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31/05/2019 | FRANCE | N°18PA02233

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 31 mai 2019, 18PA02233


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 9 janvier 2018 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1800991 du 23 février 2018, la magistrate désignée par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 30 juin 2018 M.A..., représenté par Me B...demand

e à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 9 janvier 2018 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1800991 du 23 février 2018, la magistrate désignée par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 30 juin 2018 M.A..., représenté par Me B...demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour mention "Vie privée et familiale" ou à tout le moins de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application de l'article

L. 761-1 du code de Justice administrative.

Il entend reprendre tous moyens soulevés en première instance et soutient que :

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;

- il se fonde principalement sur la décision de la Cour Nationale du Droit d'Asile (CNDA) or il est constant que celle-ci est entachée d'une erreur de droit et de fait et que par conséquent il peut se prévaloir du principe de l'exception d'illégalité ;

- le préfet a méconnu les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions de l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision méconnaît l'article 3 de la convention contre la torture ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation sur les conséquences de celle-ci sur son droit au respect de sa vie privée et familiale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 novembre 2018, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants adoptée à New York le 10 décembre 1984 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Heers a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., ressortissant vietnamien, a fait l'objet d'un arrêté du préfet de police de Paris en date du 9 janvier 2018 portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours assorti d'une décision fixant le pays de renvoi. Il relève appel du jugement du 23 février 2018 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, en vertu des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, les mesures de police doivent être motivées et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. En l'espèce, l'arrêté contesté vise les textes dont il fait application, et notamment les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et notamment l'article L. 511-1 6° de ce code. Il mentionne également des considérations de fait et notamment le fait que la demande d'asile de M. A...a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 31 janvier 2017, confirmée par un arrêt de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 28 juin 2017 et que l'intéressé n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Cet arrêté comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est suffisamment motivé dès lors que le préfet de police n'était pas tenu de mentionner l'ensemble des circonstances de fait relatives à la situation de M.A....

3. En deuxième lieu, l'arrêté contesté n'a pas été pris sur le fondement de la décision de la Cour nationale du droit d'asile mais celle-ci a seulement été prise en compte par le préfet pour prendre sa décision. Par suite, le requérant ne peut utilement invoquer par voie d'exception, à l'encontre de l'arrêté contesté, une éventuelle erreur dans l'arrêt de la Cour nationale du droit d'asile.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale. 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". De plus, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...).

5. M. A...soutient qu'il a choisi de poursuivre sa vie privée et familiale en France et que ses deux filles y vivent. Toutefois, le requérant n'apporte aucun élément permettant d'apprécier la situation de sa vie privée et familiale et notamment permettant d'établir qu'il a effectivement deux filles vivant en France alors qu'il ne contredit pas l'administration qui soutient dans son mémoire en défense qu'il est célibataire, sans charge de famille et ne démontre pas une particulière intégration en France. De plus, l'intéressé a lui-même indiqué à l'OFPRA ne pas être dépourvu de toute attache dans son pays d'origine où résident ses parents et ses sept frères et soeurs. Enfin, il déclare être entré en France le 2 novembre 2015 soit moins de trois ans avant la date de l'arrêté contesté. Dès lors, eu égard aux conditions et à la durée du séjour en France de M.A..., l'arrêté litigieux n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le préfet de police n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de celle-ci sur le droit de M. A...au respect de sa vie privée et familiale. Enfin, l'arrêté contesté ne porte pas refus de titre de séjour, de sorte que M. A...ne peut utilement invoquer à son encontre les dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. En dernier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants. Enfin, aux termes de l'article 3 de la convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants : " 1. Aucun Etat n'expulsera, ne refoulera ni d'extradera une personne vers un autre Etat où il y a des motifs sérieux de croire qu'elle risque d'être soumis à la torture ".

7. Pour soutenir qu'il risque de subir des traitements inhumains en cas de retour au Vietnam, M. A...rappelle qu'il a fait l'objet d'un mandat d'arrêt en date du 25 mai 2013 à raison des " actes réactionnaires " qu'il a commis, de documents rappelant la situation au Vietnam, d'une attestation soutenant qu'il est un défenseur des droits de l'homme et qu'il est recherché par la police en raison de ces activités. Toutefois, ce mandat mentionne un acte du bureau de la police d'enquête de la province de Soc Trang de 2008 sur des documents collectés en 2003 et une décision de poursuite de 2012, soit des faits antérieurs aux évènements que M. A...cite comme marquant le début de son engagement politique. Le mandat produit ne permet pas à lui seul d'établir qu'il serait susceptible de faire personnellement l'objet de traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine. De plus, la production de documents d'ordre général sur la situation au Vietnam ou d'une attestation peu circonstanciée ne permettent pas non plus d'établir que l'intéressé serait personnellement menacé en cas de retour dans son pays. Au surplus, sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides puis par la Cour nationale du droit d'asile. Dans ces conditions, M. A...n'est pas fondé à soutenir que le préfet a méconnu les stipulations des articles 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3 de de la convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera délivrée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 17 mai 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme Heers, président de chambre,

- Mme Julliard, président-assesseur,

- M. Mantz, premier conseiller.

Lu en audience publique le 31 mai 2019.

Le président-rapporteur,

M. HEERSL'assesseure la plus ancienne,

M. JULLIARD

La greffière,

F. DUBUY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 18PA02233 5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA02233
Date de la décision : 31/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: Mme Mireille HEERS
Rapporteur public ?: Mme JAYER
Avocat(s) : BERA

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-05-31;18pa02233 ?
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