Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 3 avril 2017 par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé de l'assigner à résidence.
Par un jugement n° 1709124/4-1 du 25 octobre 2018, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 22 novembre 2018, M.B..., représenté par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1709124/4-1 du tribunal administratif de Paris du 25 octobre 2018 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 3 avril 2017 par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé de l'assigner à résidence ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de l'assigner à résidence dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jours de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision attaquée est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il remplit les conditions pour obtenir un titre de séjour sur ce fondement ;
- elle est entachée d'erreur de droit au regard de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que, contrairement à ce qu'a retenu le ministre de l'intérieur, il se trouve dans l'impossibilité de retourner en Algérie où il est dépourvu de toute attache ;
- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il justifie résider sur le territoire français depuis vingt-six ans et qu'il vit en concubinage avec une ressortissante algérienne en situation régulière avec laquelle il a eu trois enfants ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention des Nations unies sur les droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 dès lors que ses trois enfants nés et scolarisés en France se trouveront privés de leur père ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense enregistré le 14 mars 2019, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête, à titre principal, comme irrecevable et, à titre subsidiaire, comme non fondée.
Il soutient que :
- la requête est insuffisamment motivée, en l'absence de moyen d'appel et devant la reprise intégrale et exclusive de la requête de première instance ;
- les moyens tirés de la méconnaissance des articles L. 313-11 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile comme ceux tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention de New-York relative aux droits de l'enfant ne peuvent pas être utilement invoqués à l'encontre d'une décision refusant le bénéfice d'une assignation à résidence ;
- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention des Nations unies sur les droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Guilloteau,
- et les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M.B..., ressortissant algérien né en 1975, a été condamné le 12 novembre 1994 par le tribunal correctionnel de Paris à une peine d'un an d'emprisonnement assortie d'une interdiction définitive du territoire français pour des faits de cession ou offre non autorisée de stupéfiants, entrée ou séjour irrégulier sur le territoire français et détention frauduleuse de faux documents administratifs, puis le 27 juin 2000 par la cour d'appel de Paris à une peine de neuf ans d'emprisonnement assortie d'une interdiction définitive du territoire français pour pénétration non autorisée sur le territoire national après interdiction et importation, transport, détention, offre ou cession, acquisition, et emploi non autorisés de stupéfiants. Il a présenté une demande tendant à être assigné à résidence, en vue de pouvoir présenter une demande de relèvement des peines d'interdiction définitive du territoire français prononcées à son encontre. Par une décision du 3 avril 2017, le ministre de l'intérieur a refusé de faire droit à cette demande. M. B...relève appel du jugement du 25 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
2. En premier lieu, la décision contestée mentionne que l'intéressé, qui a fait l'objet de deux mesures d'interdiction définitive du territoire, ne remplit pas les conditions prévues à l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il ne justifie pas être dans l'impossibilité de quitter le territoire faute d'établir qu'il ne pourrait regagner son pays d'origine, ni se rendre dans un autre pays. La décision énonce ainsi les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde. Dans ces conditions, et quand bien même le ministre de l'intérieur ne reprend pas l'ensemble des éléments relatifs à la situation personnelle de l'intéressé, M. B...n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée serait insuffisamment motivée.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger justifie être dans l'impossibilité de quitter le territoire français ou ne peut ni regagner son pays d'origine ni se rendre dans aucun autre pays, l'autorité administrative peut, jusqu'à ce qu'existe une perspective raisonnable d'exécution de son obligation, l'autoriser à se maintenir provisoirement sur le territoire français en l'assignant à résidence, dans les cas suivants : (...) 5° Si l'étranger doit être reconduit à la frontière en exécution d'une interdiction du territoire prévue au deuxième alinéa de l'article 131-30 du code pénal (...) ".
4. Il appartient à l'étranger qui, à la suite d'un arrêté d'expulsion ou d'une décision de reconduite à la frontière prise à l'initiative de l'administration ou pour l'exécution d'une décision judiciaire d'interdiction du territoire, demande à être assigné à résidence en application de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de justifier soit qu'il se trouve dans l'impossibilité matérielle ou juridique de quitter le territoire français, soit que sa vie ou sa liberté sont menacées dans le pays de destination qui lui est assigné ou qu'il est exposé dans ce pays à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
5. Il ressort des pièces du dossier que M. B... n'a justifié, à l'appui de sa demande d'assignation à résidence, ni d'impossibilités matérielle ou juridique de quitter le territoire français ni, en cas de retour en Algérie, de menaces pour sa vie ou sa liberté ou de risques de traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Si M. B...fait valoir qu'il réside en France depuis vingt-six ans, qu'il vit en concubinage avec une ressortissante algérienne en situation régulière avec laquelle il a eu trois enfants et qu'il ne peut les quitter pour se rendre en Algérie où il ne dispose d'aucune attache familiale, ces circonstances ne sont pas constitutives d'une impossibilité matérielle ou juridique de quitter le territoire au sens des dispositions précitées de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le moyen tiré d'une méconnaissance de cet article doit par suite être écarté.
6. En troisième lieu, M. B...soutient que la décision refusant son assignation à résidence porte atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale et à l'intérêt supérieur de ses enfants dès lors qu'il ne dispose d'aucune attache familiale en Algérie et que ses enfants se trouveront privés de leur père. Toutefois, les conséquences de l'éloignement du territoire français sur la vie privée et familiale de M. B...ou sur les conditions d'existence de ses enfants résultent des condamnations judiciaires d'interdiction définitive du territoire dont il a été l'objet et non de la décision contestée par laquelle le ministre de l'intérieur a opposé un refus à sa demande d'une mesure d'assignation à résidence. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention des Nations unies sur les droits de l'enfant ne peuvent être utilement invoqués à l'encontre de la décision du 3 avril 2017.
7. Les circonstances invoquées par M. B... ne permettent par ailleurs pas de regarder la décision contestée comme entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
8. En dernier lieu, la circonstance que M. B...remplirait les conditions pour obtenir un titre de séjour sur le fondement des articles L. 313-11 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée, par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé de l'assigner à résidence. Le requérant ne peut davantage utilement se prévaloir des termes des circulaires du 27 octobre 2005, du 22 juillet 2011 et du 28 novembre 2012 dont les dispositions sont dépourvues de tout caractère impératif.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 18 avril 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président,
- M. Luben, président assesseur,
- Mme Guilloteau, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 mai 2019.
Le rapporteur,
L. GUILLOTEAULe président,
J. LAPOUZADE
Le greffier,
C. POVSELa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA03656