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24/04/2019 | FRANCE | N°19PA00049

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 24 avril 2019, 19PA00049


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'une part, d'annuler l'arrêté du 30 mai 2018 par lequel le préfet du Val-de-Marne a décidé sa remise aux autorités espagnoles en charge de l'examen de sa demande d'asile ainsi que l'arrêté du

6 juillet 2018 l'assignant à résidence, d'autre part, d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours, sous astreinte de 200 euros par jour de retard et de lui permettre de saisir l'Office français de

protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) d'une demande d'asile dans le délai de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'une part, d'annuler l'arrêté du 30 mai 2018 par lequel le préfet du Val-de-Marne a décidé sa remise aux autorités espagnoles en charge de l'examen de sa demande d'asile ainsi que l'arrêté du

6 juillet 2018 l'assignant à résidence, d'autre part, d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours, sous astreinte de 200 euros par jour de retard et de lui permettre de saisir l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) d'une demande d'asile dans le délai de quinze jours, sous astreinte de

200 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1805620 du 16 juillet 2018, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 5 janvier 2019 M.A..., représenté par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 16 juillet 2018 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler les arrêtés du 30 mai 2018 et 6 juillet 2018 du préfet du Val-de-Marne ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de réexaminer sa demande d'admission au séjour au titre de l'asile dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour, injonction assortie d'une astreinte fixée à 100 euros par jour de retard ;

4°) de lui permettre de saisir l'OFPRA d'une demande d'asile dans le délai de 15 jours, sous astreinte de 200 euros par jour de retard.

Il soutient que :

S'agissant de la régularité du jugement :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé.

S'agissant de la décision de transfert :

- la décision en litige est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il ne mentionne pas le droit d'avertir ou de faire avertir son consulat ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa vie privée et familiale.

S'agissant de la décision d'assignation à résidence :

- le préfet du Val-de-Marne n'a pas procédé à un examen sérieux de sa situation.

En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative, l'affaire a été dispensée d'instruction.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du

14 novembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ;

- le règlement (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014 modifiant le règlement (CE) n° 1560/2003 portant modalités d'application du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des États membres par un ressortissant d'un pays tiers ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Julliard,

- et les observations de Me C...pour M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant malien, né le 31 mai 1990, entré irrégulièrement en France le 20 mars 2018, a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile le 9 avril 2018. A la suite de la vérification de ses empreintes digitales, il est apparu que sa demande d'asile relevait de la responsabilité de l'Espagne. Le 20 avril 2018, les autorités espagnoles ont été saisies d'une demande de réadmission à laquelle elles ont explicitement donné leur accord le 22 mai 2018. Le préfet du Val-de-Marne a, par un arrêté du 30 mai 2018, décidé de transférer M. A...aux autorités espagnoles en vue du traitement de sa demande d'asile et, par un arrêté du 6 juillet 2018, décidé de l'assigner à résidence dans le département du Val-de-Marne. M. A... relève appel du jugement du 16 juillet 2018 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces arrêtés.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

3. M. A...soutient, en premier lieu, que le jugement du Tribunal administratif de Melun attaqué n'a pas répondu au moyen portant sur l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision de transfert du 30 mai 2018 sur sa situation personnelle. Toutefois, il ne ressort pas des termes de la demande de première instance qu'un tel moyen ait été soulevé par M.A.... Dès lors, le jugement attaqué n'est pas entaché d'omission à statuer.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

Sur la décision de transfert aux autorités espagnoles :

4. Aux termes de l'alinéa 2 de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Toute décision de transfert fait l'objet d'une décision écrite motivée prise par l'autorité administrative. Cette décision est notifiée à l'intéressé. Elle mentionne les voies et délais de recours ainsi que le droit d'avertir ou de faire avertir son consulat, un conseil ou toute personne de son choix (...) ".

5. M. A...soutient, en deuxième lieu, que le préfet n'a pas suffisamment motivé sa décision dès lors qu'il s'est contenté de formules stéréotypées. Toutefois, l'arrêté contesté, après avoir visé la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la convention de Genève du 28 juillet 1951, le protocole de New York du 31 janvier 1967, le règlement (UE) n° 604/2013 du Conseil du 26 juin 2013, le règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003, le règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne que M. A...est entré irrégulièrement en France et s'y est maintenu, qu'il a sollicité l'admission au titre de l'asile le 9 avril 2018, qu'à la suite du relevé de ses empreintes, il est apparu qu'elle avaient été enregistrées le 10 mai 2017 en Espagne, qu'un examen attentif de sa situation a révélé que, conformément aux stipulations des articles 3 et 13 du chapitre III du règlement n° 604/2013, la demande d'asile de l'intéressé relevait de la responsabilité de l'Espagne, que dès lors, le 20 avril 2018, les autorités espagnoles avaient été saisies d'une demande de réadmission à laquelle elles avaient explicitement donné leur accord le

22 mai 2018, que sa situation ne relevait pas d'éléments de nature exceptionnelle ou humanitaire susceptible de remettre en cause la décision envisagée à son encontre, que compte tenu des circonstances propres au cas d'espèce, il n'était pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale, l'intéressé n'établissant ni l'existence d'une vie privée et familiale en France, ni le risque d'être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour en Espagne. L'arrêté litigieux énonce ainsi les considérations de droit et de fait sur lesquelles le préfet du Val-de-Marne a fondé sa décision et est suffisamment motivé au regard des exigences des dispositions de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. Si M. A...soutient, en troisième lieu, qu'il n'a pas été informé de son droit de faire avertir son consulat, il ressort du document d'information signé par l'intéressé le 6 juillet 2018 qu'il y reconnaît être informé de la possibilité de prendre l'attache du consulat dont il relève, le Mali, et qu'y figurent les coordonnées postales et téléphoniques dudit consulat. Par suite, et en tout état de cause, ce moyen doit être écarté.

7. M. A...soutient, en quatrième lieu, que la décision de transfert aux autorités espagnoles est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle en ce qu'il ne dispose d'aucune attache en Espagne et qu'il fait des efforts pour s'intégrer à la société française et apprendre le français. Toutefois, le requérant ne produit aucun élément permettant d'établir une quelconque intégration en France et ne justifie pas davantage d'attaches familiales ou professionnelles sur le territoire français. Par ailleurs, la circonstance qu'il ne dispose d'aucun lien en Espagne est sans incidence sur la légalité de la décision de transfert. Par suite, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle du requérant et ce moyen doit être écarté.

Sur la décision d'assignation à résidence :

8. En cinquième lieu, la décision de transfert n'étant pas illégale, le moyen tiré de ce que la décision d'assignation à résidence serait illégale du fait de l'illégalité de la décision de transfert ne peut qu'être écarté.

9. Aux termes de l'article L. 561-2, I, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : (...) 1° bis Fait l'objet d'une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 ou d'une requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ".

10. Il ne ressort d'aucune pièce du dossier, en sixième lieu, que la décision en litige serait entachée d'un défaut d'examen personnel et circonstancié de la situation de M.A.... Ce moyen doit être écarté.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte ou tendant à lui permettre de saisir l'OFPRA.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera délivrée au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 1er avril 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme Heers, président de chambre,

- Mme Julliard, présidente-assesseure,

- M. Mantz, premier conseiller.

Lu en audience publique le 24 avril 2019.

La rapporteure,

M. JULLIARDLe président,

M. HEERSLe greffier,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 19PA00049 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA00049
Date de la décision : 24/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-05 Étrangers. Réfugiés (voir : Asile) et apatrides.


Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: Mme Marianne JULLIARD
Rapporteur public ?: Mme JAYER
Avocat(s) : PARTOUCHE-KOHANA

Origine de la décision
Date de l'import : 07/05/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-04-24;19pa00049 ?
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