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14/02/2019 | FRANCE | N°18PA01586

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 14 février 2019, 18PA01586


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E...C...épouse A...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 7 décembre 2017 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite.

Par un jugement n° 1800084 du 13 avril 2018, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enreg

istrée le 9 mai 2018, Mme C..., représentée par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le juge...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E...C...épouse A...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 7 décembre 2017 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite.

Par un jugement n° 1800084 du 13 avril 2018, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 9 mai 2018, Mme C..., représentée par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 13 avril 2018 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 7 décembre 2017 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer le titre de séjour sollicité, dans le délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à défaut, d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa demande dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir et de lui délivrer durant ce réexamen une autorisation provisoire de séjour, sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice.

Elle soutient que :

- la décision de refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'erreur de droit au regard des stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien, car elle ne se fonde que sur l'état de santé de son fils majeur et non sur les autres éléments de sa vie privée et familiale dont le contexte de violences conjugales dans lequel elle a fui l'Algérie ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision d'obligation de quitter le territoire français est illégale par voie d'exception ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'erreur de droit car elle méconnait l'article 6 paragraphe 5 de l'accord franco-algérien ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision fixant le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 3 juillet 2018, le préfet de police conclut au rejet de la requête de MmeC....

Il soutient que les moyens soulevés par Mme C...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Legeai a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C...épouseA..., ressortissante algérienne née en mars 1973, entrée en France le 18 décembre 2013 selon ses déclarations, a sollicité en janvier 2017 la délivrance d'un certificat de résidence " vie privée et familiale " sur le fondement de l'article 6 paragraphe 5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par arrêté du 7 décembre 2017, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite. Mme C...fait régulièrement appel du jugement du 13 avril 2018 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 décembre 2017.

Sur la décision de refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration dispose que la motivation des actes administratifs " doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". En l'espèce, l'arrêté attaqué vise les textes dont il fait application, notamment l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. En outre, la décision contestée, qui n'avait pas à mentionner l'ensemble des éléments relatifs à la situation personnelle de l'intéressée, fait état des éléments précis et non stéréotypés pour lesquels elle ne remplit pas les conditions pour obtenir la délivrance du titre de séjour sollicité. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.

3. En deuxième lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". L'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles stipule : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 5. Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ". Pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

4. D'une part, il ressort de la motivation même de l'arrêté attaqué que, contrairement à ce que soutient Mme C..., le préfet de police, pour refuser le titre de séjour qu'elle sollicitait sur le fondement de l'article 6 paragraphe 5 de l'accord franco-algérien, ne s'est pas contenté d'affirmer qu'il n'existe pas de droit au séjour pour l'accompagnant d'un enfant malade majeur, mais a examiné la situation particulière de l'intéressée au regard de sa vie privée et familiale, et notamment de sa durée de résidence, de ses attaches en France et en Algérie et de l'intégration sociale et professionnelle dont elle faisait état. Le moyen tiré de l'erreur de droit manque en fait.

5. D'autre part, Mme C...fait valoir qu'elle résidait en France depuis quatre ans à la date de la décision attaquée, avec deux de ses fils, jumeaux nés en mars 1996 et inscrits en seconde dans un lycée d'adultes en 2016-2017, dont l'un, qui l'héberge, était titulaire en raison de son état de santé d'un titre de séjour, en cours de renouvellement, délivré sur le fondement des stipulations de l'article 6 paragraphe 7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Si elle soutient que sa présence était indispensable pour le suivi médical et psychologique de ce jeune majeur, elle ne le démontre pas par le certificat médical peu circonstancié qu'elle fournit, et alors que son fils, qui travaille, ne fait l'objet que d'un suivi semestriel. Son autre fils était lui-même en situation irrégulière en France. Par ailleurs, si Mme C...fait valoir qu'elle a travaillé en France à temps partiel au cours des années 2016 et 2017 en tant qu'employée de maison, cette circonstance n'est pas suffisante pour établir son insertion professionnelle et sociale en France. En outre, si Mme C...fait valoir qu'elle fait l'objet d'un suivi médical en France pour un syndrome anxio dépressif en raison de violences conjugales et familiales subies en Algérie et soutient ne plus être en contact avec son mari, elle n'établit pas qu'un tel suivi ne pourrait être dispensé qu'en France. Dans ces conditions, et alors que l'intéressée n'établit pas être dépourvue d'attaches en Algérie où résident trois de ses enfants, dont deux mineurs, et où elle a vécu jusqu'à l'âge de 40 ans, le préfet n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a pris la décision attaquée. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 6 paragraphe 5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, doivent être écartés. Pour ces mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit également être écarté.

Sur la décision d'obligation de quitter le territoire français :

6. En premier lieu, il ressort des termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que la décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation spécifique lorsqu'elle accompagne, comme en l'espèce, une décision de refus de titre de séjour elle-même suffisamment motivée. Par suite, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français serait insuffisamment motivée doit être écarté.

7. En deuxième lieu, il résulte des motifs adoptés précédemment que le préfet de police pouvait légalement refuser de délivrer un titre de séjour à MmeC.... Par suite, le moyen tiré de l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour doit être écarté.

8. En troisième lieu, Mme C...soutient que la décision contestée méconnaît les stipulations des articles 6 paragraphe 5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation. Toutefois, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 5, le préfet de police a pu obliger Mme C...à quitter le territoire français sans porter à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis et sans commettre d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle.

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

9. Pour les mêmes motifs que ceux précédemment énoncés, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 7 décembre 2017. Sa requête d'appel ne peut qu'être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, lui verse une somme en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...C...épouse A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 24 janvier 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente de chambre,

- M. Diémert, président assesseur,

- M. Legeai, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 février 2019.

Le rapporteur,

A. LEGEAI La présidente,

S. PELLISSIER Le greffier,

M. B...La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18PA01586


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18PA01586
Date de la décision : 14/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Alain LEGEAI
Rapporteur public ?: Mme NGUYÊN-DUY
Avocat(s) : CABINET BOUKRIS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-02-14;18pa01586 ?
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