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11/12/2018 | FRANCE | N°17PA03561

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 11 décembre 2018, 17PA03561


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. I...A...E...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 5 novembre 2014 par lequel le maire de la commune de Bry-sur-Marne lui a infligé une sanction disciplinaire d'exclusion temporaire de fonctions d'une durée d'un an et de mettre à la charge de la commune de Bry-sur-Marne une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1410009 du 21 septembre 2017, le Tribunal administratif de Melun a annulé la

décision attaquée et mis à la charge de la commune de Bry-sur-Marne une som...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. I...A...E...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 5 novembre 2014 par lequel le maire de la commune de Bry-sur-Marne lui a infligé une sanction disciplinaire d'exclusion temporaire de fonctions d'une durée d'un an et de mettre à la charge de la commune de Bry-sur-Marne une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1410009 du 21 septembre 2017, le Tribunal administratif de Melun a annulé la décision attaquée et mis à la charge de la commune de Bry-sur-Marne une somme de 1 500 euros à verser à M. A...E...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 21 novembre 2017, 11 juin 2018, 13 juillet 2018 et 9 août 2018 la commune de Bry-sur-Marne, représentée par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Melun du 21 septembre 2017 ;

2°) de rejeter la demande de M. A...E... ;

3°) de mettre à la charge de M. A...E...une somme de 3 000 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé dès lors qu'il reprend l'avis du conseil de discipline ;

- le tribunal a méconnu l'étendue de son pouvoir de contrôle des sanctions disciplinaires puisqu'il s'est borné à reprendre les constatations du conseil de discipline ;

- la décision contestée était suffisamment motivée ;

- le tribunal a, à tort, considéré que les faits reprochés n'étaient pas établis alors qu'ils le sont, qu'il s'agisse du comportement hostile et provocateur à l'égard de la hiérarchie, du non-respect des consignes, de manquements aux consignes de sécurité, de la sollicitation abusive des services municipaux, du manquement à l'obligation de réserve et de secret professionnel, de l'usage de fonctions syndicales à des fins de défense d'intérêts personnels, de la désorganisation du service et du comportement préjudiciable à la santé des autres agents ;

- la sanction prononcée était proportionnée aux faits reprochés.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 21 juin 2018 et 2 août 2018, M. A...E...représenté par MeG..., demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Bry-sur-Marne une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 3 août 2018 la clôture de l'instruction a été reportée du 3 août au 23 août 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Labetoulle,

- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,

- les observations de MeB..., pour la commune de Bry-sur-Marne,

- et les observations de MeF..., pour M. A...E....

1. Considérant que M. A... E..., gardien de police municipale titulaire, est employé par la commune de Bry-sur-Marne depuis le 28 juillet 2008 et a été titularisé le 28 juillet 2009 ; que, par un arrêté en date du 8 avril 2014, le maire de Bry-sur-Marne a prononcé la suspension de fonctions de M. A... E... pour une durée de quatre mois, puis a engagé une procédure disciplinaire à son encontre ; que le maire de la commune de Bry-sur-Marne a, par un arrêté du 5 novembre 2014, infligé à M. A... E... une sanction disciplinaire d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de 12 mois ; que, saisi par M. A... E..., le Tribunal administratif de Melun a annulé cet arrêté par un jugement du 21 septembre 2017 dont la commune interjette appel ;

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment du rapport d'audit réalisé à la demande de la commune par M. H...et M. C...que M. A... E..., conjointement avec M.D..., a eu à l'égard de sa hiérarchie un comportement systématiquement hostile au point de porter atteinte à la santé et à la sécurité des agents ainsi qu'au bon fonctionnement du service ; qu'il ressort ainsi de ce rapport que : " l'ambiance de travail et de ce fait la qualité globale du service a été dégradée par une trop longue période de mises en cause et d'hostilité, rendues publiques " et qu' " il y a lieu de faire cesser cette " guérilla " permanente menée par certains agents clairement identifiés et cela quelque soit par ailleurs leur sentiment d'exprimer des points de vue justifiés. Cette profusion continue de tracts et d'affichage incluant de façon plus ou moins explicite des sous-entendus malveillants à l'égard de nombreux agents et mettant en cause de façon permanente la hiérarchie dépasse très manifestement l'expression d'une revendication personnelle ou syndicale pour aboutir à porter une atteinte grave au bon fonctionnement du service et à ce qui pourrait s'apparenter probablement à l'égard de certains agents à du harcèlement " ; que le " sentiment de stress au travail " souligné dans ce rapport est corroboré par le médecin du travail qui, en mars 2014, alertait le maire de la commune de la gravité de la dégradation de l'état de santé psychologique des agents et préconisait le désarmement temporaire de l'ensemble des effectifs auquel il a d'ailleurs été procédé ; que le rapport relève également que " la suspension des deux agents perçus comme étant à l'origine par leur communication et leur attitude de ce climat très malsain a incontestablement amené un début de détente dans la relation professionnelle " ; que si les auteurs de ce premier rapport n'ont pas nominativement désigné les deux agents incriminés, ils sont clairement identifiables au vu de l'ensemble des pièces du dossier et notamment du rapport d'audit complémentaire du 20 octobre 2014, réalisé quelques mois après le début de la suspension de Messieurs D...et Dias E...dont l'auteur relate que " sans mettre en cause la qualité professionnelle des deux agents actuellement éloignés du service, tous les agents auditionnés constatent que la fin des mises en cause systématiques de la hiérarchie et du fonctionnement du service par Messieurs D...et Dias E...a permis à chacun de ne plus se demander au quotidien ce qui allait arriver à chaque prise de fonction. Cette inquiétude latente et générale qui avait fini par déstabiliser plus ou moins gravement chacun des membres de la police municipale, a progressivement régressé et même disparu " ; que ces constats reposent sur les déclarations des agents du service, et sont corroborés par les pièces du dossier et notamment des témoignages concordants émanant de la hiérarchie et des agents ; qu'ainsi les griefs tirés de comportements hostiles et provocateurs à l'égard de la hiérarchie et d'un comportement préjudiciable à la santé des agents et au bon fonctionnement du service doivent dès lors être tenus pour établis sans que M. A...E...puisse utilement tenter de mettre en cause l'impartialité de l'auteur de ce rapport d'audit ; que le manquement aux consignes de sécurité en matière d'armement ressort également des pièces du dossier ; qu'à supposer même que certains griefs, tirés notamment de la sollicitation excessive des services municipaux et de manquements à l'obligation de réserve, de l'usage des fonctions syndicales à des fins d'intérêts personnels et de désorganisation du service par des affichage syndicaux ne seraient pas suffisamment établis, le tribunal ne pouvait annuler la sanction en accueillant le moyen soulevé par M. A...E...tiré de l'inexactitude des faits qui lui étaient reprochés ; que par suite, la commune de Bry-sur-Marne est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal s'est fondé sur ce motif pour annuler l'arrêté du 5 novembre 2014, par lequel son maire a infligé à M. A... E...une sanction disciplinaire d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de 12 mois ;

3. Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisi par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens de la demande de première instance ;

4. Considérant que l'arrêté attaqué vise les dispositions applicables et notamment le code général des collectivités territoriales et la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 et notamment ses articles 89 à 91, qu'il rappelle ensuite la procédure disciplinaire suivie, et énumère très précisément chacun des griefs retenus à l'encontre de M. A...E..., ainsi que les pièces sur lesquelles il s'est fondé pour retenir l'existence d'une faute disciplinaire de l'intéressé, et reprend pour les réfuter les conclusions du conseil de discipline sur les différents points en litige ; que cet arrêté énoncé ainsi les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde et est dès lors suffisamment motivé, alors même qu'il se fonde sur des considérations très proches de celles retenues dans l'arrêté infligeant une sanction identique à M. D..., ce qui s'explique par le caractère voisin et parfois communs aux deux agents des faits reprochés ;

5. Considérant que, pour les mêmes motifs, le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'individualisation de la sanction doit également être écarté, l'administration ayant pu sans méconnaitre ce principe infliger aux deux agents une sanction identique en se fondant sur des faits très proches et sans qu'il puisse lui être davantage fait grief de n'avoir pas procédé pour ce motif à un examen particulier de chaque situation ;

6. Considérant enfin que les faits clairement établis relevés au point 2 sont constitutifs d'une faute de nature à justifier légalement une sanction disciplinaire ; qu'eu égard à la gravité de ces faits, à leur impact sur le fonctionnement du service et sur la santé psychologique des agents, le maire de la commune de Bry-sur-Marne, en prononçant l'exclusion de fonction de l'intéressé pour une durée d'un an, n'a pas pris une sanction disproportionnée par rapport aux faits reprochés ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Bry-sur-Marne est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé l'arrêté du 5 novembre 2014 infligeant à M. A...E...une sanction disciplinaire d'exclusion temporaire de fonctions d'une durée d'un an ; qu'elle est par suite fondée à demander l'annulation dudit jugement et le rejet de la demande de première instance de M. A...E... ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Bry-sur-Marne, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. A...E...au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de M. A...E...la somme demandée par la commune de Bry-sur-Marne sur le même fondement ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1410009 du Tribunal administratif de Melun du 21 septembre 2017 est annulé.

Article 2 : La demande de première instance de M. A...E...est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de M. A...E...et de la commune de Bry-sur-Marne présentées en première instance et en appel au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Bry-sur-Marne et à M. I...A...E....

Délibéré après l'audience du 27 novembre 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- Mme Labetoulle, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 décembre 2018.

Le rapporteur,

M-I. LABETOULLELe président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

P. TISSERAND

La République mande et ordonne au préfet du Val-de-Marne en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

4

N° 17PA03561


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA03561
Date de la décision : 11/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-03-01 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Motifs. Faits de nature à justifier une sanction.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: Mme Marie-Isabelle LABETOULLE
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : SCP LATOURNERIE WOLFROM et ASS.

Origine de la décision
Date de l'import : 18/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-12-11;17pa03561 ?
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