il lui revient, le cas échéant, d'établir devant la juridiction saisie. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier, notamment du procès-verbal d'audition par les services de police du 23 janvier 2019, que le requérant a été informé de l'intention de l'administration de prendre à son encontre une mesure l'obligeant à quitter le territoire français à destination de l'Algérie et mis à même de formuler ses observations sur cette éventualité. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire doit être écarté.

9. En cinquième lieu, M. D...soutient, en produisant devant le juge son passeport muni d'un visa valable du 27 octobre 2015 au 21 janvier 2016 et d'un tampon de l'aéroport d'Orly le 21 décembre 2015, qu'il est entré régulièrement en France, contrairement à ce que retient l'arrêté fondé sur les dispositions, citées au point 2 ci-dessus, du 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, à supposer que M. D... démontre qu'il n'a pas quitté la France entre cette entrée régulière en décembre 2015 et la date de l'arrêté litigieux, il est constant qu'il se serait alors maintenu irrégulièrement sur le territoire français " au-delà de la durée de validité de son visa (...) sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ", cas prévu au 2° du même I de l'article L. 511-1. Le préfet de police, qui demande une substitution de motifs, indique qu'il aurait pris, en vertu d'un même pouvoir d'appréciation, la même décision sur le fondement de cette disposition si le passeport avait été produit devant lui. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire droit à cette demande de substitution de motifs. Dès lors, M. D... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police a entaché sa décision d'une erreur de fait et d'un défaut de base légale.

10. En sixième lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5. Au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs de son refus (...) ". L'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant stipule : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale ".

11. M.D..., qui soutient être présent en France depuis un peu plus de trois ans à la date de la décision litigieuse, fait valoir, en produisant des attestations, qu'il apporte aide et assistance à sa soeur aînée de nationalité française, chez laquelle il réside, qui est malade et handicapée, élève seule sa fille de 18 mois et héberge également leur jeune frère Abdelwahab, âgé de dix-sept ans et scolarisé en classe d'accueil depuis la rentrée scolaire 2018. Toutefois il ne ressort pas des pièces produites que seul M. D... serait apte à porter à sa soeur l'assistance qu'elle requerrait, ni que l'intérêt supérieur des enfants que sont sa jeune nièce, dont le père réside en région parisienne, ou son frère, dont les parents résident en Algérie et dont l'arrivée en France est très récente, commande qu'il soit autorisé à résider sur le territoire français. Dans ces conditions, alors que M. D...a vécu au moins jusqu'à l'âge de vingt-deux ans en Algérie, où résident ses parents et le reste de sa fratrie, et qu'il ne justifie en France d'aucune insertion sociale ou professionnelle, même s'il produit une promesse d'embauche comme " agent de nettoyage véhicules " datée du 27 janvier 2018 et donc postérieure à la décision attaquée, le préfet de police a pu l'obliger à quitter la France sans porter à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts poursuivis, et sans méconnaitre l'intérêt supérieur de sa nièce et de son frère. Par suite, les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article 6 (paragraphe 5) de l'accord franco-algérien et de l'article 3 de la convention de New York relative aux droits de l'enfant doivent être écartés.

En ce qui concerne la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire :

12. Aux termes du II de l'article L. 511-1 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification pour rejoindre le pays dont il possède la nationalité ou tout autre pays non membre de l'Union européenne ou avec lequel ne s'applique pas l'acquis de Schengen où il est légalement admissible. (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement (...) f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, (...) qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale (...) h) Si l'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français (...)".

13. Pour refuser à M. D...un délai pour quitter volontairement la France, le préfet de police a visé le II de l'article L. 511-1 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui constitue le fondement de droit de cette décision, et indiqué qu'il existe un risque que M. D... se soustraie à l'obligation de quitter le territoire français dès lors qu'il ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français et n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour, qu'il s'est soustrait à l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français prononcée le 9 février 2017 par le préfet du Rhône, qu'il ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, ne pouvant présenter de documents d'identité ou de voyage en cours de validité ni justifier d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation et, enfin, qu'il a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français. La décision refusant un délai de départ volontaire comporte ainsi, de façon précise et non stéréotypée, les motifs de droit et de fait qui la fondent. Elle est suffisamment motivée.

14. Si M. D... soutient que la décision de lui refuser un délai de départ volontaire a été prise sans examen sérieux de sa situation dès lors qu'il avait indiqué lors de son audition être entré régulièrement en France, posséder un passeport et un domicile stable chez sa soeur, il est constant qu'il n'a pas produit son passeport et qu'il a même répondu à une question concernant sa volonté de faire ainsi obstacle à une mesure d'éloignement : " je ne sais plus où je l'ai mis chez moi ". Il ne ressort donc pas de la motivation de la décision que le préfet n'aurait pas procédé à un examen sérieux de la situation de l'intéressé.

15. Si M. D...a donné lors de son audition une adresse précise à Bagneux, il est constant qu'il était dépourvu lors de son interpellation de tout document d'identité, que les recherches entreprises ont révélé qu'il n'avait pas exécuté une précédente obligation de quitter le territoire français et qu'il a répondu aux questions concernant une éventuelle décision d'éloignement vers l'Algérie qu'il ne pourrait pas y déférer et qu'il voulait bien qu'on le laisse " déposer son dossier pour régulariser sa situation ". Il a ainsi manifesté sans équivoque son refus de mettre à profit un éventuel délai de départ volontaire pour exécuter la décision d'éloignement et le préfet de police n'a pas méconnu les dispositions précitées du III de l'article L. 511-1 en estimant qu'il existait un risque de fuite et en refusant à l'intéressé, pour ce motif, un délai de départ volontaire. En outre, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le refus d'un tel délai aurait comporté en l'espèce des conséquences graves et que la décision serait entachée d'erreur d'appréciation.

16. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution du jugement :

17. La Cour se prononçant, par le présent arrêt, sur la requête de M. D...tendant à l'annulation du jugement du 4 février 2019 du tribunal administratif de Paris, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 19PA01265 tendant çà ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement.

Sur les frais liés au litige :

18. Les dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et celles de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, les sommes que M. D... demande au titre des frais qu'il a exposés.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fins de sursis à exécution de la requête n° 19PA01265 de M.D....

Article 2 : La requête n° 19PA01263 de M. D...et les conclusions de la requête n° 19PA01265 tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 20 juin 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente de chambre,

- M. Legeai, premier conseiller,

- M. Platillero, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 4 juillet 2019.

L'assesseur le plus ancien,

A. LEGEAI

La présidente de chambre,

rapporteur

S. PELLISSIERLe greffier,

M. A...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°s 19PA01263, 19PA01265


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19PA01263,19PA01265
Date de la décision : 04/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: Mme Sylvie PELLISSIER
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : KOSZCZANSKI et BERDUGO

Origine de la décision
Date de l'import : 16/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-07-04;19pa01263.19pa01265 ?
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