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14/05/2019 | FRANCE | N°19PA00361

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 14 mai 2019, 19PA00361


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 2 octobre 2018 par lequel le préfet de police a décidé sa remise aux autorités autrichiennes.

Par un jugement n° 1817761/8 du 14 décembre 2018, le magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 22 janvier 2019, M.B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du

magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Paris du 14 décembre 2018 ;

2°) d'annule...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 2 octobre 2018 par lequel le préfet de police a décidé sa remise aux autorités autrichiennes.

Par un jugement n° 1817761/8 du 14 décembre 2018, le magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 22 janvier 2019, M.B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Paris du 14 décembre 2018 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de police du 2 octobre 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police d'enregistrer sa demande d'asile dans un délai de huit jours et de lui remettre l'attestation de demande d'asile dans un délai de soixante-douze heures à compter de la notification du présent arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 800 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision attaquée est entachée d'un vice de procédure en raison du défaut de mention du nom et de la qualité de l'agent sur le résumé de l'entretien individuel mené pour la détermination de l'Etat membre responsable ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en n'exerçant pas le pouvoir qu'il tient de l'article 17 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 car il risque d'être renvoyé en Afghanistan à la suite de son transfert en Autriche, cet Etat ayant rejeté la demande d'asile qu'il y avait formée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 avril 2019, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 21 mars 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Niollet a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.B..., ressortissant afghan né le 2 mars 1994, a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile le 26 juillet 2018. Par un arrêté du 2 octobre 2018, le préfet de police a décidé sa remise aux autorités autrichiennes. M. B...fait appel du jugement du 14 décembre 2018 par lequel le magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. (...) / 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. 6. L'État membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. L'État membre veille à ce que le demandeur et/ou le conseil juridique ou un autre conseiller qui représente le demandeur ait accès en temps utile au résumé (...) ".

3. La conduite de l'entretien par une personne qualifiée en vertu du droit national constitue, pour le demandeur d'asile, une garantie. Si le compte-rendu de l'entretien individuel qui comporte seulement la mention " Préfecture de police / Direction de la Police Générale / 12ème Bureau " sur la dernière page, ne mentionne pas le nom et la qualité de l'agent ayant mené l'entretien, il ressort toutefois des pièces du dossier que M. B...a eu la possibilité, lors de cet entretien, de faire part de toute information pertinente relative à la détermination de l'Etat responsable. Par suite, l'absence d'indication de l'identité et de la qualité de l'agent qui a mené l'entretien individuel n'a pas privé l'intéressé d'une garantie et n'a pas été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du paragraphe 5 de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 doit être écarté.

4. En second lieu, aux termes de l'article 18 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. L'État membre responsable en vertu du présent règlement est tenu de : (...) d) reprendre en charge, dans les conditions prévues aux articles 23, 24, 25 et 29, le ressortissant de pays tiers ou l'apatride dont la demande a été rejetée et qui a présenté une demande auprès d'un autre État membre ou qui se trouve, sans titre de séjour, sur le territoire d'un autre État membre. (...) ". L'article 17 de ce règlement dispose : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. (...) ". Enfin, l'article 3 de ce règlement prévoit que : " Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable.".

5. M. B...soutient qu'il sera renvoyé en Afghanistan en cas de transfert vers l'Autriche, car les autorités de ce pays ont rejeté sa demande d'asile, et qu'il encourt des risques pour sa vie en cas de retour dans son pays d'origine. Toutefois, l'arrêté en litige a seulement pour objet de renvoyer l'intéressé en Autriche et non dans son pays d'origine. Par ailleurs, l'Autriche, Etat membre de l'Union européenne, est partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Les rapports d'organisations internationales produits ou cités par l'intéressé ainsi que les statistiques dont il fait état sur le taux d'octroi d'une protection internationale aux demandeurs d'asile afghans en Autriche ne suffisent pas à établir qu'il existerait des raisons sérieuses de croire à l'existence de défaillances systémiques en Autriche dans la procédure d'asile ou que les juridictions autrichiennes n'auraient pas traité sa demande d'asile dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile. En outre, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que les autorités autrichiennes alors même que la demande d'asile de M. B... a été rejetée, n'évalueront pas, avant de procéder à un éventuel éloignement de M. B..., les risques auquel il serait exposé en cas de retour en Afghanistan. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de police, en s'abstenant de mettre en oeuvre la clause dérogatoire de l'article 17 du règlement cité ci-dessus, aurait entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquence sur sa situation personnelle, doit être écarté.

6. Il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'annulation, celles à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 24 avril 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- M. Pagès, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 mai 2019.

Le rapporteur,

J-C. NIOLLETLe président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

T. ROBERT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 19PA00361 5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA00361
Date de la décision : 14/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière - Légalité interne - Étrangers ne pouvant faire l`objet d`une OQTF ou d`une mesure de reconduite - Demandeurs d'asile.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe NIOLLET
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : SELARL LFMA

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-05-14;19pa00361 ?
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