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18/04/2019 | FRANCE | N°18PA01810

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 18 avril 2019, 18PA01810


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2012 à raison de la plus-value de cession d'un fonds de commerce exploité à Bussy-Saint-Georges (Seine-et-Marne).

Par un jugement n° 1603200/7 du 22 mars 2018, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2012 à raison de la plus-value de cession d'un fonds de commerce exploité à Bussy-Saint-Georges (Seine-et-Marne).

Par un jugement n° 1603200/7 du 22 mars 2018, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 28 mai 2018 et 6 mars 2019, Mme A..., représentée par Me C... Paeye, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1603200/7 du 22 mars 2018 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif, dès lors que le contrat de location gérance du fonds de commerce artisanal de brasserie sis 1, grande place à Bussy-Saint-Georges (Seine-et-Marne) a été résilié, il y a bien eu cession d'un fonds de commerce exploité par l'Eurl ;

- le fonds de commerce était en situation de location gérance depuis le 23 novembre 2005 ; la société AMG, qui était locataire gérant, a été dissoute le

30 novembre 2011 ; l'Eurl n'avait donc plus de locataire gérant à compter de cette date ; elle a repris juridiquement et naturellement l'exploitation du fonds de commerce lui appartenant ;

- elle remplit les conditions pour bénéficier de l'exonération prévue par l'article 151 septies du code général des impôts ;

- l'administration n'apporte pas la preuve du manquement délibéré.

Par un mémoire en défense enregistré le 6 septembre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Appèche,

- les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public,

- et les observations de Me Paeye, avocat de Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL)A..., qui exerce une activité de loueur de fonds dans le cadre d'un contrat de location-gérance et dont Mme A...était la gérante et l'unique associée, a cédé, par acte notarié du 21 décembre 2011 enregistré au service des impôts des entreprises de Lagny-sur-Marne (Seine-et-Marne) le 30 décembre suivant, son fonds de commerce artisanal de brasserie sis 1 grande place à Bussy-Saint-Georges (Seine-et-Marne), pour un montant global de 180 002 euros, dont 125 000 euros pour les éléments incorporels et 55 002 euros pour les éléments corporels. Par une proposition de rectification du

7 avril 2014, l'administration fiscale a notifié à la requérante, en sa qualité d'associée unique de la société, selon la procédure contradictoire prévue par l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, des rectifications en matière de bénéfices industriels et commerciaux au titre de l'exercice clos au 30 septembre 2012, à raison de la cession du fonds de commerce. MmeA..., qui a demandé en vain au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des impositions supplémentaires auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2012 à raison de cette plus-value de cession, relève appel du jugement n° 1603200/7 du 22 mars 2018, par lequel ce tribunal a rejeté sa demande.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

2. Aux termes de l'article 8 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition en litige : " Sous réserve des dispositions de l'article 6, les associés des sociétés en nom collectif et les commandités des sociétés en commandite simple sont, lorsque ces sociétés n'ont pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société. (...) ". L'article 151 septies du même code, dans sa rédaction issue de la loi n°2005-1720, et applicable au présent litige, eu égard à la date de cession du fonds de commerce en cause dispose que : " I. Les dispositions du présent article s'appliquent aux activités commerciales, industrielles, artisanales, libérales ou agricoles, exercées à titre professionnel. - L'exercice à titre professionnel implique la participation personnelle, directe et continue à l'accomplissement des actes nécessaires à l'activité ". / II.-Les plus-values de cession soumises au régime des articles 39 duodecies à 39 quindecies, à l'exception de celles afférentes aux biens entrant dans le champ d'application du A de l'article 1594-0 G, et réalisées dans le cadre d'une des activités mentionnées au I sont, à condition que l'activité ait été exercée pendant au moins cinq ans, exonérées pour : / 1° La totalité de leur montant lorsque les recettes annuelles sont inférieures ou égales à : / a) 250 000 € s'il s'agit d'entreprises dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place ou de fournir le logement, à l'exclusion de la location directe ou indirecte de locaux d'habitation meublés ou destinés à être loués meublés, ou s'il s'agit d'entreprises exerçant une activité agricole ; (...) ". Il résulte de ces dispositions, que le législateur a entendu, en conditionnant l'exonération ainsi prévue à l'exercice à titre professionnel des activités qu'elles concernent, la restreindre au seul bénéfice des activités poursuivies par le contribuable lui-même, en excluant les activités mises par lui en location-gérance. Par ailleurs, le bénéfice de cette exonération est notamment subordonné à la condition que le bien dont la cession a dégagé une plus-value ait été affecté à l'une des activités qu'elles visent, et que celle-ci ait été exercée à titre professionnel moyennant une participation personnelle, directe et continue à l'accomplissement des actes nécessaires à l'activité par le cédant pendant une période de cinq ans précédant la cession.

3. Il résulte de l'instruction que le service vérificateur a constaté, d'une part, que si le bilan de cessation d'activité clos le 30 septembre 2012 faisait bien ressortir au titre de la cession susmentionnée d'un fonds de commerce, une plus value nette à court terme de 55 002 euros et une plus value nette à long terme de 125 000 euros, la plus-value à court terme, ainsi d'ailleurs que celle à long terme, avaient fait l'objet d'une déduction extra comptable par la requérante, mentionnée sur la ligne 350 du tableau n° 2033-B au titre de l'exercice de cessation définitive d'activité au 30 septembre 2012 et, d'autre part, que la somme de 55 002 euros n'avait pas, comme elle l'aurait dû, été intégrée par l'intéressée à la détermination du résultat fiscal d'ensemble taxable à l'impôt sur le revenu au titre de l'exercice clos au 30 septembre 2012. L'administration fiscale a ensuite réintégré au revenu imposable de Mme A...au titre de l'année 2012, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, la plus-value de cession du fonds de commerce artisanal non reportée, à concurrence de la somme de

55 002 euros, en application des dispositions de l'article 39-2 duodecies du code général des impôts.

4. La requérante se prévaut, comme elle le faisait en première instance, de l'exonération prévue à l'article 151 septies du code général des impôts, dont elle prétend remplir les conditions.

5. Il est constant que le fonds de commerce de brasserie cédé par l'Eurl faisait l'objet d'un contrat de location gérance avec la société à responsabilité limitée AMG depuis le

23 novembre 2005. D'une part, si l'acte de cession mentionné ci-dessus précise que ce contrat de location gérance a été résilié, aucune pièce probante versée au dossier ne permet de tenir pour établi que cette résiliation serait intervenue le 30 novembre 2011 et en tout état de cause qu'après cette date, l'Eurl aurait, comme le soutient MmeA..., repris juridiquement l'exploitation du fonds de commerce lui appartenant. D'autre part, Mme A...soutient que la Sarl AMG était une entreprise familiale dont elle-même a été la dirigeante du 2 novembre 2005 au

18 février 2012. Toutefois, et à supposer même que la requérante ait été co-dirigeante de cette société, les documents qu'elle produit, constitués de quelques attestations postérieures aux années concernées, et au nombre desquels ne figure aucun document signé par elle relatif à la gestion courante de l'établissement, ne suffisent pas à justifier qu'elle aurait participé personnellement, directement et de manière continue à l'accomplissement des actes nécessaires à l'activité du fonds de commerce artisanal de brasserie. Dans ces conditions Mme A... n'est pas fondée à soutenir que le bénéfice de l'exonération prévue à l'article 151 septies du code général des impôts lui aurait été refusé à tort.

Sur les pénalités :

6. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition en litige : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'État entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ". Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales :

" En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration ".

7. Il résulte de ces dispositions que la pénalité pour manquement délibéré a pour seul objet de sanctionner la méconnaissance par le contribuable de ses obligations déclaratives. Pour établir le caractère délibéré du manquement, l'administration doit apporter la preuve, d'une part, de l'insuffisance, de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations et, d'autre part, de l'intention de l'intéressé d'éluder l'impôt.

8. En se bornant, pour justifier l'application de la majoration pour manquement délibéré aux impositions en litige, à relever que l'acte notarié de cession du fonds de commerce du

21 décembre 2011 indique que le " cédant reconnaît avoir reçu du notaire soussigné toutes explications en matière de déclarations et de calcul des plus-values applicables aux présentes, notamment celles figurant aux articles 39 duodecies à 39 quindecies du code général des

impôts ", alors que cette indication ne permet pas de connaître le contenu exact de l'information donnée à l'intéressée, l'administration fiscale ne démontre pas que MmeA..., qui avait déposé au nom de l'Eurl A...un bilan de cessation clos au 30 septembre 2012 faisant ressortir une plus-value nette à long terme de 125 000 euros et une plus-value nette à court terme de

55 002 euros, aurait pertinemment su, eu égard à sa qualité de gérante et associée de l'Eurl, qu'elle ne pouvait prétendre à l'exonération prévue à l'article 151 septies du code général des impôts et ainsi délibérément entendu éluder un impôt qu'elle savait dû. Par suite, la requérante est fondée à obtenir la décharge des pénalités litigieuses.

9. De tout ce qui précède il résulte que Mme A... est seulement fondée à obtenir la décharge des pénalités de 40% qui ont été appliquées aux impositions litigieuses et la réformation, dans cette mesure, du jugement attaqué. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des sommes demandées par la requérante sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Mme A...est déchargée de la majoration de 40%, appliquée aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux mises à sa charge au titre de l'année 2012.

Article 2 : Le jugement n° 1603200/7 du 22 mars 2018 du Tribunal administratif de Melun est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Mme A... une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus de la requête de Mme A... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 3 avril 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Appèche, président assesseur,

- M. Magnard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 avril 2019.

Le rapporteur,

S. APPECHELe président,

I. BROTONS

Le greffier,

P. LIMMOIS

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18PA01810


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA01810
Date de la décision : 18/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Sylvie APPECHE
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : PAEYE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-04-18;18pa01810 ?
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