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26/06/2019 | FRANCE | N°18PA02629

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 26 juin 2019, 18PA02629


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...D...ont demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des cotisations sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2008 et 2009.

Par un jugement n° 1605567/7 du 28 juin 2018, le Tribunal administratif de Melun a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 31 juillet 2018, M. et MmeD..., représentés par Me B..

.C...demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Melun du 28 j...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...D...ont demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des cotisations sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2008 et 2009.

Par un jugement n° 1605567/7 du 28 juin 2018, le Tribunal administratif de Melun a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 31 juillet 2018, M. et MmeD..., représentés par Me B...C...demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Melun du 28 juin 2018 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la proposition de rectification est insuffisamment motivée en ce qui concerne les rectifications relatives aux contributions sociales ;

- ce document n'indique pas que les revenus distribués entrent dans le champ de ces contributions ;

- le tribunal ne s'est pas prononcé sur cette branche du moyen ;

- les prescriptions de la doctrine administrative référencée BOI CF IOR 10-40-20120912, n° 40 ont été méconnues ;

- l'apport en compte courant est justifié par l'affectation à la société Advantage International du remboursement du prêt que M. D...avait consenti à la société L'Olivier ;

- la doctrine administrative référencée BOI-RCM-10-20-10, n°210, 12/09/2012 prévoit que le bénéficiaire des sommes distribuées échappe à toute imposition lorsque lesdites sommes ne présentent pas à son égard le caractère d'un revenu ;

- les prélèvements sur le compte courant d'associé étaient impossibles ;

- le service n'apporte pas la preuve qui lui incombe que les indemnités kilométriques versées à M. D...constituent des revenus distribués pour celui-ci, en contradiction avec le principe de l'indépendance des procédures ;

- l'intention délibérée d'éluder l'impôt n'est pas établie.

Par un mémoire en défense enregistré le 29 octobre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par M. et Mme D...ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 5 décembre 2018, la clôture de l'instruction a été fixée au

20 décembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Magnard,

- les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public,

- et les observations de MeE..., substituant MeC..., représentant M. et MmeD....

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue d'une vérification de comptabilité de la société Advantages International, dont M. A...D...était le gérant et l'associé, portant sur les exercices clos en 2008 et 2009 en matière d'impôt sur les sociétés et d'un contrôle sur pièces du dossier fiscal personnel de M. et Mme D...au titre des années 2008 et 2009, l'administration fiscale a imposé entre leurs mains, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, des revenus considérés comme distribués au titre des années vérifiées. Par la présente requête, M. et Mme D...relèvent appel du jugement du Tribunal administratif de Melun du 28 juin 2018 en tant qu'il a refusé de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des cotisations sociales auxquelles ils ont été assujettis en conséquence au titre des années 2008 et 2009.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de statuer sur tous les arguments soulevés par les contribuables à l'appui de leurs moyens, ont statué sur le moyen qui leur était soumis tiré de l'insuffisante motivation de la proposition de rectification. La circonstance qu'ils aient pris en compte les mentions de la proposition de rectification relatives aux conséquences financières des rectifications pour apprécier la régularité de la motivation de ce document, notamment au regard des contributions sociales, ne saurait être regardée comme entachant d'irrégularité le jugement attaqué.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

3. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter, outre la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base des rectifications, ceux des motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées qui sont nécessaires pour permettre au contribuable de formuler ses observations de manière entièrement utile.

4. L'administration fiscale a, dans la proposition de rectification adressée à

M. et Mme D...le 12 décembre 2011, qui comportait la désignation des impôts concernés, des années d'imposition et de la base des rectifications envisagées, exposé les motifs de droit et de fait ayant fondé les chefs de rectification en litige dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. Ladite proposition de rectification exposait que les contributions sociales s'appliquaient aux revenus du patrimoine et indiquait les articles du code général des impôts relatifs auxdites contributions. Elle était ainsi suffisamment motivée. La circonstance que la proposition de rectification ait précisé que les gains de cession de droits sociaux faisaient partie des revenus du patrimoine soumis aux contributions sociales alors que les rehaussements étaient relatifs à des revenus distribués ne saurait conduire à regarder ce document comme entaché d'une insuffisance de motivation. Les prescriptions de la doctrine administrative référencée

BOI CF IOR 10-40-20120912 sont relatives à la procédure d'imposition et ne peuvent par suite être valablement invoquées sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

5. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. ".

6. En premier lieu, l'administration fiscale fait valoir que les crédits constatés au compte courant d'associé ouvert au nom de M. D...dans les écritures de la SARL Advantages International au cours de l'année 2009, à concurrence de la somme de 32 640 euros, doivent être regardés comme des sommes mises à la disposition de l'intéressé. L'existence de ces crédits ne fait l'objet d'aucune contestation. Les requérants font valoir que les sommes litigieuses correspondent, à hauteur de 25 000 euros, à l'affectation à la SARL Advantages International, qui connaissait des difficultés financières, du remboursement par la société L'Olivier, de sommes avancées, à titre personnel, par M. D...au gérant de ladite société. Toutefois, ils se sont bornés à produire une reconnaissance de dettes de ce dernier dépourvue de date certaine. Ils n'apportent aucun élément permettant de s'assurer de la réalité du prêt en cause et des modalités de son remboursement par la société L'Olivier. Les pièces fournies ne permettent donc pas de constater que les crédits en compte courant litigieux trouveraient leur origine dans l'abandon par M. D...d'une créance qu'il aurait effectivement détenu sur un tiers. Si les requérants font valoir par ailleurs que les prélèvements sur le compte courant d'associé étaient impossibles en raison des difficultés financières de la SARL Advantages International, ils se bornent à produire des liasses fiscales qui ne permettent pas de suivre au jour le jour la situation de la trésorerie de cette société entre la date des crédits en compte courant et la clôture des exercices en cause. Ainsi ils n'établissent pas, alors qu'ils sont seuls en mesure de le faire, l'impossibilité de prélèvement des sommes mises à la disposition de M.D.... De telles sommes sont dès lors taxables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement des dispositions rappelées ci-dessus de l'article 109 du code général des impôts. Si M. et Mme D...font valoir que la doctrine administrative BOI-RCM-10-20-10, n°210 prévoit que le bénéficiaire des sommes distribuées échappe à toute imposition lorsque lesdites sommes ne présentent pas à son égard le caractère d'un revenu, ces indications ne font pas de la loi fiscale une interprétation différente de ce qui précède et ne peuvent par suite être valablement invoquées sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

7. En deuxième lieu, le service vérificateur a constaté que la SARL Advantages International avait déduit des montants d'indemnités kilométriques versées à M.D..., correspondant au remboursement forfaitaire, en application du barème kilométrique fourni par l'administration, des trajets effectués par celui-ci avec son véhicule personnel, à hauteur

de 21 322 kilomètres en 2008 et pour un kilométrage inconnu en 2009. Par ailleurs, les opérations de contrôle ont permis d'établir que le requérant avait bénéficié à cet égard de plusieurs versements sur son compte-courant d'associé à hauteur de 8 550,27 euros en 2008 et

1 817,60 euros en 2009. Aucun état de frais n'a été présenté non plus qu'aucun élément justificatif du nombre de kilomètres parcourus à titre professionnel. L'administration doit dès lors être regardée comme ayant établi le bien-fondé du rehaussement, notifié à cet égard, des résultats de la société Advantages International. L'appréhension des sommes correspondantes résulte des crédits au compte courant d'associé constatés par le service et qui ne font l'objet d'aucune contestation. L'administration établit ainsi, sans que les requérants puissent valablement invoquer la méconnaissance du principe d'indépendance des procédures, que les indemnités kilométriques versées à M. D...constituent, faute de justification, des revenus distribués taxables sur le fondement du 1° de l'article 109-1 du code général des impôts.

Sur les pénalités :

8. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration

de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".

9. Il résulte de l'instruction que les requérants ont apporté des justifications relatives à une partie significative des sommes créditées au compte courant d'associé de M. D...et qui avaient été constatées dans la proposition de rectification adressée le 12 décembre 2011. S'ils n'ont pas été en mesure de justifier des sommes restant en litige, une telle circonstance, en l'absence d'autres éléments de nature à éclairer le comportement fiscal de M. et MmeD..., et alors même que les omissions constatées représenteraient au titre des années 2008 et 2009 respectivement 18,6 % et 72,3 % des revenus des intéressés, ne saurait suffire à établir que ces derniers avaient l'intention délibérée d'éluder l'impôt.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D...sont seulement fondés à demander la décharge des pénalités pour manquement délibéré dont ont été assorties les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2008 et 2009. Pour le surplus, ils ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par les requérants sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : M. et Mme D...sont déchargés des pénalités pour manquement délibéré dont ont été assorties les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2008 et 2009.

Article 2 : Le jugement n° 1605567/7 du 28 juin 2018 du Tribunal administratif de Melun est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête M. et Mme D...est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...D...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé la direction nationale d'enquêtes fiscales.

Délibéré après l'audience du 12 juin 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Appèche, président assesseur,

- M. Magnard, premier conseiller.

Lu en audience publique le 26 juin 2019.

Le rapporteur,

F. MAGNARDLe président,

I. BROTONS

Le greffier,

P. LIMMOIS

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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2

N° 18PA02629


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA02629
Date de la décision : 26/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : TAXLENS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-06-26;18pa02629 ?
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