Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le syndicat français des allergologues a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 22 octobre 2015 par lequel la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche et la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes ont fixé, au titre de l'année 2015, le nombre maximum de diplômes d'études spécialisées complémentaires de groupe I susceptibles d'être délivrés par reconnaissance de l'expérience professionnelle.
Par un jugement n° 1520777/1-1 du 19 avril 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés le 17 juin 2017 et le 12 juin 2018, le syndicat français des allergologues, représenté par Mes Autet et Marson, demande à la Cour :
1°) d'ordonner avant-dire droit aux ministres compétents de communiquer la méthode de définition des besoins de la population visée à l'article R. 632-76 du code de l'éducation ;
2°) à titre principal, d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris
n° 1520777/1- 1 du 19 avril 2017 ;
3°) d'annuler l'arrêté du 22 octobre 2015 fixant au titre de l'année 2015, le nombre maximum de diplômes d'études spécialisées complémentaires de groupe I susceptibles d'être délivrés par reconnaissance de l'expérience professionnelle ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens ainsi que le versement de la somme de
2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision attaquée n'est pas réglementaire et relevait, par suite, de la compétence du Tribunal administratif en premier ressort ;
- la décision attaquée est entachée d'un vice de procédure compte tenu de la délégation à une association de droit privé de la procédure de gestion des demandes de validation des acquis de l'expérience ;
- la décision attaquée a été prise pour l'application d'une circulaire réglementaire entachée d'incompétence ;
- la décision attaquée a été prise pour l'application de l'article R. 632-76 du code de l'éducation qui est entaché d'incompétence négative ;
- la décision attaquée méconnaît l'article R. 632-76 du code de l'éducation dès lors que les besoins de la population ont été appréciés au regard des priorités de la santé publique ;
- les premiers juges ont méconnu leur office en n'ordonnant pas la production, par les ministres compétents, de la méthode de définition des besoins de la population visée à l'article
R. 632-76 du code de l'éducation.
Par un mémoire en défense enregistré le 29 mai 2018, le ministre des solidarités et de la santé conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- à titre principal, le Tribunal administratif de Paris était incompétent à raison de la nature réglementaire de la décision attaquée ;
- à titre subsidiaire, les moyens soulevés par le syndicat requérant ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense enregistré le 28 juin 2018, la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation déclare s'associer aux écritures du ministre des solidarités et de la santé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'éducation ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Hamon,
- les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public,
- et les observations de Me A...pour le syndicat français des allergologues (SYFAL).
Considérant ce qui suit :
1. Le syndicat français des allergologues (SYFAL) a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté interministériel du 22 octobre 2015 par lequel la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche et la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes ont fixé, au titre de l'année 2015, le nombre maximum de diplômes d'études spécialisées complémentaires de groupe I (DESC 1) susceptibles d'être délivrés par reconnaissance de l'expérience professionnelle. Il fait appel du jugement du 19 avril 2017 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. La décision attaquée, qui se borne à fixer, pour une année, un nombre maximal de diplômes pouvant être délivrés, sans comporter aucune règle affectant le régime juridique de ces diplômes, ne présente pas de caractère réglementaire. Par suite, la contestation de la légalité de cet acte relevait, en application des dispositions combinées des articles L. 311-1 et R. 312-1 du code de justice administrative, de la compétence du tribunal administratif, ainsi que l'ont relevé les premiers juges.
Sur la légalité de l'arrêté contesté :
3. Aux termes de l'article L. 632-12 du code de l'éducation dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : " Des décrets en Conseil d'Etat déterminent : / (...) / 5° Les conditions dans lesquelles l'expérience acquise au cours de l'exercice professionnel peut être validée, en tout ou partie, en vue de l'obtention d'un diplôme de formation médicale spécialisé, dans une limite compatible avec les besoins de soins de la population et après une durée minimum d'exercice de la spécialité correspondant à la formation initiale ". L'article R. 632-75 du même code dispose que : " Les ministres chargés de l'enseignement supérieur et de la santé fixent par arrêté la liste des diplômes d'études spécialisées complémentaires en médecine qui n'entraînent pas l'exercice exclusif de la spécialité et que peuvent obtenir les médecins autorisés à exercer sur le territoire national lorsqu'ils justifient d'une durée d'exercice professionnel correspondant à la durée de la formation conduisant au diplôme d'études spécialisées au titre duquel ils exercent ". Enfin l'article R. 632-76 de ce code précise que : " Un arrêté des ministres chargés de la santé et de l'enseignement supérieur détermine chaque année, pour chaque région, et par spécialité, au vu des besoins de la population, le nombre maximum de diplômes d'études spécialisées complémentaires mentionnés à l'article R. 632-75 susceptibles d'être délivrés par reconnaissance de l'expérience professionnelle ".
4. En premier lieu, si l'association de droit privé " Association universitaire francophone et européenne en médecine et odontologie ", qui regroupe des cadres administratifs des universités de médecine, a collecté les dossiers de demandes de DESC1 par reconnaissance de l'expérience professionnelle, déposées sur tout le territoire, afin de les transmettre au jury compétent pour la délivrance de ces diplômes, cette circonstance est en tout état de cause sans incidence sur la régularité de la procédure de prise de la décision attaquée dès lors, d'une part, que cette association ne se substitue nullement aux jurys souverains pour la délivrance des diplômes, ni aux ministres compétents pour arrêter le nombre annuel de ces diplômes, d'autre part, qu'aucune disposition légale ou réglementaire ne régit la collecte de ces dossiers et, enfin, que ces modalités de collecte n'ont privé les candidats à l'obtention du diplôme DESC1 d'allergologue d'aucune garantie.
5. En deuxième lieu, il ressort des termes de l'instruction du 27 juillet 2012, adressée par la direction générale de l'offre de soins aux directeurs généraux des agences régionales de santé, que celle-ci, qui se borne à demander à ces agences d'émettre un avis sur une proposition de nombre maximal de DESC1 délivrés par reconnaissance de l'expérience professionnelle, en indiquant que cet avis sera émis au regard des travaux de prospective et des objectifs de santé publique dégagés par ces agences sur leurs territoires, n'ajoute rien aux dispositions de l'article R. 632-76 du code de l'éducation et ne comporte aucune disposition réglementaire à caractère impératif de nature à entacher cette décision d'incompétence. Au surplus, aucune disposition législative ou réglementaire ne soumettant l'arrêté pris annuellement par les ministres à une procédure d'avis préalable des agences régionales de santé, la décision attaquée n'a, de ce fait, pas été prise pour l'application de cette instruction du 27 juillet 2012. Dès lors, le syndicat requérant n'est en tout état de cause pas fondé à soutenir que la décision attaquée doit être annulée à raison de l'illégalité qui entacherait cette instruction.
6. En troisième lieu, il résulte des termes mêmes des articles L. 632-12 et R. 632-76 du code de l'éducation précités que la détermination du nombre de DESC 1 pouvant être délivrés par reconnaissance de l'expérience professionnelle n'est pas illégalement laissée par le pouvoir réglementaire, comme le soutient le SYFAL, à l'appréciation " arbitraire " des ministres concernés, dès lors que le législateur n'a imposé au pouvoir réglementaire aucune définition de ces besoins. La détermination de ce nombre est au demeurant soumise, sous le contrôle du juge administratif, aux deux critères cumulatifs des besoins de la population et d'une durée minimum d'exercice, cette dernière étant en outre précisée par l'article R. 632-75 du même code. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence négative du pouvoir réglementaire, en tant qu'il n'a pas fixé de critères pour la détermination des besoins de la population, doit être écarté.
7. En quatrième lieu, dès lors que, ainsi qu'il a été dit au point 5, l'instruction du 27 juillet 2012 ne comporte aucune disposition impérative quant à la détermination des besoins de la population, le SYFAL n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué aurait méconnu les dispositions de l'article R. 632-76 du code de l'éducation en ayant apprécié les besoins de la population au regard des objectifs de santé publique mentionnés dans cette instruction.
8. Enfin, le SYFAL n'ayant pas soutenu en première instance que l'arrêté attaqué serait illégal à raison d'une appréciation erronée des besoins de la population, les premiers juges n'ont pas méconnu leur office en s'abstenant d'ordonner la production, par les défendeurs, de " la méthode de définition des besoins de la population ". Ce moyen n'étant pas plus soulevé en appel, il n'y a pas lieu d'ordonner cette production.
9. Il résulte de tout ce qui précède que le SYFAL n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre des dépens et des frais de justice ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête du syndicat français des allergologues est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat français des allergologues, à la ministre des solidarités et de la santé et au ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.
Délibéré après l'audience du 12 mars 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Even, président de chambre,
- Mme Hamon, président assesseur,
- Mme d'Argenlieu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 1er avril 2019.
Le rapporteur,
P. HAMONLe président,
B. EVENLe greffier,
I. BEDRLa République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé et au ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, en ce qui les concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA02051